Crawling back to you (Oliver)

Cela fait déjà un moment qu'ils sont là, Oliver et elle, à cette fête à laquelle ils ont séparément été invités par un ami commun. Ils s'étaient croisés, avaient bu un verre ensemble, mais tous les deux n'avaient dû passer qu'une vingtaine de minutes ensemble à tout casser. Il était parti de son coté, elle du sien, jusqu'à ce qu'ils ne finissent par se retomber dessus en allant commander quelque chose à boire. Appuyée contre le bar en face de lui, Théia essaie de lui parler, mais n'arrive pas à se faire entendre à cause de la musique qui sonne trop fort. Elle espère d'ailleurs pour l'organisateur que ses voisins ne risquent pas d'appeler la police, il serait regrettable de devoir partir en courant d'une fête si réussie. Son regard plongé dans celui d'Oliver, elle n'a cette fois plus envie de le laisser partir avec quelqu'un d'autre. « Viens, » dit-elle en se penchant à son oreille sans vraiment lui laisser le choix, attrapant son poignet et l'emmenant avec elle vers une fenêtre. L'étage où ils se trouvent étant le dernier, il ne reste plus que le toit au-dessus d'eux, endroit souvent utilisé par les fumeurs. Parfait pour lui. Théia ouvre la fenêtre et se laisse tomber sur une parcelle en fer qui tremble légèrement sous son poids. Elle grimpe ensuite les quelques marches de l'escalier de secours et se retrouve en peu de temps sur cet endroit tant convoité. Elle attend qu'Oliver aie fini de monter avant d'à nouveau lui faire face. « Cette fichue musique est sûrement gravée à jamais dans ma tête, » dit-elle en esquissant un sourire, n'ayant jamais particulièrement aimé la musique électronique qu'on passe en soirée. Ce n'est qu'une fois dehors qu'elle se rend compte que sa tête lui tourne légèrement à cause de l'alcool, mais pas assez pour lui faire dire des choses qu'elle regretterait. Elle se tourne vers le vide et contemple la rue, les bâtiments, le ciel rempli d'étoiles. « Tu passais une bonne soirée ? Je veux dire, avant que je ne te kidnappe. » Elle est curieuse, peut-être un peu trop.

Oliver n'était pas le plus à l'aise dans les fêtes privé, ça lui rapellait trop de mauvais souvenirs. Ce n'était pas la première fois qu'il sortait s'amuser depuis 10 ans, il avait visité toute sorte d'endroit dans le monde où les gens vivent la nuit pour faire la fête. Depuis qu'il était arriver à Bowen, il s'était donner le défi de ne plus se restreindre de choses que n'importe qui d'autre ferait, il ne voulait plus vivre en cage. Il avait fumer une cigarette avant d'arriver pour se calmer les nerfs un peu et très honnêtement, il avait quand même du plaisir. Il n'avait qu'à ne pas trop s'exiler à l'écart, il ne sentait pas vraiment prêt pour ça. Mais quand Théia l’entraîna vers le toit il n'eu pas trop le choix de suivre même s'il sentit chaque cellules de son corps crier «NON» dans sa tête. Mais puisqu'il avait bu deux bière il était plus suggestif à suivre sans résistance. Dès qu'il arriva en haut il eu l'impression de respirer à nouveau, il n'avait pas réaliser à quel point il étouffait réellement à l'intérieur. Le paysage urbain en pleine nuit était d'une beauté un peu froide, mais très agréable à regarder néanmoins. Il se retourna vers la jeune brunette quand elle lui adressa la parole. Il eu un léger rire et baissa la tête en guise de réponse. Il remarqua des chaises de parterre dépareillées qui traînait un peu plus loin et il se dirigea lentement dans le direction en espérant que Théia allait suivre, il ne voulait pas l'interrompre.«Quand même, malgré le bruit à nous rendre sourd l'ambiance était bonne, les gens semblait s'amuser. Mais je dois dire qu'un peu de calme ça fait du bien aussi» Il lui sourit à nouveau et c'était très sincère comme sourire. «Et toi? » Il aimait bien retourner la conversation vers les autres plutôt que vers lui même.

