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Bienvenue à Bowen, petite ville côtière du Nord-Est de l'Australie, abritant moins de 7 000 habitants. Si vous recherchez le calme, la bonne humeur et la joie de vivre, vous serez au paradis. Tous les habitants vous le diront, Bowen est l'endroit idéal pour se ressourcer. Et puis ne vous inquiétez pas pour l'intégration, ici tout le monde se connaît et les habitants adorent accueillir les nouveaux. › suite.

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 you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla)

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MessageSujet: you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla)   you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla) EmptySam 4 Mar 2023 - 17:42

7 octobre 2022, 16h49, Aéroport de Bowen, Australie.

Les mains dans les poches, parce qu’il n’aurait pas su quoi en faire autrement, Leónel attendait, le coeur serré, le coeur battant, la gorge nouée. Il attendait de voir l’avion de sa nièce se déposer sur le tarmac. Il se repassait en boucle son appel, plus tôt dans la semaine. Il n’avait jamais entendu sa nièce être autant paniquée. À travers ses sanglots, il avait réussi à comprendre que quelque chose de grave était arrivé à ses parents, qu’elle devait fuir le Chili et que Diego, le frère de Leyla, le neveu de Leónel, lui avait dit de l’appeler lui. Comprenant que la petite - plus si petite que ça - était complètement déroutée, désorganisée, il avait pris sur lui, avait rassemblé ce qu’il lui restait d’énergie, et avait tout planifié pour elle. À l’aéroport de Santiago, un billet d’avion l’attendrait au bureau d’enregistrement, un billet à destination de Brisbane, où elle ferait ensuite un vol interne jusqu’à l’aérodrome de Bowen, où il l’attendrait. Pour que ce plan se réalise, Leónel avait dû prendre tout son chèque du mois de la sécurité sociale, mais bien honnêtement, il n’en avait pas grand chose à faire. Sa nièce avait besoin de lui. Sa soeur était morte en raison d’un cartel, une violence qui empoisonnait son pays. Il voulait juste la savoir en sécurité. Le reste n’importait pas.

Il vit enfin l’avion portant le nom de la compagnie aérienne de laquelle il avait acheté le billet de Leyla, atterrir. Il quitta son poste devant les grandes fenêtres, se dirigeant d’un pas rapide vers les arrivées. Vingt minutes plus tard, vingt minutes à sentir son coeur battre à tout rompre, il avait vu sa nièce sortir du long couloir, l’air complètement perdue. « Leyla ? » Avait-il lancé dans sa direction. Elle avait tourné la tête vers lui, le regard vide, les yeux rougis par les larmes. Une courte hésitation se dressa entre eux, avant que la jeune femme ne prenne une grande inspiration et marche vers lui. Il sortit enfin ses mains de ses poches, replaça ses lunettes sur le bout de son nez, puis ouvrit ses bras pour l’y accueillir. « Ven aquí. » Elle trouva refuge dans ses bras, le serrant si fort, et lui aussi. Il referma ses bras autour de son corps si fragile, fragile comme leurs coeurs endeuillés l’étaient aussi. Il ferma les yeux, sentant l’émotion le gagner. « Lo siento mucho, Leyla. » Parvint-il à murmurer malgré le trémolo dans sa voix.
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MessageSujet: Re: you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla)   you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla) EmptyDim 5 Mar 2023 - 2:27




leyla & leónel 


Je regardai à travers le hublot alors que l'avion se posait finalement au sol. Après une vingtaine d'heures de voyagement et une dizaine d'heures de décalage horaire, j'arrivais enfin dans ce qui serait ma nouvelle maison. C'était surréel, je peinais à y croire. J'avais eu l'impression d'être quelqu'un d'autre pendant l'entièreté de mes vols. Comme si ce que je vivais était un mauvais rêve et que j'allais me réveiller. J'avais essayé de dormir pendant le vol pour Brisbane, j'étais épuisée, mais je n'y arrivais tout simplement pas. Je pouvais encore entendre les coups de feu, les cris de mes parents, la voix de Diego... J'avais essayé de tout mettre sur pause, d'enterrer les sons avec les écouteurs gratuits de la compagnie aérienne. Une fois les pieds en sol australien, j'avais suivi les indications d'un agent de bord à l'aéroport, puis j'avais pleuré durant l'entièreté du vol vers Bowen. Plus je m'approchais de la destination, plus la réalité me rattrapait et je n'étais pas certaine d'être prête à l'affronter. J'avais un sac avec moi, un sac dans lequel je n'avais rien pu mettre. C'était Diego qui l'avait fait pour moi. C'était désormais tout ce que je possédais. J'avais les mêmes vêtements sur moi depuis trois jours, mes yeux étaient rougis par la fatigue et par les larmes qui n'avaient cessé de couler depuis les trois dernières heures. Au moment de quitter l'avion, je sentais mon coeur battre plus vite et ma respiration s'accélérer. Je n'avais jamais mis les pieds hors du Chili et voilà que j'étais à l'autre bout du monde.

