guardian angel (ou presque) + diego.

Le visage de Diego se retrouva à quelques centimètres du sien mais la jeune fille ne bougea pas, absolument pas impressionnée. Son regard resté ancré dans celui de Diego et un fin sourire étirait ses lèvres. Honnêtement, elle se moquait bien qu'il la découpe. Elle ne tenait absolument pas à la vie. Ceci expliquait sans doute pourquoi elle l'avait suivi jusqu'ici sans aucune crainte... Elle n'avait rien à perdre, de toute façon. « Fais-le, je t'en prie. » Elle avait répondit sur le même ton que lui, le plus doucement possible. Elle n'était pas choquée par son attitude. Elle le trouvait plutôt marrant, en réalité. Et puis, il la distrayait. Pour une fois, elle ne passait pas la soirée seule. Et contre toute-attente, Diego était plutôt de bonne compagnie. En le voyant se lever, Maybelle fit de même. Elle voulait pouvoir l'aider au cas où il n'arriverait pas à se diriger jusqu'à la cuisine. Il répondit à sa question en inventant une histoire plutôt marrante et elle fit mine de boire ses paroles, comme une gosse qui gobe une histoire incroyable. « Oh. Ouais... Ça tient la route ! », fit-elle en souriant. Puis il lui demanda plus ou moins directement son prénom. « Maybelle. » Elle lui adressa un sourire. Elle n'aimait pas parler d'elle, certes, mais elle n'avait rien contre le fait de dévoiler son prénom. C'était le minimum de la politesse. Elle le regarda quelques secondes puis elle reprit la parole. « Tu me dis si tu veux que je partes, hein. » Elle ne voulait pas surtout pas s'imposer. Si ça se trouve, il préférait passer la soirée seul plutôt qu'avec une petite blonde curieuse et inintéressante dans son genre.

Elle ne le connaissait absolument pas et pourtant, elle saviat très bien qu'il n'était pas du genre à s'empêcher de dire ce qu'il pensait. Elle l'avait vu à la façon dont il lui avait parlé lorsqu'elle l'avait abordé. S'il voulait la foutre dehors parce qu'il la trouvait trop ennuyeuse, il n'hésiterait sûrement pas à le lui faire comprendre clairement. Mais elle avait quand même de le déranger. À vrai dire, elle se demandait toujours ce qu'elle faisait là... Pourquoi l'avait-elle suivi jusqu'ici ? C'était de l'inconscience pure et simple. Pourtant, elle n'avait pas vraiment envie de partir. La compagnie de Diego était toujours plus attrayante que la solitude de sa chambre. Alors qu'un silence s'installait, Diego revint vers le canapé et commença à... Mon dieu. « Est-ce que c'est... » Elle ne termina pas sa question, qui était plutôt rhétorique qu'autre chose. Oui, c'en était. Elle ouvrit de grands yeux, incapable de masquer ses émotions. Jamais de sa vie elle n'avait fumé, pas même une cigarette, alors le voir là en train de se rouler un joint comme si c'était la chose la plus normale du monde la perturbait un peu. Une fois de plus, elle prit conscience qu'elle était complètement déconnectée du monde. Elle n'avait rien en commun avec les jeunes de son âge. Maybelle était une enfant emprisonnée dans un corps de femme, voilà tout. Elle n'avait aucun attrait pour les choses que les gens de son âge faisaient. Et c'était très perturbant de se rendre compte à quel point elle était décalée, comme sortie tout droit d'une autre planète. Elle remarqua bien évidemment les regards amusés que Diego lui lançait mais elle ne fit aucun commentaire. Elle était plus que mal à l'aise - et elle se faisait du souci pour lui. « Tu devrais pas », fit-elle avec hésitation en levant les yeux vers lui. Elle avait une lueur d'inquiétude dans le regard. Elle se demandait pourquoi il faisait tout ça. Boire, se battre, fumer des joints... Cela ressemblait fort à de l'autodestruction. « Tu es déjà super mal en point, ça va t'achever... » Bon, le mot était peut-être un peu fort. Mais elle était persuadée que fumer un joint ne lui ferait pas de bien. Surtout pas après la soirée qu'il avait passé. Malgré tout, elle redoutait qu'il change une fois de plus d'attitude et qu'il lui dise de se mêler de ses oignons. Il n'aurait pas tort, cela dit... Il était assez grand pour savoir ce qu'il faisait. Mais elle ne pouvait s'empêcher de jouer les moralisatrices.