Elle a toujours aimé regarder les étoiles. Ça doit être son coté artiste, ce genre de décor a souvent été pour elle une grande source d'inspiration pour les films amateurs qu'elle réalise de temps en temps. Sans réfléchir, Théia suit instinctivement Oliver vers les chaises abandonnées par d'autres personnes qui ont du avoir la même idée qu'elle plus tôt dans la soirée, puis prend place sur l'une d'elles. Avec ce qu'il lui dit, elle se sent presque soulagée de ne pas avoir gâchée sa soirée en l'emmenant pratiquement de force, ici, sur ce toit. Il lui sourit, et Théia ne peut s'empêcher d'esquisser un léger rictus devenu automatique, comme à chaque fois que le visage du brun est illuminé par cette expression qui lui va si bien. « Disons que j'ai un peu du mal avec ce genre de soirée, ça a tendance à m'étouffer un peu. » Elle passe une main dans ses longs cheveux foncés pour dégager les quelques mèches venues recouvrir une partie de son œil gauche. « Parfois, je me demande pourquoi on prend la peine de m'inviter à ce genre de truc. Je suis une grand-mère, je pars tout le temps avant la fin parce que la musique va trop fort, ou parce que j'en ai marre de voir tout ce monde que je connais à peine. » Elle se cale dans le fond de sa chaise et ramène ses jambes contre sa poitrine avant de les entourer de ses bras. L'air est frais, il caresse sa peau et lui permet enfin de respirer autre chose que des odeurs de bière et de transpiration. « Mais je n'allais pas te laisser ici, seul, sans moi pour te sauver d'une conversation gênante. » Théia tourne la tête vers Oliver et croise son regard, un sourire amusé accroché aux lèvres. Elle se doute bien qu'il n'a pas besoin d'elle pour ça, qu'il est assez débrouillard et pas du tout du genre à dépendre de qui que soit. Mais c'est plus fort qu'elle, elle n'a pas pu s'empêcher de lâcher quelque chose qui sous-entendrait qu'Oliver pourrait avoir besoin d'elle.

C'est en regardant Théia qu'il regrettait amèrement de ne pas avoir sa caméra avec lui, comme à chaque fois qu'il voyait quelque chose qui captait son attention. Ça lui arrivait très souvent, mais c'est simplement pas socialement acceptable de braquer une caméra dans le visage des gens sans permission, il n'avait plus 11 ans. Il se disait qu'avec le décor ça aurait pu faire une superbe photo. Il se sentait un peu plus détendu qu'au moment où elle l'avait agrippé, il avait plus peur de ses souvenirs que du moment présent. Quand elle passa la main dans ses cheveux un léger parfum passa dans l'air, son shampoing possiblement? Il s'étira le dos avant d'allonger ses jambes, pour une vieille chaise en plastique elle était quand même très confortable. Lui et Théia était vraiment du même avis sur ce sujet, les grosses fêtes sont trop étouffante à la longue. Son sourire était si captivant qu'il en oublia presque de répondre. «J'apprécie grandement le geste, même si j'aurais probablement pu m'en sortir.» Il lui fit un clin d'oeil avec un sourire. «Mais sans toi, j'aurais manqué la vue qu'on a ici.» Il appuya sa tête sur le bord du dossier de la chaise pour pouvoir mieux voir les étoiles, elles étaient un peu pâle à cause des lumières de la ville comparé à la vue du ciel en campagne, mais elles étaient tout de même magnifique.

Comment souvent, elle a agi sur un coup de tête. Elle l'a emmené avec elle, sans se soucier de si ça lui convenait ou non. Théia voulait le voir, passer quelques minutes avec lui sans toutes ces personnes autour d'eux qui l'empêcheraient d'avoir une conversation où ils ne seraient pas obligés de crier pour s'entendre. Son corps s'est alors exécuté avant même que son cerveau ne puisse analyser la situation. Oliver lui confirme ce qu'elle sait déjà, qu'il aurait très bien pu s'en sortir sans elle. Évidemment, elle ne voit pas comment elle, pauvre fille de seulement vingt ans au cœur physiquement trop fragile, arriverait à l'aider dans une situation gênante. Sauf peut-être grâce à son fabuleux jeu d'acteur qui pourrait faire fuir une fille un peu trop collante. « Je savais que ça te plairait, » répond-elle en regardant à nouveau l'horizon, cette fois bien calée dans le fond de sa chaise. « Je crois qu'il n'y a qu'avec toi que je peux être admirative devant une nuit de pleine lune sans pour autant passer pour une irrécupérable romantique. Ça être le coté artiste. » Parce qu'au fond, cette fibre artistique, c'est quelque chose qui les définit tous les deux. Lui avec ses photos, elle avec ses films. Ils ont cette même passion pour les images qui ne peuvent être vues qu'à travers un appareil.

