he saw all my dark sides and said that black was his favorite color. (levi)

Peut-être que ce qui la blessait aussi tellement dans cette réponse qu'elle devait lui donner, c'était de savoir que ça fissurerait un peu l'âme de celui qu'elle avait aimé. D'ailleurs, elle n'était même pas sûre de pouvoir mettre ce qualificatif au passé. La complexité de ce lien qu'elle savait presque palpable entre eux, était ce qui en faisait la force et la beauté, en même temps que cela menaçait son intégrité même. Quel paradoxe, que de voir que ce qui les liait toujours avait eu la force de transcender les années, et restait à la fois d'une fragilité telle qu'il pouvait se détisser par quelques mots seulement. C'était égoïstement seulement, qu'Effy se rembrunissait alors que l'Anglais sautait du train en marche pour confronter la réalité du dehors, avec cette simple question. Elle était en colère qu'il mette fin à cette réunion d'âmes, si pas inattendue, pour le moins improvisée. Qu'il amortisse cette effervescence qu'aucun deux n'avait pu contenir plus longtemps, se laissant porter par leurs instincts avec les étoiles pour seules témoins. Mais elle savait, que c'était égoïste. C'est pourquoi elle lui répondit sans négociation, et hocha la tête quand il justifia sa question. Bien sûr, qu'il avait besoin de savoir. Bien qu'au fond d'elle, la jeune Anglaise savait qu'il la connaissait suffisamment bien, et connaissait tout autant Milo, pour savoir que oui, ce n'était pas de l'amour factice, pas de faux-semblants. Elle n'épilogua pas cependant, pressée de fuir cette conversation. Pressée de fuir cette distance soudainement bien trop réelle, tout en craignant qu'il ne soit trop tard. Après, il était peut-être trop tard depuis bien longtemps. Cette pensée percuta douloureusement son cœur, et elle la chassa vite, d'une nouvelle gorgée de rhum alors que le silence souhaitait reprendre ses droits. Levi en décida autrement, il semblait d'ailleurs décidé à emboutir de ses ingérences, chaque partie de l'esprit de la jeune fille. Sa gorge se serra, sa tête fit violence pour maîtriser les réponses de son corps, alors qu'elle sentait des larmes prêtes à monter, dans l'impasse de cette situation. Dans tout ce que ça remuait, bousculait dans tous les sens, mettant à mal le peu de contrôle qu'ils avaient tous deux sur leur vie, jouant avec leurs sentiments et leurs respirations comme s'ils n'étaient que des quilles à renverser. Effy posa la bouteille sur le sable, laissant les vagues avaler la vulnérabilité qu'évoquait le brun, la couchant sur le sable sans détours. Elle prit une inspiration, se mordit la lèvre, désespérée de contrôler ce que son cœur infligeait à sa chair. « On est censés guérir de ces vies-là ? » demanda-t-elle d'une voix à peine audible, presque un chuchotement brisé, alors qu'elle plongeait ce regard intense et abyssal dans celui du garçon.

