I'll break your halo |ft Gigi

La solitude accaparait un peu plus chaque jour Giulia. Il lui restait un mois et demi avant le tournage, raison pour laquelle elle s'efforçait de vider son esprit en sortant et en faisant de nouvelles rencontres. Ce soir elle avait rendez-vous avec Owen. Un garçon qu'elle venait tout juste de rencontrer, et surtout avec qui elle se surprenait d'être elle-même. Elle avait cette impression qu'Owen était tout aussi brisé qu'elle et qu'ainsi elle pouvait baisser sa garde. Erreur ou non, Giulia cherchait à séduire le britannique malgré qu'elle connaisse l'issue de cette relation.

Elle avait troqué ses talons aiguilles pour des baskets. Souhaitant dévoiler son corps, elle avait opté pour un croc-top blanc et un short en jean court, trop court. L'italienne arrivait dans sa voiture de location, à la grange d'Owen. Il faisait nuit noire mais les étoiles éclairaient joliment le ciel. Elle observa un moment la toiture. Ses nombreuses fugues durant son enfance l'avait aidé à devenir une fille de la rue, une fille qui n'avait pas peur d'escalader les toits pour y dormir. C'était ce genre de détails qu'elle ne souhaitait raconter à personne, et pourtant avec lui, elle s'y autorisait.

Gigi fut accueillie par un Owen qui semblait interloqué. Son hello la fit sourire, elle craquait totalement pour son accent. Mais ce qui la frappa en premier lieu c'était qu'il était encore caleçon. Réprimant un rire, elle se pinça les les lèvres et regarda instinctivement son entrejambe. Je suis trop en avance? se permit-elle de demander. Alors qu'il se confondait d'excuse, elle, elle trouvait sa maladresse adorable. Tu sais si tu voulais qu'on couche tout de suite ensemble, tu aurais dû enlever la chemise aussi ! renchérit l'italienne qui trouvait la situation amusante.

Il rougissait et Gigi profitait de la situation pour en rajouter une couche. Tandis qu'il fit mine de se dénuder, elle ne pouvait s'empêcher de penser qu'elle aurait été déçue qu'il précipite les choses. Mais heureusement Owen plaisantait. Tout à l'heure me semble très bien. assura t-elle en avançant dans les lieux. Il avait pris sa main de façon très naturelle, très instinctive. Gigi n'avait pas vraiment l'habitude de ce genre de petits gestes. Il y déposa un léger baiser et elle en ressentit étrangement une agréable gêne. C'était à son tour de rougir. La brune le suivit, toujours avec agréable sensation qui lui chatouillait le bas-ventre. J'ai fait ça des millions de fois, ça ne me pose pas de problème. affirma Gigi très sûre d'elle. Elle hésita un court instant et rajouta : J'étais une enfant et une ado assez difficile. Pour dédramatiser, elle tenta de sourire mais se rendit compte qu'elle n'était pas convaincante. Elle n'avait pas l'habitude de parler de son enfance et cela devait sans doute se voir. Oui pourquoi pas, il fait encore chaud dehors. lui fit-elle remarquer alors que la canicule se calmait lentement durant la nuit tombée. Encore une fois son regard se balada sur le corps du jeune homme. Le tissu de sa chemise faisait apparaitre ses tatouages.