Il était bien avec elle, juste installés là à parler, mais une partie de lui s’interrogeait à savoir si Théia attendait quelquechose de lui en l'isolant du reste du monde. Il chassa cette pensée de ça tête en se disant qu'encore une fois, il essayait trop d'analyser les choses au lieu de les prendre tel quels sont. Il ne voulait simplement pas qu'elle s'attache trop, il savait qu'à la longue il serait toxique pour elle. C'était triste de toujours devoir penser aussi négativement à propos de tout, mais il ne voulait pas voir une jeune fille pleine de vie perdre sa lumière à cause de sa noirceur. Il songea à sortir une excuse pour s'éclipser, mais il n'était physiquement pas capable, son inconscient voulait rester. « Quel genre de chose t'inspire pour tes films? » Il n'avait pas détaché son regard du ciel mais la question lui avait échapper des lèvres. Il ne se l'avouait pas mais il était très curieux d'en apprendre plus sur elle. Il fouilla dans sa poche distraitement à la recherche de son paquet de cigarettes. Il se retourna vers Théia «Est-ce que ça te dérange si je fume?» Il préférait demander parce qu'il se sentirait impoli sinon.

Ça lui fait du bien d'être là. Ne plus être envahie de pensées macabres, ne même plus réfléchir du tout. Juste vivre, et profiter du moment présent avec quelqu'un dont elle a toujours apprécié la compagnie. Si on le lui demandait, Théia serait impossible d'exprimer comment elle considère Oliver. Elle l'a toujours trouvé intriguant, mystérieux, et n'a pas vraiment le sentiment de le connaître réellement. Elle ne lui en a cependant jamais demandé plus sur lui. C'est peut-être ce quelque chose qui le rendrait presque attirant à ses yeux, ce coté secret, le fait qu'il ne parle pas tant que ça de lui. Quand il commence à s'intéresser à ses films, Théia ne peut empêcher ses joues de légèrement rougir. Heureusement qu'il fait noir, il ne peut certainement pas le voir sauf en se concentrant vraiment sur son visage. Ça lui fait toujours cet effet quand quelqu'un s'intéresse à elle, ou à ce qu'elle fait. « Ça dépend de beaucoup de choses. Parfois un paysage, un événement que j'ai vécu, rien qu'un oiseau qui passe dans le ciel peut suffire à me donner envie de le filmer. Puis, parfois, ça peut se limiter à une personne. » Un nouveau sourire incontrôlable étire ses lèvres pour la seconde fois. Elle ne ment pas, certaines personnes ont déjà été pour elle de grandes sources d'inspiration, parfois même de simples inconnus croisés dans la rue. Quand il lui demande si il peut fumer à coté d'elle, Théia lui fait un bref signe de tête. « Ça ne me dérange pas du tout, » dit-elle en l'écoutant sortir son paquet. Elle n'a jamais fumé, et ne pourrait même pas se le permettre à cause de la déformation de son cœur. Détail dont elle ne lui a d'ailleurs jamais parlé. « Tu sais, ça me plairait beaucoup de voir tes photos. T'en parles t'en parles, puis au final tu ne montres jamais. Je vais finir par croire que tu ne fais plus rien de tes journées. » Elle se tourne vers lui, une leur espiègle brillant dans son regard.

