i’ve got a starving heart that breaks you’ve got a smile that makes it raise (nevaeh)

Ayant terminé le travail assez tôt aujourd'hui, tu décides de t'arrêter dans la petite épicerie du coin, pas loin de ta maison, pour faire quelques courses rapides. Depuis tout petit, tu aimes venir dans cet endroit où les odeurs d'épices, de légumes ou encore de fruits frais émanent. C'est peut-être aussi parce que tu venais ici avec ta mère et que cet endroit est rattaché à quelques beaux moments mère-fils. En tout cas, avec les années, tu n'as pas perdu l'habitude d'y mettre les pieds, connaissant même le patron. Après avoir arpenté quelques rayons, remplissant ton panier de légumes pour ton repas de ce soir, de pâtes et de diverses boissons, tu décides de passer en caisse où tu prends toujours un de ces jeux débiles à gratter où tu perds toujours. C'est ridicule mais c'est devenu un petit plaisir coupable. Arrivé à hauteur de la caisse, ton regard est attiré par une brune qui hante toutes tes pensées ces derniers temps. « Nev. » Dis-tu en souriant largement, heureux de la voir. Le hasard fait bien les choses comme on dit car il y a une heure à peine, c'est à ses yeux noisette que tu pensais. Comme toujours, sa présence illumine la pièce et son sourire, quand elle te voit, davantage encore. « Comment tu vas ? » Demandes-tu en jetant un rapide coup d'oeil à son panier, fronçant légèrement les sourcils en voyant à quel point celui-ci est bien fourni. Reçoit-elle de la visite ? La simple idée qu'elle puisse faire à manger pour un autre homme te déplaît mais tu tentes de masquer tes doutes en restant le plus serein possible. Après tout, elle pourrait recevoir n'importe qui... une amie, un membre de la famille, peu importe.

Depuis que Woody et Nevaeh avaient crevé l'abcès qui les empêchait d'être aussi proches qu'ils l'avaient toujours été, ils avaient repris leurs habituels soirées à essayer de nouvelles recettes et à jouer aux cartes jusqu'à ce que son grand-frère tombe de fatigue et déclare forfait en jurant devant tous les dieux possibles, bien qu'il n'y croyait pas spécialement, qu'il allait prendre sa revanche à la prochaine soirée cartes. Ils alternaient l'hôte de la soirée, parfois chez lui, parfois chez elle, et le genre de recettes à cuisiner. Pour la prochaine édition de leur soirée frère et soeur, ils avaient opté pour un repas de pâtes maison qu'ils feraient de A à Z. Bon, ils avaient aussi convenu d'allouer un budget pizza, au cas où leur confection de pâtes maison serait un flop total. Cette soirée n'aurait lieu que dans quelques jours, mais avec son article à rendre sur une exposition d'art et une artiste française, Nevaeh avait préféré se rendre à l'épicerie aujourd'hui, évitant ainsi les imprévus et les grandes foulées, d'autant plus qu'elle avait choisi de se rendre chez un petit marchant local qui importait des produits de qualité, une petite épicerie fine étroite où la cohue pouvait rapidement se former. Dans son panier, on comptait tout ce qu'il leur faudrait pour faire des raviolis maison, leur soirée venue, ainsi qu'une bonne bouteille de vin recommandée par le gérant. À la caisse, alors qu'elle attendait en file pour payer, Nevaeh reconnut une voix dans son dos qui la fit frémir. Son timbre, son intensité, elle n'avait pas besoin de se retourner pour savoir de qui il s'agissait, Juliann, sans aucun doute. Instinctivement, un large sourire se posa sur ses lèvres quand elle le salua. « Toujours bien quand tu es là », souffla-t-elle avant de rire. « Et toi ? Tu ne travailles pas aujourd'hui ? », dit-elle, surprise de le croiser si tôt.

