take one- ft. Ryder

Nous étions tous les deux accoudés à la rambarde du balcon et nous étions tous les deux pensif à regarder le vide. Nous étions bien similaire du'n côté, je commençais à vraiment apprécier ce type. De l'alcool et du tabac, nous étions pareil sur ce point là et c'était top. Je cherchais un peu à savoir, curieux, le pourquoi du comment il avait choisit cette petite ville Australienne. Il m'expliqua alors qu'il n'avait pas forcément de choix précis pour sa destination mais qu'il voulait partir loin des Etats-Unis et de l'Europe pour fuir un fantôme. Je ne savais pas trop de quoi il parlait mais je ne voulais pas rentrer dans les détails non plus, c'était personnel et nous ne nous connaissions pas encore assez pour que je demande. "On va dire que moi aussi, je suis venu chasser un fantôme. New-York devenait un peu pesant pour moi" répondis-je avec un petit sourire en coin. Le souvenir de mon père était partout lorsque j'étais là bas. Je le voyais à chaque endroit où j'allais et je ne pouvais plus vivre cette chose qui me rongeait au fur et à mesure.

Arthur leur versa à chacun encore un peu de whiskey avant de jeter du bout des doigts son mégot de cigarette. Il eut un moment de silence, ce qui était impression ces qu’entre eux, deux parfaits étrangers, ces moments n’étaient pas trop lourd. Il ne ressentait pas le besoin de vider les vides de la conversation par des paroles vides de sens. Ryder porta à nouveau le verre à ses lèvres, l’air de rien. Arthur rigola un peu.

- Tu tiens bien l’alcool…c’est rare qu’on réussisse à me suivre quand je me mets sur du whiskey. Mais bon, je dirais pas ça trop fièrement…

Il se racla la gorge, tendant de prendre un air sérieux, mais il ne peut s’empêcher de continuer en riant un peu.

- C’est une une mauvaise habitude…mais j’ai pas l’impression de le dire à quelqu’un chez qui ça va changer grand chose, je me trompe? Et faudrait d’abord que je l’applique moi-même j’imagine.

Il prit une gorgée de son verre.

- Un fantôme à New York…et un autre qui se balade entre L.A. et Rome…

Il jeta un œil sur la rue, observant les gens qui passaient.

- Il doit en avoir un peu partout, des fantômes. Mais depuis que je suis ici toutes les personnes que je rencontre sont venues les fuir ici, à croire qu’ils se promènent pas en Australie...

Il regarda à nouveau Ryder, un air plutôt doux sur le visage. Il ne pouvait pas savoir ce que ce jeune homme avait perdu. Il espérait simplement que ce n’était pas trop grave…L’alcool commença à lui délier la langue… il avança quand même une question.

- Ça fait longtemps qu’il se promène à New York ton fantôme?

Comme on dit, l'alcool délie les langues. Et avec Arthur, je me sentais de plus en plus en confiance au fur et à mesure de notre avancé alcoolisé. Il était un peu comme moi, on dirait. A vouloir chasser des esprits et des démons qui hantent les journées. Malheureusement, c'est l'alcool qui m'aide et depuis bien trop longtemps maintenant. Quand je pris une gorgée de mon verre, je pu voir que Arthur ria légèrement en me disant que je tenais pas mal l'alcool quand même. "C'est parce que je commence à avoir pas mal d'entraînement" répondis-je à mon boss. C'est bizarre de se sentir aussi bien pendant un entretien avec son nouveau patron. Mais tant mieux si les relations sont comme celle là ! J'observais les gens passer dans la rue en bas du balcon où vous étions. Ensuite, il me demanda si mon fantôme se balader depuis longtemps. "Depuis maintenant 10 ans, le fantôme de mon père..." répondis-je un peu mélancoliquement. Avec l'alcool, je suis plus sociable et plus apte à parler de ça même si ça fait quand même un peu mal. Je me tournais vers Arthur et lui fit un sourire pour ne pas avoir l'air trop triste.

Arthur regarda le sol, pensif. Il se doutait bien qu’en posant la question il avait couru le risque de toucher un sujet délicat…mais il n’avait pas pu s’en empêcher. La curiosité…mais probablement aussi une envie enfouie et malsaine de se sentir un peu moins seul l’avaient poussé à le demander.

