i don't want to miss a thing (malias)

Tu as attendu ce moment toute la journée, enfin non, c’est faux, tu as attendu ce moment depuis que tu as parlé à Elias de ton anniversaire et que vous avez fini par vous donner rendez-vous dans un petit restaurant portugais avec vue sur l’océan. C’est ton premier date, ton premier vrai date avec quelqu’un que tu connais. Tu en as déjà eu, qui ont tous plus ou moins mal fini, avec des gens rencontrés sur bbt ou ailleurs mais là c’est différent. Tu vas passer ton anniversaire avec ton petit-ami et tu as toujours du mal à croire que ce soit le cas. Tu t’es pris la tête mille ans sur la tenue à mettre, sachant que tu as envie de mettre autre chose qu’un t-shirt mais que tu n’as pas énormément de chemises, sur ta coiffure, sur ton parfum. Tu as peur d’en mettre trop mais en même temps avec le stress tu as peur de transpirer et que ton déodorant ne soit pas suffisamment efficace. Tu as l’impression de revenir à la première fois où Elias est venu chez toi alors qu’à présent il y vient régulièrement. Mais là tu as l’impression que vous passez un next step avec ce rendez-vous. Tu arrives bien en avance, malgré ton temps de préparation, beaucoup trop long pour le résultat final. Forcément Elias n’est pas là, tu sais que c’est normal mais tout le long où tu attends sur le banc situé à côté du restaurant, tu as peur qu’il n’arrive jamais et que tu sois seul avec tes acras de morue pour la soirée. Tu pourrais lui envoyer un message pour lui dire que tu es là mais tu n’as pas envie de lui mettre la pression, tu n’as pas envie d’être un copain flippé tout le temps, tu l’es déjà bien assez.

Etre en couple, c’est quelque chose de totalement inédit pour moi, et c’est étrange à quel point ça me rend léger. Depuis que Manny et moi avons décidé d’être exclusifs l’un envers l’autre et de nous mettre ensemble, je me sens porté par une énergie douce qui se diffuse dans tous mon corps et qui semble coller un sourire à mon visage presque H24. Je me sens bien, et j’ai le sentiment que cela fait des années que je ne me suis pas sentis aussi heureux. J’ai presque du mal à y croire. Et pourtant…
Ce soir, c’est notre premier vrai rencard et c’est l’anniversaire de Manny par la même occasion. J’ai la pression pour que la soirée se déroule au mieux ! Mais je compte bien lui faire passé un bon moment. Pour commencer, il a proposé de me faire découvrir un restaurant portugais sur la côte, à quelques minutes de Bowen. Je suis touchée qui me fasse entrer dans son univers, qu’il souhaite me faire découvrir ce qu’il aime.
Après m’être changé, je branche mon GPS et rejoins rapidement le restaurant, je me gare sur le parking puis trouve Manny, attendant que j’arrive. Dès que je l’aperçois, une bulle de bonheur éclate dans ma poitrine. J’avance vers lui, puis alors qu’il se redresse, passe un main dans sa nuque pour l’attirer tendrement à moi. Mes lèvres attrapent les siennes, et je me délecte de leur douceur tandis que mon pouce caresse sa joue fraichement rasée.
— Joyeux anniversaire, je lui souffle en me détachant légèrement de lui, un sourire s’élargissant dès que mes yeux rencontre les siens.
Je me recule légèrement puis l’observe, mon ventre se creuse tant j’ai envie de le dévorer cru. C’était sans doute la première fois que je le voyais en chemise, et cela le rendait encore plus sexy que d’ordinaire.
— T’es beau, je déclare.
Malicieux, je passe une main sous l’encolure de sa chemise, avec ce besoin d’être en contact direct avec sa peau chaude. Je ne résiste pas à l’envie de l’embrasser encore tandis que mes doigts s’occupent de défaire un bouton pour ouvrir un peu plus son col. Je relève les yeux vers Manny, un air espiègle accroché aux lèvres.
— On y va ? je dis comme si de rien n’était.