Même si Nevaeh le dit sur le ton de la plaisanterie, tu dois bien avouer que sa présence ramène toujours un peu de soleil dans ta journée, dans ton quotidien. Elle a ce petit truc en plus que tu n'expliques pas mais qui te donne toujours le sourire. Seulement là, voir que son panier est bien rempli et ce, pour deux personnes, te met pas mal de doutes et d'interrogations dans la tête. Tu ne sais pas ce que vous êtes l'un pour l'autre, vous n'avez pas encore eu de discussions très sérieuses à ce sujet mais le simple fait de l'imaginer avec un autre te déplaît. Tu ne peux pas l'empêcher de voir d'autres personnes et pourtant, tu n'as pas envie de la laisser faire non plus. C'est donc avec une tête remplie de confusion que tu fais face à Nevaeh dans cette petite épicerie. « J'ai commencé tôt alors j'ai déjà terminé ma journée. J'en profite donc pour faire quelques courses et surtout remplir mon frigo bien trop vide. » Répliques-tu en riant. « Le tien l'est aussi, visiblement... » Ajoutes-tu sans pouvoir t'en empêcher, ta curiosité étant piquée à vif. Tu as besoin d'envoyer des signaux à la jeune femme pour qu'elle te donne plus d'informations sur sa soirée accompagnée à venir. Mais évidemment, plutôt que de poser la question directement, tu tournes autour du pot en la jouant innocemment. Good job Juliann.

C'était effectivement sur le ton de l'humour que Nevaeh s'était adressé à Juliann, pour cacher qu'au fond, elle craquait complètement pour lui. Et chaque fois qu'elle le voyait, c'était vrai qu'elle allait automatiquement mieux, comme s'il l'apaisait, d'une façon. Mais c'était plus facile de le dire sur le ton de la plaisanterie, plutôt que de l'avouer concrètement, d'exposer ce qu'elle ressentait quand il était près d'elle. Parce qu'en effet, tous les deux, ils n'avaient toujours pas eu de discussion à savoir ce qu'ils représentaient l'un pour l'autre. Ils passaient du temps ensemble, étaient plutôt proche, Juliann lui avait même confié qu'elle n'était pas comme les autres, qu'il ne la voyait pas comme une simple conquête, mais alors, comment la voyait-il ? Tout ça, ça n'avait pas été dit, ça n'avait pas été exprimé avec des mots. Et avec son passé tumultueux avec les hommes, ceux de sa vie avaient toujours fini par aller voir ailleurs, elle avait préféré ne pas se faire d'idées et attendre le moment qu'il aurait choisi pour avoir cette discussion, s'il le voulait. Au fond, peut-être que Juliann ne la voulait pas, cette discussion, lui qui se remettait tout juste d'une rupture douloureuse avait peut-être envie d'avoir plutôt du plaisir sans prise de tête. « Avoir su, j'aurais pu venir te porte des petits plats, ça t'aurait sans doute évité de passer à l'épicerie après une journée de travail », décréta Nevaeh avec bienveillance avant de suivre les yeux du pompier vers son propre panier bien remplit. La brune rit légèrement, concédant que le contenu de son panier était bien trop gros pour une seule personne. « Je me lance dans la confection de ravioli maison », avoua-t-elle en haussant les épaules. « Mais je ne suis pas certaine que ce sera très mangeable, j'en ai jamais fait. » Juliann souriait moins qu'à l'habitude, cela fit froncer les sourcils de la journaliste. « Ça va ? », demanda-t-elle, inquiète.

Tu te sens encore plus confus quand Nevaeh souligne qu’elle aurait pu t’apporter quelques petites plats pour que tu n’aies pas à passer par l’épicerie. Tu es confus parce que cela prouve qu’elle pense à toi et veut être là pour toi mais visiblement, elle voit quelqu’un d’autre ce soir, par la même occasion. « Oh ça ne me dérangeait pas de passer en coup de vent par ici. » Tu aurais pu rajouter et puis, on s’est vu comme ça mais dans le fond, tu aurais préféré ne pas être confronté à son panier remplit de bonnes choses pour le repas qu’elle prépare pour quelqu’un d’autres. « En plus tu vas être bien occupée ce soir… pour tes ravioli maison. » Ajoutes-tu innocemment, bien que tu ne le sois pas du tout. « Pour avoir déjà goûté à tes lasagnes, je sais d’avance que tes raviolis seront délicieux. » Lui assures-tu avec un léger sourire aux lèvres. Vous avez souvent parlé des lasagnes de Nevaeh par sms mais dernièrement, tu as eu la chance de les goûter en live et tout ce que tu peux dire c’est que c’était divin. Elle est visiblement douée pour la cuisine italienne. La voyant froncer les sourcils, tu comprends rapidement que ton comportement est différent de d’habitude et que Nevaeh le sent. Mais puisque tu es toujours dans le flou et un peu orgueilleux par la même occasion, tu préfères éviter de parler du vrai problème. « Oui oui, je suis juste un peu fatigué après ma journée. » Ce qui n’est pas totalement faux mais pas totalement vrai non plus.