Diego se moquait ouvertement d'elle, comme si elle était la dernière des idiotes. Et c'était sûrement le cas d'ailleurs. Qu'est-ce qu'elle croyait, qu'il allait se décider à arrêter de fumer juste parce qu'elle le lui avait demandé ? C'était ridicule. Elle n'était personne. Pourquoi s'obstinait-elle à vouloir apporter de l'aide à des gens qui n'en avaient même pas besoin ? que cherchait-elle à se prouver ? Qu'elle valait quelque chose ? C'était raté. De toute façon, comment pouvait-elle prétendre être capable d'aider quelqu'un alors qu'elle n'était même pas capable de prendre soin d'elle-même ? Pitoyable. Ferme la une bonne fois pour toute et tout ira bien. Voilà ce que sa conscience lui criait. De toute façon, qu'elle parle ou pas, quelle différence ? Elle ne disait jamais rien d'intéressant. Une douleur lancinante envahit sa poitrine et elle soupira malgré elle. Un soupir à peine audible, un soupir de désespoir. Elle pensait que son cœur était mort depuis longtemps et qu'elle était incapable de ressentir quoi que ce soit. Mais elle s'était trompée. Ce sentiment désagréable venait à nouveau de pointer le bout de son nez, elle se sentait à nouveau vide. Insignifiante, nulle, inintéressante. Fort heureusement, elle savait assez bien jouer la comédie pour continuer à sourire quand les larmes menaçaient ses yeux. Il ne manquerait plus qu'elle se mette à chialer... Elle était tellement pathétique. Elle aurait aimé avoir assez de répartie pour lui répondre quelque chose. Pour lui faire comprendre qu'il n'avait pas à lui parler comme ça, qu'elle ne méritait pas qu'il se foute d'elle de cette façon alors qu'elle lui était venue en aide. Mais elle en était incapable. Après tout, elle n'était que Maybelle, la petite blonde sympathique et toujours souriante qu'on aime bien mais qu'on oublie vite. Celle dont l'on peut se foutre à longueur de journée puisque de toute façon, "elle est tellement gentille qu'elle ne dit rien". Elle acceptait tout. Elle se contenta donc de lui adressa un petit sourire qui sonnait faux tant ses grands yeux bleus étaient empreints de tristesse. Puis elle baissa la tête et tortilla machinalement ses doigts. Elle cherchait à se donner une contenance, ni plus ni moins. Diego devait la trouver tellement godiche qu'elle en aurait presque rigolé. Elle aurait pu partir, bien sûr, mais pour être honnête elle avait trop peur pour le laisser seul. Entre ses blessures, l'alcool qu'il avait ingurgité et le joint qu'il était en train de consommer, mieux valait ne pas le laisser seule. De toute façon, elle n'avait nulle part d'autre où aller. Son colocataire n'était pas là pour la soirée et elle savait très bien ce dont elle était capable lorsqu'elle était seule, livrée à elle-même... Mieux valait garder un œil sur Diego, juste au cas où. Et puis, servir de punching-ball humain avait du bon. Au moins, elle ne se sentait pas complètement inutile. Perdue dans ses pensées, elle n'avait pas remarqué que le regard de jeune homme était de nouveau braqué sur elle. Elle tourna ses yeux étonnamment brillants vers lui et secoua légèrement la tête pour lui faire comprendre qu'elle n'en voulait pas. Non, elle ne voulait pas fumer. Elle ne n'essaierait plus de l'empêcher de faire n'importe quoi s'il en avait envie mais elle n'allait pas le suivre pour autant. Elle se fichait bien qu'il la trouve ridicule, has been, insignifiante ou conne à pleurer. Elle l'était, de toute façon.