Je m'apprêtais à rejoindre mon oncle Leónel. Oncle que je n'avais pas vu depuis tellement d'années que je n'étais même pas certaine de le reconnaitre. Prenant mon simple sac, j'étais sortie de l'avion en dernier. Je me sentais complètement perdue, mais surtout très seule. C'était exactement le genre de moment où ma mère m'aurait pris la main pour m'apaiser, pour me guider. Sauf qu'elle ne la prendrait plus jamais. Je suivis l'étroit couloir qui menait aux gens qui attendaient leurs proches aux arrivées. Je restai plantée là, quelques secondes, à regarder autour avant d'entendre mon prénom. Je tournai la tête vers cette voix, voix qui m'était inconnue. Mon oncle se tenait là. Ma famille, mon repère. Le seul désormais. Je pris une bonne inspiration puis abandonnai ma façade de fille forte en expirant. Je me dirigeai directement dans ses bras. « Tío. » arrivai-je à dire juste avant de fondre en larmes. Je le serrai si fort, comme si j'avais peur qu'il me laisse là, seule. Il resserra mon étreinte et j'aurais voulu me sentir instantanément mieux, mais ce n'était pas le cas. J'avais le coeur en miettes, l'impression que mes jambes allaient lâcher à tout moment, ça faisait tellement mal. « No entiendo... No entiendo que paso » arrivai-je à dire la voix tremblante. C'était plus fort que moi, je cherchais des explications. La violence de notre pays ne me suffisait pas.



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MessageSujet: Re: you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla)   you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla) EmptyDim 5 Mar 2023 - 3:23

Cela faisait si longtemps que Leónel n’avait pas revue sa nièce, en chair et en os, devant lui, pouvant la prendre dans ses bras. Des années. Des années à ne la voir qu’en visioconférence et encore, plus elle vieillissait, moins il avait le droit à ce petit temps d’écran. Souvent elle ne faisait que passer derrière ses parents, lui adressant un rapide signe de la main avant de retourner à ses occupations. Leónel ne lui en avait jamais voulu. Il savait qu’il n’était plus qu’un étranger pour lui, l’oncle qui vit à l’autre bout du monde, l’oncle duquel elle n’avait que des bribes de souvenirs d’une enfance lointaine. Aujourd’hui cependant, alors qu’il s’apprêtait à être son repère, son refuge, il aurait voulu que cette distance ne se soit jamais installée entre eux. Il aurait voulu qu’elle le reconnaisse, qu’il soit un peu un chez elle, une maison n’importe où dans le monde. Ce ne serait pas le cas. Elle serait complètement déboussolée et lui, qu’un mince réconfort. Pourtant, elle se rua quand même dans ses bras lorsqu’elle le repéra parmi la foule, après qu’il l’ait interpellée. Le tío qu’elle lui lâcha le rassura tout de même, et il resserra son étreinte un peu plus encore, pour lui signifier que oui, il était là. Son oncle était là pour elle. Et il s’excusait, tellement, si fort, qu’elle ait eu à vivre une telle tragédie, à un si jeune âge. Elle ne comprenait pas. Lui non plus. « Yo no más, Leyla. Yo no más … » Souffla-t-il, la voix tremblante comme celle de sa nièce. Il essaya de reprendre un peu de contrôle, de se montrer solide, pour elle. « Este mundo es un lugar injusto. » Et elle aurait la triste surprise de réaliser qu’au Chili comme ici en Australie, cette injustice continuait de semer le chaos. Il aurait cru, Leónel, que ce pays qu’il avait adopté aurait été bien moins violent que celui qu’il avait laissé derrière lui en suivant Selma à l’autre bout du monde. Et pourtant, c’était une violence tout aussi gratuite qui avait fait voler en éclats sa vie. Une fusillade insensée sur une plage bondée de gens, de touristes et de locaux. Une fusillade qui avait fait les manchettes avant qu’on l’oublie, quelques semaines plus tard. Leónel n’avait jamais oublié, lui. Il en gardait les images d’horreur tatouées sur sa cornée, hantant ses nuits, torturant ses jours. Il savait que c’était ce qui attendait Leyla, qui avait vu, bien trop jeune, cette même horreur, se faisant arracher sa famille du même coup. « Vamos, vamos a casa. Puedes ducharte, cambiarte y comer. » Mais elle ne s’en allait pas à la maison, Leyla. Elle n'en aurait plus, pour un moment, d’endroit à appeler home.
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MessageSujet: Re: you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla)   you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla) EmptyLun 6 Mar 2023 - 2:50




leyla & leónel 

Je me sentais un peu mal, je trouvais horrible le fait de revoir mon oncle dans ces circonstances. Il était ma famille, mon sang, mais les années avaient passées et... La réalité était qu'il ne faisait plus vraiment parti de ma vie depuis un bon moment. J'avais ma part de responsabilité là-dedans, j'avais moins participé aux appels, j'avais cessé de demander des nouvelles. Je me sentais ingrate en ce moment alors qu'il avait tout organisé pour que je puisse venir le retrouver ici et être en sécurité. Je n'avais cependant pas le loisir de m'attarder sur ces sentiments. Si j'en prenais trop en même temps, je craquerais. Une chose à la fois. Et l'émotion qui dominait parmi toutes celles que je ressentais était la peine. La solitude n'était pas loin derrière. Toute mon attention était sur ce qui s'était passé il y a quelques jours à peine, il n'y avait de place pour rien d'autre dans mon esprit. Lorsque mon regard croisa le sien, c'est comme si on me permettait d'être une enfant à nouveau. Je me ruai dans ces bras, laissant tomber au passage cette carapace, ce mur autour de moi qui m'avait amené jusqu'ici. Je n'avais plus besoin de chercher le prochain avion, les papiers à montrer, plus besoin de me rappeler de mettre un pied devant l'autre et de relever la tête. Je pouvais simplement vivre ma peine. Mon oncle allait prendre le relais pour le reste.

