leioh ( d'ombre et de lumière.

outfit - Sahan,
Je pourrais t’écrire une lettre aux mille pensées désordonnées, mais je ne suis pas certain que cela puisse nous aider. J’ai longtemps réfléchi à ce que je pourrais te dire avant de comprendre que l’essentiel je te l’ai déjà transmis durant ces années passées à tes côtés.
Je te l’ai dit, je suis parti. Cela devenait difficile de vivre dans cet appartement sans toi. J’y ai terminé mes études et c’était suffisant. Parce que, même si tu vas revenir après avoir terminé ton service militaire, nous avons tous les deux décidé d’arrêter. Il ne m’aurait servi à rien d’insister en restant dans ce cocon qui a vu s’entrecroiser et s’entrechoquer nos coeurs égarés. Parce qu’aujourd’hui, je suis fatigué, Sahan. J’ai besoin de retrouver mes forces, j’ai besoin de me retrouver. Et toi ? T’es-tu retrouvé ? Je te le souhaite, je te souhaite de finir par retrouver une paix intérieure.
Je suis retourné là où les vagues pourront peut-être adoucir mes tourments. L’Australie est mon unique refuge, après toi. Je ne te demande pas de venir me chercher mais tu sais où je me trouve au besoin. Je serais toujours là pour toi, Sahan, je ne t’ai pas abandonné car je t’aime. Tu as beau croire être un ange déchu, tu peux l’être je ne t’en aimerais qu’encore plus car tu l’incarnes au comble de la perfection. On a tous nos défauts, nos tares et nos vices cachés et on n’en reste pas moins beau. Nous ne sommes que des êtres humains. Et tu n’as pas à avoir peur, je peux briller assez fort pour deux tu sais. Tu le savais.
Je t’embrasse du fin fond de mon coeur, mon tendre amour. Que nos âmes ne puissent se rencontrer une nouvelle fois sous un ciel moins amer.

Ta précieuse étoile, Lei

Ranger ses affaires dans son sac, saluer les derniers élèves à partir. Lâcher un petit sourire. Au fond, ce n’était pas une mauvaise idée d’être venu à Bowen. Il n’était plus accroché auprès de sa famille, auprès de quiconque. Il s’en sortait mieux, tout seul, et il commençait à s’y trouver un certain confort. Il n’avait pas repris plus de poids, il n’en avait pas reperdu mais il prenait ces médicaments qu’on lui avait prescrit. Il ne tenait plus sur un fil, il n’était pas en équilibre précaire, pas non-plus totalement guéri. Il y avait ce vague à l’âme constant qui l’empêchait de se tracer une nouvelle route avec d’autres perspectives que de le garder bien caché au fond de lui dans un tiroir. Il n’en était pas capable. Pas encore, parce qu’à ce temps maussade, il songeait qu’habituellement, à son âge, on ne pouvait rêver que de rentrer se blottir dans des bras aimants.
Mélancolie qui ronge l’âme.
Il enfila sa veste, ajusta la bandoulière de son sac et la posa à son épaule. En plus du métier de traducteur qu’il avait commencé en revenant en Australie, il avait eu l’occasion qu’on lui propose de faire du tutorat dans cette université. Il n’avait pas envisagé le métier de professeur avant de commencer à apprendre à ces personnes ayant à quelques années près le même âge que lui. Il n’était pas le plus à l’aise, il butait parfois et riait de cette expérience qu’il ne possédait pas. Cependant, il était agréable de les voir pour la plupart attentifs et qu’ils ne viennent l’enjoigner à donner plus de cours. Il n’avait pas dû totalement se perdre, après tout.
Pourtant, que ressentait-il en cet instant en l’apercevant de l’autre côté du trottoir ? Il se voyait courir dans ses bras, il se voyait pleurer entre ses bras. Il imaginait toutes les situations possibles tandis que ses phalanges blanchissaient autour de la poignet du parapluie. Sahan était revenu. Sahan était venu jusqu’à lui. Il était là. Tu es là.