« Et du coup, on a pu se voir comme ça », souriait Nevaeh, sans même se douter qu'à l'intérieur de Juliann, il y avait déjà une colère qui grondait. Sans se douter qu'au fond, cette colère, c'était elle qui la déclenchait. Elle et son panier d'épicerie remplit d'ingrédients pour son repas du soir, clairement chargé pour deux personnes. Pour Nevaeh, c'était évident qu'elle ne recevait pas un autre homme à la maison, elle n'avait que Juliann dans la tête, et dans la peau. Jamais elle n'aurait pu se douter qu'il se faisait des scènes, qu'il s'imaginait qu'elle puisse préparer un repas romantique pour deux avec une autre personne que lui. Juliann enchaîna, pointant que la brune serait sans doute bien trop occupée ce soir dans la confection de ses raviolis maison pour passer lui porter des petits plats. Il y avait dans son attitude quelque chose de différent, quelque chose que Nevaeh n'arrivait pas à cerner. « Je t'en garderai un plat », lui promit-elle en s'approchant de lui, tout sourire. « Je pourrais peut-être venir te l'apporter demain ? Tu travailles ? » Elle adorait cuisiner, surtout pour les autres. C'était tout Nevaeh, ça. Et la cuisine italienne, c'était sa préférée. C'était à Naples qu'elle avait goûté les meilleurs plats de tous ses voyages dans le monde. « Je pourrais te faire une petite livraison spéciale : Raviolis et un ou deux baisers. » Et elle pourrait aussi en profiter pour se rincer l'oeil, voir Juliann dans son uniforme de travail qui le rendait encore plus sexy qu'il ne l'était déjà. Nevaeh avait fini par adresser son ressentiment : l'attitude de Juliann bien trop différente qu'à son habitude. Quand il lui fit part de son état de fatigue, elle hocha docilement la tête. « D'accord.. Je devrais te laisser terminer tes courses, alors. » Elle s'était reculée, sentant que si elle s'approchait pour poser un baiser sur sa joue il finirait par la repousser.

Nevaeh prononce ces mêmes mots que tu aurais pu prononcer, toi aussi, dans d'autres circonstances. Si seulement elle n'avait pas exhibé son panier remplit pour deux personnes devant toi. Si seulement elle avait été dans une autre épicerie... les choses auraient été plus simples et tu n'aurais pas ce comportement que tu as à cet instant précis. Tu n'as pas envie d'être jaloux comme ça et surtout tu n'en as pas le droit puisque l'Australienne est célibataire et a le droit de voir qui elle veut. Néanmoins, imaginer qu'un autre homme pose ses mains sur son corps est quelque chose que tu aurais préféré éviter. « Oui je travaille jusque 23h. » Dis-tu en souriant malgré toi, touché par ses petites attentions que Nevaeh a envers toi. Bien sûr que non tu ne diras pas non à ses lasagnes et encore moins à quelques baisers. Cela risque de faire parler tes collègues mais tant pis. « Tu sais bien que tu es toujours la bienvenue à la caserne. » Et n'importe où, d'ailleurs. Tu es bien obligé de reconnaitre que tu te sens bien quand Nevaeh est dans les parages. Enfin, jusqu'à ce soir. Voyant que tu restes distant malgré tout, la jeune femme s'éloigne un peu, soulignant qu'elle devrait te laisser terminer tes courses. « D'accord. » Murmures-tu par orgueil. Mais finalement, incapable de la laisser partir comme ça, tu soupires et poses cette question qui te brûle les lèvres depuis que tu l'as aperçue avec un panier remplit dans cette épicerie. « Tu reçois quelqu'un ce soir ? » Demandes-tu en essayant difficilement de garder une expression indéchiffrable.

