black and white (effy)

La jeune femme sourit en voyant Manny commander immédiatement un verre d’eau. Il était mignon, avec ses réflexes tout innocents. Comme si ne pas prendre ce verre d’eau maintenant signifiait signer son arrêt de mort. Elle n’y aurait sans doute pas prêté attention si ça avait été quelqu’un d’autre, mais avec le garçon, c’était différent. Comme elle l’avait dit, elle ne laisserait pas quoi que ce soit lui arriver. Même si on pouvait douter de ses capacités à préserver quelqu’un, même si Effy était sans doute catégorisée comme quelqu’un d’irresponsable, elle aurait tout fait pour qu’il n’arrive rien à Manny, elle aurait en tout cas essayé. Malgré sa fâcheuse tendance à foirer les choses et les gens. Pour le coup, elle serait attentive, un minimum, et comme elle l’avait dit, il ne risquait franchement pas grand-chose avec un quart de pilule. Le pire qui puisse arriver, c’était que ça ne lui fasse rien. C’était pas avec une si petite dose qu’il allait devenir un danger public, pour lui ou pour les autres. Et on restait tout de même étonnamment lucide avec l’ecstasy. Simplement plus… Débridé. On se posait moins de questions. « Un cap ou pas cap, ça te tente, avant d’aller danser ? » proposa-t-elle avec un coup d’œil malicieux, joueuse. Rien de bien méchant, juste quelques défis pas trop dévergondés pour préparer le terrain en douceur. C’était ça, sa proposition. Après, Manny pouvait toujours opter pour autre chose, elle lui laissait le choix de l’activité sans soucis. Ce soir, c’était pour lui, pas pour elle. L’anglaise voulait qu’il profite, qu’il s’amuse, qu’il passe un bon moment dont il se souviendrait longtemps, et qu’il soit heureux d’avoir lâché prise, rien qu’un instant.

Tu ne peux t’empêcher de te demander si tu as pris la bonne décision. Évidemment maintenant c’est trop tard pour revenir en arrière mais tu ne peux t’empêcher d’imaginer tous les scénarios qui pourraient mal se passer. L’inconnu te fait peur mais tu aimes aussi ça, tu aimes repousser tes limites, découvrir de nouvelles choses. Il se trouve qu’avec Effy ces choses ne sont pas vraiment légales et que tes amis ou ta famille ne seraient pas d’accord avec les décisions que tu prends. Tu espères seulement qu’elle a raison, que tu ne vas pas devenir accro en une fois ou alors que tu ne vas pas faire de conneries que tu pourrais regretter toute ta vie. Tu essaies de te détendre mais ce n’est pas simple. Tu vois bien qu’elle se moque gentiment de toi en te voyant pas très rassuré face à ce qui t’attend. Elle te propose de faire un cap pas cap en attendant, le genre de truc qui peut facilement dégénérer. Elle parle aussi d’aller danser. Tu n’es pas contre l’idée mais rien qu’à y penser tu te décomposes. Tu as du mal à être devant des gens, à te lâcher alors danser, à part seul dans ta chambre, tu évites globalement. « Ok. » dis-tu seulement à sa proposition. Tu fais régulièrement ce genre de trucs avec Jewel mais tu n’es pas sûr que les défis d’Effy soient du même genre. « Je te laisse commencer, le temps que je trouve quelque chose. Mais je pense pas qu’il y ait des défis que tu veuilles pas relever. » Tu vois Effy comme la fille qui ose tout, qui n’a peur de rien et qui ne dira pas non à un cap pas cap, peu importe ce que c’est.

