Stay fresh, play nice [Manwë]

Ses lèvres s’étaient pincées, probablement que l’ensemble de ses muscles brachiaux s’étaient également contracté à l’impact de la crème chantilly sur son visage. Il pouvait avoir l’air impressionnant, malgré ce qu’il avait en pleine face, lorsqu’il avait l’air en colère. Il se savait pas rassurant, pourtant, son regard n’était pas même assombri de cette émotion. C’était comme s’il pouvait sentir les regards autour d’eux se glacer d’effroi, car oui, ils étaient observés. C’était comme ça, désormais, sa vie. Il le savait. Il était en compagnie d’une jeune femme innocente, pas besoin de se faire de dessin pour imaginer ce qui se tramait dans la tête de tous ces cons. Cette agression à coup de crème fouettée, ça pouvait sembler aux yeux de beaucoup, comme un geste suicidaire.

Le brun n’était pas en colère, c’était simplement son corps qui avait réagi. Réflexe. Il avait malgré tout compris le message, derrière son geste, bien qu’il n’avait pas vraiment écouté ses mots. Avec ses doigts, il se débarrassa comme il le pu se ce qu’il avait sur le front, puis les essuya négligemment sur son t-shirt. Il planta ses yeux clairs dans celui de la jeune femme. “ Apparemment, c’est pas si difficile de te faire exploser. Control freak. “ Au moins, ils restaient dans le thème.

Il hausse un sourcil, dans lequel il y avait encore un peu de chantilly et quelques unes de ces maudites paillettes au sucre, ce qui le rendait assez amusant à son insu. “ Je vais être obligé de vraiment le faire, tu sais… Le truc de devoir creuser dans le sable pour cacher ton cadavre. Moi qui voulait passer une soirée tranquille…. “ C’était étrange, de pouvoir plaisanter là dessus. Manwë pouvait être à la fois drôle, irritant et touchant dans la même soirée. C’était un peu sa spécialité, sa spontanéité.

Le luthier ne la lâchait pas du regard, elle semblait ne pas vouloir ciller non plus. Bon sang, qu’elle l’intriguait, madame je ne veux pas être mise dans une case. Qu’est-ce qu’elle s’en foutait que les gens puissent la mettre dans une case, hm ? Lui, s’en foutait pas mal et pourtant, ce que l’on disait sur lui était loin d’être élogieux. Il s’y était fait. Il y trouvait même curieusement quelques avantage dans sa vie quotidienne.

Il approcha doucement sa main de son visage, il ignorait si elle aurait peur. Il ne lui en voudra pas, ça serait d’ailleurs, une réaction plutôt normale de sa part. Il vint seulement subtiliser cette ombrelle qu’elle avait mise derrière son oreille un peu plus tôt. Il fut lui-même presque dérangé par son geste. “ T’as du cran. “ Faut dire, que ça fait un bail que personne ne lui tenait plus vraiment tête, ça n’était plus amusant pour un sou, à force. “ J’vais pas te faire de mal, Hazel. T’as pas ce qu’il faut pour me faire exploser… Et tant mieux. “ Il se redressa dans sa chaise, posant l’ombrelle entre eux avant de saisir son verre et le vider avec une excellente descente.

Il ferait mieux de se lever et partir. Se faire oublier de cette jeune femme au regard vif. Elle semblait représenter la rage de vivre, alors que lui, avait des mains d'assassin. Il savait au fond de lui que cette rencontre sera unique, une parenthèse dans sa vie à elle, un moment plus doux dans sa vie à lui. “ Et donc… T’as encore envie de me jeter un truc à la gueule ou est-ce qu’on est bons pour ce soir ? “ Et il haussait encore ce fameux sourcil en chantilly... Bon sang... La question qu’il avait bien envie de lui poser, c’était de savoir pourquoi est-ce qu’elle restait là, assise en face de lui, mais la réponse pourrait être trop… Gênant. Gênant pour lui. Parce qu’il ne sait jamais quoi faire de sa peau dans la moindre relation sociale, pas après tout ce qu’il s’est passé dans sa vie. Pas après que toute sa noirceur ait réellement explosé en lui…