Ce n'était pas parce qu'elle ressentait l'obligation de le faire, que Nevaeh se proposait pour lui garder un plat. C'était parce qu'elle en avait envie, parce que malgré toutes les complications qui pouvaient entourer leur relation, elle commençait à développer des sentiments pour Juliann, bien plus que ce qu'elle aurait cru il y a quelques mois déjà. « Ne te fais pas de lunch pour le repas, je me charge de tout », s'empressa-t-elle d'ajouter lorsqu'il lui confirmait qu'il était de garde pour le lendemain. Et déjà, elle avait hâte d'être au lendemain, de lui faire de douces petites attentions, un dessert, peut-être, même, qui sait. Elle lui proposa de lui livrer des raviolis et des baisers directement à la caserne, mais n'avait pas pensé que cela pourrait lui attirer des regards et des questions. Pourtant, elle aurait dû. Ils n'étaient pas un couple, et si elle avait parlé de lui à son frère, elle n'était pas certaine que Juliann, lui, parle d'elle autour de lui. Et si elle ne voyait personne d'autre que lui, elle n'était pas certaine que Juliann, lui, ait cessé de flirter. Ce n'était pas ce qu'elle lui demandait, ils n'avaient pas parlé d'exclusivité et, surtout, elle n'avait pas le droit de lui exiger. Mais tout ce qu'elle espérait c'était que cette visite à la caserne ne soit pas malaisante pour lui. « Ou chez toi, si tu arrives à patienter jusqu'à 23h pour y goûter », enchaîna-t-elle, toujours dans la réflexion de lui éviter une situation dérageante. La journaliste l'aurait bien invité ce soir, mais ce n'était pas le bon moment pour lui de rencontrer Woody. Pas encore. Il fallait dire que son frère avait une haine redondante envers les garçons qu'elle choisissait de fréquenter et si la brune n'avait pas eu de chance dans le passé, elle n'avait tout de même pas envie que son grand-frère jette son dévolu sur Juliann. Et puis, il avait cette attitude détachée, comme s'il était préoccupé par quelque chose. Ce n'était sans doute pas la meilleure soirée pour des rencontres. Nevaeh l'avait questionné, Juliann avait plaidé la fatigue. Et elle s'était donc résignée à se séparer de lui, reculant pour lui laisser de l'espace. Prête à tourner les talons, elle adressa au pompier un sourire désolé, mais ce dernier ajouta un questionnement qui la fit se retourner. Elle fronça d'abord les yeux, pour les laissa se poser sur son panier. Il y avait effectivement plus de nourriture que pour une seule personne et, surtout, une bouteille de vin. Mais comme pour elle, ce dîner était inoffensif, elle releva les yeux vers Juliann, incrédule. « Oui », répondit-elle d'abord, avec la bonne intention de poursuivre, de s'expliquer. Mais alors qu'elle allait le faire, une vieille dame et son panier de course bien trop gros pour sa petite personne entrèrent en collision avec celui de la brune, attirant son attention. Après des excuses faites, Nevaeh reporta son attention sur son amant. « Pardon. On disait quoi, déjà ? », s'excusa-t-elle en tentant de reprendre leur conversation là où ils l'avaient laissé.

« Tu sais que c'était ma mère qui me préparait mon lunch, avant ? » Plaisantes-tu en repensant à toutes ces fois où ta mère déposait un repas préparé pour que tu l'emportes à la caserne. Il a fallu des années avant qu'elle arrête de le faire et qu'elle te donne ton indépendance à ce niveau-là. Et ce, même si tu vivais seul depuis quelques années déjà. En fait, elle a arrêté au moment où Alejandro est entré dans ta vie, comme si elle pensait qu'il allait prendre le relais. La blague. « Ou alors, tu passes à la caserne dans les alentours de midi et le soir, quand je rentre, c'est moi qui te fais à manger. Sauf si c'est un peu trop tard pour toi. » Ce que tu comprendrais parce que tout le monde ne supporte pas le même rythme de vie que toi. Tes horaires sont tellement aléatoires que c'est compliqué de tenir un rythme sain malgré que tu sois pompier depuis des années. Même si tu aimerais rester sur la réserve, vis-à-vis de Nevaeh et du repas qu'elle prépare ce soir pour quelqu'un d'autres, tu ne peux t'empêcher d'avoir envie de la voir et pour ça, n'importe quel prétexte est bon. Néanmoins, ta curiosité prend le dessus et tu ne parviens pas à laisser partir la brune sans poser cette question qui te brûle les lèvres. A ta question, l'Australienne répond un simple oui qui te laisse à la fois perplexe et un peu blessé. De son côté, elle n'a pas l'air de comprendre pourquoi tu lui poses cette question ce qui embrouille encore plus tes idées, tes pensées. Elle n'a pas le temps d'en dire plus, malheureusement, qu'une vieille dame percute son panier avec le sien. Rapidement, tu les aides à ramasser ce qui est tombé au sol et te relèves au moment où Nevaeh demande de quoi vous discutiez. « Euh... je ne sais plus. » Feignes-tu en fronçant légèrement les sourcils. Tu le sais très bien mais tu n'es pas certain d'avoir envie de connaitre tous les détails de sa soirée. Alors autant stopper la discussion là, non ? « Passe une belle soirée, alors. J'espère que tes raviolis seront bons. » Dis-tu d'un air détaché.