Il se tourna un peu pour la regarder quand elle parlait, c'es fou comment les yeux d'une personne peuvent s'illuminer quand elle parle de quelque chose qu'elle aime. On dit que les yeux sont le miroir de l'âme et Oli y croyait. «Je comprend ce que tu veux dire, c'est exactement comme ça pour moi aussi avec mes photos.»C'était rare qu'il ramenait la conversation vers lui mais c'était sortit tout seul, il se sentait un peu plus vulnérable quand on parlait de lui. Puisque ça ne dérangeais pas Théia, Oliver inséra une cigarette entre ses dents et entreprit de trouver son briquet quelque part dans ses poches pour ensuite l'allumer. Il détestait dépendre de ce poison pour se détendre, mais c'était déjà mieux que de la cocaïne, surtout avec la quantité qu'il consommait avant. Dès la première inhalation de fumer dans ses poumons, il se sentit un peu plus léger. Il souffla la fumer dans les airs en se réinstalla la tête appuyer sur le dossier, il laissa ses pensées plus sombres partir avec elle. Il eu un léger gloussement quand elle lui reprocha de ne pas lui montrer ses photos. «Malheureusement je ne traîne pas un portfolio de photos partout avec moi.» Il fit tomber un peu de cendre dans ce qui semblait être un cendrier parterre avant de poursuivre. «Il faudrait que tu passe me voir à mon studio photo pour que je montre ça, sinon mes meilleurs sont en ligne sur mon site.» Il porta la cigarette à ses lèvres. Il était conscient que ce n'était possiblement pas la réponse qu'elle espérait parce que ça sonnait un peu froid, mais il ne se voyait pas l'inviter chez lui pour lui montrer ses albums photo. Il y en avait des plus personnelle là dedans qu'il avait apporté avec lui quand il avait prit la fuite et il ne voulait pas qu'elle tombe dessus en regardant ses autres photos.

Elle a toujours aimé parler de ses films. Raconter leurs histoires, les sens cachés, débattre des émotions exprimées implicitement, captées de manière différente en fonction du point de vue. Ça la fait presque se sentir importante. Et la façon dont Oliver s'y intéresse, ça la touche pour une raison qu'elle n'arrive pas à identifier. Peut-être parce qu'il est autant artiste qu'elle, si pas plus, et que son avis est de fait encore plus important que celui d'une personne lambda. D'un air songeur, Théia le regarde porter l'objet qui lui est interdit à l'ouverture de ses lèvres. Même si la nicotine pourrait lui être fatale, elle a toujours trouvé un charme chez certains fumeurs. Ils consument leur cigarette comme s'ils se fichaient de ce qu'il passe à l'extérieur, ils semblent ne se préoccuper que de cette chose si précieuse à leurs yeux qui brûle, lentement, jusqu'à mourir dans un cendrier avec ce qu'il reste d'elle. La voix d'Oliver la ramène à la réalité. « Dommage, » souffle-t-elle. Elle arque ensuite un sourcil. « Mais tu as les clés de ce studio, là sur toi ? » Un sourire étire ses lèvres, et ses yeux foncés pétillent comme ceux d'un enfant prêt à faire une bêtise. « Enfin, sauf si tu ne peux pas. Même si je ne savais pas que tu respectais les règles, maintenant. » Elle regarde en l'air sans se défaire de ce sourire. Théia le cherche. Elle cherche à le faire plier parce qu'au fond, elle est vraiment tentée de voir ces fameuses photos. Mais pas sur un site, pas derrière un écran alors qu'elle traîne sur son pc en pyjama. Elle le veut à coté de lui, elle veut entendre ses commentaires et pouvoir observer les clichés de son point de vue.

Elle allait réussir à le faire craquer si elle continuait comme ça, elle était comme une luciole qui scintille dans le noir, il avait le goût de la suivre, de l'attraper, mais il ne voulait pas quitter sa grotte par peur de ce qu'il pourrait arriver s'il en sort. Il continuait de se répéter qu'il ne pouvait pas entrer dans son jeu, mais en même temps il se demandait de quoi il avait si peur. «Tu pourrais lui faire du mal.» Il ne pourrait jamais faire cela, c'était la dernière chose qu'il voulait faire, pas à elle, pas à personne. «Si ce n'est pas physiquement, ça sera émotionnellement.» Ils n'allaient que regarder des photos, il n'y avait aucun mal là dedans. Il décida d'ignorer les cris de sa conscience et de lentement glisser sa main dans sa poche pour en sortir son trousseau de clés. Il se tourna vers Théia avec un léger sourire au visage, elle avait gagnée. «C'est dur de te refuser quelque chose, je dois l'avouer.» Il inspira un peu plus de poison dans ses poumons tout en gardant son regard sur la jolie brune assise à coté de lui, elle avait cet étincelle dans les yeux qui le fascinait. Il ne pouvait pas l'expliquer, mais elle lui donnait le goût d'arrêter de se battre pour garder intacte la carapace qu'il s'était fait au cours des années. «Parcontre il va falloir y aller à pied puisqu'on a bu, mais c'est peut-être 10 minutes de marche... toujours partante?»

