Blood brothers (Devan)

Blood Brothers

Devan & Liam

"Tu pourrais me faire le plaisir de sourire un peu, Liam." La voix un peu sèche de son amie fit sortir le jeune homme de ses pensées. Par pure provocation, il lui adressa un énorme sourire, un poil hypocrite. Il ne savait pas faire semblant : il était de mauvaise humeur et comptait bien le faire savoir. Son amie l'avait traîné au restaurant, où Liam allait devoir déjeuner avec elle. En soi, cela ne le gênait absolument pas. Si ce n'était qu'elle avait invité quelques autres amis, que Liam avait "perdu de vue". Comprenez par là que ces chers "amis" avaient totalement rompu le contact avec lui, après son accident. Et aujourd'hui, il n'était clairement pas en état d'affronter des regards pleins de pitié, des paroles pseudo-réconfortantes ou des excuses sorties tout droit d'un autre monde.

Si en plus de cela il savait qui se trouvait au fond, dans la cuisine de ce restaurant, il était certain que Liam ronchonnerait encore davantage. Installé à l'une des tables, Liam écoutait d'une oreille distraite les diverses conversations du petit groupe, se contentant de hocher la tête lorsqu'on lui posait une question. Heureusement, une serveuse vint rapidement prendre leur commande. Afin d'éviter le moment gênant durant lequel on lui énumérait tous les plats de la carte, il devança son amie qui s'était déjà penchée vers lui : "Pour moi, ce sera la spécialité du chef. Peu importe ce que c'est." Et il se mura de nouveau dans son silence, ne pouvant pas se rendre que la jeune serveuse l'observait avec attention. Ces deux-là se connaissaient, bien évidemment. Ils s'étaient rencontrés durant leur adolescence, à l'époque où Devan et Liam avaient leur petite bande d'amis, qui cherchait des noises à ceux qui les embêtait de trop près. Elle termina de prendre la commande et s'éloigna de leur table. Arrivée dans la cuisine, cette dernière annonça les plats commandés, avant de terminer : "Et une spécialité du chef ! Je crois que tu devrais d'ailleurs jeter un coup d'oeil à celui qui a commandé ça, Devan. Table deux, celui avec le t-shirt noir..."

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Le restaurant, c’était toute sa vie. Devan ne comprenait pas comment il avait pu si longtemps passer à côté de cette vocation ni comment il avait fait pour en vouloir à Liam tant d’années. Il fallait être honnête : s’il n’y avait pas eu cet accident ce serait encore probablement le cas aujourd’hui. Et pourtant, c’était un peu grâce à lui s’il était chef cuisinier maintenant, s’il prenait tant de plaisir à aller travailler. Liam n’avait fait que son devoir, de flic autant que de frère et avait empêché Devan de vivre de l’argent facile. Car on avait beau aimer son travail, gagner sa vie honnêtement, quand on avait l’occasion de se faire du fric sans trop d’efforts on sautait dessus. C’était en cherchant une nouvelle orientation à donner à sa vie qu’il s’était rendu compte de son amour pour la cuisine. Devan avait toujours apprécié se mettre derrière les fourneaux pourtant il n’avait jamais vu ça comme un métier potentiel. Il avait peut-être perdu un peu de temps… Mais maintenant tout allait mieux.
Enfin, il lui restait peut-être quelques mauvaises fréquentations. Et son frère était toujours loin de lui. Quelques petits détails encore à régler… Le plus gros était fait, en tout cas.

Sa patience était souvent mise à l’épreuve dans ce boulot. C’était assez étonnant de voir que Devan savait se retenir, qu’il était calme, posé, autoritaire mais pas trop, alors que dans la vraie vie il s’énervait facilement. Il était arrivé une fois où il avait totalement perdu le contrôle… Depuis le brun s’était promis que ça n’arriverait plus, il tenait trop à sa place ici. En fait, il se donnait encore un ou deux ans avant de chercher à ouvrir son propre restaurant. Pour le moment, il économisait, apprenait encore beaucoup des autres et aussi aux autres.

Ce soir c’était assez calme. Le restaurant marchait bien alors c’était plutôt agréable de relâcher un peu la pression parfois et d’avoir plus de temps pour chaque commande. Quand le temps le lui permettait il passait même en salle pour faire connaissance, voir si tout se passait bien pour tout le monde. Il avait à cœur de faire les choses bien, pour une fois qu’on lui confiait un poste important.
En particulier quand on commandait la spécialité du chef. Il n’avait pas toujours le temps de la servir lui-même mais quand il en avait l’occasion comme ce soir il le faisait sans hésiter. Ca lui faisait plaisir qu’on commande un plat qu’il avait amené lui-même sur la carte ! Alors quand la serveuse vint lui annoncer la dernière commande, il sourit. Elle l’intrigua cependant. « Si tu le dis… Je m’occupe de la commande et j’apporte ça, alors. Merci ! » Son commis prendrait le relai le temps qu’il s’absente. Ca lui permettait aussi de s’exprimer un peu, de prendre des initiatives et c’était toujours ça de gagné pour le jeune cuisinier en devenir.
Aussi, quelques minutes plus tard il s’élançait dans la salle avec les plats dans les mains, direction la table deux. Si le service n’était pas sa spécialité, il ne s’en sortait toutefois pas si mal.
Du moins… c’est ce qu’on aurait pu croire si, la seconde d’après, toutes les assiettes n’avaient pas fini par terre dans un fracas incroyable.

C’était comme s’il avait vu un fantôme – et ce n’était pas totalement faux. Devan s’était arrêté net devant la table, lâchant les assiettes par la même occasion. Merde. Le type avec le t-shirt noir, c’était Liam. Son frère qu’il n’avait plus revu depuis un moment. Son frère à qu’il n’avait jamais pu vraiment faire ses excuses. Il resta un moment planté là avant de réaliser : tout était par terre. Il se mordit la lèvre et s’empressa de prendre la parole. « Merde j’suis désolé… Je… je sais pas ce qui m’a pris, j’ai eu une absence. » Mytho, tu sais très bien pourquoi t’as tout laissé tomber.
Il était tellement surpris de le voir là ! Devan se demanda un instant si Liam avait reconnu sa voix… Il hésita sur la démarche à suivre puis finalement : « Liam… ? C’est moi… Devan… » C’était bizarre de devoir le préciser. Mais il n’avait encore jamais affronté le handicap de son frère.

A ce moment-là, il se fichait bien que tout le monde le regarde.

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Devan & Liam

Alors que ses compagnons d'un soir discutaient de leurs tracas quotidiens, en se plaignant notamment d'un patron insupportable, d'horaires de travail interminables ou d'une petite amie un peu trop possessive, Liam, lui, se renfrognait davantage. Il aurait aimé avoir un patron casse-bonbon, du boulot à n'en plus finir ou une petite amie jalouse. Il n'avait plus rien de tout cela et les entendre se plaindre n'allait pas l'aider à se dérider. La main de son amie posée sur son bras lui arracha un petit sourire de convenance, mais Liam savait d'avance que la soirée allait être longue. Très longue. Au point d'attendre avec impatience l'arrivée du repas. Au moins, il pourrait se focaliser sur la nourriture, sa plus fidèle compagne.