Dix années passées depuis la mort de son père…et ce Ryder n’était pas bien vieux, probablement plusieurs années plus jeunes que lui...ça brisait le cœur. Il pensa à son propre paternel en Italie. Ils étaient très proches, cet homme l’aidait dans tous ses aspects de sa vie, son expérience en tant que réalisateur lui était précieuse, mais ses conseilles et son affection encore plus. Ses yeux parcoururent le cadreur. Cet endurcissement envers l’alcool provenait probablement et malheureusement de méthodes compensatoires qu’il utilisait pour vivre chaque année avec cette perte.

Mais bon…Arthur n’était pas psychanalyste…ou du moins il était lui-même dans un état émotionnel plutôt faible. Les mots lui manquaient. Il se contenta de les resservir les deux.

- Je suis désolé. Ça n’a pas du être toujours facile…T’as grandi avec lui à New-York?

Il pensa à Deb’ et à comment il se sentirait après 10 ans. Ce n’était pas un père…mais il ne voyait pas le bout de cette peine. Il était surpris de la tournure qu’avait pris cette rencontre, mais il en appréciait le naturel.

La vue de ce balcon était plutôt belle. On voyait les gens passer dans la rue et les hauts de la ville de Bowen. Un paysage que mon père aurait surement aimé voir. Il regardait toujours loin devant lui, à scruter l'horizon. Je tiens surement ça de lui d'ailleurs. Sur mes pensées, je finis mon verre d'une traite. L'alcool m'aidait beaucoup trop à oublier, même si je n'ai pas forcément la gueule d'un alcoolique, je buvais trop souvent. Arthur me demanda ensuite si j'avais grandi avec lui à New-York. "Oui, jusqu'à mes 14 ans, pour moi mon père était mon idole, la personne que je voulais être. Alors j'essais comme je peux de faire ce qu'il ferait à ma place dans mon quotidien" annonçais-je à Mr. Morricone. Maintenant que ma soeur était à Bowen, je me sentais moins seul. Beaucoup moins seul que quand je suis arrivé ici. La vie est plus belle entourée de sa famille et de ses amis. Cette rencontre avec Arthur était différente de ce que je pouvais en penser avant d'arriver. En fait, c'est un homme un peu comme moi qui a vécu des choses difficile et qui est fasciné par le 7ème art. J'étais très heureux de rencontrer un homme comme ça.

Quelques nuages un peu moroses pointèrent le bout de leur nez au dessus de leur tête et un vent sournois s’était soulever faisant danser la cravate d’Arthur sur sa poitrine. Il n’y prêta guère attention, concentré sur sa la réponse de Ryder à sa question. Le jeune homme s’était légèrement ouvert. Il ne pouvait que respecter ce courage que lui-même n’avait pas réellement, malgré le fait qu’il soit son ainé…mais il était peut-être un peu trop dur envers lui-même. La mort de Deborah était beaucoup plus récente.

Il trouva touchant la façon qu’il avait de parler de cet homme. Il arborait en n’en parlant ce regard d’enfant impressionnable, comme si la mort de son père, alors qu’il n’avait que quatorze ans, avait figé pour toujours ce sentiment que l’on a pour nos parents; cette impression qu’ils sont invincibles. Cette confidence valait pour lui toutes les entrevues frigides du monde.

- Alors il boirait la moitié d’une bouteille de whiskey un après-midi avec un cinéaste qui a peu la déprime? fit-il en rigolant.

Il rigola un peu et poursuivit plus sérieusement :

- Je suis sûr qu’il serait fier, mais je pourrais encore mieux le dire si tu acceptais de travailler avec moi!

Il ne ressentait pas le besoin de pousser davantage le suspens. Il était déjà pas mal convaincu, après ses recherches et finalement cette rencontre, que le jeune Ryder serait un bon élément dans son équipe de production.