Jusqu’au dernier moment tu as peur qu’il ne vienne pas, tu tripotes ton téléphone, redoutant qu’il vibre annonçant l’arrivé d’un sms annonciateur de mauvaise nouvelle. Enfin il pourrait aussi ne pas venir et ne rien te dire. Tu te prends vraiment trop la tête. Le regard un peu perdu dans le vague, tu reviens à la réalité quand tu réalises que le Elias que tu vois s’approcher n’est pas le fruit de ton imagination mais bien la réalité. Il est là, il est venu et si c’est tout à fait normal puisque vous êtes en couple maintenant, pour toi ça te paraît toujours aussi surréaliste. Tu te lèves, un large sourire aux lèvres. Il t’embrasse et tu te sens complètement fondre à son contact. Chaque fois qu’il t’embrasse tu sens des petits papillons se déployer dans ton ventre, tu te demandes si cette sensation disparaîtra un jour ou si chaque fois sera extraordinaire à tes yeux. « Merci. » dis-tu en rougissant légèrement lorsqu’il te souhaite ton anniversaire. Il semble apprécier ta chemise et tu es content que le temps choisi à hésiter ne soit pas vain. Lui n’a pas besoin de faire d’effort pour être beau, il l’est naturellement, tu le trouves toujours beau, même le matin quand il vient à peine de se réveiller. Tu te demandes si vous allez passer votre soirée à vous embrasser, toi ça te va bien comme programme, ça serait un très bon anniversaire. « Toi aussi. » réponds-tu avant de te rendre compte qu’il a profité de votre proximité pour ouvrir un bouton de ta chemise, offrant au regard un décolleté bien plus imposant que ce que tu avais prévu. « Hey ! » dis-tu en riant nerveusement, tu n’es pas vraiment habitué à te montrer comme ça mais tu laisses ta chemise comme ça malgré tout. « Oui. » réponds-tu finalement avant d’aller vers le restaurant. On vous installe à une petite table dehors, donnant sur l’océan, une vue plutôt sympa pour un rendez-vous. Avant de consulter le manu, que tu connais déjà en partie, tu lui dis « Tu sais je me demande souvent si je suis juste dans un rêve et qu’un jour je vais me réveiller et que tout ça n’existe pas. » Oui tu te fais vraiment des réflexions fun dans ta vie.

Je souffle un petit rire lorsque Manny se rend compte de mon stratagème et proteste. Je porte ma main à ma propre boutonnière et défait un bouton pour lui montrer que nous sommes à égalité ce soir. Nous entrons dans le restaurant qui offre une atmosphère très cosy, plutôt intime et on nous installe à une table dont la vue sur la mer est divine. Je ne peut rêver mieux pour notre premier vrai date, du moins notre premier date depuis que Manny et moi avons officialisé. J’ouvre le menu et lis la carte, mais mon oeil est constamment attiré par Manny, ses yeux charmants, sa bouche pulpeuse qui appelle aux baisers, son petit nez adorable, la naissance de ses pectoraux que l’ouverture de son col me laisse à présent voir.  Lorsqu’il me confie qu’il ne réalise pas vraiment que ce qui se passe entre nous est vrai, je garde le silence pour lui laisser pleinement l’espace de s’exprimer, puis je lui souris avec tendresse.
— Je pense que c’est souvent comme ça au début du relation. On est sur un nuage et le monde défile sans qu’on s’en rende compte. On a l’impression d’être en dehors de temps…c’est ce que je ressens en tout cas.
Je marque une pause, avant de reprendre.
— En tout cas, je suis sûr d’une chose : j’adore être avec toi. Tu me rends heureux. Et j’ai pas ressentis ce genre de chose depuis très…très longtemps.
Le dire à haute voix me fait du bien aussi. Manny me fait un bien fou, au delà de ce que je pouvais imaginer. Sa seule présence à mes côtés semble apaiser cette colère qui me brûle l’estomac depuis dix ans.
— Oh…et avant que j’oublie…
J’attrape un petite enveloppe dans la poche de poitrine de ma chemise, puis la tend à Manny.
— Joyeux anniversaire.
Je souris. J’ai chercher longtemps avant de trouver un cadeau, qui, je l’espère lui plaira. C’est une inscription à un atelier de lutherie, auquel je compte l’accompagner s’il l’accepte, pour lier sa passion pour les guitares et la mienne pour le bricolage.