Mais là encore, rien ne se passa comme prévu. L'arrivée des plats se fit avec fracas. Au sens propre, comme au sens figuré. Liam sursauta en entendant le bruit des assiettes cassées, une légère grimace s'affichant sur son visage déjà bien renfermé. Mais le pire était à venir. En dépit du brouhaha qui régnait dans la salle, la voix du malheureux surpassa toutes les autres. Liam fronça les sourcils. Cette voix... il la reconnaîtrait entre mille. Il eut l'impression de retourner cinq ans en arrière, quand il entendit cette voix lui déversait tout son venin. C'était celle de Devan, le grand frère trahi par le plus petit. Liam en mettrait sa main à couper. Les joues du jeune homme perdirent le peu de couleurs qui leur restaient. Alors qu'il ferait mieux de jouer l'ignorant, en faisant comme si son frère n'était pas là, Liam garda son regard bien droit, porté vers l'endroit où il avait entendu les assiettes se fracasser. C'était la première fois qu'il recroisait son frère et il ne savait pas vraiment comment agir. Fort heureusement, Devan fut le premier à faire un pas vers lui. L'entendre s'adresser à lui fut comme un électrochoc pour Liam. Pour une fois, ce n'était pas des insultes lâchées sur le ton de la colère, mais juste son prénom. Devan alla même jusqu'à préciser son identité. Liam posa son regard vide vers lui et lâcha un léger soupir en se relevant de sa chaise. "Je sais que c'est toi. Je ne suis pas encore sourd, tu sais." marmonna-t-il dans sa barbe, même si l'ombre d'un sourire se dessina brièvement sur ses lèvres. Liam était un râleur et ce n'était pas Devan qui allait le contester. Le jeune aveugle s'aida à s'orienter en gardant sa main sur les dossiers des différentes chaises où se trouvaient ses amis. Arrivé vers l'endroit du carnage, il s'agenouilla et entreprit d'aider son frère en ramassant les bouts de porcelaine brisée. C'était surtout le moyen de détourner l'attention d'eux, en montrant que la situation rentrait dans l'ordre. Liam avait senti les regards insistants sur eux et c'était bien une chose qu'il n'appréciait pas. Il avait même entendu son amie lui poser une question sur Devan, mais Liam l'avait magistralement ignoré. Ramassant la vaisselle cassée avec précaution, il reprit : "Je ne savais pas que tu travaillais ici." Comprenez par là que ses parents et leur frère aîné avaient bien gardé cette information pour eux. Bien sûr, Liam savait que Devan était devenu chef cuisinier. Il se souvenait d'ailleurs du sourire qu'il avait eu sur les lèvres quand il avait appris la nouvelle. Cela avait été un vrai soulagement pour Liam, qui voyait enfin son frère gagner sa vie de manière honnête. Même s'ils s'étaient disputés, Devan restait son frère. Liam ne voulait que son bonheur, même si, parfois, sa façon de faire avait été mal interprétée par le frère rebelle. Il se voyait encore entrer en trombe dans l'appartement et être obligé de passer les menottes à celui qu'il avait longtemps considéré comme son double. Si cela avait pu aider Devan à revenir sur le droit chemin, c'était le principal. Même si pour cela, Liam avait dû tirer un trait sur sa relation avec son frère. Il reprit doucement : "Je finis de ramasser ça et je m'en irai. Je ne veux pas te déranger davantage." Voilà où ils en étaient arrivés : à force de s'éviter comme la peste, Liam avait le sentiment d'empiéter sur le territoire de Devan. Et c'était bien ça le plus triste.

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Voilà un moment que Devan songeait à revoir son frère. Seulement il n’avait trouvé ni le temps, ni le courage. S’il était clair dans sa tête qu’il ne lui en voulait plus à propos de cette histoire d’arrestation, les deux frères n’avaient toutefois jamais mis les choses au clair ensemble. C’était une discussion inévitable et qui leur serait bénéfique à tous les deux pourtant Devan n’était pas tellement motivé. Il avait beau savoir que cette fois ça ne se terminerait pas en insultes et en paroles blessantes… Tellement de choses à lui dire, sans trop savoir comment… Il n’était pas le plus doué pour ouvrir son cœur surtout quand il s’agissait d’avouer son erreur. Car c’était clairement sa faute s’ils ne s’étaient plus parlés depuis sa sortie de prison. Même après l’accident, ils prenaient des nouvelles l’un de l’autre mais toujours par l’intermédiaire de quelqu’un.
D’ailleurs, quand il entendit le son de sa voix… Devan se sentit défaillir. Ca faisait vraiment trop longtemps. Pendant des années il avait considéré Liam comme un jumeau, quelqu’un avec qui tout partager. Comment en étaient-ils arrivés là ? Le seul avantage des disputes, c’était les retrouvailles. Si toutefois le lien pouvait survivre à des années de silence. D’autant que les conditions n’étaient pas optimales pour que les garçons se retrouvent… Devan avait encore pas mal de boulot pour ce service et ne pouvait pas tout laisser tomber comme ça. « C’est vrai, t’as reconnu ma voix ? Ca fait longtemps pourtant… » Il se mordit la lèvre. En fait c’était assez con comme réflexion parce que lui non plus n’avait pas oublié la voix de son frère, malgré le temps qui passe. Mais il était un peu paumé, son cerveau marchait à l’envers.

Il sourit à son frère quand ce dernier vint l’aider avec la vaisselle cassée… Avant de réaliser que ce sourire, il ne pouvait pas le voir. Alors il soupira et s’appliqua au moins dans sa tâche pour ne pas se blesser. Ce serait le comble ! Cela dit, il eut bien du mal à garder son calme en entendant les mots de son frère. Liam croyait vraiment qu’il dérangeait ? Cette fameuse discussion qui les attendait était plus que nécessaire, en fait bien plus que ce que Devan n’aurait pensé.
Sans trop réfléchir il posa sa main sur celle de Liam pour qu’il s’arrête deux secondes de ramasser les assiettes. « Non, t’en vas pas. On… on a besoin de parler, ça fait longtemps. En tout cas, moi j’ai des choses à te dire. Je dois retourner en cuisine là, refaire vos plats, terminer le service… tu crois que tu pourrais m’attendre ? J’te force à rien mais… »

Heureusement Liam accepta, probablement surpris par l’initiative de son frère. Ca n’était pas étonnant s’il ne savait pas que Devan l’avait pardonné… Les débris dans les bras il retourna donc à la cuisine et s’employa à faire de son mieux. Ca ne fut pas facile de se concentrer, il réfléchissait en même temps à ce qu’il allait lui dire. Néanmoins, un petit sourire ne quittait plus ses lèvres. Il attendait ce moment depuis longtemps…