Evidemment qu’il venait de se tirer, presque volontairement, une balle dans le pied, s’infligeant lui-même d’entendre cette vérité qui lui ferait forcément mal, se répercutant jusqu’à son âme déjà meurtrie. Et il se retrouvait démuni sous le poids de ses sentiments contradictoires, alors que son cœur ne s’était toujours pas remis de la fièvre de cet échange auquel ils avaient finalement cédé. Il avait senti qu’il venait de raviver les brûlures de cette rupture, sans connaître les détails de leur histoire, comprenant qu’il était question d’un amour qui n’avait rien de superficiel, le genre dont ils avaient été liés des années auparavant, et dont ils semblaient encore victimes aujourd’hui. C’était là, au milieu de ce déferlement d’émotions que Levi peinait à trouver sa place, à ne serait-ce savoir s’il en avait au moins une. Parce-que la réponse d’Effy avait été claire, sans bavure, lui confirmant presque qu’il devait reculer, admettre cette distance entre leurs deux cœurs pour les empêcher de s’envoyer des signaux. Levi, il comprenait maintenant qu’il n’avait plus le droit d’intervenir, de s’immiscer dans cette vie dont il s’était écarté, qu’Effy avait reconstruit en occultant son prénom. L’idée de n’appartenir qu’à son passé parvenait à fissurer son âme, encore un peu plus, quand un autre était venu prendre possession de ce cœur qu’il n’aurait certainement jamais voulu quitter. Alors il se redressa, admettant cet éloignement d’abord physique entre eux, encore trop bousculé par le souvenir de ses lèvres sur les siennes, tentant désespérément de faire le point alors qu’il vacillait toujours au plus près du vide. Levi, il n’avait certainement aucune idée de ce qu’il était en train de faire, ne laissant plus sa raison filtrer ses paroles, étalant sans réfléchir ses maux et sa vulnérabilité face à celle qui était la seule apte à les recevoir. « J’en sais rien. » Souffla-t-il finalement, leurs paroles entrecoupées de ces silences où les vagues s’entrechoquaient, se mourant à quelques mètres d’eux. Il trouva son regard, s’y perdant une énième fois, comme une histoire qui se répétait inlassablement, comme un destin auquel il ne pouvait pas échapper. « Tu seras toujours là, quoi qu’il se passe. » Ajouta-t-il, alors que l’ombre d’un sourire triste s’était dessinée sur ses lèvres, comme celui d’un homme abattu par les vérités, un homme qui arrêtait de lutter contre les évidences.

Happée par ces yeux d'opaline, par ces mots qui exsudaient la vérité, elle ne pouvait qu'acquiescer pourtant sans broncher, juste d'une flamme dans ses yeux d'un bleu inadmissible. Derrière cette connexion qui semblait immuable, Effy redoutait le goût d'éloignement qu'elle projetait, lui laissant une trace d'amertume. Elle aurait voulu saisir la main de l'Anglais, lui rappeler ce lien qui ne semblait jamais vouloir se briser entre eux. Ce lien qu'elle ne voulait pas briser. Comme une évidence, la brunette pouvait presque palper cette peur, tangible, celle qu'elle lisait dans la résignation de Levi, celle de chemins se voyant obligés de continuer dans des directions opposées. C'était pourtant le destin le plus sensé qui les attendait, le chemin qu'ils devaient emprunter, séparément. Mais pour Effy, il n'existait pas d'inévitable, si sa volonté en décidait autrement. Elle n'acceptait pas de se résigner à ce qu'il en était advenu de leurs vies mêlées, d'où ils en étaient arrivés. Et si certes, l'image de Milo brulait encore son cœur et ses entrailles, elle s'obstinait à penser que la vitesse de son pouls en présence de Levi, n'avait aucun rapport, et était totalement dissociable de cet état de fait. S'ils devaient creuser la question, qu'avaient-ils à perdre exactement ? Rien, si ce n'est un énième morceau d'eux-mêmes. Mais ils en avaient déjà dispersé suffisamment à travers le temps et le monde, que pour encore tenir les comptes. « Please don't go. » murmura Effy, d'un ton presque impératif, partagé avec une supplique, alors qu'elle plaçait finalement sa main sur celle de l'homme à ses côtés, incapable de lâcher son regard. Elle avait envie de sa chaleur, de son réconfort, de ses yeux incandescents et de sa tendresse, celle qu'elle connaissait par cœur. Et elle n'avait aucune envie de perdre du temps à se l'expliquer, ni à elle-même, ni à qui que ce soit. C'était lui, tout simplement. Elle tressaillit aux mots de l'Anglais, comme des révélations qu'elle aurait voulu entendre toute sa vie. Ces mots, ils n'apaisaient aucune douleur, aucune blessure ni injustice dont elle avait fait les frais. Mais ils vivifiaient son âme, et même sans les entendre, elle avait envie de lier la sienne à celle du garçon, une fois de plus, une fois encore, comme il en serait probablement toujours le cas à chaque fois qu'elle le retrouverait sur son chemin. C'était pourtant cette acceptation, cette résignation dans le regard du brun, qu'elle ne pouvait affronter. Elle le suppliait de ses yeux brillants, vulnérables, serrant sa main dans la sienne, mi-caresse mi-prison. Elle voulait le retrouver lui, entièrement, sans compromis.