Quand Elias ouvre lui aussi un bouton de sa chemise pour être à égalité avec toi, tu rougis légèrement. Encore un truc de plus pour te perturber et la liste est déjà longue. Il faut dire que tu es assez facilement perturbable comme personne alors quand il s’agit de ton copain, que tu trouves sexy à en tomber et qui en plus de ça est toujours adorable avec toi, ce n’est pas simple de rester droit. Tu y arrives un peu plus par messages interposés même si tu dois chaque fois te faire violence pour ne pas lui dire de venir dormir avec toi même si tu en as très envie. Ton sommeil est déjà suffisamment perturbé comme ça. Tu lui confies le fait que tu as juste l’impression que tout est trop beau pour être vrai depuis que tu le connais. Tu as toujours cette peur en toi que tu te sois fait des illusions tout le long et que votre histoire va s’arrêter du jour au lendemain. « J’ai envie de rester toujours sur un petit nuage...tu me rends aussi tellement heureux. » dis-tu en sentant ton cœur s’accélérer. Tu as toujours la tête dans les nuages, l’esprit un peu ailleurs, du mal à te concentrer mais depuis que votre relation a débuté, tu as grand mal à te concentrer et à être efficace au quotidien. Il occupe tes esprits en permanence. Tu aimes bien ça, sans doute pour ça que ton esprit ne veut pas penser à autre chose. Il y a encore la musique qui arrive à te faire décrocher de lui un peu mais c’est bien la seule chose. Elias sort ensuite une enveloppe de sa chemise et te la tend. Tu as vaguement pensé à un moment qu’anniversaire rime en général avec cadeau mais cette pensée a bien vite été évacuée par une autre et tu n’y as pas franchement réfléchi plus que ça. Tu ne dis rien, trop étonné qu’il t’offre quelque chose. Tu attrapes l’enveloppe et l’ouvre pour découvrir son cadeau, un atelier avec un luthier à faire à deux. Tu sais déjà qui t’accompagnera, enfin s’il accepte. Pendant un instant tu ne dis rien, un peu trop abasourdi par la surprise. Tu lui souris avant de te lever pour le prendre dans tes bras. « Merci. C’est vraiment un super cadeau. » dis-tu en enfouissant ta tête dans son cou pour y déposer un baiser.

Ce petit nuage sur lequel on se trouve est très agréable, je ne peux le nier, et j’aimerais, moi aussi y rester pour toujours avec Manny. Cet homme me charme complètement et donne à ma vie un sens que je n’avais jusqu’alors pas envisagé. Tout cela est très récent, et c’est fou comme ça vous chope d’un seul coup, sans prevenir, mais c’est si beau aussi. J’ai envie de sourire chaque fois que je pense à lui et je me sens vivre, plus que jamais quand il est dans les parages. Quand je le touche, c’est encore mieux, j’ai l’impression que chacune des cellules de mon corps crépite de plaisir. Un sourire ourle mes lèvres quand il m’avoue être heureux, lui aussi, avec moi. J’en profite pour lui offrir mon cadeau, et guette sa réaction au moment où il ouvre l’enveloppe. Quand il se lève pour me rejoindre et me prendre dans ses bras, mon sourire ne peut que redoubler. J’entoure mes bras autour de lui, réalisant que j’aimerais pouvoir le garder ainsi, contre moi, pour toujours. Son baiser dans mon cou provoque un doux frisson. Je souris encore lorsqu’on se sépare doucement.
— Je suis heureux que ça te plaise.
Je caresse sa joue avec tendresse puis dépose un baiser sur ses lèvres. J’ai l’impression que le monde s’efface autour de nous, et le restaurant s’est réduit à notre table. La vue est magnifique, c’est vrai, pourtant, je ne vois que Manny.
— Je me suis dis que ça pouvait être un moyen d’apprendre à se connaitre un peu mieux, enfin…si tu veux faire cet atelier avec moi, t’es pas obligé bien sûr. C’est ton cadeau, c’est toi qui choisi.