Blood Brothers

Devan & Liam

Il était là. Son frère était là. Liam ne se souvenait même plus de la dernière fois où ils s'étaient trouvés dans la même pièce. C'était peut-être avant son accident, quand ils s'étaient croisés dans le jardin de la maison familiale, alors que Liam venait de rendre visite à ses parents. Ils s'étaient à peine regardés, s'évitant avec brio, en faisant comme si l'autre n'existait pas. Plusieurs fois, Liam avait voulu l'appeler, ou simplement lui laisser un message. Lui dire à quel point il lui manquait. Parce qu'en dépit de leurs conflits, Devan était son frère. S'il lui arrivait la moindre chose, il était certain que Liam rappliquerait à toute vitesse. Chose que Devan n'avait pas fait, en revanche. Mais Liam ne lui en voulait pas, parce qu'il savait que son frère avait régulièrement pris de ses nouvelles. Le jeune homme le connaissait comme s'il l'avait fait. Si Devan s'en tenait aux simples nouvelles, c'était probablement parce qu'il ne trouvait pas le moyen adéquat pour reprendre contact avec lui. Enfin... c'était ce que Liam préférait se dire. Il ne pouvait - et ne voulait - envisager le fait qu'en réalité, Devan lui en voulait toujours et qu'il n'en avait plus rien à faire de lui.

Mais voilà, le moment était arrivé. Le hasard faisait parfois bien les choses. Il était certain que cette rencontre était un coup du destin, vu que nos deux protagonistes étaient incapables de faire le premier pas eux-mêmes... Alors que Devan demanda, sur un ton surpris, s'il avait bien reconnu sa voix, Liam ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel, même si cet étrange sourire rôdait toujours sur ses lèvres : "Bah, tu es mon frère. Il y a des choses qui ne s'oublient pas, peu importe le nombre d'années qui s'écoulent." Prenant garde de ne pas se couper avec les morceaux de vaisselle cassée, Liam se tut et se fit minutieux. Peut-être était-ce aussi parce qu'il ne savait pas quoi dire. Alors, forcément, il lâchait ce à quoi il pensait en premier. Sans même réfléchir, il voulut rassurer son frère en lui disant qu'il ne resterait pas. Parce qu'il était persuadé qu'il ne voudrait pas de lui dans ce restaurant. Il suffisait de voir les dégâts qu'il avait déjà causé sur cette pauvre vaisselle. En revanche, Liam ne s'était pas attendu à un tel acte de la part de Devan. Il sursauta quand il sentit la main de son frère sur la sienne. Le jeune homme redressa le visage et posa ses yeux verts, mornes, sur son frère. Les paroles de Devan le laissèrent pantois. Si on lui avait dit que Devan sauterait sur l'occasion pour reprendre contact, Liam vous aurait sûrement ri au nez. Le jeune Matthews resta bête un instant, voire même hésitant : "Euh..." Mais il reprit contenance. Il n'avait pas le droit de l'envoyer valser. Pas après tant d'années. Il esquissa un léger sourire et hocha doucement la tête : "D'accord. Je t'attendrai. Sans compter que je ne pouvais pas partir sans goûter à ta fameuse cuisine, dont tout le monde parle." Oui, c'était une tentative pour alléger l'atmosphère. Pas sûr que cela fonctionne, mais c'était un autre pas qu'il faisait vers lui. Liam était touché par tout cela, mais avant que cela ne se voit davantage, il enchaîna : "Allez... retourne travailler ! On se retrouve tout à l'heure." Il avait employé le ton faussement autoritaire qu'il avait souvent eu avec lui. C'était un retour en arrière. Même si Liam était le plus jeune, il avait souvent été celui qui calmait Devan l'impulsif. Liam se releva et retourna à sa table, beaucoup plus souriant qu'à son arrivée.

Il tenta de profiter de la soirée, même si l'idée de voir son frère lui hantait l'esprit. Plus le temps passait, plus la boule qu'il avait au ventre grossissait. C'était paradoxal : il était tout aussi joyeux que stressé. Alors que le délicieux repas prit fin, Liam prit congé de ses amis. Ces derniers comprenaient parfaitement la situation. Ainsi, il les laissa partir et se commanda un énième café, destiné à le rendre d'autant plus nerveux. Alors que le restaurant s'apprêtait à fermer ses portes, Liam sortit de l'établissement et se posa près de l'entrée, appuyé contre une rambarde, sa canne blanche dans une main, une cigarette dans l'autre. Devan ne devrait plus tarder à présent... Vingt bonnes minutes plus tard, il entendit la porte s'ouvrir et des gens se saluer. Ce fut en entendant des pas se diriger vers lui que Liam comprit qu'il s'agissait de Devan. "Alors, tu voulais parler ?" Mais avant que ses paroles ne soient prises pour une attaque, Liam reprit, en souriant : "On en a mis du temps, tu ne crois pas ?!" Il employait le "on". Parce qu'au fond, Liam était aussi fautif que son frère.

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Il avait dû faire un maximum d’efforts pour ne plus repenser à Liam jusqu’à la fin du service, au risque de faire encore d’autres dégâts. Il avait pour habitude de traîner un peu le soir, c’était même souvent lui qui fermait le restaurant. Devan passait un peu partout, regardait si tout était prêt pour le service du lendemain, rangeait deux ou trois trucs, profitait juste de cet environnement qui lui plaisait. Mais ce soir il fit vite, à la fois pressé et un peu anxieux en sachant que son frère l’attendait devant le restaurant – s’il était vraiment resté, mais Devan n’en doutait pas tellement.
Le brun profita du bol d’air frais que lui procurait l’extérieur pour se remettre un instant les idées en place. Il ne savait absolument pas ce qu’il allait lui dire, à Liam… Il avait souvent imaginé l’avoir face à lui, avait souvent pensé à ces retrouvailles mais ne s’y était pas correctement préparé. Ca n’était pas une si mauvaise chose que ça... Au moins, les mots qui sortiraient de sa bouche seraient sincères et non décidés à l’avance. De l’autre côté, impossible dans ces conditions d’être maître de la situation et il avait horreur de perdre le contrôle.