Il parlait de sa mère et ça faisait prendre conscience à la brune que de tous les sujets abordés, ils n'avaient pas beaucoup parlé de leur famille, du moins qu'en survol. Et ce petit élément de plus sur la vie de Juliann, ce fut assez pour la faire sourire. C'était terriblement mignon, que sa mère lui prépare ses lunchs. Mais elle profita du ton léger pour le taquiner. « T'es en train de me comparer à ta mère, là ? Tu sais qu’aucune ne veut être comparé à la mère de l'homme qu.. » Elle s'arrêta un instant, réfléchissant bien à ses mots. Attentions, Nevaeh. Ne t'emballes pas trop. « qui lui plait. » C'était safe, comme qualificatif. Ça ne dévoilait pas toutes ses cartes. Et elle évitait, ainsi, de se prendre un mur si elle parlait trop. Juliann, c'était bien plus que de l'attirance qu'elle ressentait pour lui. « Deux fois dans la même journée ? », demandait la brune en riant. Pour elle, ce n'était pas un problème. Elle pourrait voir le pompier par intermittence toute la journée s'il le fallait. Mais, pour lui, est-ce que cela faisait trop.. sérieux ? Trop officiel ? Bien qu'il n'y avait rien d'officiel dans leur relation. Pour la brune, tant que la conversation n'était pas abordée, elle resterait dans le néant quant à leur potentielle relation. Et c'était sans doute bien mieux comme ça pour elle, ainsi elle évitait de se faire mal à nouveau, de tellement s'attacher et de croire que c'était réciproque à en perdre la tête. Elle savait bien que Juliann ne lui ferait pas volontairement du mal, du moins c'est ce qu'il lui promettait et elle avait confiance en lui. Mais son coeur amoché, lui, tentait de se protéger des douleurs qu'elle ne pouvait pas contrôler, comme l'idée qu'il puisse en draguer d'autres, qu'il puisse flirter, dater, peut-être même coucher avec d'autres. « Je peux faire en sorte de travailler tard pour manger avec toi... » La conversation avait changée de ton, juste avant d'être interrompue. Juliann semblait malaisé ou préoccupé par quelque qui dépassait la journaliste. Et quand elle le questionnait, il semblait éviter le sujet. Puis, arriva cette dame qui les sortit un instant de leur bulle d'intimité. Il s'était penché pour les aider à récupérer leurs items, Nevaeh lui avait souri. « Merci », avait-elle murmuré alors que la dame était toujours là. Et si elle n'avait pas senti cette retenue, sans doute qu'elle se serait penchée pour l'embrasser. Elle avait d'ailleurs fait un pas faire l'avant, mais s'était résignée. Prête à reprendre là où ils étaient, Juliann, lui, coupait court à leur conversation, initiant leur séparation. « Je me trompe, où il y a un truc qui cloche entre nous ? », osa-t-elle demander, plutôt que de le remercier.