L'émotion était au rendez-vous, autant pour lui que pour moi. J'avais perdu mes parents, mais il avait perdu sa soeur. Notre famille avait été brisée par la violence de notre pays, ce dernier nous avait un peu trahis en nous laissant vivre ces horreurs. Ça me brisait le coeur juste d'y penser. Mon oncle León me disait que la vie était injuste. Son commentaire ne satisfaisait pas mon besoin de réponses, mais il était vrai. Le monde était cruel, injuste et ce n'était probablement pas la dernière fois que je serais confronté à de telles choses. J'espérais pourtant que oui parce que je n'étais pas certaine de pouvoir le supporter. Je savais que mon oncle avait vécu sa part d'atrocités, ma mère m'en avait vaguement parlé. Je n'avais aucune idée à quel point ça l'avait affecté ni même à quel point cet événement teinterait mes nuits pour les semaines, voir même les mois à venir. Je n'étais pas prête pour ce qui allait venir. J'hochai la tête lorsque mon oncle me proposa d'aller à la maison pour manger quelque chose, prendre une douche et me changer. La maison. À cette pensée, mon coeur se serra. J'avais l'impression que ce ne serait jamais chez moi. Cette maison, cette ville, ce pays. Chez moi, c'était à 13 000 km d'ici. J'essuyai mes larmes du revers de la main, essayant de me ressaisir. Je montrai le sac avec mon autre main. « Es todo lo que tengo. » dis-je tristement. Ça signifiait aussi que nous n'avions pas besoin d'attendre d'autres bagages. Ma vie entière était restée dans la maison familiale. Je jetai un dernier coup d'oeil aux avions à travers la fenêtre, à la foule autour de moi, puis suivis mon oncle vers la sortie. Je le suivis jusqu'à sa voiture et montai du côté passager, déposant mon sac sur mes genoux. C'était tout ce qu'il me restait et je n'avais pas envie de m'en séparer. Je tournai la tête vers mon oncle. « As-tu... As-tu eu des nouvelles de Diego? » demandai-je sans être bien certaine de vouloir la réponse. Une partie de moi espérait que oui, qu'il était sain et sauf également... Qu'il était simplement en vie. C'était lui qui m'avait dit d'appeler Leónel, peut-être qu'ils se parlaient régulièrement. Une part de moi était positive, simplement parce que je n'avais pas le choix de m'accrocher à cette lueur d'espoir.




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MessageSujet: Re: you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla)   you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla) EmptyMar 7 Mar 2023 - 2:45

Jamais Leónel n’en voudrait à Leyla que la distance se soit creusée entre eux. Il ne jetait aucunement la responsabilité sur la jeune femme qui avait tout simplement grandi. Elle n’était plus la petite fille toujours fourrée dans les jambes de ses parents, jouant avec son oncle en le laissant volontiers envahir son univers d’enfant. Elle avait eu d’autres occupations, d’autres amis, son oncle n’en était plus vraiment un, un ami. Et surtout, c’est lui qui était parti. Leónel avait choisi de poursuivre une histoire avec la femme de sa vie, sur un autre continent, laissant sa famille derrière. S’il y avait quelqu’un à blâmer de cette distance c’était lui, pas Leyla. Il se blâmait pas mal, d’ailleurs, depuis le début de la semaine. S’il était resté au Chili, il aurait été davantage au courant des problèmes financiers de sa soeur. Il aurait été neurologue au Chili comme ici, il aurait suffisamment bien gagné sa vie pour donner un coup de main à sa soeur, sans qu’elle n’ait besoin de se foutre dans des affaires pas clean avec un cartel. Au lieu de ça, il l’avait abandonnée dans son merdier, sans savoir qu’elle était prise jusqu’au cou. Elle en était morte. Leónel s’en blâmait, même si ce n’est pas lui qui avait tenu le fusil, il aurait pu éviter toute cette chaîne d’événements. Leyla n’aurait jamais eu à venir se réfugier dans ses bras, dans ce nouveau pays, sans aucun repère, sans aucun souvenir matériel. Elle lui désigna en effet le simple sac qu’elle tenait au bout de son bras. Un sac à dos. C’est tout. Leónel soupira tristement. « We’ll figure it out. Tu ne manqueras de rien, Leyla. » Il savait fort bien que c’était faux, pour deux raisons : il n’avait pas les moyens de lui offrir tout ce qu’elle voudrait, et ce qu’elle voulait ne s’achetait pas de toute façon. Ce qu’elle voulait, Leyla, c’était de retrouver sa maison, sa famille, ses effets personnels à elle, pas des objets de remplacement que son oncle pourrait difficilement lui offrir. Mais chaque chose en son temps. Leónel ne mentait pas lorsqu’il disait qu’ils trouveraient le moyen de s’arranger, de s’en sortir. Le quadragénaire passa un bras autour des épaules de sa nièce, juste le temps de la diriger vers la sortie. Après ça, il laissa tomber son bras le long de son corps, allant chercher les clés de sa voiture dans les poches de son pantalon. Il regarda Leyla monter du côté passager, retenant l’émotion au creux de sa poitrine. Il démarra la voiture au moment où sa nièce lui demandait s’il avait eu des nouvelles de Diego, son frère. Il secoua la tête en signe de dénégation, lentement, avant de regarder la jeune femme. « Non, je suis désolé, Leyla … J’ai parlé à mes parents … Ils n’en ont pas non plus. » Ça ne servait à rien de lui vendre une situation autre que ce qu’elle était. Il se jura toutefois de faire tout ce qu’il pouvait pour retracer son neveu.
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MessageSujet: Re: you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla)   you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla) EmptyVen 10 Mar 2023 - 3:44