« Hi, souffla-t-il, you will end up soaked, you know. »

Mais il l’avait abrité sous son parapluie, avait traversé le passage piéton. Plongé dans ses prunelles dévastées. S’il tendait la main, l’attraperait-il ?

@sahan kwon

outfit -

Je me demande à quoi tu penses
Quand nos cœurs ne se retrouvent pas
À quoi peut ressembler la transe
Quand t’es perdu loin de mes bras
Je me demande à quoi tu penses
Si tu sais que j’ai mal au cœur
Que je sais plus comment je danse
Qu’je vois les minutes comme des heures

Il luttait. Il menait une bataille intérieure aux milles questions qu’il eut envie de lui poser. Pourquoi est-ce que tu es parti ? Pourquoi n’ai-je pas pu te retenir ? Il avait cessé de se les poser jusqu’à aujourd’hui, elles étaient revenues à la charge. À quoi est-ce que cela lui servirait ? Car ça n’avait pas fonctionné avant. Pourquoi est-ce que tu pars ? Pourquoi ne puis-je te retenir ? Il avait cru n’être que son unique source de bonheur capable de braver tous les obstacles et tout avait volé en éclats. Il n’avait plus qu’à s’excuser de ne pas avoir été à la hauteur. Il n’avait pas pu le protéger, il n’avait fait que protéger sa petite personne.
Et Sahan se battait toujours contre lui-même, il le percevait. Alors d’autres questions prenaient le relais sans savoir quelle serait la première qui oserait franchir la barrière de ses lèvres. C’était une cacophonie qui lui vrillait l’âme, remontait jusqu’à ses tympans et lui donnait la migraine. Il avait rêvé de nombreuses fois qu’il ne lui revienne, il avait fait des cauchemars et avait perdu le contrôle. Puis, un matin, le vide s’était installé en lui. Ils avaient mis un point final à cette relation. Elle n’existait plus que dans leurs coeurs décousus.
Il en avait fait assez, il n’y avait plus que ça à croire.
Pourtant, Sahan fut le premier à briser le silence de leurs corps qui s’imploraient à s’étendre. Il lui communiqua plus que de raison et ses yeux s’écarquillèrent de surprise. S’embuèrent. Ne pleurèrent pas. Ils ne firent que quitter les siens, fixer le sol tandis que le parapluie lui était subtilisé. Ses doigts entourèrent la sangle de son sac, il crut se voir chuter. Comment tenait-il sur ses deux pieds ?

« O-okay, murmura-t-il, there’s a coffee near to us. »

Une proposition faite, suivie quand il n’avait plus envie que de fuir. Assis autour de cette table, face à face, il ne toucha guère au thé commandé. Il y observa son reflet à peine réfléchi et inspira un bon coup. Releva ses yeux étoilés vers les siens. Il ne voulait pas avoir à regretter de nouveau de ne pas en avoir fait assez quand il n’avait fait que penser prétendre le contraire sur ce trottoir.

« Quand est-ce que tu es arrivé ?, fut sa première interrogation, Bowen est une jolie ville, ajouta-t-il, Ah, this is so ridicules to say that. »

Il agita ses doigts devant son visage, eut un léger rire nerveux. Il souffla pour se donner du courage, ce n’était pas de sa faute. Il avait honte de l’image qu’il lui renvoyait. Sahan avait à chaque fois fait tomber ses barrières mais c’était différent en cette fin de journée. Tout avait été éradiqué, il avait recommencé à se bâtir des murailles et c’était bancal. Un coup de vent et cela s’effondrerait. Il n’avait pas de voeu plus cher que de celui de le prendre dans ses bras, le rassurer car ce n’était réellement pas de sa faute.
et je sais ce que tu penses. tu songes que tu en es le coupable, que tu m’as fait perdre toute vitalité. tu vas te brimer, tu vas remettre en question ta propre existence. alors que je n’ai pas été le plus à même à t’aider dans les plus difficiles épreuves que tu as traversé. alors ne te blâmes pas. ne te blâmes plus. ne t’inquiètes pas, je ne sais pas si nous avons fait les bons choix mais on a dû en faire. les voici.