Une once de tension était palpable en provenance de Manny, qui le connaissant, regrettait peut-être déjà de s'être laissé entraîner là-dedans. Mais il était hors de question qu'elle le laisse y accorder plus de réflexion, c'était comme ça qu'on risquait de passer un mauvais moment en angoissant pour rien, au lieu de se laisser porter et de profiter. Elle lui coula simplement un regard félin et malicieux, plutôt destiné à le rassurer, et également à le mettre un peu au défi. Ça le sortirait de son stress inutile à propos d'une malheureuse pilule, même pas entière. Un petit rire bref s'échappa des lèvres de la belle brune devant l'air déconfit du costaricain, après sa proposition, et s'il accepta, c'était du bout des lèvres. Mais la jeune fille n'était pas du genre à le laisser s'en tirer comme ça, elle savait que le faire aller danser représentait une étape signifiante pour lui, et c'était bien là-dessus qu'elle comptait. « Tu me connais bien, Manny, mais il ne faut jamais dire jamais. » rétorqua-t-elle quand son ami affirma qu'il n'y avait sûrement rien qu'elle refuserait de faire. Peut-être. Mais on ne sait jamais. Des choses inattendues pouvaient parfois se produire. « Très bien, on va partir sur un jeu de rôles. » lança-t-elle après une gorgée de sa boisson et un éclaircissement de voix. Elle chercha autour d'elle, ses iris d'un bleu perçant sondant la salle, jusqu'à trouver une proie potentielle, se léchant presque les babines de satisfaction. « Tu vois le beau tatoué là-bas, brun, avec sa bière et son pote ? » fit-elle en désignant à peine discrètement du doigt la cible de son jeu. « Cap d'aller me chercher son numéro. Et je jouerai les filles timides et prudes. » continua-t-elle en reportant son regard étincelant sur Manny, le défiant du regard. Autant l'entraîner d'abord sur des mecs et pour le compte de quelqu'un d'autre, avant de le lâcher dans la fosse aux lionnes qui lui faisait si peur.

Tu paniques forcément un peu. Effy a tendance à pas mal te faire sortir de ta zone de confort. Même si tu aimes ça parce que tu es curieux de tout, tu aimes bouger, vivre de nouvelles expériences, une partie de toi ne peut pas s’empêcher de flipper un peu quand même. De toute façon il est trop tard maintenant pour flipper, tu as pris cette moitié de pilule, tu ne peux pas revenir en arrière. En plus de ça, si tu ne sens pas encore ses effets, tu commences à sentir ceux des verres que tu as bu avant. Tu te sens un peu engourdi mais aussi un peu plus sur de toi. Pas de quoi jouer les Don Juan mais tu penses que tu pourrais parler sans bégayer, ce qui est déjà pas mal. Tu as peur de ce que ton amie va te proposer, forcément quelque chose qui va te faire grincer des dents. Elle te demande d’aller choper le numéro d’un mec. Tu paniques. Elle n’est pas au courant qu’homme ou femme ça change rien pour toi, tu deviens rouge comme une tomate devant les deux. Tu as seulement parlé de tes doutes sur ta sexualité à ta meilleure amie et à sa sœur. Tu hoches la tête et bois une gorgée de ton verre pour te donner une contenance, même si c’est que de l’eau. « Ok, mais j’te garanti rien. J’sais pas comment on fait. » dis-tu peu sûr de toi avant de te lancer. Tu vas vers le type en priant intérieurement pour ne pas être déjà rouge comme une tomate. « Salut ! » lances-tu avec un air gêné. Tu prends une grande inspiration avant de dire « Mon amie te trouve très mignon et aurait bien aimé avoir ton numéro. » Pire tentative du monde ! Tu t’empresses d’ajouter, plus bas, pour être certain qu’Effy n’entende pas « En vrai tu peux me donner un faux numéro, j’ai juste besoin qu’elle y croit. » Premier point, tu n’as pas bégayé ce qui est un exploit, faut dire que tu as évité le regard du type tout le long. Tu vois le gars demander un stylo au barman avant d’attraper ton bras pour y écrire un numéro. Il ajoute ensuite « J’préfère que ce soit toi qui m’appelle plutôt que ton amie. » Cette fois c’est certain, tu deviens rouge. Sans le regarder tu te retournes et reviens vers Effy, triomphant.

Eff’ hocha la tête d’un air amusé, comme une mère qui envoie son enfant sociabiliser en ayant une totale confiance dans sa capacité à se faire des amis. Elle ne s’inquiétait pas le moins du monde. « Ça viendra tout seul. » rétorqua-t-elle comme seul argument potentiellement rassurant, alors que Manny se lançait dans la direction du mec qu’elle avait choisi. Elle observa de loin, entièrement focalisée sur la scène, ne détachant pas son regard des deux protagonistes, et envoyant un clin d’œil accompagné d’une langue passée rapidement sur ses lèvres, à l’attention du tatoué. Timide, mon cul. Mais c’était trop amusant pour qu’elle ne s’en empêche. Et finalement, elle put admirer le gars écrire ce qui devait être son numéro de portable sur le bras d’un Manny visiblement tout retourné. Son sourire victorieux sur le chemin du retour arracha un rire heureux à la belle anglaise. « Ben alors, t’essaies déjà de me piquer mon plan de ce soir ? » railla-t-elle en désignant d’un regard tendancieux les chiffres écrits à même la peau. C’était de toute façon pas dans son idée de réellement contacter ce gars et d’essayer de le mettre dans ses draps, tout ça n’était qu’un jeu. Un jeu qui l’amusait déjà beaucoup. « Congrats, et un défi d’accompli. » fit-elle ensuite en riant en trinquant son verre d’eau contre celui du costaricain. « J’imagine que c’est à mon tour de faire mes preuves… » souffla-t-elle en plongeant ses iris étincelants dans ceux de son ami, le défiant presque de lui donner une tâche à accomplir. Elle n’était pas le moins du monde intimidée et attendait la suite, presque impatiente.