Liam l’interpella alors qu’il n’avait même pas ouvert la bouche. Devan trouva incroyable que son frère puisse ainsi détecter sa présence… Quand on perdait un sens, les autres étaient décuplés, il le prouvait bien. Le plus âgé esquissa un petit sourire avant de hausser les épaules. Gestuelle qui ne servait absolument à rien dans la mesure où Liam ne pouvait pas le voir… Réflexes, c’était la première fois qu’il se retrouvait face à son handicap. Et c’était bizarre. Dérangeant. Il aurait assurément beaucoup de mal à s’y faire et une tonne de questions se bousculait dans sa tête. Mais ça n’était pas le moment, ils devaient déjà parler du passé, de leur dispute. De sa connerie. « On ? T’es bien gentil… J’ai mis du temps. » Devan reconnaissait qu’il avait été bien con et les deux frères se seraient probablement retrouvés bien plus tôt s’il n’avait pas été aussi buté. Au final, il n’était même plus sûr de savoir lequel des deux devait pardonner à l’autre.
Un léger silence s’installa, comme l’avait redouté l’aîné. Au fond, ça ne serait pas plus simple de le prendre dans ses bras ? Beaucoup plus parlant que tous les mots qu’il pourrait trouver, et surtout tellement sincère… Pourtant quelque chose le retenait. Ils n’avaient jamais été très tactiles tous les deux. « C’est marrant, je voulais te parler et je ne sais absolument pas quoi te dire, là. » Ca l’embarrassait vraiment car il avait plein de choses à lui dire ! Qu’il était désolé, reconnaissant, qu’il l’aimait ! Mais après tout ce temps, c’était plus compliqué que prévu. « Ca me fait plaisir de te revoir… » C’était déjà un bon début. « Je sais, ça doit te surprendre. Je tenais pas trop le même discours la dernière fois qu’on s’est vus. » Insultes, doigts d’honneur, tout ce qu’il y avait de plus mature en somme. Heureusement, on finissait tous par grandir un jour ou l’autre ! Pour certaines personnes c’était plus long que pour d’autres. « Avant que j’dise quoique ce soit… est-ce que tu vas bien ? On prend des nouvelles régulièrement, c’est vrai. Mais j’ai besoin de l’entendre de ta bouche. »

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Devan & Liam

A première vue, Liam semblait parfaitement serein. Il avait un bref sourire sur les lèvres et ses muscles semblaient relâchés. Malgré cela, ses doigts jouaient nerveusement avec la lanière de sa canne blanche. Liam avait toujours été un "faux calme". Il avait simplement appris à cacher ses émotions, là où Devan, lui, les laissait exploser. C'était pour cela qu'il y avait eu une telle complicité entre eux. Liam avait su calmer son frère, à de nombreuses reprises. Ce soir, ni l'un, ni l'autre ne pourraient se calmer, parce qu'ils devaient être arrivés au même stade de nervosité. Liam avait bien souvent pensé à leurs retrouvailles. Souvent, il avait cru qu'ils se retrouveraient dans le domaine familial, entourés de leurs parents et de leur frère, au cas où la situation dégénérerait. Liam préférait largement ce qu'il se passait actuellement. Le hasard de ces retrouvailles allait amener davantage de sincérité. Ils n'avaient pas eu le temps de réfléchir à ce qu'ils allaient se dire. Et c'était peut-être bien mieux comme cela. L'arrivée de son frère le fit sortir de ses pensées et Liam lança directement la conversation, afin que le malaise ne les entache de trop. Il esquissa un sourire aux paroles de Devan, secouant la tête : "C'est vrai, mais moi aussi, je n'ai pas cherché à te voir ou à arranger la situation. Nous sommes tous les deux fautifs. Chacun à notre niveau." Cela serait trop simple de remettre la faute sur Devan. Liam avait pas mal de défauts, mais il était intègre et savait reconnaître ses tords. Devan avait été buté sur ce coup-là, mais le benjamin de la famille ne s'était pas montré plus intelligent. Il n'avait en aucun cas essayer de reprendre contact avec Devan. Liam était resté sur l'idée qu'il n'avait pas à s'excuser de ce qu'il avait fait. C'était dans le cadre de son boulot. Mais au lieu d'ignorer son frère, il avait répondu à ses insultes et à ses hurlements. Puis, le calme plat. Les années passaient et il n'y avait pas eu de retour possible. Liam avait appris à vivre sans lui.

Alors que le silence s'installait peu à peu, le jeune homme se passa la main sur la nuque, puis s'ébouriffa les cheveux, comme à chaque qu'il était mal-à-l'aise. Que pouvait-il bien dire pour lancer la discussion, pour mettre à plat tout ce qu'ils avaient sur le coeur ? La voix de Devan le sortit de ses songes, esquissant un sourire en se rendant compte que son frère était dans le même cas que lui. "Bienvenue au club." Pour autant, Liam n'avait pas vu venir la confession de son frère. Il était content de le revoir ! Effectivement, cela le surprenait, même si cela était naturel. Peu importe ce qu'il s'était passé, un lien comme le leur ne pouvait jamais vraiment disparaître. ALors que Devan lui rappela leur dernière rencontre, Liam haussa les épaules en lâchant un léger rire. C'était encore bien frais dans sa tête et il se rappelait chaque insulte que son frère avait pu proférer à son égard. "En effet, ce n'est pas le même discours. Je préfère celui que tu tiens actuellement, je te l'avoue. On a dû mûrir entre temps. Qui l'eût cru ! " Il lui lança un regard complice, comme ceux qu'ils avaient toujours eu l'un envers l'autre. Plus jeunes, ils en avaient fait des conneries, allant jusqu'à se demander s'ils finiraient par devenir "adultes" un jour. Puis leur séparation était arrivée brutalement, renforçant leur côté immature. Le temps avait coulé et de nombreux événements avaient eu lieu, les forçant à grandir. Aujourd'hui, ils avaient le caractère pour s'affronter, pour discuter, sans avoir à se hurler dessus. Devan lui demanda comment il allait. Liam haussa les épaules, en comprenant qu'il avait vraiment besoin de l'entendre par lui-même : "Je crois qu'on a utilisé tous les deux les mêmes intermédiaires." Comprenez par là leur mère. Elle était leur médiatrice. Leur messagère. Parce qu'elle avait voulu préserver un semblant de contact entre ses deux rejetons. "ça va... Enfin, il faut que ça aille, tu t'en doutes bien." Liam était dans sa phase résignation. L'espoir de retrouver un jour la vue s'amenuiser en lui. Il n'avait pas d'autres choix que de l'accepter. " Et toi alors ? Comment vas-tu ? Je suis content de voir que tu as trouvé un super boulot. Tu le méritais."

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N’avoir plus de rancœur envers Liam, ça lui faisait tout drôle. Il avait l’impression de redécouvrir son frère et même si le temps perdu ne serait jamais vraiment rattrapé, ils pourraient au moins réapprendre à se connaître. Après tout, ils avaient changé tous les deux. Liam du fait de sa cécité avait dû changer sa manière de vivre, adapter son caractère et s’était peut-être un peu renfermé sur lui-même. Son grand frère espérait malgré tout qu’il avait gardé le goût de vivre et s’assurerait de le lui rendre si ça n’était pas le cas. C’était son rôle de l’épauler et de le suivre dans cette épreuve. Quant à Devan… oui, il avait tout autant changé. Il était devenu plus ou moins responsable et occupait un poste important dans un restaurant. Autant dire qu’il était posé… et que l’ennui commençait à se faire ressentir. Cette coïncidence n’en était peut-être pas une, peut-être qu’on avait ramené Liam dans sa vie pour l’empêcher de faire une nouvelle connerie – même si le cuisinier ne croyait absolument pas à ces conneries de destin.