Elle n'a pas toujours eu de beaux jours pourtant. Comme tout le monde, Théia a connu des moments sombres qu'elle s'est toujours contentée de garder pour elle. Très peu connaissent réellement Théia dans son entièreté, rares sont les personnes qui l'ont déjà vue autrement que souriante, pleine de joie, prête à conquérir le monde. Pourtant, la présence d'Oliver a toujours suffi à lui faire oublier ce coté sombre qui a parfois tendance à l'envahir. Ce doit être parce qu'il ne sait rien et qu'elle peut, sans limite, se permettre de créer cette nouvelle personne qu'elle apprécie plus. La fille heureuse d'être encore en vie, celle que tout le monde connait. Lorsqu'il sort son trousseau de clés de sa poche, elle ne peut s'empêcher de sourire jusqu'à en avoir mal aux joues. « C'est un de mes talents secrets, » avoue-t-elle. Elle l'écoute la prévenir qu'il y a de la marche à faire, mais dix minutes n'ont jamais suffi à la faire reculer devant ses envies. Théia quitte son siège et se place devant Oliver. « Totalement partante, alors allons-y maintenant avant que le soleil ne se lève. » Elle se penche vers lui et attrape sa main libre avant de le tirer pour le lever à son tour. Elle est ravie. Ravie qu'il accepte, ravie qu'il soit moins froid et distant que lors de leur première rencontre. Même si elle doit se faire de fausses idées, Théia a parfois l'impression qu'avec le temps, Oliver a fini par se radoucir avec elle. Comme si elle arrivait à amener quelque chose de positif dans la vie du garçon. Elle flash certainement, elle ne se voit pas comme étant spéciale pour réussir un tel exploit.

(HJ : Désolée du délai, j’avais écrit une superbe réponse et je l’ai perdu sans faire exprès et ça m’a pris beaucoup de motivation pour recommencer.)


Oliver se départit du reste de sa cigarette avant que Théia lui attrape la main pour le tirer de son siège, elle avait l’air aussi énervée qu’un chiot à qui on avait promis une promenade. L’idée de marcher dans les rues de Bowen un peu avant l’aube le charmait, il y avait quelque chose de très poétique dans le fait de voir une ville sous un autre angle et de la voir s’éveillée peu à peu. Une fois à l’intérieur, il constata qu’il y avait beaucoup moins de monde que lorsqu’ils étaient montés, mais malgré cela il faisait toujours aussi chaud. Ils n’avaient pas manqué grand-chose apparemment. Oliver avait un nœud à l’estomac, il n’avait jamais invité personne à son lieu de travail en dehors des heures d’ouverture et ça lui faisait bizarre. Il espérait qu’il n’avait aucune photos compromettantes dans ses affaires là-bas, mais rien ne le frappait à l’esprit, il serait vraiment imbécile d’avoir quoi que ce soit à son travail qui pourrait le mettre dans une position fâcheuse. Il fit un signe de la main au loin pour dire au revoir aux quelques visages connu qu’il restait avant de prendre la porte avec Théia, Ils allaient peut-être se faire des idées en les voyants quitter ensemble, mais il ne s’en préoccupait pas trop. Elle s’intéressait à son art et il voulait partager cela avec elle, même s’il se sentait comme si il allait se mettre à nu devant elle. «Tu es la première à qui je fais faire une visite comme ça.» Il avait lâcher ça tout bonnement, sans vraiment avoir d'émotions dans la voix. Il ne voulait pas qu'elle se sente comme si elle était spéciale comparé à n'importe qui d'autre, mais il commençait à se rendre compte qu'elle l'était un peu, au fond.