@sahan kwon

outfit - En essayant de se connecter à cet instant qui lui apparaissait comme tout droit sorti de ses rêves, les souvenirs coloraient son champ de vision. La mémoire s’amusait à lui jouer des tours, prenait un malin plaisir à s’abreuver de ses émotions emmêlées à ces retrouvailles. Il y avait eu ces jours où ils avaient dansé sous la pluie, à rire et à fendre l’espace du temps, il y avait eu ces autres jours où aucun des deux ne voulait sortir de sous les draps où ils avaient refait le monde. Il y avait eu, il y avait eu, et il n’existait plus. Plus d’eux, plus d’eux deux et plus de leurs doigts liés à l’éternité.
Le temps était fade, il était propice à leurs coeurs qui battaient avec difficulté l’un en face de l’autre. Autrefois, cela n’avait pas été comme ça. N’est-ce pas ? Les images qui continuaient à se manifester sous ses yeux en étaient la preuve et il aimerait en sélectionner une. Une particulière, une dotée de ce côté artistique que Sahan avait toujours apporté à leur relation, lui prouver qu’avant ils en avaient été capables. Alors, pourquoi pas… aujourd’hui ? Une boule se forma dans sa gorge, impossible à avaler, impossible à passer.
Il n’avait qu’à tendre la main, il le toucherait. Il n’avait qu’à se pencher légèrement, il effleurerait sa peau avec cette tendresse qu’il lui avait offerte en guise d’amour. Il souhaitait plonger ses doigts dans sa chevelure noire de jais, qu’elle ne soit courte n’avait guère d’importance tant la beauté restait prospère à ses traits. Mais il le rendait malade, il ne lui apportait plus que laideur à son visage.
Après tout, il s’était fait une raison.
Il ne réagit pas à sa maladresse, ne fit que ramener ses mains vers lui. Les cacher sous la table, se les abîmer. Qu’il ne le voit pas. Il voulut rire, n’y parvint pas et baissa les yeux jusqu’à ce qu’il ne l’entende lui parler de lui. Lui avouer le chemin qu’il avait parcouru en venant ici, en venant jusqu’à lui. Parce que pourquoi serait-il venu ici si ce n’était pas pour lui ?

« Sahan, souffla-t-il, I came here to move forward, dit-il la voix enrouée, Firstly, I came to Sydney because my sister and my mom asked me to come back. But, I need to really move forward and my family took care of me too much, so I followed our friend in Bowen. »

Pourtant, à quoi aspirait-il en ce moment face à lui ? Ses yeux plongés dans les siens y trouvaient-ils un refuge comme lors de ces années d’insouciance ? Son être hurlait, les véritables mots qui désiraient franchir la barrière de ses lèvres étaient qu’il l’avait attendu chaque jour, chaque mois jusqu’au jour de trop. Aujourd’hui, il ne savait plus. Il avait beau avoir été égoïste, il avait souffert lui aussi.

« I miss you, articula-t-il en ravalant un sanglot, I miss you so much. »

Il ne pleurerait pas. Il ne le ferait pas. Par contre, rien ne lui interdisait de lui dire combien il avait pu lui manquer. Leur relation était éteinte, le myocarde continuait de battre sous la poitrine. Il ne cesserait pas car cet amour s’était même accrue au fil du temps. Il était peut-être destructeur, mais si puissant qu’il ne puit s’en défaire. Il lui offrit alors un sourire, un sourire peu assuré, et espéra lui faire retrouver ses jolies couleurs d’antan.

