« Wound » libre

Le problème quand on passe son temps à faire le con et à provoquer les gens c'est qu'un jour ou l'autre on se fait exploser la gueule. J'avais fini par me faire exploser la gueule, je pissais le sang d'un peu trop d'endroits à la fois. J'attendais gentiment dans la salle d'attendre, mon débardeur blanc ensanglanté. Je me sentais terriblement ridicule et je priais pour ne croiser personne. « Putain c'est quand qu'on s'occupe de moi ?! » Je gueulais sur la secrétaire, j'en pouvais plus d'attendre. Je n'avais jamais rien trouvé de plus insupportable. Elle me lança un regard noir et me dit sèchement de patienter. Je détournais le regard, soufflant vivement. La plupart des gens me regardaient de travers et je leur jetais des regards mauvais. J'étais agacé, de m'être mis dans cette merde, mais aussi de devoir attendre pendant des heures.

Il m'était clairement insupportable de devoir attendre des heures sur une chaise pour trois points de sutures. J'étais profondément agacé, j'avais mal au crâne et l'autre qui ne se bougeait pas pour répondre à mes questions. Quand un mec m'interrompit en me disant la fermer, je me tournais vers lui, prêt à en découdre encore une fois. Je reconnus tout de suite Diego et je me marrais, comme un con. « T'aurais du la fermer toi par contre ! » Sous-entendu de son arcade bien amochée. Je remarquais malgré tout qu'il n'avait pas l'air très en forme, moralement parlant, mais ce n'était pas à moi d'aborder le sujet. Si il avait envie d'en parler il m'en parlerait, sinon je ferais toujours comme si je rien n'étais. Je m'assis à côté de lui, ignorant les regards courroucés que les gens me lançaient. Je parlais probablement beaucoup trop fort mais je ne m'entendais vraiment pas. Et puis j'ouvrais toujours ma gueule dix fois trop fort pour trois fois rien.

J'étais un habitué des lieux ce qui me rendait encore plus agacé durant l'attente. Je crois bien que je m'étais déjà cassé le nez une fois ou deux et j'avais quelques cicatrices partout sur le corps. Je n'étais pas très doué dans tout ce que je faisais, encore moins avec les relations humaines. Je reposais mon regard sur Diego, un grand sourire étirant mes lèvres. « Mais moi j'ai pas une belle gueule comme toi... » Je lui fis un clin d’œil, amusé, avant de poser mon regard sur le vieux type en face de nous. Je fus immédiatement dégoûté de cette vision de l'être humain : pour rien au monde je ne voulais finir comme ça. « Mec promets moi que tu me tueras si je deviens comme lui ! » Je lançais un regard désespéré à Diego : j'avais terriblement peur de vieillir et je ne m'en cachais pas. La maladie, le reste, je m'en fichais, mais je ne voulais pas ressembler à cette vieille loque.

Les grimaces de Diego me firent sourire : de toute façon j'avais trop de choses dans le sang pour sentir quoi que ce soit sur ma peau. J'avais l'impression d'être un esprit dans un corps robot. Mais ce n'était pas le cas malheureusement. Je lui jetais un coup d'oeil rapide, souriant. « Nan ça va je suis pas encore prêt là... » Y'avait trop de filles dans ce monde qui attendaient de me connaître pour mourir maintenant. Je suivis le regard de Diego en entendant ses paroles et je me marrais direct : la gueule de la nana était juste énorme. Elle était terriblement choquée et offusquée du comportement de Diego. Et lui en rajoutait des tonnes, et moi je me foutais de sa gueule, je pense que ça faisait beaucoup pour une petite créature comme ça. Elle finit par se barrer avec son mioche et je me tournais vers Diego, hilare. « Mais putain mec c'est quoi ces gens ! » En l'espace de quelques minutes on avait remarqué beaucoup trop de gens étranges.

Ce qui me rassurait, un peu, c'est qu'on était mutuellement agacé par cette éternelle attente. Et, lui comme moi, on avait réellement aucune patience. Je soupirais, suffisamment fort pour que la nana m'entende, tel un enfant capricieux qui n'a pas ce qu'il veut. Je suivis des yeux le bras de Diego et je fus intrigué par cette chose brillante à son poignet mais mon esprit se détourna rapidement de ça pour observer son arcade, sanglante à souhait. Je lui souris, taquin. « Tu veux un bisou magique ? » Je lui jetais un regard équivoque avant de reposer mon regard sur son bracelet. C'était un truc de femelle ça se voyait à trente bornes. Je fronçais les sourcils, étonné et en totale absence de compréhension. Je levais les yeux vers lui, attentif. « Tu me trompes ? » J'essayais de rester le plus sérieux possible, quoi que mes yeux devaient pétiller un peu trop pour que ce soit crédible. Mais ça me faisait bien marrer, intérieurement. Et puis j'étais curieux de savoir cette histoire de donzelle, surtout qu'elle devait être importante.

Diego ne répondit pas et je regardais ailleurs lorsqu'un infirmière arriva. Et l'autre alla la rejoindre, faisant le beau et me piquant ma place. « Arriviste. » Je le regardais s'en aller, boudeur, faisant mine de l'ignorer quand il se tourna vers moi pour me faire un clin d'oeil. Enfant que j'étais. J'attendis impatiemment qu'il revienne, tapant du pied. J'avais horreur d'attendre de base, surtout en sachant qu'il m'avait grillé ma place. Il finit par revenir et sa remarque me fit sourire. « J'suis sûr qu'elle aimera ma gueule cassée. » C'est vrai que la demoiselle se fichait royalement de ma gueule, se contentant de s'occuper de moi. Enfin réparé, je rejoignis rapidement Diego et lui jetais un regard vif. « Elle suce bien en plus ! » Je lui avais dit ces quelques mots à l'oreille, faisant preuve d'une rare discrétion.

Je me marrais avec Diego et me pressait totalement pour me casser de cet endroit. Je souris à sa proposition et l'attrapais par les épaules. « Carrément mec ! » Et ouais c'était évident. Je lui souris, sincèrement heureux de me dire que j'allais passer du temps avec cet abrutis fini. Un peu comme moi quoi...