leyla & leónel 

Je serais éternellement reconnaissante à mon oncle pour tout ce qu'il faisait pour moi depuis que je l'avais appelé. Il avait mis sa vie sur pause pour m'aider à sortir du pays et faire en sorte que je puisse venir le rejoindre ici, en Australie. Son univers était presque autant bouleversé que le mien alors qu'il n'avait rien demandé. Mais je le connaissais mon oncle, même après des années sans l'avoir vu, c'était quelqu'un de bien, il était selfless. Je savais que pour lui, c'était normal de m'aider comme ça, de tout mettre en ordre pour moi et faire en sorte que je n'ai pas à me préoccuper d'aucun besoin de base. Je lui étais redevable et même si en ce moment, je n'étais pas en état pour lui montrer, je comptais me rattraper éventuellement. Je savais aussi que le peu de biens que j'avais réussi à amener avec moi, c'était secondaire. L'important était qu'au final, j'ai réussi à m'en sortir vivante. Ça n'empêchait pas de ressentir énormément de tristesse d'avoir tout perdu, mais j'imagine qu'il y en avait des pires? C'était ce que j'essayais de me dire sans réellement arriver à me convaincre. J'avais montré mon sac à mon oncle sans m'attendre à quoi que ce soit de sa part. Il en avait déjà tellement fait pour moi. « It's okay. » lui dis-je avec un sourire triste alors qu'il tentait de me rassurer, me disant que je ne manquerais de rien. Je n'avais pas besoin d'énormément de biens matériels, c'était le dernier de mes soucis en ce moment. Ce que je voulais, c'était retrouver ma vie d'avant, ma famille. On se rendait compte que c'était ça le plus important qu'une fois qu'on avait tout perdu.

Mon oncle me guida à l'extérieur de l'aéroport jusqu'à sa voiture. Son contact était rassurant, ça m'apaisait pour l'instant. Je ne savais pas jusqu'à quand ce serait suffisant. Je savais au fond que j'aurais vite besoin d'un câlin enveloppant comme seul mon père savait les faire ou bien d'un sourire qui me redonnait confiance en une seconde de la part de ma mère. Et c'est ce moment là que je redoutais plus que tout. Je me demandais si j'allais être capable de fermer les yeux ce soir, de dormir dans un lit qui n'avait même jamais vu la forme de mon corps, de manger dans une cuisine où je n'avais jamais couru avec Diego pour vole un biscuit avant le repas. Je craignais ces moments bien plus que j'avais craint l'avion. En pensant à Diego, je ne pouvais m'empêcher de me poser mille et une questions. Je n'étais pas certaine que mon oncle avait les réponses que je souhaitais entendre. En fait, je ne savais même pas s'il avait une quelconque réponse à me donner. Je m'essayai tout de même, mais sa réponse me percuta comme un coup de poing. Je ne savais pas si je devais interpréter ce manque de communications de façon positive ou négative. Mes grands-parents non plus n'avaient pas eu de nouvelles. J'hochai la tête à répétition, digérant la nouvelle alors que de nouvelles larmes coulaient sur mes joues. « Ça ne veut pas nécessairement dire qu'il n'est pas en sécurité, hein? » demandai-je à travers les larmes. « Peut-être qu'il se cache? Ou qu'il n'a pas accès à un téléphone? » demandai-je, tentant de me convaincre. « Ça ne veut pas dire qu'il est... Qu'il est.. » tentai-je de dire, perdant un peu le contrôle de mes émotions. Mort. Ça ne voulait pas dire qu'il était mort, right? J'étais épuisée.



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MessageSujet: Re: you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla)   you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla) EmptyDim 19 Mar 2023 - 19:10