@sahan kwon

outfit - Il lui avait manqué à tel point qu’il avait perdu le fil de son existence. On avait vu ses nerfs se distordre, on l’avait vu se battre contre lui-même avec une force qu’on ne lui pensait pas avoir. On l’avait vu maigrir, manger moins et on s’était demandé comment un si petit corps était encore capable de se lever le matin. Continuer à aller en cours, terminer sa licence et l’obtenir avec des notes satisfaisantes. On avait songé qu’on ne pouvait tant aimer si c’était pour se voir chuter aussi bas qu’il ne l’avait fait. Ça ne donnait pas envie et on lui avait demandé d’oublier. Il était trop tard, il ne lui reviendrait pas même s’il le lui demandait. Ils avaient rompu tous les deux, ils avaient pris cette décision ensemble et il était temps d’avancer. Il avait longtemps pleuré, il avait passé des heures entières sous les draps à s’écorcher et à l’implorer de lui revenir.
Et ce n’était arrivé qu’aujourd’hui. Trop tard, il est toujours trop tard. Il lui avait dit qu’il lui avait manqué mais il avait quitté cet appartement. Il était revenu en Australie, il y avait commencé une nouvelle vie. Une deuxième chance au bonheur. Il avait tout laissé là-bas, en Corée du Sud, il n’avait gardé de lui que son amour et peut-être ce bijou qu’il portait autour du cou.
Alors il lui avait avoué la vérité et il l’avait vu se décomposer. Il n’avait pas à être surpris de le voir se lever et décamper. Il n’avait pas à se sentir suffoqué de découvrir qu’il le laissait une nouvelle fois derrière lui. Il n’avait fait que le mériter après avoir pris mal soin de lui et lui avoir dit malgré tout dans cette lettre où il se trouvait. Peut-être Sahan attendait-il d’autres mots de sa part, peut-être. Mais il ne souhaitait pas lui mentir car les mensonges ne les avaient pas aidés par le passé. Il y en avait eu peu, bien assez. Ses ongles s’enfoncèrent avec brutalité dans sa peau, il se mordit la lèvre et ravala rageusement ses larmes. Il n’avait pas à en être décontenancé, il en était certain mais cela le blessa.
Il aplatit un billet sur la table et se leva précipitamment. Son parapluie rangé dans son sac, le sien dans ses mains. Il le rejoignit, le lui balança à la figure bien qu’il se retourna au même instant face à lui.

« Vais-je toujours te courir derrière ?!, s’emporta-t-il, À quoi est-ce que tu t’attendais, Sahan ?! Je suis venu te chercher à cet aéroport et tu es quand même parti loin de moi, serra-t-il ses poings, Ça m’a rendu malade, j’étais en train de me perdre, dit-il en se rapprochant, Tu le savais, tu le savais car je te l’ai écrit. Tu es venu jusqu’ici, alors please, don’t run away once again. Don’t abandon me once again. DON’T LEAVE ME! »

Ce cri le prit de court. Il baissa la tête, les gouttes continuaient de tomber des cieux avec âpreté. Il ferma les yeux et se redressa en prenant une nouvelle profonde inspiration. Il les rouvrit, ne sut plus si l’eau qui s’écoulait le long de ses joues était dû à la pluie ou à ses propres larmes. Il était secoué de sanglots, tout son corps tremblait. Il allait s’effondrer. Ce n’était pas ce qu’il avait espéré comme retrouvailles. Il les avait imaginées un nombre incalculable de fois sauf qu’elles ne se présentent comme ça. Quelle image renvoyait-il ?
Quelle image est-ce que je te renvoie ? M’aimes-tu encore ? Bien sûr que oui, sinon tu ne me serais pas revenu. Mais alors pourquoi est-ce que nous ne sommes séparés ? Parce que je ne suffisais pas.