Tu ne pensais pas vivre tout ça un jour et tu n’arrêtes pas de te demander si tout est bien réel, si tu n’es pas juste en train de te faire complètement des films. Mais en général tu captes quand quelqu’un n’est pas intéressé par toi. Tu manques tellement de confiance en toi que tu pars toujours du principe que tu n’intéresses personne et comme tu n’as jamais réussi à ce qu’un date aboutisse à quelque chose, forcément cette idée est renforcée. Mais avec Elias tu es bien obligé d’avouer un peu que tu l’intéresses même si tu as franchement du mal à le réaliser. Tu te retrouves dans ses bras, là, pour ton anniversaire et cette scène te semble complètement surréaliste. Il a choisi le cadeau parfait pour toi et toi, pour son anniversaire, tu n’as rien fait parce que tu l’as oublié. Pour ta défense vous n’étiez pas encore ensemble. Tu aimerais continuer à l’embrasser et à l’avoir tout contre toi mais tu es bien obligé de retourner à ta place, surtout quand tu réalises tous les gens autour de vous, tu n’as pas envie de te faire remarquer même si c’est sans doute déjà un peu trop tard. « Oui...oui. » Tu n’as pas eu le temps de réfléchir vraiment concrètement à l’utilisation de ton cadeau mais tu serais ravi de partager ça avec lui, tu as envie de partager tout un tas de choses avec lui. Tu t’imagines déjà en train de travailler le bois main contre main et cette pensée te fait rougir, tu t’empresses d’attraper le menu pour te cacher derrière. Tu le redescends un peu pour retourner ton regard vers Elias. « Ça me ferait très plaisir. » Tu caches un sourire derrière la carte avant de t’y replonger. Tu la connais déjà et les plats ne sont pas un secret pour toi. « Le meilleur c’est de prendre des petiscos, c’est plein de petits plats à partager ! Mais j’espère que tu aimes bien le poisson et les crustacés parce qu’il y en a pas mal. Et les acras de morue c’est le meilleur ! » La cuisine portugaise te rend pas mal bavard, ça te ramène en vacances chez tes grands parents.

Mon cadeau à l’air de lui faire plaisir, et je ne peux pas m’empêcher de sourire tandis qu’il essaie de cacher le sien derrière le menu, dont il se saisit à la hâte. Il me conseille quelques plats et je décide de lui faire confiance. Peu importe ce que je mange ce soir, la soirée est déjà réussie, tant que je la passe avec lui. C’est fou quand on y pense, ce couple qu’on est en train de créer. Ca nous tombe dessus sans qu’on l’ai vu venir, et j’en suis heureux. On nous amène donc les petits plats à partager que Manny a choisi et je goûte enfin les acras de morue qu’il ne cesse de me venter depuis qu’il sait que j’ai réservé ici.
— C’est une tuerie, je confirme en roulant des yeux tellement c’est bon.
Je me sers du vin et en propose à Manny. Le moment est doux, j’espère que Manny est heureux de le partager avec moi. Quand on nous amène la carte des desserts, le soleil est en train de se coucher sur la mer. C’est complètement idyllique.
— Tu as prévu de fêter tes 25 ans avec ta famille, plus tard ?

