Maybe i'll get drunk to feel a little in love (Jay)

Elle voit flou. C'est la première fois depuis des mois, peut-être même des années, qu'elle se retrouve dans cet état. Ses pieds la maintiennent à peine au sol, sa vision est trouble, et sa tête est prête à imploser. Elle a trop fait la fête, d'abord avec ses amis, puis avec des inconnus qui ne cessaient de lui offrir des verres. Théia commence à fatiguer, et à ne même plus être sûre de comment elle va savoir rentrer chez elle. Elle refuse le verre qu'on lui propose et se dirige vers la porte de sortie de la boîte, la tête comme un sceau. Une fois dehors, l'air frais lui fait du bien. Elle dégage son visage des nombreuses mèches de cheveux qui lui collent à la peau et essaie de faire quelques pas sans trébucher. Sauf que, à peine quelques mètres plus loin, elle percute quelque chose. Théia lève le yeux, et découvre que ce quelque chose est en réalité quelqu'un. Un homme, grand, très charismatique. Elle sourit naïvement, comme une ado devant un beau garçon. « Désolée, » bredouille-t-elle en se redressant du mieux qu'elle le peut. Elle n'aurait pas dû boire autant, l'alcool ne lui a jamais réussi et a toujours tendance a enlever le peu de charme qu'elle est parfois capable d'avoir. Sans savoir pourquoi, elle reste plantée devant lui plutôt que de continuer son chemin. « Waw. Quelle chance j'avais de tomber sur un beau garçon à cette heure-ci en pleine rue ? Il a fallu que je sois dans cet état, évidemment. » Elle est sûrement en train de se ridiculiser sans même s'en rendre compte. L'alcool la fait parler, et elle ne réalise pas toutes les bêtises qu'il arrive à lui faire dire. « Je vais maintenant me maudire dans mon lit. Si j'arrive à le retrouver. Et ma maison aussi. Ou mon appartement, je ne sais plus ! » Théia hausse les épaules puis lève les yeux au ciel pour regarder les étoiles comme si cela allait suffire à lui indiquer le chemin vers sa maison.

Sa façon de lui parler et de tenir ses épaules la font se sentir et soulagée, et encore plus mal à l'aise. Théia n'aime pas être saoule, c'est d'ailleurs pour cette raison qu'elle ne boit presque jamais. Sauf que ces derniers temps, le premier anniversaire de la mort de Wallace, son meilleur ami, a crée chez elle un besoin constant de faire des choses dont elle n'a pas l'habitude. Sortir en fait évidemment partie. Théia lève lentement les yeux vers l'inconnu et esquisse un sourire gêné. Elle n'ose pas parler, elle a peur de ne pas réussir à contrôler les bêtises qui peuvent sortir de sa bouche. Elle baisse alors les yeux, et remarque cette petite boule de poils postée au cotés de l'homme. Le visage de Théia s'illumine. « Salut toi ! » dit-elle en s'accroupissant pour caresser l'animal, sans gêne. Elle a toujours aimé les animaux, surtout les chiens, mais pas de là à aller s'attendrir publiquement sur celui d'un individu croisé dans la rue. Lentement, elle se relève et appuie une main sur le bras de l'homme pour ne pas tomber. « Merci, désolée, je vais bien. Enfin je crois. » Elle tourne la tête avec dix secondes de retard vers l'endroit qu'il lui a précédemment désigné avant qu'elle ne centre toute son attention sur le chien. Théia fait un pas, mais attend de voir si il la suit ou pas pour en faire un deuxième. Elle se tourne à nouveau vers lui. « Je vous assure, c'est rare que j'arrive même plus à marcher droit. » Elle parle bien pour une fille qui a trop bu, c'est déjà ça. Il ne risque pas de la prendre pour une attardée. Ou seulement qu'à moitié. « Enfin, je pense que ça se voit » ajoute-t-elle en riant avant de retrouver un visage fermé et sérieux qui se concentre pour essayer de visualiser le tracé le plus rapide vers ce fameux banc.

Elle ne se rend pas encore compte de la chance qu'elle a d'être tombée sur lui à cause de son état. À la place, Théia pourrait déjà être en train de se vider de son sang dans une ruelle, ou d'être emmenée par un homme mal intentionné dans une cave sombre. À la place, elle se retrouve soulevée par un charmant jeune homme qui semble être tout sauf malveillant. Elle n'en est pas encore capable pour le moment, mais Théia inscrit dans sa tête qu'elle devra le remercier plus tard, d'une manière ou d'une autre. Elle se retrouve installée à coté du chien de l'inconnu mais n'a pas le temps de s'attarder sur lui que l'homme lui pose indirectement une question qui la fait caler. Théia réfléchit, elle fait travailler du mieux qu'elle le peut chacun de ses petits neurones encore intacts. Elle finit par pousser un soupir. « Je n'arrive pas à m'en rappeler. » Lentement, elle relève les yeux vers le brun. « J'ai emménagé il y a peu chez un ami, vous comprenez. Enfin, ce n'est pas vraiment un ami, c'est plutôt une connaissance. Mais je n'avais pas vraiment d'autre choix. » Elle s'interrompt et plaque une main contre sa bouche. « Je parle trop, » souffle-t-elle avant de laisser aller sa tête contre le dos du banc. Elle regarde les étoiles un moment et se met à sourire bêtement. Théia a toujours aimé les ciels étoilés, ça a le don de l'apaiser. « Vous devriez rentrer chez vous, je dormirai sur ce banc. Comme une sans-abri. » Théia relève la tête vers l'homme dont elle ne connait toujours pas le nom et hausse les épaules. Elle risque d'être frigorifiée, mais elle préfère ça à déranger plus longtemps ce pauvre individu quoi doit certainement avoir bien mieux à faire que de s'occuper d'elle.