hj : pas de souci dis, de toute façon j'étais partie

Elle est enthousiaste, elle ne tient pas en place. C'est la première fois qu'Oliver lui laisse une opportunité d'enfin en savoir un peu plus sur lui comme si enfin, elle avait réussi à trouver une faille dans ce mur qu'il s'est crée. Ils quittent le toit pour se retrouver à l'intérieur, là où la fête touche à sa fin. Autour d'eux, certains sont étalés dans des canapés, totalement morts saouls. D'autres fument dans l'appartement, rendant l'air presque irrespirable. Théia se dépêche de passer la porte avant d'être prise d'une quinte de toux et profite du courant d'air crée par le passage de dedans à dehors pour replace une mèche de cheveux derrière son oreille. Au-dessus d'eux, la lune et quelques réverbères suffisent à éclairer la route ainsi que la moitié de son visage. Il doit être tard, ou tôt selon le point de vue. Théia aimerait tellement pouvoir assister à un lever de soleil alors qu'elle est encore éveillée. La voix d'Oliver la sort de ses pensées, et la voilà presque touchée par ses paroles. « Vraiment ? » Elle se retient de faire une réflexion laissant paraître un quelconque sentiment de supériorité par rapport aux autres. Elle se doute bien que ce n'est pas parce qu'il la préfère qu'il lui fait ce privilège, certainement plutôt parce qu'il en avait marre de l'entendre le supplier. « Je ferai de mon mieux pour être une bonne première fois, » glisse-t-elle avec un sourire amusé aux lèvres. Théia sait qu'elle ne sera pas la dernière. Oliver n'a peut-être personne dans sa vie pour le moment, il reste un garçon avec beaucoup de charme qui ne tardera sûrement pas à jeter son dévolu sur une fille, n'importe laquelle, sûrement plus intéressante que Théia. D'un discret geste de la tête, elle sort ses pensées de son esprit et le suit à travers les rues endormies de la ville. Les yeux grands ouverts, elle observe chaque recoin comme si elle les découvrait pour la première fois. Elle est déjà passée par ici, elle a déjà vu Bowen enveloppée du voile de la nuit. Mais jamais elle n'a vu le travail d'Oliver, et c'est cette excitation qui crée en ce moment un nœud dans son ventre.

Curieusement il faisait un peu plus froid maintenant que quand ils étaient sur le toit, peut-être que c'était les effets de l'alcool qui l'avait empêché de s'en rendre compte plus tôt. Il regardait autour de lui la ville endormie, ils étaient les seules âmes à l'horizon, sauf peut-être le chat qui traversait la rue silencieusement un peu plus loin. Il se tourna pour regarder Théia, le lampadaire donnait une couleur jaune-orangée à son visage. « On ne serait pas en route pour y aller si je ne pensais que tu en serais pas une » un léger sourire apparu sur son visage en la regardant. Si il y avait bien quelqu'un qui pouvait bien comprendre sa passion, c'était elle. Elle allait probablement réellement apprécier la visite, pas seulement faire semblant pour être poli. Oliver réalisait que même si il connaissait Théia depuis un moment, il ne connaissait pas énormément de choses à son sujet. « Depuis qu'on se connait j'ai jamais pensé à te demander, est-ce que tu es née à Bowen? » Il était curieux, c'était même parfois un défaut. Mais  bon il pouvait bien se permettre de poser des questions pour mieux la connaitre lui aussi.

La réponse d'Oliver la fait sourire, un sourire qu'elle essaie cependant de faire passer inaperçu en déviant le regard vers les lampadaires au-dessus de leur tête. Elle fait semblant d'être fascinée, et les contemple pendant quelques secondes avant de réussir à effacer ce stupide rictus niais qui s'était emparé de ses lèvres contre son gré. À nouveau, Théia porte toute son attention sur lui. « Arrête, je vais finir par rougir, » dit-elle pour plaisanter. Car même si il lui arrive de sourire à ses pseudo-compliments, il en faut beaucoup pour la mettre mal à l'aise au point que ses joues ne virent soudainement au rouge vif. À cause du vent froid de la nuit, elle se met à frissonner et croise ses bras contre sa poitrine pour trouver un semblant de chaleur. Son regard maintenant posé sur la route qu'ils longent, elle écoute sa question, quelque peu amusée qu'Oliver prenne enfin l'initiative d'en apprendre un peu plus sur elle malgré le fait qu'ils se connaissent depuis déjà un petit moment. « Non, je suis née aux États-Unis, dans le New Jersey. J'ai emménagé à Bowen quand j'avais dix ans à cause d'une histoire familiale très... compliquée. » Elle préfère ne pas rentrer plus les détails, pas certaine qu'Oliver soit tenté à l'idée d'apprendre que Théia est non seulement à moitié orpheline, mais qu'en plus elle souffre d'une déformation du coeur qui la force à vivre auprès des quelques membres de se famille restant qui s'intéressent un minimum à sa santé. « Et toi ? » le questionne-t-elle en le regardant à nouveau.  Elle non plus ne connait pas beaucoup l'histoire d'Oliver, mais jamais elle n'a osé la lui demander.