C’était rassurant d’entendre que tout n’était pas sa faute mais Devan savait qu’il était malgré tout le principal responsable dans cette histoire. Il préféra cependant ne rien ajouter à ce sujet ; s’ils pouvaient éviter de parler des choses qui fâchent le jour de leurs retrouvailles, c’était mieux. « Je préfère aussi. Cela dit… t’avais pas tant besoin de mûrir, entre nous deux c’était moi le plus gros gamin des deux. Mais t’inquiète, maintenant je peux assumer mon rôle de grand frère ! Pour le meilleur et pour le pire ! » Il s’approcha de son frère, l’attrapa par le cou pour lui ébouriffer les cheveux. Ils avaient tellement peu de différence d’âge que les notions de grand frère et petit frère n’avaient pas grand-chose à dire mais symboliquement c’était lui le plus vieux et il comptait bien le faire comprendre à Liam. Être là pour lui quoi.
Il n’était pas tant convaincu quand Liam lui dit aller bien. S’il n’avait pas rajouté le verbe « falloir », peut-être… Devan fit une moue boudeuse que Liam ne verrait de toute façon pas. Il croisa les bras et le regarda longuement. « Je me doute que c’est pas facile. » En fait, il imaginait à peine ce que devait être son calvaire… Devan n’arrivait pas à imaginer l’effet que ça faisait de se retrouver du jour au lendemain dans le noir le plus total. Il frappa doucement son épaule avant de s’appuyer contre le mur du restaurant. « T’es pas tout seul. » Il avait ses amis et maintenant il avait son frère.

En se repassant les quelques minutes précédentes dans sa tête, il se rendit compte qu’il était pas mal tactile avec Liam. Comme avant qu’ils ne soient pris par toute cette rancœur, tous ces conflits. Et c’était agréable. Inattendu mais agréable. « Non c’est pas vrai, je méritais pas ça. J’crois que t’es le seul à croire en moi. T’as toujours été le seul. » Il sourit tristement. « C’est grâce à toi que je suis rangé maintenant… Et je sais pas comment te dire merci. Ou comment m’excuser… » Il était content de sa nouvelle vie. Elle était monotone mais au moins elle était réglo. C’était probablement le mieux à son âge non ? Il ne lui manquait plus qu’une petite famille… mais ça il ne fallait pas trop y compter.

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Devan & Liam

Liam était en train d'arrondir les angles. Bien sûr, il en avait gros sur le coeur. Il ne s'était jamais vraiment remis des insultes proférées par Devan, il y a quelques années. Il ne lui avait jamais dit à quel point cela lui avait coûté de lui passer les menottes, à quel point il avait été difficile de choisir entre son statut de policier et son statut de frère. Un jour, tout cela viendrait à éclater au grand jour. Mais aujourd'hui, Liam était bien décidé à se taire. Il n'avait pas envie de ruiner tout espoir de retrouver son frère. Il lui manquait énormément, ce bougre ! Devan et Liam avaient toujours été inséparables, à tel point qu'on les croyait jumeaux. Forcément, quand il était parti, cela avait causé un grand vide dans la vie de Liam. C'était comme si on lui avait arraché une partie de lui-même. Désormais, ils allaient devoir se retrouver et se reconstruire un lien fraternel, eux qui avaient tant changé en quelques années. En parlant de ce sujet, Liam laissa échapper un léger rire quand Devan se traita de "gros gamin". Liam le suivait dans sa gaminerie, ceci dit. Devan avait toujours été le plus cool des deux. A l'adolescence, Liam s'était quelque peu calqué sur lui, afin d'avoir plus de valeur aux yeux des autres. Heureusement, cela avait changé lorsque le benjamin de la famille était entré à l'école de police. Il s'était enfin accepté. Devan plaisanta sur son statut de grand frère. Pour le taquiner, il attrapa Liam par le cou et - sacrilège - lui ébouriffa la chevelure. Ronchonnant, ce dernier répliqua par une légère tape sur le bras alors qu'il recoiffa ses cheveux, qui étaient originellement déjà bien ébouriffés. "Par contre, ne t'avise pas à jouer le grand frère relou, qui fait sans cesse la morale, ça serait trop ennuyeux !" Ils avaient leur grand frère qui assumait parfaitement ce rôle et Liam faisait clairement allusion à ce dernier. Toutes ces différences faisaient le charme de la fratrie Matthews.

Vint le moment de prendre les nouvelles et forcément, Liam ne pouvait pas mentir sur son état d'esprit. ça allait. Il ne pouvait pas dire plus, il ne pouvait pas dire moins. Il subissait son état. Il haussa les épaules aux paroles de Devan, esquissant tout de même un léger sourire pour ne pas affoler son frère. "Ce n'est pas facile, en effet, mais tu me connais, je ne suis pas du genre à me laisser abattre." A force, il les connaissait, ces petites phrases destinées à rassurer son entourage. C'était se voiler la face, mais cela restait la meilleure solution pour lui et ceux qui l'entouraient. Quand son frère lui affirma qu'il n'était pas tout seul, Liam hocha la tête pour montrer qu'il le savait bien. C'était ce qui le sauvait au quotidien, de toute façon. Et il espérait compter Devan au sein de son entourage. Il avait sa place, plus que quiconque.

Alors qu'il s'appuya contre une rambarde, Liam se risqua à parler du boulot de Devan. C'était parfaitement voulu. Il avait envie de savoir si son frère s'était bel et bien rangé. Quand celui-ci lui affirma que Liam avait toujours été le seul à croire en lui, le jeune aveugle répliqua : "Je suis celui qui te connaît le mieux. Je ne pouvais que croire en toi, Devan." Mais à la suite de ses paroles, Liam grimaça quelque peu. Il ne voulait pas qu'il le remercie ou autre. "Tu aurais fait la même chose à ma place..." Si c'était à refaire, Liam le ferait de la même façon, peu importe les conséquences qu'il y avait eu suite à cela. Devan s'était tellement complu dans sa déchéance qu'il avait fallu le faire réagir en usant la manière forte. Toutefois, Liam craignait de le voir replonger, même après tant d'années. Devan avait toujours été un électron libre. Il croquait la vie à pleine dents. Le voir rangé d'une telle manière était toujours un peu surprenant. "ça te plaît, au moins ?" Il fallait comprendre par là qu'il ne parlait pas du boulot en lui-même, mais de cette vie justement un peu trop rangée...