Le soupir de Diego assena le coup de grâce. Elle savait très bien ce qu'il pensait : qu'elle était désespérante. Qu'il se rassure, elle en avait conscience et elle était d'accord avec lui. Elle le regarda se lever et pester contre la baie vitrée sans rien dire. Bizarrement, elle n'arrivait même pas à avoir peur de lui. Imprévisible, ça oui. Il semblait changer d'humeur toutes les quinze secondes, passant du type sympa au mec le plus froid qui puisse exister. Mais elle ne le pensait pas dangereux pour autant. Peut-être qu'elle se trompait et qu'elle aurait dû faire preuve de plus de méfiance... Ou peut-être pas. La méfiance ne se faisait vraiment pas partie du caractère de Maybelle - et elle se faisait souvent avoir à cause de cela. Elle était aussi naïve qu'une enfant de six ans, aussi douce qu'un agneau. Diego resta quelques temps sur le balcon alors qu'elle restait dans le canapé à penser à tout un tas de choses inutiles. Elle ne comprenait rien à cette soirée. Elle ne comprenait pas ce qu'elle faisait là, assise sur le canapé de cet inconnu. Le jeune homme revint finalement vers elle et elle leva les yeux vers lui, se demanda ce qu'il allait encore pouvoir lui dire. Mais contre toute attente, il se précipita vers elle... la serrer dans ses bras. D'abord étonnée, Maybelle ne fit pas le moindre mouvement, se contentant de rester figée dans les bras de Diego sans rien dire de peur de le faire changer d'humeur une fois de plus. Puis, en l'entendant murmurer "pardon" à plusieurs reprises, elle passa à son tour ses bras autour de lui, bien décidée à lui rendre son étreinte pour lui montrer que ce n'était pas grave. La jeune femme le serra un peu contre elle, lui donnant l'un de ses câlins magiques - enfin selon Casey - qui faisaient nous sentir mieux en un clin d’œil. Elle adorait les câlins. Une bonne étreinte faisait bien plus que n'importe quel mot. Elle relâcha finalement Diego et lui adressa un petit sourire. « Tu es... Surprenant. » Une fois encore, aucune méchanceté. Ce n'était pas une critique mais un constat, fait sur un ton léger. Il était surprenant, c'était vrai. Il passait d'un état à un autre sans qu'elle ne comprenne comment ni pourquoi mais au final, il ne semblait pas méchant. Juste un peu torturé. Soucieuse de repartir sur de bonnes bases, elle fixa les yeux bleu de Diego sans perdre son sourire. « C'est rien, t'as pas à t'excuser. C'est moi, j'aurais pas dû. » C'était à elle de s'excuser, oui. Elle n'avait pas se montrer si intrusive, elle n'avait pas à lui dire que fumer des joints n'était pas bon pour lui. Il était assez grand pour le savoir tout seul. Et surtout assez grand pour savoir ce qu'il avait à faire. « Désolée », fit-elle finalement, ses grands yeux scrutant toujours ceux de Diego. Elle regarda autour d'elle quelques secondes avant de reporter son attention sur le jeune homme. « Tu veux que je parte ? » Maybelle et son obsession de déranger. Elle avait toujours l'impression qu'elle gênait les gens. Et elle détestait cela. Elle n'aimait pas l'idée d'imposer sa présence aux autres. Si Diego voulait qu'elle s'en aille - et elle le comprendrait très bien parce qu'elle ne devait pas être de très bonne compagnie - alors elle le ferait sans hésiter.

Maybelle avait bien du mal à cerner ce Diego. Il était capable de passer d'un extrême à un autre en une fraction de seconde et c'était plutôt... déstabilisant. Pour autant, elle ne pouvait s'empêcher de le trouver attachant, d'une certaine manière. Elle était persuadée qu'il n'était pas aussi mauvais qu'il le laissait paraitre. Bon, d'accord. Maybelle avait une vision un peu édulcorée du monde. Elle était persuadée que tout le monde avait bon fond, qu'aider les autres était la chose la plus importante sur terre... Un vrai bisounours. Elle le regarda s'allonger, réfléchissant si elle devait partir ou non. Mais elle était persuadée qu'il était incapable de rester seul. Ce n'était pas méchant, mais elle avait l'intuition qu'il enchaînait les conneries quand il se retrouvait face à lui-même... Comme elle, d'une certaine manière. Sauf qu'ils n'avaient pas la même façon de s'autodétruire. Elle s'agenouilla à côté du canapé, offrant un petit sourire à Diego. « Je pense que t'as besoin de quelqu'un pour veiller un peu sur toi, alors je reste. » Elle ne pouvait pas le laisser là. Elle culpabiliserait trop. Jouer les anges gardiens lui donnaient l'impression d'être utile, au moins un peu. Alors elle resterait là et garderait un œil sur lui jusqu'à ce qu'il se réveille. Elle remarqua qu'il lui avait laissé une petite place auprès de lui mais elle hésita à s'y installer. Elle n'était pas très familière avec ce genre de pratique et elle était gênée à l'idée de s'allonger à côté de lui dans ce canapé si restreint... Mais elle avait peur qu'il se vexe. Elle s'accorda encore quelques secondes de réflexion puis s'installa finalement à côté de Diego, tellement timidement que c'en était sûrement adorable (ou complètement ridicule, au choix). Elle se pinça les lèvres en se rendant compte que leurs corps étaient pratiquement collés l'un à l'autre. Cette proximité soudaine la gênait. Elle n'était pas vraiment du genre à se rapprocher autant des garçons, en règle générale... Manquant de tomber en arrière tant elle manquait de place, elle s'agrippa délicatement au bras de Diego. « Désolée », murmura-t-elle en grimaçant, lâchant de suite son bras. Elle le regarda quelques secondes avant de chuchoter doucement : « Ça va ? » Elle ignorait pourquoi elle parlait tout doucement. Peut-être pour ne pas le déranger. Ou parce qu'elle avait peur qu'il l'envoie bouler encore une fois. Mais elle s'inquiétait réellement. Entre les coups, l'alcool et le joint, il avait de quoi se sentir mal.

