ce qui se passe à vegas, reste à vegas ~ aleja

Alfie a toujours aimé voyager. Il a d'ailleurs passé les cinq dernières années de sa vie à travers le monde, allant de continent en continent. Vegas, il n'a cependant jamais fait. À l'époque, c'était une ville qui ne l'attirait pas car il n'avait pas les moyens de se payer un voyage jusqu'au paradis du casino et des mariages arrangés le jour-même. Sauf que depuis qu'il a élu domicile à Bowen, ses petits boulots lui avaient permis d'économiser assez pour s'offrir une virée là-bas. Et pourtant, cette virée était loin d'être prévue. Elle a été décidée sur le tas, avec Freja. Alfie et elle sont souvent comme ça, à parler ou faire des trucs totalement improbables. Après tout, ça correspond bien à ce qu'ils sont, à leur relation. Une vie instable pour des personnes instables, incapables de savoir si ils s'apprécient ou pas. Pour une fois dans sa vie, Alfie s'est levé tôt. D'un coté, il est impatient. Il a tellement entendu parler de Las Vegas, et il sait pertinemment que cette ville est connue pour ses nombreux secrets. À croire que franchir la frontière de ce lieu permet à tout le monde de commettre n'importe quelle chose qu'il ne ferait pas en règle générale. Alfie compte bien respecter la tradition. Une fois à l'aéroport, son précieux ticket acheté, il se met à la recherche de Freja. Il ne met pas longtemps avant de trouver la blondinette, tirant une grosse valise derrière elle. Le sac d'Alfie contient peut-être moins de vêtements, c'est un mec après tout.  « Carrément prêt. » Il l'accompagne pour acheter son ticket, tenant précieusement le sien dans sa main droite. Sa réflexion lui tire un sourire, et il hoche docilement la tête.  « Ça me convient très bien. » Une fois le ticket acheté et sa valise partie sur le tapis roulant en direction de l'avion, Alfie se dirige vers les portes d'embarcations d'un pas légèrement précipité. Comme avant chaque voyagé, il est tout excité et a du mal à tenir en place. Pire qu'un gosse.  « J'espère qu'on aura droit à un truc à manger, j'ai vraiment la dalle. » Le voyage n'est pas la seule raison qui rend Alfie si impatient. Il y a aussi... l'avion. Appareil dans lequel il n'est jamais monté. Une fois aux portes, ils se font guider par une hôtesse de l'air qui leur indique leur place. Alfie s'installe à coté de Freja et regarde tout autour de lui. L'angoisse du premier vol commence à s'emparer de lui, et il se met à jouer nerveusement avec sa ceinture de sécurité. Le vol promet d'être long.

Assez haut. Alfie déglutit. Ça monte jusqu'à quelle hauteur ces trucs là ? Et si jamais ils se crashaient ? Il se remémore le film qu'il a vu une fois avec sa petite sœur dans lequel l'avion prenait feu avant d'exploser en plein milieu du vol, comme ça, sans raison, juste parce que ça le tentait bien. Les paroles de Freja le sortent de ses pensées. « Non j'ai pas peur, bien sûr que non! » Alfie fronce les sourcils et lâche la ceinture. Mignon, bien sûr, et puis quoi encore ? Il a pas cinq ans bon sang, c'est un homme qui a intérêt à se reprendre si il ne veut pas se ridiculiser devant elle. Étrangement, le contact de la peau de Freja sur sa joue suffit à le détendre. Un petit peu. Après tout, si il mourrait, elle aussi et ce serait bien fait elle car c'est de sa faute si ils se retrouvent là-dedans. Il divague totalement. Respire Alfie, ça va aller, ce n'est que... Il regarde l'écran devant lui, accroché au siège d'en face. 16 heures ?!  « Et ben, on a intérêt à trouver de quoi passer le temps. » Et tel un miracle, Freja lui sort la phrase qui lui enlève toute peur de cet interminable voyage. À boire. Comment refuser?  « Je peux simuler une crise d'angoisse si tu veux, on aura une bouteille chacun. » Il esquisse un grand sourire amusé et se laisse aller dans son siège. Un bruit assourdissant se fait alors entendre, ce qui le crispe à nouveau. L'hôtesse de l'air leur fait comprendre que l'appareil va bientôt décoller, encore cinq bonnes minutes, le temps que tout le monde soit bien installé, avec le décès du garçon. Effectivement, Alfie aurait bien besoin d'un verre là tout de suite. Ils peuvent bien se le permettre vu leur destination. Avant même d'avoir la réponse de Freja, il fait de grand signe en direction de l'hôtesse qui se dandine joyeusement dans leur direction.« Que prendrez-vous Ma Dâme? » lui demande-t-il en la regardant, insistant sur le "a" sans trop savoir pourquoi il vient de prendre cet anglais de bourge anglais.