Ils allaient tout droit dans le mur, c’était tout ce que Levi pouvait constater maintenant qu’il savait où en était la brune, qu’il avait compris les eaux troubles dans laquelle son âme s’était noyée. Et lui, il ne pouvait qu’assister à ça, désarmé, lui tendant désespérément sa main qui avait tout l’air d’une aide mais qui n’en était pas une en réalité. Il avait peur de la voir s’enfoncer davantage, que sa présence ne finisse par l’anéantir un peu plus, jusqu’à la perdre définitivement. Et Levi, il était incapable d’être égoïste quand il s’agissait de cette femme qui le bouleversait depuis toujours, lui qui était prêt à la choisir elle avant lui. Parce-qu’il ne supporterait pas l’idée d’interférer dans un quotidien où il n’avait plus sa place, où même son ombre pouvait provoquer un cataclysme aux conséquences désastreuses. Il aurait eu voulu avoir la force de partir, pour elle, pour lui donner l’air dont elle avait besoin pour respirer, et pourtant, il se retrouvait encore là, happé par le bleu de ses yeux, le cœur battant au même rythme que le sien. Ses mots eurent fini de l’achever, de faire taire sa raison alors qu’il sentit sa main se frayer un chemin sur la sienne, immédiatement réchauffée par ce contact dont il semblait incapable de se défaire. Et Effy, elle le savait autant que lui, qu’elle venait de réduire à néant cette dernière flamme de lucidité, anéantie par son regard, par cette douceur qu’il percevait jusque dans les tréfonds de son âme, par cette vulnérabilité dont il était la première victime. Il cilla, serrant sa main dans la sienne, comme une preuve silencieuse qu’il était toujours là, malgré les doutes et les peurs qui ne cessaient de souffler le chaud et le froid sur eux. « Où est-ce qu’on va comme ça ? » Murmura-t-il, tout aussi perdu qu’elle, avançant à l’aveugle dans les limbes de leur relation, peinant à prédire s’ils parviendraient à rester debout au prochain pas. Le brun bascula finalement sur le dos, retrouvant sa position initiale dans le sable, au premier rang pour se perdre dans les étoiles. Il croisa de nouveau le regard de la brune, le captant pendant quelques secondes, avant que son bras ne s’écarte cette fois-ci pour lui laisser la possibilité de venir contre lui, sans aucune barrière physique entre eux.