@sahan kwon

outfit - Cela ne s’oubliait pas. La déchéance. La sienne, à Sahan. Il l’avait vu tomber dans le gouffre et n’avait rien pu y faire. Lui n’avait fait que faire parti des autres, se réjouir de sa renommée face à son talent inné pour l’art. Inestimable. Il en était sa muse. Ça l’avait gonflé de joie de voir son travail récompensé car il le méritait. Pourtant, Sahan s’était déjà fait une place là-haut avec le nom qu’il possédait, il n’avait pas cherché plus et ça, Leioh ne l’avait pas compris. Il l’avait vu lui échapper, dégringoler du sol et ne pas se relever. Et cela l’avait effrayé. Il en avait été terrorisé de découvrir une fois de plus qu’ils n’étaient pas du même univers et qu’il lui serait difficile d’en saisir toutes les vilaines subtilités. Parce que le monde de cet ange déchu n’était pas beau et recelait d’une laideur incroyablement disgracieuse. Alors il ne lui avait pas suffi.
Il avait été égoïste, il s’était protégé. Cela avait été dur, il n’avait pas un pouvoir assez puissant sur cet homme qui le rendait fou. Il avait pourtant trouvé rapidement cette substance dans laquelle il s’était laissé tomber sans être capable de faire en sorte de la lui subtiliser. Qu’il ne puisse plus la prendre, qu’il ne plonge son regard que dans le sien et y puise la force nécessaire. Il avait été lâche parce que cela l’avait blessé de voir qu’il était trop tard pour faire machine arrière. Il aurait dû mieux se renseigner, insister afin qu’il ne se confie à lui au lieu de lui montrer son monde plus attrayant que le sien. Il s’en excuserait mille fois sans que cela ne soit assez.
En quoi est-ce que ça va l’être aujourd’hui ?
Il pleurait, finalement. Il pleurait avec fureur, ses deux petites mains serrées en poings comme s’il se réveillait après tout ce temps passé en léthargie. Aurait-il pu faire quelque chose de plus à l’aéroport ? Mais il aurait pu l’y retrouver. Le secouer et lui avouer qu’il l’aimait plus qu’au premier jour. Qu’ils ne puissent réessayer. Se blottir l’un contre l’autre. Et ce fut comme si Sahan avait lu dans ses songes, corps débloqué qui se permit d’agir à son encontre. Il retrouva sa chaleur, sa douceur inouïe, s’en abreuva. Ses doigts se desserrèrent, s’accrochèrent à sa veste et il huma son odeur. Il était loin de n’être qu’une illusion, il était réel et son corps se craquela de plus belle.
Ah, mon prince, je ne puis qu’espérer que tu me retrouves à chaque fois. Mais, quel chemin dois-je suivre afin de te retrouver, toi qui t’es perdu ?
Il le serrait, il le serrait de peur qu’il ne lui échappe. Une nouvelle fois. Il eut même un léger sursaut lorsque son étreinte se rompit, la panique prit possession de son frêle corps. Sahan ne fit que poser son front contre son épaule, à sa langue déliée qui lui communiqua des mots face auxquels il faillit s’écrouler.

« Sahan, Sahan, Sahan, répéta-t-il en déposant ses mains sur ses joues afin qu’il ne relève ses yeux vers les siens débordant de larmes, you know, I remember the first day we met and I knew I always love you until the end. Thank you for finding me despite of you are lost yourself. And, dit-il d’une voix tremblante qu’il se mordit violemment la lèvre, Tout n’est pas perdu, caressa-t-il sa joue de la pulpe de son doigt, Tout n’est pas perdu, sanglota-t-il, Moi aussi j’ai besoin de toi. Je… »

Mais avait-il le droit d’être égoïste ? Il secoua la tête, s’excusa pendant qu’il continuait de pleurer sans s’arrêter. J’aimerais te dire que je n’y arrive pas sans toi, j’aimerais t’avouer que je regrette mon comportement passé. J’aimerais que tu me pardonnes de ne pas en avoir fait assez malgré que tu aies pu me blesser. J’aimerais juste que tu puisses te retrouver et que cela suffira à mon bonheur de savoir que cela ira. Est-ce que ça ira ? Perdu dans le tourbillon de ses pensées, il lui relâcha le visage et plaqua ses mains sur le sien. Se cacha de sa vue car il ne parvenait pas à se calmer. En cet instant, il était plus l’ombre de lui-même qu’il n’ait pu être ce rayon de soleil dont on avait pu tant le nommer.