La famille avant tout, c’était dans cet esprit-là que Leónel avait grandi, et même s’il s’était un jour d’abord choisi lui-même en poursuivant l’amour de sa vie jusqu’à l’autre bout du monde, cela ne changeait rien au fond que sa famille était importante pour lui. Même à distance il s’était juré de garder cette valeur-là bien ancrée en lui. C’est pour cette raison d’ailleurs que le Chilien s’en voulait autant de ne pas avoir été au courant des soucis financiers de sa sœur. Il aurait dû savoir. Elle aurait dû se sentir capable de le dire à son frère, même s’il était loin. L’écart avait été trop grand cette fois et sa main tendue ne se serait pas rendue à temps. La vie lui offrait l’opportunité de se rattraper auprès de sa nièce Leyla, et cette fois Leónel ne permettrait à personne de lui faire du mal. « Non, non, y’a rien qui est okay dans ce que tu viens de vivre. Je t’interdis de minimiser, entiendo ? » Il était bien placé pour savoir que des images du genre restent longtemps gravées dans une mémoire. Que le traumatisme ne s’efface pas en un claquement de doigts. Leónel détestait la vie d’avoir fait en sorte que sa nièce ait à vivre avec ça. Il déposa un rapide baiser sur le dessus de sa tête, avant de passer un bras autour d’elle pour sortir du petit aéroport de Bowen. Il s’installa derrière le volant de sa voiture, Leyla à côté de lui. Il aurait aimé avoir des réponses pleines d’espoir pour elle, malheureusement il lui aurait fallu mentir et ça, Leónel ne le ferait pas. « Non, ça ne veut pas dire ça du tout. » Termina le quadragénaire en secouant la tête. « Diego a toujours été débrouillard. Je suis persuadé qu’il se cache, comme tu dis, le temps que les choses se tassent. Il est en sécurité, et on le retrouvera, Leyla. On le retrouvera. » Affirmait-il sans pour autant promettre, de peur d’être incapable de la tenir, cette promesse. Pourquoi, misère, son neveu n’avait-il pas pris la fuite avec sa sœur ? Pourquoi n’était-il pas avec eux aujourd’hui ? Leónel avait du mal à comprendre qu’il ait laissé partir sa soeur sans s’assurer jusqu’au bout qu’elle serait en sécurité. Il avait du mal à comprendre pourquoi il ne s’était pas réservé le même sort, à lui-même. Ses parents n’avaient pas été en mesure de lui donner des réponses, tout comme il ne pouvait en donner à Leyla pour le moment. L’oncle de cette dernière conduisit jusqu’à l’espace caravaning qui se trouvait entre forêt et mer, dans un grand terrain aux allures abandonnées, et pourtant de nombreuses mobile-homes le décoraient. Il s’arrêta devant sa propre caravane et soupira en coupant le courant. « Je sais que ce n’est pas ce à quoi tu t’attendais … J’aimerais pouvoir t’offrir plus de confort que ça … mais … » Il haussa les épaules en laissant son regard se perdre sur cette maison qui n’était pas vraiment sienne non plus, même s’il l’habitait depuis deux ans. « Je ne peux pas. » Conclut-il.
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MessageSujet: Re: you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla)   you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla) EmptyMer 22 Mar 2023 - 15:04




leyla & leónel 

N'importe qui qui vivait un vrai drame, un truc bien réel, devait avoir le réflexe de minimiser. De se faire tout petit, le plus possible afin de ne pas déranger autour, de ne pas faire de vagues. C'était plutôt pour les trucs sans importances qu'on se permettait d'être dramatique ou bien de chercher la pitiée des autres. Enfin, je pense. Ça me semblait logique. C'était peut-être juste un réflexe à moi. Après tout, je n'aimais pas spécialement avoir l'attention sur ma personne, être au centre des sujets de discussion, faire réagir. Rien dans ce que je vivais ne pouvait être mis de côté et minimisé. Mon oncle l'avait bien compris et à ses paroles, je savais que je finirais par le comprendre aussi. Il semblait déjà savoir ce que je m'apprêtais à vivre, le cauchemar que je m'apprêtais à revivre en boucle plutôt. J'avais encore aucune idée de ce qui m'attendait, mais je voyais dans ses yeux que ce n'était pas terminé et que j'allais devoir m'accrocher à la vie et aux bons souvenirs qui me restaient de toutes mes forces. Je le regardais les yeux brillants et je ne pus qu'hocher la tête. Entiendo.

On se dirigea vers la voiture de mon oncle, j'avais la tête baissée, le regard un peu perdu. Ce n'était pas un grand aéroport, mais il se passait pas mal de trucs et c'était facile de me sentir overwhelmed par ces nouvelles choses tout autour de moi. J'avais pas la force d'assimiler tout ça. Je commencerais demain. Mon esprit divergea plutôt vers mon frère. Ce n'est qu'une fois assise dans la voiture que je trouvai le courage de poser des questions. Comme si, ici, à l'intérieur, c'était plus sécuritaire de demander. Je me retrouvai bien vite déçue et plusieurs scénarios me venaient en tête. Diego, il était tout ce qu'il me restait et j'aurais tellement aimé qu'il vienne avec moi. Je ne sais pas s'il pensait pouvoir sauver nos parents ou s'il avait du faire un deal lui aussi pour que je m'en sorte vivante. J'avais aucune idée. Normalement, on aurait tous dû y passer. Cette simple pensée me déchirait le coeur en deux. Plutôt que de dire ce qui me passait réellement par la tête, j'émis quelques hypothèses à mon oncle et il prit soin d'encourager les meilleures. J'hochai la tête, essayant de me convaincre. '' Oui, il va appeler quand il le pourra. Puis, il a ton numéro, il me l'a donné. Tu as toujours ton téléphone avec toi, hein? '' demandai-je, souhaitant croire à cette éventualité avec l'entièreté de mon corps. Je ne voulais surtout pas qu'il rate son appel, si ça venait à arriver. On fit le reste de la route en silence, me perdant dans mes pensées les plus sombres. On entra dans un espace de caravanes, s'arrêtant finalement devant une. Mon oncle semblait peu enthousiaste de me montrer la sienne. À ce stade-ci, moi, tout ce qui m'importait... C'était d'avoir un toit sur la tête sans y entendre des coups de feu. Son regard était triste, son ton aussi. Ça me serra le coeur. Je lui pris le bras avant qu'il me regarde. '' C'est tout ce dont j'ai besoin, ne t'en fais pas. '' lui dis-je avant de me réfugier à nouveau dans ses bras. '' Merci. '' lui murmurai-je, sentant à nouveau les larmes me monter aux yeux. Je me détachai de lui, le suivant à l'intérieur. Bon, la grandeur rendait les choses un peu complexes, on avait peu d'espace pour deux, mais c'était le dernier de mes soucis en ce moment. Je regardai un peu autour, mon oncle, il n'avait pas l'air très heureux de vivre ici. Une partie de moi se demandait ce qui avait bien pu se passer.