Nous parlions, de notre vie, de tout de rien. Cet entretien n'était plus trop un entretien mais on apprenait à se connaître et j'appréciais fortement cette tournure. Arthur était un homme un peu comme moi, rongé par un problème du passé qu'il cherche toujours à résoudre ou alors dont il cherche à se remettre. Quand je parlais de mon père, je montrais tout ce que je pouvais pour en faire de lui un homme exceptionnel. Enfin à mes yeux, il l'était et j'aimais parler de ce qu'il m'a apprit même si cela faisait mal au coeur. Je souris à Arthur quand il demanda s'il boirait une bouteille de whisky avec un cinéaste déprimé. "Oh, ce serait tout à fait le genre de mon père, mais il aurait surement déjà fini la bouteille !" répondis-je avec un petit rire à mon interlocuteur. Le cinéaste devenait de plus en plus sérieux car il me dit que mon père serait surement fier si j'acceptais de travailler avec lui. "Ce serait même un honneur" répondis-je simplement en souriant. Sa proposition était sympathique, et j'acceptais volontiers de découvrir de nouveaux horizons au niveau du cinéma. Alors pourquoi pas collaborer avec Arthur Morricone sur ce nouveau projet !

Un honneur…

«Attends au moins qu’on ait fini celui-là…après on verra si c’est un honneur! J’avoue que c’est le projet le plus important que j’entreprends depuis qu’ai j’ai débuté dans le métier. Cette fameuse question de créer pour l’Art tout en générant des bénéfices qui ne m’endetteront pas se pose très sérieusement pour moi en ce moment. Je trouve ça assez difficile….J’espère pouvoir être fier du résultat, mais aussi de toucher une certain rendement…Je suis un de principaux investisseurs…si ça marche pas je vais vraiment perdre beaucoup, mais en plus je vais avoir les autres sur le dos».

Il se passa une main dans les cheveux. Quelques gouttes de pluie se mirent à tomber. Un frisson lui parcourut les bras et subitement, sans qu’il ne le voie venir, il lâcha un énorme éternuement en direction de Ryder. Oups. Espérant qu’il ne l’avait pas trop indisposé, il se mit à rire.

«Okay, il faut rentrer là!»

Il s’engouffra à l’intérieur n’oubliant pas d’attraper au passage la bouteille de whiskey.

Il pris leur deux verres et les déposa sur son bureau. En les servant encore une fois, d’un mouvement de tête, il lui indiqua l’emplacement du script.

- Tiens, prends-en une copie.

Arthur me proposa carrément de travailler avec lui. Quelque chose que j'ai énormément apprécier sur le coup car il m'a laissé le choix. J'adorerais travailler avec lui et changer d'univers. Il avait vraiment son univers à lui et sa vision des choses. C'est ça que j'adorais chez lui en fait. "Eh bien je suis ravi de collaborer pour cette expérience qui va être au top j'en suis sûre !" dis-je avec un petit sourire à mon interlocuteur. La pluie commençait à tomber, enfin quelques goutes mais bon ce n'était pas forcément agréable alors Arthur me proposa de retourner à l'intérieur. Le cinéaste prit nos deux verres pour nous resservir un peu de whisky, pourquoi pas, continuons dans notre alcoolisme vu qu'on a l'air de bien se compléter là dessus. Le script était posé sur la table, il me le montra d'un mouvement de tête pour que j'en prenne une copie. "J'ai hâte de le lire !" répondis-je à Arthur en souriant. J'avais surtout hâte de voir le déroulement de l'histoire et de voir comment j'allais m'organiser avec mes plans de caméras et surtout commencer à chercher des endroits à filmer par rapport aux scènes décrites.

Il regarda le jeune homme s'approcher de la table et prendre le script du bout des doigts. Il avait hâte de le lire lui disait-il. Arthur laissa un sourire se glisser sur ses lèvres, content de le voir aussi motivé.

- Ce n'est pas encore une version finale, mais presque. Tu vas avoir tout ce que tu as besoin pour commencer à réfléchir sur quelques plans. J'ai d"ailleurs, sur certaines scènes, laissé des indications.

Il prit une gorgée de son verre et en fit tourner les glaçons.

- J'aimerais d'ailleurs avoir un feedback assez rapide sur ta lecture. Je veux commencer les storyboard dans deux semaines.