Quand tu maîtrises plutôt bien un sujet, tu es plus à l’aise et un peu plus bavard. La cuisine portugaise et le Portugal en général sont des sujets que tu connais plutôt bien, ta mère étant portugaise, tu as toute une partie de ta famille qui vit là-bas, tu connais donc très bien cette culture. Tu fais quelques recommandations à Elias, qui les suit et finalement, en goûtant les fameux acras de morue dont tu lui parles régulièrement quand il s’agit de cuisine, avec la cuisine indienne, il semble plutôt bien apprécier. Tu es content que ton plat préféré lui plaise, c’est comme si ça te confirmait que tes goûts ne sont pas si nuls alors que ça serait complètement débile de juger quelqu’un sur ses goûts culinaires, mais toi tu te juges sur tout. Tu lui souris en mangeant également tes acras et tous les autres petits plats sur la table. Le repas se déroule tranquillement et tu profites de ce moment où vous pouvez parler sans autre distraction, parce qu’en général vous finissez rapidement par vous rapprocher pour ne plus dire grand-chose et laisser le reste parler. Tu restes tout de même encore un peu timide, tu mets toujours du temps à te dévoiler même si ta proximité avec Elias accélère un peu les choses. Alors que vous réfléchissez à votre dessert, il te questionne sur ton anniversaire avec ta famille. « Oui, sûrement. A Bowen il reste que mes parents et mes grands parents du côté de mon père. » expliques-tu alors avant de te perdre un instant à regarder le coucher de soleil. « Mais on ira peut-être tous, avec mes parents, mes frères et ma sœur, au Portugal dans quelques mois pour tous se retrouver. J’ai un cousin qui se marie donc j’pense que ça sera l’occasion de fêter les anniversaires de tout le monde. » dis-tu en hochant la tête, toujours un peu dans le vague.

C’était complètement neuf pour moi tout ça, les sorties avec mon mec, les petites attentions, les anniversaires…je pouvais être très attentionné avec ma famille ou mes amis, mais je n’avais jamais été assez loin avec un homme pour que ce trait de ma personnalité ne se developpe dans ma vie sentimentale également. J’aimais prendre soin de l’autre, faire en sorte qu’il se sente bien, qu’il ne manque de rien. Et Manny réveillait se trait de ma personnalité. Ca me plaisait, même si notre relation était encore jeune.
— C’est cool que vous alliez au Portugal tous ensemble ! Ca fait un sacré bout de chemin, mais ça doit vous faire plaisir d’y aller, j’imagine.
Je prends une gorgée de ma boisson, puis jette un regard sur la carte des desserts.
— Tu sais ce qui te fais envie je demande, tout en ne sachant pas moi-même ce que je vais choisir.  

Tes voyages au Portugal sont l’occasion pour toi de retrouver tout un côté de ta famille et à présent tes frères et ta sœur aussi, maintenant que tout le monde est parti de Bowen sauf toi. Tu aurais pu faire comme eux et aller t’installer dans une grande ville un peu moins perdue mais l’idée d’aller dans un endroit où tu ne connais personne te fait flipper. « Oui c’est long, du coup on essaie de rester autant qu’on peut mais j’aime trop aller là-bas ! Et je suis sûr que ça te plairait aussi, y’a des plages comme à Bowen et il fait chaud, le climat est pas si différent. » L’idée qu’Elias puisse venir avec toi au Portugal te plaît, mais tu sais aussi que ça ne serait pas possible pour le moment. « Le plus connu c’est les pasteis de nata mais mon préféré c’est le pudim de ovos, c’est une sorte de crème avec du caramel et beaucoup de sucre. » réponds-tu en riant.

Je me doute qu’un tel voyage demande de prévoir du temps, après un trajet si long, on ne reste pas seulement pour quelques jours sur place. Ca implique donc que Manny devra partir quelques semaines, pour le mariage de son cousin. Je n’ai pas l’habitude de cette sensation mais j’ai le sentiment qu’il va me manquer pendant ce voyage. Je tâche toutefois de ne rien laisser transparaitre. Je l’écoute, hochant la tête et souriant.
— Oui, ça a l’air sympa et ça me plairait de le voir avec toi.
C’est la vérité. Ca me plairait de visite le pays dont il est originaire. Pour des vacances rien qu’à deux par exemple. Ca pourrait être une idée, même si notre couple est encore jeune pour penser à assez. Quoique…chacun va à son rythme au final. On fait bien ce qu’on veut.
— Je te suis, je fais en riant, t’as dis caramel, c’est le mot magique pour moi.