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MessageSujet: Re: you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla)   you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla) EmptyDim 26 Mar 2023 - 1:49

Les questions auxquelles Leónel n’était pas préparé, auxquelles il n’avait aucune bonne réponse à offrir, fusèrent une fois qu’ils furent assis dans sa voiture. Il n’avait aucune bonne nouvelle à donner à Leyla, et ça lui brisait le cœur. Il pouvait juste lui insuffler un peu d’espoir, alors que lui-même en manquait cruellement. « Oui, toujours. Le son est déjà toujours allumé au cas où il arrive quelque chose à Isidora. Maintenant, ce sera aussi dans l’attente de nouvelles de Diego. » Lui assura-t-il avant de quitter le stationnement de l’aéroport et de prendre la route principale longeant l’océan. Durant le trajet, Leónel se demandait si c’était la bonne chose à faire, d’emmener Leyla directement à la caravane. Ce serait sans doute une énième déception, un rappel de tout ce qu’elle avait perdu, du peu qu’il lui restait désormais. Cependant, il se voyait mal s’arrêter à certains endroits clés de la ville et jouer les touristes avec sa nièce après le drame qu’elle venait de vivre chez eux, au Chili. Elle n’avait pas la tête à ça. Il n’avait pas la tête à ça. Elle avait fait un long voyage, aussi, sans doute aurait-elle seulement envie de se doucher et d’aller s’étendre. Peut-être qu’elle n’aurait même pas la force pour tout cela, peut-être irait-elle s’effondrer endormie dès leur arrivée. À quelque part, c’était ce que Leónel souhaitait. Ça lui donnerait peut-être le temps, à lui, d’organiser un peu ses pensées. Il avait répondu à l’appel à l’aide de Diego avec empressement, sans se poser de questions, c’était la chose à faire de s’assurer que sa nièce soit en sécurité, ici. Maintenant qu’elle était assise à ses côtés, cependant, il prenait conscience de tout ce que sa présence à Bowen impliquait pour lui, pour eux deux. C’était gros. Le Chilien quitta la route principale et s’engagea vers l’espace caravaning, le coeur serré d’appréhension. Il craignait la réaction de Leyla, c’est vrai, et pourtant elle arriva à le surprendre une fois qu’il coupa le moteur. Ils sortirent de la voiture alors que sa nièce le remerciait, se réfugiant dans ses bras. Il hocha la tête, un sourire triste sur les lèvres. Il la serra contre lui, avant de relâcher l’étreinte et d’aller ouvrir la porte de la mobile-home à la jeune femme. « Isidora est ici une semaine sur deux, parfois juste pour la fin de semaine, cela dépend. Il faudra que vous partagiez la même chambre, en tout cas, le temps qu’on s’arrange autrement. » Il se dirigea vers le fond, à droite, ouvrant la porte sur une petite chambre décorée pour une pré-adolescente. « Ce sera ici. La mienne est à l’autre bout. La salle de bain est juste ici, si tu veux prendre le temps de te rafraîchir un peu. Ou bien l’océan est à dix minutes à pieds, si tu préfères. » Il avait ouvert la porte adjacente à sa chambre pour lui montrer la toilette. « Est-ce que tu as faim ? » Il ne voulait pas l’assaillir de questions, Leónel, mais il voulait qu’elle ait tout ce dont elle avait besoin à cet instant précis. Il voulait juste qu’elle soit bien. Du moins, le mieux possible qu’elle puisse être, dans les circonstances.
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MessageSujet: Re: you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla)   you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla) EmptyMar 4 Avr 2023 - 17:44