@sahan kwon

outfit - Il avait écrit cette lettre pour ne pas laisser son âme en peine. En soi, il ne lui devait rien, ils s’étaient séparés. Il avait apposé ses mots sur papier en état de bonne conscience et en espérant secrètement, oui, qu’il ne veuille le retrouver. À quoi avait pensé Sahan en découvrant l’appartement vide ? S’était-il dit qu’il l’attendrait malgré tout ? Il avait l’impression qu’ils tournaient en rond depuis qu’ils s’étaient égarés en chemin. Ils avaient vécu de merveilleux jours, insouciance jeunesse. Ça n’aurait pas durer, cela allait de soi. Les coups de foudre n’étaient que le chaos de l’amour et il en était venu à penser qu’ils auraient mieux fait de ne pas se rencontrer.
Car il avait été blessé et il l’avait vu chuter. Il l’avait vu perdre pied et il l’avait vu lui échapper. Il l’avait vu lutter, pauvre petit prolétaire qui avait cru pouvoir protéger le coeur d’un artiste princier. Alors il s’était poussé de lui-même, hors de son champ de vision, instinct naturel de survie. Il n’avait été question que de cela et il avait hurlé dans l’obscurité. Cela n’aurait pas dû se passer comme ça.
Où en était-il ? À pleurer une nouvelle fois devant lui parce que Sahan ne se l’autorisait pas. Foutaises. Il laissait les larmes déborder, secouer son corps fragile qui n’allait pas tenir longtemps debout. La pluie continuait de tomber, drue, et il était transi de froid. L’étreinte de Sahan ne lui avait pas apporté assez de chaleur ou les avait-il glacés tous les deux avec sa fragilité constante. Quand Sahan retrouva un chemin vers lui, son coeur papillonna sous sa poitrine, il sentit finalement la chaleur revenir à lui. Autant que Sahan ne continuait à faire l’effort de parler sa langue natale en ces retrouvailles difficiles qui se déroulaient entre eux.

« Okay. »

Ce fut tout ce qu’il parvint à articuler. Quelques instants plus tard, ils étaient au sec et il se demanda si cela avait été une bonne idée d’accepter. Mais il l’avait perdu une fois. S’il lui réchappait ? Si tu repars ? L’appartement était vide, constat troublant. Sahan était revenu en Corée du Sud, puis était venu jusqu’en Australie pour lui. Il frissonna et laissa tomber son sac au sol. Il s’avança, regarda autour de lui et remarqua qu’il mettait de l’eau partout autour de lui.

« Ah, sorry !, dit-il effaré, We are completely soaked, rit-il nerveusement, It’s a good apartment. »

Il le regarda, tremblant de froid de la tête aux pieds. Il s’enserra la taille en espérant se réchauffer, se mit à sourire maladroitement. L’ambiance restait tendue, ils ne savaient pas quoi faire ni l’un ni l’autre. Ils n’allaient pas s’effondrer s’ils se touchaient et, pourtant, c’était tout comme. Il ne s’était écoulé que depuis dix-huit mois depuis leur rupture et cela avait été les plus longs de toute son existence car, aujourd’hui, il serait incapable d’être à l’aise avec lui comme il avait pu l’être autrefois. C’était douloureux et, bien qu’il ait cessé de pleurer, il baissa le regard en sentant revenir les larmes.