Freja, c'est sa bouffée d'air frais. Être avec elle, c'est comme s'effacer du reste du monde pendant un moment. Malgré les coups de gueule et les quelques insultes rarement bien méchantes qui fusent de temps en temps entre eux, Alfie doit avouer qu'il a fini par quelque peu s'y attacher, à cette fille. Elle le fait sourire, parfois même rire, elle l'aide à se vider la tête et ce petit voyage tombe justement à pique avec tout ce qui se passe actuellement dans sa vie. Comme à chaque fois, elle le sauve des problèmes du quotidien, elle l'emmène loin de toutes ces emmerdes, littéralement cette fois. Une fois l'hôtesse à leur niveau, Freja demande du Passoa. Un cocktail de fille, quoi. Puisqu'elle l'a mis au défi quelques minutes plus tôt de l'impressionner avec son jeu d'acteur, Alfie se sent obligé d'en faire des caisses pour au moins essayer de la faire rire. Il plante son regard dans celui de l'hôtesse et demande d'un ton très sérieux. « Servez-vous du champagne dans cet avion ? Ma charmante compagne et moi aimerions fêter quelque chose de très important aujourd'hui. » Il glisse un regard en coin à l'intention de Freja tout en essayant de garder son sérieux. Si elle se met à rire, il va rire aussi et foirera sa mise en scène. La pauvre hôtesse semble totalement désemparée face à sa question, et se met à bégayer. Alfie pousse un soupir. « Écoutez, je suis le fils de celui qui possède votre compagnie. Si vous ne m'apportez pas mon habituelle bouteille de champagne, mon père risque d'être très, très déçu. » Il n'y croit pas, au fond ce n'est que pour s'amuser qu'il fait ça. Alors qu'il ne s'y attend pas du tout, la fille, gênée, hoche la tête et bredouille qu'elle va leur chercher tout ça. Il se tourne vers Freja, l'air agréablement surpris.« Alors, convaincue ? » lui demande-t-il en faisant semblant d'être totalement confiant alors, qu'au fond, ce voyage commence à le rendre aussi excité d'un gosse qui va à Disneyland. L'hôtesse ne met pas longtemps avant de leur apporter deux coupes ainsi que le fameux cocktail commandé par Freja quelques minutes avant qu'il ne décide de faire son cinéma. Alfie prend une des coupes et la lève pour trinquer avec elle, un grand sourire accroché aux lèvres.

Le simple contact de la main de Freja sur son bras a suffit à dissiper sa peur de l'avion. Seul, il n'aurait certainement pas été capable de monter dans cet engin. Et puis, ils avaient réussi à trouver de quoi s'amuser même en étant dans un avion, ce qui fait presque passer ce qui est censé être pour lui un moment de stress intense en une vraie partie de plaisir. Malgré l grand succès de son jeu d'acteur, Freja ne semble pas convaincue. Ou du moins, c'est ce qu'elle essaie de lui faire croire. Alfie fait semblant d'être choqué par ses paroles. « Franchement, tu me vexerais presque, » ment-il, une petite moue triste accrochée aux lèvres. La réflexion de Freja fait cependant disparaître cette moue qui, rapidement, laisse place à un grand sourire. « Tout ce que je veux ? Tu m'intéresses là. » Évidemment, il ne va pas pousser le jeu trop loin. Si il interpellait encore une fois l'hôtesse, celle-ci finirait par se rendre compte que ces deux-là ne sont pas louches et risquerait bien de le jeter de l'avion en plein vol. Ou de les enfermer dans la soute à bagage, Alfie ne sait pas vraiment quelles sont les punitions infligées à ceux qui foutent le bordel dans un avion. Leurs deux coupes se cognent dans un petit bruit cristallin, et Freja prononce encore une fois une phrase qui fait sourire Alfie sans qu'il ne puisse s'en empêcher. C'est un sourire amusé, un sourire sincère qui illumine son visage et qui donne l'impression qu'en cet instant précis, Alfie est bien, heureux. « À notre futur ensemble ! » répond-t-il avant de boire une gorgée de son verre. Tout ce cirque en valait la peine, le champagne n'est vraiment pas mauvais.

(je m'autorise à faire atterrir cet avion )

Plusieurs heures et quelques verres plus tard, l'avion finit par se poser sur le sol. Le trajet a duré moins longtemps que ce à quoi Alfie s'attendait, il n'a pas vraiment vu ces seize heures passer. Il détache sa ceinture après l'autorisation de l'hôtesse, se lève, et fait signe à Freja de passer devant. « Après vous mademoiselle, » lui dit-il en bon gentleman.