leyla & leónel 

Ça me rassurait de savoir que mon oncle attendait, lui aussi, l'appel de mon frère. Ça me faisait sentir un peu moins seule dans tout ça et on allait pouvoir se donner de l'espoir mutuellement. Je pense que León serait aussi capable de cesser de nourrir cet espoir lorsqu'il saurait qu'il était temps que je me fasse à l'idée. Je ne voulais pas penser à ce scénario tout de suite, ça venait tout juste d'arriver, le temps jouait en ma faveur, mais éventuellement... Dans quelques mois peut-être, il faudra que je continue à avancer. D'ici là, autre que de m'inquiéter pour lui, je devais m'adapter à la vie ici. Mon oncle semblait plutôt réticent de m'amener à sa caravane, il me la présenta d'un air triste ou bien honteux? Je n'étais pas certaine, mais j'étais aussi incertaine de comprendre pourquoi. La seule chose qui m'importait à moi, c'était d'avoir un endroit sécuritaire où dormir. Juste pour ça, j'étais éternellement reconnaissante envers mon oncle. C'est tout naturellement que je me réfugiais dans ses bras, aussi parce qu'un peu de réconfort, c'était le bienvenue dans ce genre de situation. J'avais un peu l'impression d'être une enfant qui avait perdu le seul doudou qui l'aidait à dormir. J'essayais de m'accrocher à ce que je pouvais et en ce moment, c'était la famille. Ma seule famille, Leónel. Je le suivis à l'intérieur pour découvrir ce qui serait ma nouvelle maison. C'était petit, c'était certain, probablement plus que ce à quoi je m'attendais même, mais je me contentai  de le suivre en hochant la tête. « D'accord. » dis-je lorsqu'il me montra la chambre. J'aurais pu y déposer mon sac, mais j'avoue que j'avais un peu de mal à m'en séparer. Je le gardai donc près de moi tandis que mon oncle me montra la salle de bain. Il me demanda si j'avais faim et j'avoue que je ne ressentais plus trop la faim, mais ça l'aiderait probablement de sentir qu'il était utile alors j'hochai la tête de façon positive. « Oui un peu. » dis-je doucement. De toute façon, fallait bien que je me nourrisse. Je n'étais pas certaine d'avoir avalé quoi que ce soit depuis mon départ. « Je vais.. Je vais prendre une douche. » annonçai-je presque comme si je demandais la permission. Je fis un petit signe de tête à mon oncle et alla dans la salle de bain après qu'il m'ait donné une serviette. Je fermai la porte derrière moi et regardai mon visage dans le petit miroir. J'avais les yeux enflés, rouge et cernés. La fatigue, la douleur, la peine, tout pouvait s'y lire. J'expirai bruyamment et ouvris mon sac pour y trouver l'essentiel : des morceaux de vêtements, un pyjama, une paire de chaussures, des sous-vêtements, quelques articles de toilettes et le toutou que Diego m'avait offert lors de mon douzième anniversaire. J'y trouvai aussi une photo de nous quatre, comme s'il savait en faisant mon sac que j'allais plus jamais les revoir. Les larmes me montèrent aux yeux rapidement. Je sortis mon pyjama et mes articles de toilettes et replongeai tout le reste dans le sac que je fermai. Je pris une douche rapide, mais chaude. Je ne savais pas trop l'état de l'eau chaude chez oncle León, mais j'étais habituée à la maison de pas prendre plus que dix minutes, sinon on en manquait. Je sortis de la salle de bain vêtue de mon pyjama avec les cheveux mouillés, un peu soulagée d'être au moins propre. Je retournai voir mon oncle à la cuisine. « Merci pour la douche, ça a vraiment fait du bien. Ça sent bon, c'est quoi? » demandai-je en regardant furtivement. J'étais presque certaine que n'importe quoi aurait senti bon. Je déposai mon sac à mes pieds après m'être assise sur une chaise dans la petite cuisine.



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MessageSujet: Re: you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla)   you stood and cried and wondered why you can't return from where we came (leyla) EmptyLun 1 Mai 2023 - 19:36

Il aurait préféré, Leónel, pouvoir emmener Leyla dans sa belle grande maison, celle où il avait vécu la majorité de ses années en Australie, celle de laquelle il faisait ses appels en vidéoconférence avec la famille, celle qui avait connu ses jours bien plus heureux avec Selma et Isidora. Malheureusement cette maison-là, il l’avait laissée à son épouse et à leur fille depuis leur séparation. C’est lui qui avait besoin de temps, c’est lui qui avait besoin de se reconstruire. De revenir aux sources. Il se voyait mal demander aux deux femmes de sa vie de quitter cette maison, que Selma et lui possédaient tous les deux de toute façon. Il avait préféré être celui à partir. De toute façon, il n’aurait pas su quoi faire de son existence dans une aussi grande place. Il préférait les murs plus serrés et moins épais de cette caravane. Leónel montra à sa nièce sa chambre temporaire et partagée avec sa cousine, ainsi que la petite salle de bains où elle pourrait se rafraîchir. Elle avait un peu faim. « Ok. Je vais nous préparer quelque chose. » Il n’avait pas tellement faim, lui non plus. Son appétit était à la baisse depuis sa dépression et les récents événements survenus au Chili n’aidaient en rien. Il fallait tout de même qu’ils mangent, tous les deux, et il allait devoir montrer l’exemple. « Oui, vas-y. Prends ton temps. Tu as une serviette propre ici. » Il rentra dans la petite salle de bain le temps d’ouvrir la seule armoire et d’en ressortir une serviette grise roulée. Il la déposa sur l’étroit comptoir du lavabo. Leónel regarda Leyla rentrer et s’éclipsa aussitôt, lui laissant son espace, et se dirigea vers la cuisine. Il ouvrit le frigo et sortit de quoi faire une soupe rapide, vide-frigo. C’était à peu près tout ce qu’il pouvait offrir à sa nièce. Rien qui lui rappellerait les délicieuses cuisines du Chili. Rien qui lui rappellerait les recettes familiales. Juste de quoi survivre au reste de la journée. Pourtant, quinze minutes plus tard quand Leyla sortit, elle mentionna tout de même la bonne odeur. Il fut pris de court, rien que par ça. « Euh … Une soupe. Rien de bien sophistiqué. Mais ça te redonnera un peu de force. » Il sortit deux bols et les remplit, plongea une cuillère dans chaque, et vint s’asseoir à côté de Leyla, après avoir déposé les bols à leurs places. C’était étrange, pour lui, de partager un repas ici, dans sa caravane, avec une autre personne qu’Isidora. Jamais il n’aurait pu prédire que sa nièce se trouverait ici aujourd’hui. Et il aurait préféré que ce ne soit pas le cas. Il aurait préféré qu’elle le visite dans d’autres circonstances, avec le reste de sa famille. De leur famille. Le téléphone sonna alors que Leónel prenait sa première bouchée. Il releva un regard figé vers Leyla, avant de répondre avec empressement, sans même regarder le numéro de téléphone. C’était Selma. Il lui parla brièvement, l’informant de l’arrivée de Leyla en sol australien et de sa présence auprès de lui, au moment où ils se parlaient. Il la rappellerait plus tard. En raccrochant, Leónel regarda furtivement sa nièce. « Désolé … C’était Selma. Elle te salue. Tu risques de la croiser quand elle viendra déposer Isidora, dans quelques jours … » Elles se croiseraient pas mal plus souvent que ça, dans quelques semaines, quand Leónel réaliserait que ça n’était pas une vie, pour Leyla, de vivre à plein temps dans cette caravane avec lui.  
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leyla & leónel 