T'as tellement bien fait

Ce geste invraisemblable avait provoqué un mouvement insensé par la jeune femme. Elle s’était penchée vers lui, il n’avait pas bronché alors qu’elle venait essuyer son sourcil. Il devinait qu’avec ses doigts il n’avait pas dû tout ôter, mais ça ne le dérangeait pas. Il y avait ce mouvement, leurs peaux ne se touchaient pas, mais ça ne rendait pas moins ce moment fébrile. Ceux qui les observaient retenaient leur souffle, avant que tous ne jugement dans leur coin que cette pauvre fille était tout simplement folle. Probablement, mais qui ne l’était pas ? Ses yeux verts avaient contemplé le rictus au coin des lèvres de l'artificier. C’était sans doute cliché de ne pas vraiment se souvenir de la dernière fois qu’on l’avait touché au visage pour autre chose que le frapper. Sa peau était plus habituée à réagir à la violence qu’à la douceur, et ce geste d’Hazel n’en manquait pas. Il ne s’autorisait pas vraiment à exprimer son trouble, il se disait que ça n’avait pas de sens… Ce à quoi ils jouaient à cet instant, à se déstabiliser… En se déstabilisant soi-même.

Lorsqu’elle se dissimule pour rire, il ne put contenir un léger rictus également. Il ne prêtait pas attention à ceux qui les entouraient, il avait l’habitude maintenant, bien qu’il préférait largement l’ombre à la lumière. C’était elle, qui braquait la lumière sur eux. Soit on l’évitait, soit on le surveillait. Tout dépendait de sa compagnie. Les gens se souciaient pour elle, comme personne ne s’était jamais soucié de lui, même lorsqu’il n’était qu’un enfant et qu’il se trainait avec une multitude de bleus sur le visage à chaque fois que son père s'énervait. Parce qu’il sait que si les gens surveillent, il y en aurait probablement pas un seul pour intervenir s’il venait à lever la main sur la jeune femme, parce qu’ils sont tous lâches.

On est bon.
Doucement il acquiesce pour signifier qu’il a compris.

Il reposa doucement son verre vide, il n’avait plus vraiment faim, mais il avait aimé goûter à cette glace, à goûter à cet instant, tout simplement. Un sourire s’étire sur ses lèvres alors qu’elle ajoute que son intégrité physique ne craignait plus rien. “ Dommage, c’était marrant. “ Il n’avait pas eu l’air de s’être amusé ce soir, parce qu’il se méfiait au premier abord, puis finalement… Il se disait qu’elle ne voulait rien de lui, aucun service, aucune curiosité malsaine qui animait certaines femmes, à vrai dire, quasiment toutes celles qui finissent ponctuellement dans son lit. Il n’avait aucune raison de se méfier d’elle, comme elle pouvait le croire, lorsqu’il disait qu’il ne lui ferait pas de mal.

Toutes les bonnes choses ont une fin, elles sont seulement bien rares dans sa vie à lui. Il sortit son paquet de cigarettes pour pincer entre ses lèvres un bâtonnet de nicotine avant de se lever de sa chaise “ Bonne soirée, Hazel. “ Il devrait sans doute la remercier pour cette parenthèse, mais ce n’était pas son genre. Il avait déjà beaucoup fait, en avouant trouver dommage que ça se termine déjà. Il allumait sa clope avec son zippo, il hésita une seconde tandis qu’il surplombait la jeune femme, puis il posa le briquet à côté de l’ombrelle. “ Plus d’explosion, enfin pour moi… “ dit-il avant de s’éloigner, ne manquant pas de saluer ses admirateurs soit d’un doigt d’honneur ou bien d’un regard des plus noirs. Bizarrement, ça lui faisait du bien de se débarrasser de ce briquet, même s’il n’avait pas tué son père par le feu mais c’était bien cet élément destructeur qui avait fait disparaître le corps. Cet objet était… Une pièce à conviction. Une pièce du puzzle de ce qu’il avait fait, de ce qui le hantera pour toujours bien qu’il recommencerait sans hésiter. Il le laissait à elle. Il n’avait pas la certitude qu’elle comprendrait, mais il avait cette intuition.