Un très léger froncement de sourcil prend place au moment où Nevaeh interrompt la suite de sa phrase. Celui-ci disparaît bien vite quand elle rajoute qui lui plait. Tu n’es pas vraiment en mesure de décrire ce que tu ressens pour l’Australienne, surtout parce que tu ne sais pas ce que tu veux et si tu es prêt à t’engager dans quelque chose de sérieux. C’est sans doute encore trop tôt pour le dire. « Crois-moi, être comparée à ma mère est un compliment. C’est la femme parfaite. » En tout cas à tes yeux. Elle t’a élevé seule et t’a inculqué de vraies valeurs ainsi que le respect et l’ouverture d’esprit. Pour ça, tu lui dois tout. De plus, quand tu as ramené un garçon à la maison pour la première fois, elle n’a pas été surprise et l’a accueilli avec bienveillance. Elle ne t’a jamais jugé et t’a toujours aimé pour ce que tu es. Tu sais pertinemment que tout le monde n’a pas ta chance alors à chaque fois que tu en as l’occasion, tu lui montres à quel point tu l’aimes. « Tu en as déjà marre de moi ? » Demandes-tu, taquin, quand Nevaeh souligne que vous allez vous voir deux fois dans la même journée. Ce n’est pas un problème pour toi parce que tu as bien plus envie de la voir que tu ne veux bien l’admettre. A chaque fois qu’elle est dans les parages, tu te sens bien. L’Australienne apporte tellement de douceur et de bienveillance dans ta vie que c’en est grisant. « Alors on fait comme ça. » Malheureusement, tes incertitudes reprennent le dessus et sans le vouloir, tu te montres un peu plus distant avec la brune. Bien que tu aies tenté de l’interroger sur sa soirée, ta question est presque tombée à l’eau à cause de cette vieille dame qui a percuté le panier de Nevaeh. Trouvant tes doutes ridicules et peu pertinents, tu ne réitères pas ta question, préférant laisser celle-ci de côté. Au fond, la jeune femme a le droit de voir qui elle veut, quand elle veut. Vous n’êtes pas en couple. « Non, tu ne te trompes pas. » Avoues-tu finalement en soupirant. Puisqu’elle te pose directement la question, autant être honnête. Même si tu te sens déjà assez ridicule comme ça. « Est-ce que tu as un rencard ce soir ? » En fait, ce qui te dérange surtout, c’est que tu aimes ces petites attentions qu’elle a pour toi comme le fait qu’elle te cuisine des petits plats pour le travail ou quand tu rentres tard le soir. Tu aimes que ces petites attentions te soient réservées.

Nevaeh la rêveuse, trop dans sa tête, trop dans les nuages, elle tombait sous le charme de Juliann sans même réaliser qu'il fallait peut-être protéger son coeur au passage. Et chaque fois qu'elle avait un moment de lucidité, ça lui semblait trop tard. Trop tard parce que les sentiments commençaient à s'installer. On ne parlait pas d'amour, non, c'était encore bien trop tôt, même pour Nevaeh. Mais on pouvait dire qu'il faisait bien plus que lui plaire. Seulement, tout ça, ils ne s'en étaient pas discutés et donc, quand vint le moment de préciser sa phrase, elle figea. Heureusement, Juliann n'accorda pas plus d'importance aux mots choisis, du moins, c'est ce qu'il laissait paraitre. Mais, au fond, était-ce réellement bon signe ? La journaliste n'en savait strictement rien, mais il lança qu'être comparé à sa mère était un réel compliment puisqu'elle représentait son idée de la femme parfaite. Et quand il parla d'elle, la belle Rutkowski se rendait bien compte combien elle était importante pour le pompier. « Si je suis comparée à la femme parfaite, ça me va, alors », gloussa Nevaeh, supposant qu'il venait de lui faire un compliment caché. À connaître Juliann, sa mère devait effectivement être la femme parfaite qui avait réussi à élever un garçon parfait, dans un monde tellement imparfait parsemé de difficultés. Et ça, c'était sans doute la meilleure récompense en tant que parent. « Marre de toi ? », répéta-t-elle en souriant. « Ne t'ai-je pas déjà dit qu'il me serait impossible d'avoir marre de toi ? » Ça lui disait vaguement quelque chose, sans doute qu'elle lui avait sorti cette phrase en sms, alors qu'ils en étaient encore qu'à la découverte de l'effet qu'ils avaient un sur l'autre. Ils convenaient donc de se rattraper demain, deux fois plutôt qu'un, puisque ce soir Nevaeh était visiblement prise. Ce qu'elle venait de lui confirmer, juste avant d'être dérangés par un carambolage de paniers avant de reprendre presque là où ils en étaient. À la question de la brune, Juliann n'hésita pas à répondre. Sa réponse, néanmoins, lui fit l'effet d'un électrochoc. Si Nevaeh était de nature maladroite, il lui semblait qu'elle n'ait pas fait d'erreurs dans les derniers jours pouvant le froisser. Au contraire, elle était attentionnée. Peut-être trop ? Peut-être que c'était ce qu'il tentait de lui faire comprendre, subtilement. Elle baissa les yeux, pensive, alors qu'il enchaînait en lui retournant un questionnement qui la fit relever un regard incrédule sur lui. Un rancard ? Elle ? Il s'inquiétait ? Mais qu'est-ce qui pouvait bien lui donner cette impression ? Est-ce que c'était la bouteille de vin ? « Je ne comprends pas... », souffla-t-elle, perdue. « Je t'ai donné l'impression de.. De jouer sur plusieurs tableaux ? », le questionna-t-elle sincèrement. « Je reçois mon frère à manger ce soir, Juliann... », finit-elle par lui avouer. « C'est parce que je n'ai pas supprimé mon profil sur l'appli de rencontre ? Si tu veux tout savoir, je ne l'ai pas visité depuis des semaines déjà... » Parce que toutes ses pensées se dirigeaient vers lui.