C'était difficile d'imaginer que je me réveillerais ici tous les jours maintenant. Que cette caravane allait devenir ma maison, mon quotidien, que j'allais partager ma chambre avec ma cousine que je connaissais à peine. J'étais reconnaissante, évidemment, d'avoir un endroit où dormir, où vivre, d'avoir une famille pour m'accompagner là-dedans même s'ils ne me connaissaient presque pas. Mais, une partie de moi trouvait ça hyper difficile et je n'étais pas certaine de voir le bout du tunnel de cette épreuve. Probablement parce que j'étais encore trop sous le coup de l'émotion, c'était encore trop récent. Je tentai de chasser ces pensées, ces souvenirs, ces flashback qui me revenaient sans cesse avec l'eau chaude de la douche. J'aurais aimé que ce sentiment ne soit pas que temporaire. Pourtant, à la seconde où je sortis de la petite douche, la lourdeur des derniers jours s'affala à nouveau sur mes épaules. J'essayai tout de même de ne pas me laisser envahir par les émotions négatives, par la panique que ça me procurait d'être dans ce nouveau pays. Je tentai de faire bonne figure pour mon oncle qui avait mis toute sa vie sur pause pour m'accueillir. L'odeur de la cuisine vint rapidement jusqu'à mon nez. Je ne savais pas ce que c'était, mais même sans avoir envie de manger, je pouvais ressentir le creux dans mon estomac. Oncle León semblait surpris de mon commentaire, mais c'était sincère. « J'ai pas l'impression qu'un gros repas lourd aurait passé de toute façon. » dis-je avec un petit sourire triste. J'avais un peu la nausée, mais c'était probablement dû à la faim à ce stade. Je pris place à la table et attirai le bol que mon oncle me tendait vers moi. Je pris une première bouchée et étonnamment, ça passa bien. J'avais plus faim que je me rendais compte et bien vite, je pris une deuxième et une troisième bouchée. Peu de temps après avoir entamé le repas, le téléphone sonna. C'était comme si mon coeur arrêta de battre en même temps tandis que nos regards se croisèrent. Mon oncle répondit rapidement, mais je compris à son ton et intonation qu'il ne s'agissait pas de nouvelles à propos de mon frère. Je me concentrai à nouveau sur ma soupe, ayant soudainement un peu moins d'appétit. Je soupirai discrètement, forçant un léger sourire alors qu'il raccrocha. « Oh. D'accord. Ça va faire bizarre, ça fait longtemps. » dis-je simplement, picorant dans mon bol avec ma cuillère. Je me sentis soudainement prise de fatigue, comme si toute l'adrénaline était redescendu d'un coup, me laissant complètement épuisée et vidée. Je terminai tout de même mon bol, du moins le plus possible avant de bailler un bon coup. « Est-ce que... Est-ce que c'est ok si je vais me coucher? Je me sens épuisée. » dis-je doucement à mon oncle. Je me sentais à nouveau comme une enfant à demander la permission pour aller au lit, mais je ne voulais pas être impolie. Je ne savais également pas s'il avait autre chose en tête. pour la journée. Je pense qu'il comprit que j'en avais bien besoin. Je débarrassai mon bol, le nettoyai et me dirigeai vers la chambre avec mon fameux sac, encore. Mon oncle me sortis une couverture supplémentaire, m'expliquant rapidement les derniers petits détails que j'avais besoin de savoir et je me mis au lit, la photo de ma famille sur la petite table à côté du lit et la peluche de Diego dans les bras. J'savais pas ce qui m'attendait pour la suite, mais je me doutais que ce serait loin d'être facile.

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