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« Ca te plait, au moins ? » Devan resta longuement silencieux suite à cette question. A vrai dire, il n’était pas certain de pouvoir y répondre… Il avait bien compris que Liam parlait de cette nouvelle vie en général et non simplement de son boulot. Parce que oui, son boulot lui plaisait énormément. Il avait un poste avec des responsabilités, un patron qui lui faisait confiance et des rentrées d’argent régulières et surtout légales. C’était même plutôt chouette d’avoir des gens sous ses ordres. Mais si son métier le rendait heureux, c’était aussi un problème. Il ne faisait que ça dans sa vie. Devan travaillait trop pour réellement avoir une vie sociale, un chien ou peu importe. Il passait son temps au restaurant et quand il n’y était pas, il dormait. C’était très probablement ce qui faisait que le cuisinier trouvait sa vie morne et qu’il était un peu nostalgique de celle qu’il avait avant. Pas un jour pareil, pas de routine. Ce mode de vie un peu nomade lui avait bien plu autrefois.
Mais devait-il vraiment en parler à Liam ? Lui qui était si fier de son grand frère, peut-être bien pour la première fois depuis longtemps ! Il fit la moue, hésitant. Mais au final, le silence qu’il laissait planer depuis quelques minutes maintenant avait dû répondre à sa place. Il ne voulait aucunement inquiéter Liam, surtout pas le jour de leurs retrouvailles, mais il voulait aussi être franc avec lui. Peut-être que son frère saurait le conseiller de manière un peu moins brutale que ce qu’il avait fait la dernière fois.

« Ouais… ouais ça me plait. Mais je… enfin je sais pas, je m’ennuie. » Il ne s’en rendait compte que depuis quelques semaines seulement. Autrefois, avant de mal tourner, Devan s’était vu à trente ans casé et avec une famille, éventuellement. Il n’avait rien de tout ça… Et même s’il n’avait pas spécialement envie de se trouver un copain, il se disait que c’était de son âge tout ça. « J’adore mon boulot, va pas croire le contraire. Un patron compte sur moi et je fais ce que je peux pour le satisfaire. Mais j’suis pas tellement utile à la société comme toi en étant flic. » C’était assez nouveau, le Devan qui voulait se rendre utile. Il ne savait pas trop d’où ça lui venait… Peut-être parce qu’il savait son frère handicapé maintenant et que ça lui avait fait comme un déclic. « Je passe mon temps dans ce resto et au final j’vois plus grand-monde. Je me dis… J’sais pas, je m’amuse moins qu’avant. » Quand il jouait au con. « Je devrais pas te dire ça, je veux pas que tu t’inquiètes ou que tu te méfies. J’aurais voulu savoir si tu trouvais ça normal… Si tu penses que ça va me passer ? » Il espérait que ce n’était qu’une petite mauvaise période.
Puis finalement il réalisa qu’il avait un peu trop parlé de lui. Il fit la moue une nouvelle fois et soupira. « J’suis con. Je te raconte ma vie ô combien difficile alors que t’as bien d’autres problèmes… Dis-moi plutôt comment ça se passe pour toi depuis que… Enfin voilà… Ce que tu fais, comment tu le vis… »

Blood Brothers

Devan & Liam

De longues années s'étaient écoulées, les adolescents qu'ils étaient avaient laissé leur place à des adultes, à des hommes. Tout portait à croire qu'ils étaient devenus des inconnus. Et pourtant... Liam avait su mettre des mots sur les paroles inavouées de Devan. C'était comme ça, ça avait toujours été comme ça. Liam avait été le premier à apprendre l'homosexualité de son frère. Il l'avait encouragé à l'annoncer à leur famille. Il avait été celui qui avait su le calmer après sa première rupture douloureuse. Devan et Liam avaient des caractères très différents et pourtant, les deux frères se complétaient. Ce long silence qui s'installait était bien parlant pour Liam. Il savait qu'il avait touché la corde sensible de son frère. Et c'était plaisant. Rassurant. Ils n'avaient pas tant perdu de leur complicité, finalement. Ces retrouvailles étaient naturelles, comme s'il n'y avait pas eu toutes ces années de dispute, comme si le temps s'était mis sur pause et qu'il reprenait sa route aujourd'hui. La voix de Devan le fit sortir de ses pensées. Il venait de l'avouer : il s'ennuyait. D'habitude, Liam l'aurait regardé avec les sourcils froncés, l'air réprobateur et prêt à lui faire la morale. Là, dans son regard morne, on pouvait lire de la compréhension. Liam vivait la même chose. Il avait vécu sa vie à cent à l'heure, entre les interventions de police, les patrouilles avec Charley et sa vie personnelle avec son ex-fiancée, Tara. Aujourd'hui, il n'avait plus rien de tout cela et avait parfois du mal à retrouver un peu d'amusement dans sa vie. Liam secoua la tête quand Devan lui affirma que lui était utile : "ça ne veut rien dire, ça, Devan. On est tous utile à notre façon. Regarde, tu permets aux gens de se retrouver et de partager un moment convivial. C'est tout aussi important, surtout de nos jours." Il s'arrêta un instant, songeur, avant de répliquer doucement : "De toute façon, ce n'est jamais bon d'être trop utile à la société. Tu finis toujours par le payer. Que ce soit dans ta vie personnelle, sentimentale ou physiquement parlant. Et là, la société n'est pas toujours là pour te le rendre." ça faisait un peu discours de vieil aigri, mais Liam parlait en connaissance de cause. Il avait voué sa vie à la sécurité de Bowen et maintenant qu'il n'était plus apte à travailler, il était mis de côté. C'était un rebut. "En tout cas, je trouve ça normal de penser à une telle chose. Il ne faut pas non plus que tu passes outre cela en te disant que ça va passer, que c'est une mauvaise période et caetera. ça risquerait d'être pire. On ne vit qu'une fois et on ne sait jamais de quoi la journée de demain sera faite. Bien sûr, je ne te dis pas de quitter ton boulot, loin de là, mais il faut savoir aussi le mettre de côté. Mets un peu de folie dans ta vie... enfin... du moment que ça ne soit pas trop illégal." Pas trop illégal ? Où était passé l'ancien flic qu'il était ?! Liam esquissa un sourire, secouant la tête lorsque Devan se rendit compte qu'il abusait peut-être avec ses problèmes. "Ne t'en fais pas, ça me fait plaisir que tu te confies à moi." Et ça, c'était bien vrai. Il avait l'impression d'être normal. Alors qu'il chercha de quoi répondre à sa requête, Liam haussa les épaules : "Depuis que je suis aveugle ? Tu peux le dire, ce n'est pas tabou." Il lui adressa un léger sourire avant de reprendre : "Tu t'en doutes, ce n'était pas facile au début. C'est la raison pour laquelle je suis parti d'ici. J'ai voyagé à travers le monde. J'ai appris à mieux maîtriser ma nouvelle condition. M'éloigner de Bowen a finalement été une bonne chose, même s'il y a eu quelques... dommages collatéraux, si l'on peut dire ça comme ça." Il grimaça légèrement. De quoi parlait-il donc ? "Il faut que je te dise quelque chose, mais promets-moi de ne pas en parler aux parents." Il n'en avait parlé à personne encore. Qui mieux que Devan pouvait l'aider dans cette situation ? Il était celui qui le comprenait le mieux. "J'ai un fils, Devan." Voilà, c'était dit.