C'est ça qui est bien avec Freja. Quoi qu'il fasse, quoi qu'il dise, elle trouve toujours un moyen pour non seulement rentrer dans son jeu, mais aussi pour le rendre encore plus intéressant. Elle se fait passer pour sa femme, celle qui lui promet tout ce dont il désire une fois arrivés. Alfie retient cette proposition, se disant qu'il pourrait bien l'utiliser à un moment ou un autre de leur petite escapade. Une fois arrivés, ils descendent de l'avion et se précipitent hors de l'aéroport, trop excités à de l'idée de découvrir Vegas. Alors qu'il se perd dans le contemplation des hauts bâtiments, Freja réclame un hôtel de luxe. Il tourne la tête vers elle et hausse un sourcil. « Tu crois que j'ai un GPS intégré qui va nous guider à travers le meilleur hôtel de la ville ? » Il n'a pas dit ça méchamment, plutôt pour la taquiner un peu. Quand elle lui dit qu'elle ne veut pas dormir seule, il hausse les épaules. « Mais je veux bien me dévouer si tu as peur d'être toute seule, petite princesse. » Parce que c'est qu'elle commence à se faire exigeante, la demoiselle. De l'autre coté de la rue, Alfie remarque alors une sorte de motel qui n'a pas l'air d'être trop minable. Il fait signe à Freja de le suivre et et traverse la rue en direction du bâtiment. « J'espère que ceci conviendra à la Duchesse de Bowen, » dit-il en la regardant du coin de l'oeil alors qu'ils franchissent les portes du motel. Même si ce n'est pas un hôtel cinq étoiles, l'endroit est plutôt cosy et convient parfaitement aux yeux d'Alfie. Il s'approche du guichet d'accueil et, sans demander l'avis de Freja, prend une chambre. Il reçoit une clé qu'il glisse dans sa poche et prend les escaliers menant au premier étage, là où se trouve leur chambre. Une fois arrivé devant la porte, il l'ouvre et tombe nez à nez avec une petite chambre pas très grande, mais vachement bien aménagée. Il pose sa valise dans un coin et se laisse tomber sur le grand lit. « On y est ! » lâche-t-il dans un soupir de soulagement.

Après avoir passé plus de cinq ans à voyager à travers le monde, de motel en motel, Alfie a fini par s'y connaître dans ce domaine. Il savait que ce genre de bâtiment aux allures douteuses de l'extérieur cachait parfois de très belles chambres, pas très grandes mais aux coussins moelleux et dotées d'une salle-de-bain propre. Ou bien de cafards, quand il n'avait pas de chance. Suite à la question de Freja, Alfie se redresse sur ses coudes et la regarde vider sa valise. Il devrait faire pareil mais, actuellement, il a vraiment la flemme. Alors il se contente de la regarder. Freja semble si enthousiaste que cela illumine son visage. Sans s'en rendre compte tout de suite, Alfie se retrouve à sourire devant elle. Ce voyage, il est content de le faire avec elle. Freja a la même âme aventurière que lui, ce même coté "je ne réfléchis pas, j'agis". Et puis, elle est mignonne aussi, un peu. En réalisant qu'il la fixe depuis plusieurs secondes, Alfie se lève d'un bond du lit et s'étire, l'air de rien. « Je veux découvrir Vegas, quelle question !» Il fait quelques pas jusqu'à une table sur laquelle est déposée un dépliant montrant tout ce qu'on peut faire ou visiter dans la ville. « Tiens, toi qui voulais quelque chose de luxueux, le Bellagio ça te dit ? » demande-t-il en prenant un accent italien qui, au final, a plutôt une consonance espagnole. « C'est un casino, mais je pense que tu t'en doutais, » ajoute-t-il en relevant les yeux vers elle. Alfie se dirige vers sa valise et l'ouvre. Tout au-dessus, il avait mis quelques chemises achetées récemment, afin de ne pas les froisser. Il ouvre une des poches et sort un nœud papillon bordeaux qu'il place devant son cou. « Ce soir, on se la joue Mr. et Mrs Smith. »

Il n'avait suffit que de quelques secondes où il s'était perdu dans ses pensées en la regardant sans vraiment le faire exprès pour qu'elle le remarque. Elle lui a demandé pourquoi, mais Alfie n'a pas répondu. Il s'est contenté de dévier la conversation en parlant de ce fameux casino. L'idée semble emballer Freja qui commence à se changer. Devant lui. Alfie n'a qu'une chemise à mettre, ce n'est pas comme si il finissait en caleçon. Sauf que voir son amie en sous-vêtements, ça lui fait une sorte de choc électrique dans le cerveau. Regarde pas, du con. Il se concentre sur son noeud papillon qu'il tente d'attacher avant d'à nouveau poser les yeux sur une Freja en robe. « Wow.» C'est tout ce qu'il trouve à dire. Il ne se souvient pas de l'avoir déjà vue aussi bien habillée. Elle lui demande de fermer cette fameuse robe, le laissant voir son dos nu. Avec toute la délicatesse du monde, il remonte la fermeture jusqu'à sa nuque et fait disparaître sa peau sous un tissu rouge. « Prêt! » Clame-t-il en lui proposant son bras pour sortir de la chambre, en bon gentleman. Alfie prend la clé de la chambre dans sa poche et ils quittent le motel. Dehors, il réussit à vite appeler un taxi et ouvre la portière à Freja avant de se faufiler à coté d'elle. « Au Bellagio s'il vous plaît, » demande-t-il. Prendre un taxi, aller où il veut rien qu'en prononçant un nom de bâtiment, Alfie pourrait presque se sentir américain. La voiture démarre et il se laisse tomber dans le fond de la banquette avant de jeter un coup d’œil à Freja. « Au fait, t'es très en beauté ce soir. » Il lui sourit avant de regarder en direction de la route.