Comment Owen pouvait s'imaginer que Gigi fut autrefois une enfant difficile? Jusqu'à présent le courant passait bien entre eux et aucun clash n'avait (encore) éclaté. Il ne connaissait pas le tempérament de feu et de glace de l'italienne ni son sombre passé. Contre toute attente, Gigi se confia à lui. Dis ça aux dix-sept familles et foyers qui m'ont accueilli. Elle afficha un sourire crispé qui laissait entendre qu'elle n'était pas très à l'aise sur le sujet. Et puis son attention se porta sur la chemise blanche d'Owen. Gigi aimait les beaux garçons et elle ne se cachait jamais de les dévisager quand l'un lui plaisait. En l'occurence elle trouvait adorable sa façon d'être embarrassé. Il n'avait pas fini de l'être avec Gigi! Il revint tout penaud, soda et limonade à la main. Le britannique admit qu'en réalité il ne buvait pas d'alcool. Elle éclata d'un rire claironnant. Ce n'est pas grave. T'as pas besoin de me saouler pour te mettre dans ton lit. plaisanta t-elle pour le détendre. Owen passa devant elle pour lui montrer le passage. Elle le suivit et en grimpant la fenêtre elle scruta attentivement les endroits où elle pouvait s'accrocher. Ayant l'habitude des fugues durant sa jeunesse, Gigi faisait une bonne escaladeuse. Après avoir glissé sa bouteille au-dessus de la fenêtre, elle grimpa jusqu'au toit avec assurance. Elle rejoignit Owen sans mal mais remarqua aussitôt le décolleté anormale de sa chemise. T'as déchiré ta chemise. Lentement elle posa ses mains sur le torse du jeune homme. Il faisait nuit noire, ce qui la rassurait étrangement. J'aime beaucoup tes tatouages. complimenta Giulia. En vérité, elle avait  envie de sentir le contact de sa peau. Elle le regarda timidement car cette fois elle espérait juste qu'il la prenne dans ses bras.

Les enfants carencés gardent parfois des séquelles en tant qu'adultes. Très peu des proches de Giulia connaissent son passé, car bien souvent elle préférait le dissimuler. Tu ne t'imagines pas à quel point. approuva Gigi qui ne chercha pas à s'étendre sur le sujet. Ils montèrent sur le toit et Owen y déchira sa chemise dans la montée. C'était la deuxième fois dans la soirée qu'il se mettait dans une situation embarrassante et Giulia le trouvait davantage attachant. Amusée, elle s'approcha du jeune homme et posa ses mains sur son torse. L'atmosphère les plongeait dans un calme apaisant. Seules la lune et les étoiles les éclairaient. Il lui demanda quel tatouage elle préférerait. Lentement elle se rapprocha davantage de lui. Je ne sais pas... Peut-être celui-là. Et elle déposa ses lèvres sur les siennes qui lui fit parcourir un frisson. Dans un lent mouvement de recul, elle le regarda d'un air gêné mais le sourire rayonnant. J'en ai quelques uns aussi mais ils sont bien cachés. Ses tatouages se dissimulaient facilement sous ses vêtements et étaient la plupart discrets. Tous avaient évidement une histoire dont elle n'appréciait guère raconter. Mais là quand il lui demanda pourquoi ces dix-sept familles, inexplicablement elle brisa sa carapace. Le doux contact de son pouce sur ses lèvres la réconfortait. Elle était sécure, près de lui. Parce que mes parents ne voulaient pas de moi et parce que moi je ne voulais qu'eux. La cicatrise s'ouvrait. Elle ferma les yeux comme pour contenir une douleur physique.