Même si personne n'est parfait, tu dois bien reconnaitre qu'au fil du temps, tu découvres une Nevaeh proche de la perfection. Toujours prête à rendre ta vie plus simple, plus belle, avec des petites attentions qui lui sont propres. C'est quelque chose que tu apprécies beaucoup en plus de la découvrir un peu plus chaque jour. « Si, tu me l'as déjà dit. Mais je voulais être certain que tu n'aies pas changé d'avis. » Réponds-tu alors qu'un sourire étire tes lèvres. Après tout, quand elle t'a dit ça par sms, vous n'étiez qu'au début de votre "relation". Vous n'en étiez qu'au stade d'échanges de sms même si ceux-ci ont très vite été parsemés de photos, de sous-entendus, d'envies. Aujourd'hui, rien n'a changé si ce n'est que vous êtes encore plus proches et que l'envie de voir Nevaeh, de la toucher, de l'embrasser, ne te quitte plus. C'est pour cette raison que tu ressens une petite pointe de jalousie en l'imaginant cuisiner pour un autre et passer la soirée avec cet homme qui tomberait immédiatement sous son charme. Comment ne pas tomber sous son charme, après tout ? Malgré tout, tu ne peux pas empêcher la brune de voir du monde, d'avoir des rendez-vous, alors que vous n'êtes même pas ensemble. Et que de ton côté, il t'arrive encore de flirter principalement sur l'application de rencontres Bowen BowTie. Mais puisque Nevaeh est bien plus pure et respectueuse que toi, elle ne comprend pas tout de suite ce que tu lui reproches. Enfin, si on peut appeler cela un reproche. « Non, bien sûr que non. » Réponds-tu à propos du fait de jouer sur plusieurs tableaux. « J'me sens complètement con maintenant. » Soupires-tu en passant une main dans tes cheveux. Son frère... pourquoi n'y as-tu pas pensé ? En même temps, il aurait été tout à fait probable que Nevaeh voit quelqu'un d'autres que toi puisque vous n'êtes pas officiellement ensemble. « Non, tu as tout à fait le droit d'être sur une appli' de rencontres si tu en as envie, Nev. Et tu as le droit de voir qui tu veux, c'est juste moi qui ai... déconné. » Et laissé parler ma jalousie, aurais-tu dû ajouter.