Tu souris quand il te répond que ça lui ferait plaisir de venir un jour avec toi visiter la terre natale d’une partie de ta famille. Une partie de toi a réellement envie de lui dire de venir, là dans quelques semaines, dans quelques mois, avec toi au Portugal, l’occasion de rencontrer ta famille, de goûter les acras de morue de ta grand-mère, mais tu sais aussi que ça serait une très mauvaise idée et que cela risquerait de gâcher les retrouvailles de toute la famille. « En plus je connais plein de coins secrets. » réponds-tu avec un sourire malicieux avant que vous ne vous intéressiez au dessert et qu’il se décide à te suivre sur ton choix. « Tu aimes bien le caramel ? » Tu aimes apprendre ces petites choses sur lui même si tu en oublies la plupart, ta mémoire ayant du mal à retenir ce genre d’informations, qu’elles concernent ton petit-ami, ta famille ou tes amis. Une fois ta commande passée, tu reviens sur le sujet du Portugal et de ta famille. « Tu sais, l’autre jour, quand on m’a redemandé pour le mariage si je venais avec quelqu’un, j’ai hésité à parler de toi….mais, ma famille, pas tous, mais une partie, est pas mal conservatrice et...ils savent pas que j’aime aussi les hommes. » avoues-tu, un peu gêné. Tu as fait ton coming-out auprès d’une partie de ta famille, tes parents, tes frères, ta sœur et l’entièreté d’internet mais cela est encore secret pour une partie de ta famille au Portugal, qui n’accepterait sans doute pas, ou avec du mal, que tu puisses aimer autre chose que les femmes.

Ca me touche que Manny ait envie de me faire découvrir les coins qu’il aime, qu’il ait envie de m’amener dans un pays qui fait partie de lui. Notre relation est jeune, certes, mais je la sens déjà tellement forte et cela m’émeut. Je souris à sa question sur le caramel.
— J’adore le caramel ! Au beurre salé surtout, c’est juste le paradis sur terre ce truc !
On ne sait pas encore beaucoup de chose l’un sur l’autre, mais j’aime l’idée que ça se fasse petit à petit, qu’on se découvre au fur et à mesure sans rien précipité. Après la légèreté du caramel, la conversation tourne à quelque chose de plus sérieux. J’écoute Manny se confier et hoche simplement la tête.
— Je comprends, c’est pas…
Je cherche mes mots.
— On devrait pas avoir peur de parler de quelque chose de si naturel. Mais je comprends. Tu te protèges sans doute de cette partie-là de ta famille en gardant le silence, et c’est ok…si toi ça te va bien sûr. Chaque chose en son temps, un jour, tu leur diras…ou pas. Et ce serait pas grave non plus. Tant que tu te sens bien et en sécurité.

Tu réfléchis un instant si un des desserts portugais comporte du caramel au beurre salé mais tu n’en trouves pas. « Faudra te contenter du caramel classique pour cette fois. » lui réponds-tu avec un sourire. Tu tentes de garder dans un coin de ta tête ce qu’il vient de te dire mais tu es presque sûr que tu vas l’oublier. Une fois votre commande passée, tu reviens sur ta famille et le fait qu’ils ne sont pas tous au courant de ton attirance pour les hommes et donc, par conséquence, du fait qu’Elias existe. Il te rassure par ses mots, comprenant que ce n’est pas forcément simple d’en parler. Tu aimerais que ça le soit, tu aimerais pouvoir parler de ton nouveau copain qui te rend si heureux aux grands repas de famille. Bien sûr tu peux en parler à certains, ils ne sont clairement pas tous fermés sur la question mais la religion et les traditions ont une place relativement importante dans ta famille. « J’aimerais leur en parler...mais je sais très bien comment ils vont réagir. Des fois ça parle de ça, à table et je vois bien que l’ambiance serait plus la même si je leur disais. Ça me fait plaisir de les voir mais maintenant que t’es là, je sens que ça va pas être simple de faire semblant que j’ai pas trouvé de copine et qu’on essaie de me présenter quelqu’un. » lui expliques-tu. A ton âge et considéré comme célibataire sans avoir jamais été en couple, tu es un peu vu comme le cas désespéré de la famille, celui qu’il faut à tout prix caser. Heureusement tes parents ne sont pas comme ça. Si tu as redouté leur réaction à l’annonce de ta bisexualité, ils l’ont bien accepté, même s’ils ont mis du temps à le comprendre et à ne pas te juger.