Amusée, Gigi ne s'étonna pas que Owen n'ait pas aperçu encore ses tatouages. Certes il l'avait vu nue mais ils étaient tous discrets. Puis dans le feu de l'action, on occulte bien des choses. Si tu veux. approuva Gigi qui eut soudainement des pensées coquines. Il faudra que je me mette de dos quand tu me déshabilleras, cette fois. précisa t-elle. Des fossettes se creusèrent à son sourire, formant deux parenthèses. Un sourire qui s'estompa après avoir évoqué ses parents. Le regard posé sur le papillon d'Owen, il lui assura qu'il était désolé pour elle et ne sachant trop quoi dire elle haussa les épaules. Il lui releva le menton et l'embrassa tendrement. C'était un moment simple, un moment bon. Elle aurait aimé rester ainsi infiniment, dans cette bulle confortable. Ce fut au tour d'Owen de se confier. Gigi écarquilla les yeux, étonnée. Pour souhaiter ne pas connaître ses parents, il devait y avoir de sombres raisons songea t-elle. Pourquoi? Ils t'ont fait du mal? L'idée que quelconque puisse faire du mal à Owen la fit frissonner. Pendant cette discussion profonde, elle n'arrivait pas à se détacher physiquement de lui. Ses mains traversaient le long de ses omoplates. Elle redressa son regard dans le vert de ses yeux. Ma mère m'a vu à la télé et elle m'a envoyé un message sur Instagram. Elle pleurnichait. Elle voulait de l'argent... Je n'ai pas répondu. Parce que c'est trop tard... Quand j'étais p'tite on habitait dans un deux-pièces et il y avait des bouteilles d'alcool vides partout. Souvent elle oubliait de venir me chercher à l'école... C'est trop tard, tu vois? essaya t-elle de lui faire comprendre. Il y a bien longtemps qu'elle se disait désormais orpheline. Par ailleurs c'était étrange mais cette confidence elle se l'était gardé rien qu'à elle. Elle se sentait vraiment bien avec lui pour ouvrir son cœur sombre ainsi.

Les blessures d'Owen étaient toutes autres et Gigi l'écouta avec attention. Elle avait envie de le prendre dans ses bras, attendrie qu'il se confie aussi à elle. Caressant avec douceur le long de ses épaules, elle fronça les sourcils sans comprendre. T'es pas faible. lui assura t-elle, sans parvenir à cacher l'inquiétude dans sa voix. Était-il malade? Gravement malade? Elle se serra davantage à lui tandis que les mains d'Owen s'agrippaient au tissu de son short. Instinctivement elle reposa sa tête contre lui et ferma les yeux. Parler de sa mère lui était douloureux mais la présence d'Owen l'enveloppait dans un petit cocon confortable. D'où ma facilité d'escalader les toits. Elle souriait, respirant le parfum contre sa peau. Il la complimenta, lui assura qu'elle était une femme incroyable et qu'elle ne devait pas regretter ses choix. La sensibilité de Gigi se réveilla et ses joues devinrent écarlates. Comment t'arrive à faire ça? lui demanda t-elle à la fois intriguée et amusée. Elle dissimula son visage contre lui. À me faire sentir aussi bien.

Owen tentait de la rassurer mais les mots raisonnaient en boucle dans la tête de Gigi. Mais qu’est-ce que tu as ? T’es malade ? continua-t-elle de s’inquiéter. Cette crainte de perdre les gens qu’elle aime la poursuivait. Car elle s’attachait follement à lui. Certes c’était rapide, trop rapide, mais elle ne le contrôlait pas. Elle avait rencontré Owen à un moment de sa vie où elle était le plus fragile, peut-être ressentait-elle aussi ses blessures ; raison pour laquelle elle se confiait si facilement à lui.  Blottie dans ses bras elle s’imprégna de son parfum. Il l’entoura de ses bras et il y avait quelque chose de bien plus confortant qui s’éveillait en elle. Il tentait de la rassurer de sa positivité bienveillante et même si il ne le voyait pas elle souriait. L’envie de lui dire qu’elle se sentait bien la bouscula tout naturellement. Il riait. Le plus beau son du monde, pensa-t-elle sur le moment. Elle redressa son visage, riant elle aussi à son tour. Magicien de mon cœur en tout cas précisa Gigi avant de reculer pour admirer les étoiles. Lâchant son étreinte, elle observa le ciel et se demanda si son avenir serait radieux comme le prétendait Owen. Elle s’accroupit sur le toit et se recroquevilla, visage levé. Tu sais lire dans les étoiles ? s’étonna Gigi. Brusquement elle ressentit une désagréable gêne, parce qu’il n’était pas tout près d’elle. Une sensation absurde car Owen n’était qu’à quelques pas d’elle. Son toucher lui manquait.