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Arrêtez tout ! Qu’est-ce qu’il venait de dire, là ? Si Liam était aveugle, Devan avait l’impression d’être devenu malentendant. Un fils ? Pardon ? Il dût se tenir au mur pour ne pas s’effondrer. Ca c’était… c’était de la nouvelle. Et Liam lui balançait ça comme ça, sans cérémonie. Attendez… Est-ce que ça voulait dire que lui, il était tonton ? Waw. Dommage que Liam ne puisse voir la tête qu’il tirait parce que c’était bien plus parlant que tous les mots qu’il pourrait trouver. D’ailleurs, il n’en avait pas pour le coup, ça ne sortait pas de sa bouche. Et un long, très long silence s’installa, parfois coupé parce quelques rires nerveux. Là, il n’était plus du tout question de Devan et de son ennui, de ses problèmes, il n’avait même pas pris le temps de répondre aux conseils de son frère. Trop sonné par cette surprenante nouvelle…
Liam aurait presque pu croire que Devan s’était barré tant il n’avait rien dit depuis maintenant de longues minutes. Il se frotta la nuque et ouvrit enfin la bouche. « Désolé… mais j’sais pas quoi dire là. » Plein de questions lui venaient en tête. Quel âge avait le gamin, qui était la mère, depuis combien de temps était-il au courant ? Et surtout, très important selon lui, Liam le lui aurait-il dit s’ils ne s’étaient pas revus ? Devan n’en était pas persuadé et même s’il comprenait parfaitement que ce ne soit pas évident avec tout ce qu’il s’était passé entre eux, ça le vexait un peu. En fait, tout résidait dans une seule question : depuis combien de temps était¬-il au courant.

Cependant, Devan mit sa petite fierté de côté pour le moment. L’accabler de reproches ça n’était sans doute pas la meilleure chose à faire… Surtout qu’ils venaient à peine de se retrouver. Et puis si on y réfléchissait bien, il était quand même le premier de la famille à être au courant et mine de rien ça voulait dire beaucoup. « J’ai plein de questions qui me viennent mais j’suppose que t’en as tout autant de ton côté… J’ai du mal à saisir si c’est une bonne ou une mauvaise nouvelle. » Avoir un enfant qui n’était pas prévu pouvait engendrer beaucoup de problèmes. Encore plus quand on souffrait d’un handicap aussi sévère que Liam. « Comment tu te sens par rapport à ça ? » Parce que c’était probablement le plus important au final.
Devan n’arrivait pas à réaliser. Liam, papa. Et lui il était tonton ! Il n’avait jamais songé à cette éventualité parce qu’à trente ans, il n’était toujours pas casé – et Liam non plus aux dernières nouvelles. Et s’il n’était pas allergique aux enfants, il n’était toutefois pas très apte pour s’en occuper. Malgré ça… Devan se surprit à vouloir rencontrer ce petit bout de chou. Mais il n’osa pas le dire, pas tant qu’il ne connaissait pas les détails. Peut-être que Liam refusait sa paternité – même si ça l’étonnerait fortement. « J’en reviens pas sérieux… est-ce que je connais la mère ? » Il n’avait pas pu s’empêcher de lui poser la question ! Foutue curiosité…

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Devan & Liam

Pour le coup, Liam n'avait pas été très délicat dans sa façon d'annoncer qu'il avait un enfant. C'était Devan qu'il avait devant lui. Les deux garçons ne passaient jamais par quatre chemins lorsqu'ils avaient une annonce à faire. Peut-être que Liam aurait dû attendre un peu. Mais y avait-il un bon moment pour avouer cela ? Il n'en était pas certain. Le long silence qui s'installa était hautement parlant, mais Liam ne regrettait pas de l'avoir fait. Il était même content de l'avoir annoncé en premier à Devan, preuve étant qu'il avait toujours une énorme considération à son égard. Il était son frère, il avait été son meilleur ami et son confident. Peut-être que tout n'était pas détruit. Le jeune homme esquissa un léger sourire quand, après de longues minutes, Devan lui avoua qu'il ne savait pas quoi dire face à cet aveu. "Je te rassure, j'étais dans le même cas que toi." Si ce n'était que pour lui, cela avait été pire encore. Parce qu'il s'était pris en pleine face le fait qu'il était père, qu'une part de lui-même existait sur cette Terre et qu'il devait assumer ses responsabilités. Sur ce dernier point, cela n'était pas étonnant venant de Liam. Il était une personne responsable et il ferait tout pour que cet enfant soit heureux. Il avait raté les deux premières années de sa vie et il espérait rattraper le temps perdu. Malgré ses peurs et sa condition qui rendait la situation d'autant plus délicate.

La voix de son frère le fit sortir de ses pensées et les paroles qu'il eut firent hausser les épaules au dernier des Matthews. "Bah j'ose espérer que c'est une bonne nouvelle." Mais Devan avait le don pour mettre le doigt sur les doutes de Liam. Et la question qu'il eut ensuite ne dérogeait pas à cette règle. Comment se sentait-il face à cette situation ? Liam fronça les sourcils, songeur. A vrai dire, il ne s'était pas réellement posé cette question. Ou du moins, il n'avait jamais exprimer sa réponse à voix haute. "Bizarrement, je le prends bien. Bien sûr, ça me fiche la trouille. Je ne sais pas si je serai à la hauteur ou si je serai un bon père, mais je n'ai pas envie de faire l'autruche. C'est mon enfant, je n'ai pas le droit de le laisser tomber." Certes, il n'était pas prévu, mais Liam s'était fait à l'idée que s'il était là, c'était pour une bonne raison. Fonder une famille restait dans ses objectifs, même si son accident avait fait passer d'autres priorités avant celle-ci. Quand Devan s'exclama qu'il n'en revenait pas, Liam se mit à rire, histoire d'alléger l'atmosphère après une telle nouvelle. Mais son frère posa LA question, à savoir l'identité de la mère. Il se gratta la nuque, geste qu'il avait à chaque fois qu'il était embarrassé. "Ouais, tu la connais." Pour la principale intéressée, l'identité du père de Sasha était presque un secret défense. Liam, lui, n'avait pas envie de le cacher, du moins à sa famille. "C'est Charley." Toute la famille de Liam la connaissait. Elle était son ex-coéquipière, celle avec qui il avait subi l'accident. Celle contre qui il avait râlé à tout bout de champ, en disant ô combien elle les lui brisait. "Je sais, c'est bizarre. ça s'est passé juste avant mon départ de Bowen. Je ne sais pas ce qui nous est passé par la tête, mais ça a dérapé. Puis, je suis parti et Madame a estimé que ce n'était pas la peine de m'annoncer sa grossesse". C'était encore une sacrée histoire. Liam ne faisait jamais les choses à moitié. "Elle m'a avoué la vérité, il y a quelques jours à peine. Tu as donc un neveu âgé de deux ans et qui s'appelle Sasha." Le dire tout haut, ça le faisait se rendre compte que oui, tout cela était bien réel.