@sahan kwon

outfit - Il ferait mieux de partir. Ils venaient à peine de se retrouver, il leur fallait du temps. Il ne savait pas ce qu’il en était de Sahan mais ses esprits suffoquaient. Il avait du mal à respirer convenablement, tôt ou tard il allait chuter. Est-ce que Sahan le rattraperait-il ? Il n’était pas aveugle, il voyait que cela était aussi dur pour lui car ils avaient toujours été chacun une faiblesse l’un pour l’autre. Le regard fixé sur un point dans le vide, il songeait qu’il allait trouver le courage et s’en aller. Il ne resterait pas, il ne lui infligerait pas d’autres souffrances. Il retournerait braver le mauvais temps et s’en remettrait calmement chez lui. Triste utopie. Peut-être la tranquillité se percevait-elle après la tempête, mais elle n’apparaitrait pas de sitôt dans son coeur après l’avoir retrouvé.
Il en avait rêvé avec tant de force que c’en était devenu des cauchemars. Aujourd’hui, face à lui, il était misérable. Il avait perdu du poids, trop, il ne représentait plus sa muse artistique avec tant de soin. Il n’était que peu certain que son retour dans son existence brisée ne soit une accalmie dans sa bataille constante intérieure. Tout était parti de cette renommée et de Sahan plongeant dans la drogue. Il avait été question de confiance plus que d’amour, alors pouvait-il lui refaire confiance ? Pas quand Sahan lui-même avait quitté le pays afin de se racheter en effectuant son service militaire et en l’abandonnant. Il n’arrivait pas à le percevoir autrement tout en se sachant fautif parce que, sinon, il ne serait pas incapable à ancrer son regard au sien.
Ce fut ce qui le poussa à ne pas partir. Sa lâcheté, propre et irréversiblement impure. Une serviette posée sur les cheveux, un sourire accordé comme une minime trêve et une proposition réchauffante. Sous cette eau brûlant tout son corps, que ressentait-il ? Il eut envie de hurler, d’aplatir ses poings contre le mur. Il ne fit que coller son front contre la surface froide et entourer son corps en espérant que la douleur ne cesse. Insupportable, car dans toutes ces rêveries, il avait omis tout ce que son être traverserait à coups tranchants. Il trouva les vêtements de Sahan, il les enfila en ayant l’impression d’avoir perdu toute conscience.

« I-I finished… », lui indiqua-t-il en venant le retrouver dans la cuisine.


Il jeta un coup d’oeil au thé. Il s’en approcha quand son ancien petit-ami sut se montrer une fois de plus le premier entreprenant. Il se vit alors jeter d’un revers de main la tasse brûlante au sol, morceaux éparpillés au sol représentant avec délicatesse affligeante toutes les émotions qui affluaient en masse en eux en ces retrouvailles déchirantes. Il n’en fit rien, il ne se le permettrait pas et il ne la toucha même pas. Il s’approcha plutôt de l’évier, effleura du bout des doigts la peinture écaillée et de la douceur retrouva place à son faciès émacié. Parce qu’elle fera partie intégrante de toi jusqu’à ce que tu ne disparaisses parmi les cieux.
Soudainement, une lueur fébrile éclaira la pièce pourtant bien éclairée. Il releva le visage, découvrit la baie vitrée menant à un balcon. Il s’en approcha, la pluie s’était un peu calmée. C’était autrement que le ciel déversait son accablement et la vue était époustouflante. Il ouvrit la porte, se faufila pieds nus jusqu’à la rambarde. L’orage gronda avec une puissance terrifiante jusque dans ses entrailles et il sursauta avec violence. Il ne bougea pas, il l’observa comme il avait appris à le faire parce que Sahan n’avait plus été là pour le réconforter les soirs houleux où les cieux se déchainaient.
Pourquoi parle-t-on de coup de foudre, Sahan ? Un éclair a-t-il zébré le ciel le jour où nous nous sommes rencontrés ? Le soleil trônait en maitre ce jour-là, chez nous. Malgré tout, je t’ai aimé au premier regard en sachant que ça ne ferait que s’accroitre au fil du temps.

« I’m sinking in the deep end, I’ll just try to cry myself to sleep. », chanta-t-il.


Il fredonna la suite, ferma à demi les yeux. Il ne se sentait pas mieux, ça irait. Simplement. Il se mit à sourire et quelques larmes retrouvèrent le chemin jusqu’à ses joues.

@sahan kwon