Elle tente de te rassurer. Peut-être que pour la plupart des gens ça vient tout seul comme elle dit, mais t’es pas comme la plupart des gens justement. Tu as du mal à parler à des inconnus, surtout quand tu trouves ces inconnus plutôt mignons. Mais tu ne vas pas lui dire que tu trouves ce gars mignon, tu n’assumes pas, tu as peur de ce qu’elle pourrait te dire, de la manière dont elle pourrait te voir. Tu te dis qu’Effy ne te jugerait pas là-dessus mais tu as trop peur du regard des autres pour lui dire quoi que ce soit. Finalement tu reviens tout fier de toi, enfin, avec un sourire aux lèvres, tu ne vas pas exploser de joie non plus. A présent tu as le numéro d’un mec mignon sur le bras, tu ne l’appelleras jamais parce que tu n’en as pas le courage mais cette expérience positive et l’alcool t’aide à avoir un peu plus confiance en toi. « Non, je te le laisse. » réponds-tu lorsque la demoiselle te demande si tu essaies de lui piquer son plan. Tu ne voudrais pas venir interférer dans ses affaires et tu restes persuadé que tu n’as aucune chance avec ce gars. Elle te félicite quand même pour ton défi et te demande à présent le sien. Tu n’as aucune idée de ce que tu pourrais lui demander, tu te dis que tout serait trop fade pour elle, rien d’assez excitant, contrairement à toi où le fait de seulement parler à un inconnu est déjà une épreuve en soi. « Hummm…tu dois aller danser comme une folle sur la piste de danse et faire comme si t’étais complètement bourrée. » Ce n’est pas grand-chose mais ce te fait rire de l’imaginer danser n’importe comment.

Son regard iceberg sonda quelques instants le garçon, sourire énigmatique aux lèvres, alors qu’il assurait qu’il lui laissait. « Comme tu veux. » dit-elle simplement avec un haussement d’épaules détaché, sans s’étendre sur le sujet. Ce n’était qu’un défi, il était temps de passer au suivant. Manny réfléchit quelques petites secondes avant de lui faire part de son idée, ce qui arracha un rire à la brune. Elle acheva son verre, avant de hocher la tête d’un air entendu et de se lever. Alors qu’elle allait s’en aller vers la piste, elle s’arrêta et fit volte-face. « D’accord mais… Ton défi suivant sera de venir me chercher sur la piste et de prendre soin de moi comme si tu ne me connaissais pas. Tu n’as qu’à me convaincre de partir de la piste et m’offrir un verre d’eau au bar. » fit-elle avec un sourire lumineux, une lueur enjouée dansant dans ses iris troublants. De cette façon, les filles autour qui auraient sûrement remarqué la meuf trop ivre sur la piste auraient l’occasion de découvrir un mec mignon et respectueux dans leur environnement direct. Il y avait tellement de monde autour de l’espace dansant que la plupart des gens n’auraient sûrement pas remarqué que Manny et Effy se connaissaient et avaient discuté au bar. Ce serait donc un défi utile. Se contentant d’un petit sourire satisfait sans attendre de réponse, l’anglaise repartit en direction de la piste, titubant déjà sur le chemin, avant de se placer au milieu, se frayant un chemin dans la foule en chaleur en effleurant plus que nécessaire les gens entre qui elle passait. Elle leva les bras vers le ciel, se laissant glisser dans un monde à part, portée par la musique. Les yeux fermés, elle se déhanchait exagérément, tout en conservant ces gestes félins et aériens. Elle semblait totalement ailleurs, tournant parfois sur elle-même et riant soudainement aux éclats sans raison. Au fond, elle ne jouait pas tellement à la meuf qui avait beaucoup trop bu, elle laissait son esprit et son corps s’envoler vers des endroits invisibles auxquels elle seule pouvait accéder. Parfois elle poussait les gens, se laissant entraîner dans sa danse, elle laissait ses bras, sa poitrine et ses hanches décider de chaque mouvement, sans se soucier des regards interloqués, amusés ou désapprobateurs.