Il gardait un air calme, tentant de cacher sa nervosité à Ryder, qui de toute façon ne pouvait pas l'aider sur tous les aspects de la production. Pas besoin de le stresser pour rien. Mais bon. En réalité, il était en retard sur son échéancier et il allait devoir un peu mettre la pression sur Ryder...en espérant qu'il allait être capable d'en prendre. Il avait beau travailler comme un acharné, seul, il n'arrivait pas à tout gérer. Il avait agit en coup de tête. Partir seul en Australie, sans réelle équipe et des tonnes d'investisseurs races sur le dos qui attendait de lui des garanties du succès du projet.

- Pas besoin de te dire que ce dont je vais avoir besoin le plus rapidement sont des idées d'endroits pour les scènes tournées à l'extérieur. Heureusement, on a pas mal carte blanche...Je n'ai pas encore de régisseur, ni d'assistant à la production...alors ça me gène un peu de demander cela. Mais si tu pouvais m'arriver avec quelques endroits...ce serait vraiment super. J'ai conscience que la taille de l'équipe va faire en sorte que tu auras probablement plus de travail que les tâches habituelles qu'on te demande normalement...mais je peux offrir un bon salaire pour compenser.

Le script dans les mains, j'avais vraiment hâte de le lire comme je le disais à Arthur. Il m'expliqua alors que ce n'était pas la version finale du scénario mais que c'était un bon début. Avec les indications du réalisateur, je pourrais trouver vite quelques endroits pour tourner, quelques prises à faire par rapport aux scènes. D'ailleurs, il me dit qu'il avait laissé quelques indications sur le script pour certains plans à des scènes particulières. Il voulait un retour du script d'ici deux semaines, ce que j'en pensais.

"Je m'y mets au plus vite alors" dis-je plein d'enthousiasme.

Ce genre de réalisation, je ne connaissais pas. Et encore moins ici, en Australie car c'est le premier contrat que je trouve depuis que je suis arrivé à Bowen. Arthur avait l'air d'être un peu nerveux, surement à cause des délais de tournage et d'autres. Mais rien ne me faisait peur. Il me signala ensuite qu'il avait besoin d'idée pour des endroits où tourner, je ne connaissais pas bien la ville mais j'allais explorer Bowen de font en comble pour trouver ce que je verrais de mieux pour le films de l'américain.

"Je ferais de mon possible, j'accepte le défi!" annonçais-je au réalisateur.

Je voulais qu'il voit que je n'avais pas peur de relever des défis et que la pression ne m'effrayait pas. On m'a apprit que dans le cinéma, beaucoup de choses pouvaient être faites de façons rapides et sur des coups de tête et c'est pour ça que j'ai fais ça. Par contre, ce n'est pas pour autant que je baclerais mon travail.

Arthur était pour le moins soulagé de cette rencontre. Bowen n'était pas Los Angeles et trouver une équipe solide n'allait pas se montrer tâche facile. Il avait eu quelques autres entretiens pour le poste de Ryder, mais peu...et la liste était courte en réalité. Il avait eu peur de devoir engager quelqu'un par dépit et non pas par réel intérêt. Heureusement, ce ne fut pas le cas. Ryder était en candidat chez qui il voyait un bon potentiel, mais par dessus tout, avec qui il se voyait travailler étroitement en équipe. La bouteille était presque vide. Il la termina en séparent la portion restante dans leur deux verres puis leva le sien en direction du jeune homme.

- À notre collaboration alors!!!

Ce dernier tapa son verre contre le sien, leur regard rendue brillants pas l'alcool se croisèrent et ils rirent sans raison, probablement simplement heureux de s'être respectivement trouvé. Ils allaient bien s'amuser.

- Si tu acceptes le défi, je serai pas gêné de t'en poser un! Mais on en sortira que meilleurs! Alors il faudra d'abord trouver les endroits de tournages....D'ici notre prochaine rencontre, j'espère bien avoir déniché notre régisseur et les studios devraient être alors bouqués rapidement. Ce sera de superviser les storyboards. Je veux que tu t'intègres dans le processus dès ce moment là...même si je sais que c'est un peu tôt dans la production. Je veux qu'une fois sur le plateau tu connaisses le projet sur le bout des doigts, puisqu'on aura pas beaucoup de temps de tournage...

Ils discutèrent ainsi pendant un moment...une autre bouteille s'ouvrit, le soleil descendit tranquillement au fil du temps qu'ils passaient ensemble et il se firent la promesse de se revoir la prochaine fois en amis....