« Je n'ai pas changé d'avis », confirme-t-elle en souriant. Ce n'était pas parce qu'à présent ils se voyaient plus régulièrement, autrement que la frénésie des sms du début, de cette envie qu'ils ne pouvaient pas consommer et des aveux volés, de cette relation cachée et des désirs refoulés, qu'elle avait changés d'avis. Comment pourrait-elle se lasser de lui ? De son sourire qui illuminait tout son visage quand elle disait quelque chose de stupide, de ses baisers qui incendiaient tout le corps de la journaliste, du toucher de ses doigts sur sa peau qui lui donnait l'impression d'être une femme unique, unique et merveilleuse. Elle se doutait bien, qu'elle n'était pas la seule à qui il ait déjà fait cet effet-là, l'effet Juliann, celui qui lui rendait les genoux mous et le visage rouge, le coeur battant. Elle se doutait bien qu'elle n'était pas la première à ressentir ce genre de choses en la présence du pompier, mais elle se plaisait à croire qu'ils avaient quelque chose d'unique, eux. Et, évidemment, qu'elle ne s'en lassait pas, si ce n'était que le début. Et pour elle, c'était d'une évidence que toutes ses petites attentions, elle ne les portait qu'à un seul homme à la fois. Seulement, Juliann sembla supposer que Nevaeh en avait d'autres, des hommes, dans sa ligne de mire. Et elle, elle ne comprenait pas. Elle ne comprenait pas ce qui lui avait donné cette impression pourtant si fausse. Est-ce qu'elle avait dit ou fait quelque chose de travers ? Est-ce qu'on avait raconté des histoires - dans cette ville, on adorait les histoires - sur elle ? Est-ce que c'était la bouteille de vin dans son panier et le fait qu'elle cuisine pour quelqu'un ce soir ? Elle laissa Juliann s'expliquer, lui qui se trouvait bien con à présent d'avoir douté d'elle. « T'es pas con... », lui fit-elle savoir, touché, en quelque sorte, qu'il tienne assez à elle pour désirer être le seul à occuper ses pensées. Et c'était tellement déjà ça, il n'y avait pas de place pour un autre. Quand elle parla de son profil sur l'application de rencontre, toujours actif mais plus visité, Juliann se réfracta : elle avait le droit d'y être, de parler avec d'autres hommes, si c'était ce qu'elle voulait. Et elle était libre de rencontrer, de voir qui elle voulait. Évidemment, elle s'en doutait bien, ils n'étaient pas ensemble officiellement, ni même officieusement. Mais entendre cette permission lui fit un pincement au coeur. Elle se doutait bien qu'elle n'était pas la seule avec qui il flirtait, mais de l'apprendre, entre ses propres permissions, ça lui développait, à elle aussi, une légère jalousie. « Toi aussi t'as le droit de voir qui tu veux.. », répondit-elle. Qu'est-ce qu'elle pouvait dire de plus ? Qu'elle, elle ne cherchait pas à voir quelqu'un d'autre ? Non, pas après ça..

Je n'ai pas changé d'avis. Heureux de l'apprendre, tu lui offres un sourire sincère pour toute réponse. C'est grisant de savoir qu'après tous ces sms échangés, qu'après tous ces sous-entendus et ces moments passés ensemble, Nevaeh aime toujours ce qu'elle voit et ce qu'elle découvre de toi. Tu peux en dire autant, toi qui est captivé par ses lèvres à chaque fois qu'elle parle de ses voyages, de son travail ou de toutes ces petites choses qu'elle aime dans son quotidien. Comme faire la cuisine pour les autres. Et pour son frère, visiblement, qui n'échappe pas à la règle. Tu te sens bien con d'avoir posé toutes ces questions à présent alors que l'Australienne avait simplement prévu une soirée en tête à tête avec son frère. « Merci d'essayer de me rassurer. » Plaisantes-tu quand la journaliste te corrige, affirmant que tu n'es pas un con. C'est le sentiment que tu as, à l'instant présent, en tout cas. Il te quittera une fois la honte passée. Qu'est-ce que tu cherchais au fond ? Que Nevaeh te dise qu'il n'y a que toi, rien que toi, dans ses pensées ? Peut-être. Sans doute parce qu'elle occupe la majeure partie des tiennes, elle aussi. Même si tu discutes encore avec quelques personnes, souvent plus pour passer le temps qu'autre chose, tu dois bien reconnaitre qu'une fois la nuit tombée, dans tes rêves, c'est toujours elle que tu vois. Chacun de tes fantasmes se déroule avec la brune comme si tu ne les imaginais plus qu'avec elle. « Oui, probablement. » Réponds-tu simplement, essayant de balayer, au passage, cette discussion des plus gênantes à tes yeux. « Je suis désolé d'avoir posé la question. » Tu ne sais pas réellement pourquoi tu t'excuses mais tu ressens le besoin de le faire. « Passe une belle soirée avec ton frère. Il a beaucoup de chance d'avoir une soeur comme toi. » Ajoutes-tu en venant déposer un baiser sur le haut de son front, prolongeant quelque peu ce moment et cette proximité entre vous.