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Il sourit automatiquement quand Liam lui avoua que c’était une bonne nouvelle selon lui. C’était ce que Devan voulait entendre ! De toute façon il s’en était douté… Il connaissait son frère, et ils étaient très différents. C’était justement pour cette raison qu’il avait plutôt bien deviné la réponse de son frère ; parce que lui, à sa place, il aurait absolument pété un câble. Il était le plus âgé des deux pourtant c’était Liam le plus responsable. Celui qui ferait perdurer leur nom, probablement. Celui qui aurait une vie bien rangée avec une petite femme et des enfants. Bon, pour l’heure il n’y avait que l’enfant et en général c’était la finalité plutôt qu’un commencement, mais c’était mieux que rien. « Arrête, tu vas faire un père génial. T’étais déjà un très bon grand frère pour moi… » Oui, c’était Devan le plus vieux mais dans leurs rapports ça ne s’était que rarement ressenti. Liam s’était toujours comporté comme un grand frère avec l’irresponsable qu’était le chef cuisinier. Sauf à quelques rares exceptions, peut-être… Le simple fait de l’avoir remis dans le droit chemin, malgré tout ce que ça impliquait, montrait les capacités de Liam à être un bon père. « Ce gamin a d’ailleurs beaucoup de chances de t’avoir. Et j’espère que t’as bien entendu parce que je ne le dirais plus ! » Il fit un clin d’œil par réflexe… Avant de se rappeler que Liam ne le voyait pas. Oui, ça allait lui prendre un moment avant de s’habituer à la situation !
Merde. Il réalisa soudainement ce que ça voulait dire. Liam ne verrait jamais son enfant, et ça c’était peut-être la chose la plus triste puisse lui arriver. Une grimace déforma son visage mais il préféra ne pas lui demander comment il se sentait par rapport à ça. S’il pouvait se réjouir pour son frère plutôt que de lui donner envie de se pendre, c’était mieux !

« J’avoue que je n’aurais pas misé sur Charley. » Mais la vie était faite d’imprévus et parfois les choses ne se passaient pas du tout comme on l’aurait cru. S’il arrivait à bien s’entendre avec elle pour le bien de leur enfant, tant mieux et Devan n’avait pas son mot à dire. Même si le fait qu’elle ait attendu si longtemps pour lui dire le laissait perplexe. Lui, il aurait encore une fois très mal réagi. Quand Liam prononça le mot de neveu, il sourit comme un débile. Oui, il était devenu tonton. Comme ça, d’un coup, en dix secondes… Et s’il n’était pas certain de savoir comment s’occuper d’un enfant ni même s’il avait vraiment le feeling avec eux, il lui tardait de rencontrer ce gamin. « Sasha… Tu crois que je pourrais le voir bientôt ? Mon neveu… » Il ne se serait jamais cru aussi sentimental. Mais c’était son neveu bordel. Il se frotta la nuque. « Bon bah du coup j’suis désolé de te décevoir, j’ai pas d’aussi grosses nouvelles à t’annoncer moi. » Signe encore une fois que sa vie était pathétiquement ennuyante. « Dis… il commence à faire frais, et j’pense qu’on a tellement de choses à se dire… ça te dirait pas de venir dormir chez moi ? »

Blood Brothers

Devan & Liam

Bizarrement, Devan avait davantage confiance en les qualités paternelles de Liam que Liam lui-même. Le jeune homme se mit à rire quand Devan lui confirma qu'il avait été un bon grand frère pour lui. "Tu parles, j'ai quand même fait de bien belles conneries avec toi aussi. Là, je ne vais pas avoir le droit à l'erreur." Certes, Liam avait souvent remis Devan dans le droit chemin, mais il avait aussi su être un parfait complice pour quelques bêtises bien menées. C'était bien connu, quand Devan et Liam étaient ensemble et sur la même longueur d'ondes, rien ne pouvait les arrêter. Le jeune homme esquissa un sourire, nostalgique. C'était leurs belles années, quoique l'on puisse dire.Quand Devan reprit la parole, en lui affirmant que Sasha avait de la chance d'avoir un père comme lui, Liam fut extrêmement touché. C'était son frère qui lui disait cela, cela avait donc davantage d'impact sur lui. "Je vais essayer de m'en souvenir alors." répondit-il avec un sourire ému, faisant un léger signe de tête en guise de remerciement.

Il avait fini par dire que Charley était la mère de son fils. Liam allait peut-être se faire trucider suite à cela, mais il s'en contrefichait. Il n'avait pas honte de dire qu'il avait un fils avec elle. Il ne regrettait pas ce qu'il s'était passé entre eux. Même si cela semblait inattendu. La réaction de Devan confirma cela, puisqu'il n'aurait jamais misé sur elle. "Il y a quelques années, j'aurai dit la même chose." lâcha-t-il en riant. Puis, finalement, Liam avait fini par se dire que cela était inévitable. Ils avaient un lien bien trop fort, qui ne relevait pas de l'amitié ou du simple attachement. Quand il parla de Sasha, Liam hocha la tête face à la question de son frère. "Bien sûr ! Je vais essayer de l'amener, les prochains jours." Il s'arrêta un instant, avant de reprendre, amusé : "Je suis sûr que tu feras un super tonton. Par contre, il faudra que tu innoves au niveau des bêtises à lui apprendre, parce qu'il y en a pas mal que l'on a fait ensemble." Un rire s'échappa de ses lèvres, lui fichant une légère tape sur l'épaule. Mais quand Devan lui affirma ensuite qu'il n'avait pas d'aussi grosses nouvelles à lui apprendre, ses paroles firent echo aux confidences faites quelques minutes auparavant. Il avait une vie bien trop rangée, lui avait-il dit. "Je suis sûr que tu as deux-trois infos croustillantes à me dire !" Si Liam n'avait pas eu Sasha, lui-même n'aurait rien eu à dire à Devan. Sa vie était uniquement rythmée par son handicap. Face à la proposition que lui fit son frère, Liam répondit, sans même hésiter : "Avec plaisir. Ce serait bête de chopper la crève, quand même !" Ce n'était pas que cela, bien évidemment. Ils avaient, en effet, énormément de choses à se dire. Liam déplia sa canne blanche et se tourna vers son frère. "Je te suis !"