Diego n'avait pas besoin d'elle. Ce n'était pas une surprise, elle le savait. Personne n'avait jamais eu besoin d'elle, pourquoi ce parfait inconnu changerait-il la donne ? Pour autant, il lui demanda de rester auprès de lui et elle s'exécuta docilement. Elle n'était pas très à l'aise à l'idée d'être allongée à côté de lui, encore moins lorsque son bras se posa contre son dos pour l'empêcher de tomber à nouveau. Elle était tactile, certes... Mais également très pudique. Et ce genre de contact physique avec un garçon qu'elle connaissait à peine la gênait. Quand Diego releva sa manche, Maybelle ferma doucement les yeux. Elle se sentait terriblement mal. Rares étaient les personnes qui étaient au courant et savoir que ce garçon qu'elle connaissait à peine savait la vérité était assez... Gênant. Maybelle planta ses yeux dans les siens en entendant sa réplique. « Chacun sa façon de se détruire. » Encore que c'était totalement différent. Fumer des joints, boire plus que de raison, finir à moitié mort dans la rue, ce n'était pas se lacérer les bras avec une lame de rasoir. Et puis même. À ses yeux, la vie de Diego valait bien plus que la sienne et ses actes étaient par conséquent plus graves. Maybelle se moquait bien que son bras ne ressemble plus qu'à un amas de cicatrices et de coupures grossières. Elle se moquait bien de vivre ou de mourir, en réalité. Mais elle était persuadée que Diego ne méritait pas ça. Elle était contente qu'il ne pose pas de questions. Il avait l'air de se moquer éperdument de ses cicatrices et cela lui convenait très bien. Au moins, il n'allait pas chercher à savoir pourquoi elle en était arrivée là. Gardant son attention sur Diego, elle lui adressa un petit sourire. « Tu devrais essayer de dormir un peu. » Il allait probablement s'énerver et lui rappeler qu'elle n'avait aucun ordre à lui donner mais c'était plus fort qu'elle : son côté maman poule reprenait le dessus. Même avec les gens antipathiques comme Diego. Sur ces bonnes paroles, elle se leva délicatement et alla s'installer sur l'autre canapé. Elle pouvait très bien garder un œil sur Diego à distance, non ? De toute façon, il serait beaucoup mieux seul pour se reposer. Et elle, elle ne serait plus gênée de sentir son corps près du sien.

Maybelle esquissa un sourire malgré elle. C'est vrai, ils pourraient se filer des tuyaux. Voire même écrire le guide parfait des dépressifs suicidaires qui cherchent à s'autodétruire. Elle reposa ses yeux sur Diego lorsqu'il lui conseilla plus ou moins d'arrêter de charcuter. « Et toi, tu devrais arrêter de fumer des joints. Et de boire autant. Et de te faire casser la gueule par des sales types accessoirement. » Encore et toujours son ton jovial. Ce n'était rien qu'une plus qu'une plaisanterie, elle ne cherchait pas à lui faire la morale. Enfin, pas aussi directement qu'elle l'avait fait au début en tout cas. Bizarrement, elle se sentait proche de lui. C'était idiot parce qu'ils n'avaient certainement rien en commun mais le fait qu'il cherche à se détruire comme elle le faisait les rapprochait. Ils avaient la douleur en commun et ce n'était pas rien. Diego finit par la rejoindre sur l'autre canapé, posant sa tête sur le dossier pour la regarder. Elle posa ses yeux sur lui, un petit sourire aux lèvres. Il semblait s'amuser de sa gêne et elle ne pouvait pas lui en vouloir. La situation était assez cocasse. « Je sais. » Mais cela ne l'empêchait pas d'être encore et toujours mal à l'aise. Elle n'avait pas l'habitude de se retrouver seule avec un garçon - plutôt séduisant qui plus est, elle devait l'avouer. Elle n'était pas de ces filles sûres d'elles qui jouent de leurs charmes pour séduire tous les mecs qu'elles croisaient. Maybelle était plus une gamine innocente et complexée qu'autre chose. Elle savait que Diego ne tenterait rien et qu'il n'était certainement pas attirée par elle, mais le simple fait de se retrouver seule avec un garçon la rendait nerveuse. « Tu dois me trouver ridicule », constata-t-elle en tournant la tête vers lui. Elle avait toujours un sourire aux lèvres, réalisant à quel point elle était déconcertante. Elle ne disait pas ça pour se dévaloriser mais parce qu'elle ne devait sûrement pas être le même genre de filles qu'il rencontrait d'habitude.