Entre agoniser émotionnellement jour après jour, à perdre de son éclat à chaque minute qui passait, ou bien se prendre un mur fatal, le choix était vite fait pour Effy. Si Levi était son cataclysme, alors elle se jetterait dedans. N'était-ce pas finalement la chose la plus sensée à faire, au vu de sa réalité ? Elle n'avait peut-être plus les idées claires, mais la jeune fille n'en était plus à réfléchir au bien-fondé de ses actions. Ils pouvaient mener indéfiniment cette danse périlleuse, ce ballet de flammes et de glace, de non-dits et de vérités crues. Elle décidait de briser ce cercle infini. « Nulle part. On ne va nulle part. » souffla-t-elle presque comme une promesse. Nulle part c'était bien, nulle part c'était rassurant. C'était tout et rien à la fois, c'était le chaos et la destination, c'était ici et ailleurs. Nulle part, ça lui paraissait être une excellente option. L'océan de ses prunelles se baladant sur les traits de Levi, qui s'était rallongé, elle capta ce regard qui pouvait tout simplement l'anéantir en une seconde, pour venir se blottir contre les courbes de son corps, sans plus d'hésitation. Ce soir, elle avait enfin l'impression de décider quelque chose, de sélectionner une action. Pas de se laisser trimballer par la vie sur un pont cahoteux suspendu au-dessus du vide, pas de se faire happer continuellement par le monde autour d'elle sans y opposer aucune résistance. Ce soir, elle retrouvait un morceau d'elle-même, et tant pis si ce n'était que temporaire. Elle décidait d'embrasser cette part de sa vie, sans conciliation. « Est-ce que ce soir, nulle part ça peut être chez toi ? » Le doux silence allumé d'étoiles, comme un faux retour au calme autour de leurs âmes agitées, s'était brisé. Elle avait osé. Sans ciller. Effy avait peut-être l'air perdue, fragile et prête à se briser en morceaux au moindre coup de vent, elle savait ce qu'elle voulait et pouvait l'énoncer sans flancher. Levi et elle savaient : c'était quitte ou double.

Nulle part. C’était sans doute ce qu'il y avait de mieux pour eux à ce moment précis. Ils avançaient sans but précis, le cœur et l'âme torturés, mais ensemble, leurs mains liées comme la promesse qu'ils ne se laisseraient jamais tomber. Leurs quotidiens se trouvaient déjà bien trop sans dessus dessous pour qu'ils ne planifient quoique ce soit, eux qui restaient les maîtres de l'improvisation et de l'imprévisible. Levi ne fit qu'hocher la tête à ses mots, aussi simples que sensés, acceptant ce chemin qu'elle lui proposait d’emprunter avec elle, sans en connaître la finalité. Le sable épousa de nouveau les formes de sa silhouette, n'hésitant plus à inviter la brune à le rejoindre, sans qu'il n'y ait besoin d'admettre une quelconque distance entre leurs deux corps. Désormais, il n'était plus question de ça, plus question de tergiverser ou d'hésiter, au moins ce soir. Le calme de la nuit apaisa de nouveau la tourmente, le temps de quelques secondes, les englobant dans cette bulle qui semblait pourtant fragile mais toujours présente, alors que la paume de l'anglais recouvrait le dos de la brune pour la garder contre lui. Et alors que ses yeux se perdaient dans l'immensité du ciel pailleté d’étoiles, Levi perçut de nouveau les vibrations de son cœur résonner jusque dans ses tempes à la seule énonciation de la question d'Effy. « Ça peut être où tu veux. » Finit-il par souffler, après avoir laissé quelques secondes de silence s’écouler, juste pour lui permettre de reprendre ses esprits. « On y va maintenant ? » Demanda-t-il, appréhendant soudainement de voir Effy confronter son présent, ce qu'il était devenu, redoutant même qu’elle ne puisse plus y trouver ses repères, comme autrefois. Il prit l'initiative de se relever, tendant sa main vers l’anglaise pour l’aider à en faire de même, considérant que les étoiles avaient assez assisté au cataclysme qui se déferlait entre eux depuis que leurs univers s’étaient de nouveau percutés l’un contre l’autre.

Allaient-ils survivre à ces revirements incessants, à cette tempête universelle qui ne faisait que les séparer et les réunir ? Est-ce que tout était prévu ainsi, calculé, écrit quelque part ? Effy avait récemment l’impression de n’avoir aucune mainmise sur son existence, aucun pouvoir sur ce vers quoi ils avançaient inexorablement, tâtonnant dans le noir sans pouvoir s’empêcher de se chercher. Et formuler cette pensée éhontée, ces mots délicats et pourtant ô combien périlleux, lui donnait le sentiment de reprendre le contrôle sur cette entrave qui les liait inexorablement, et délicieusement, l’un à l’autre. S’ils pouvaient avoir l’impression d’avoir le choix rien que ce soir, la belle ne laisserait pas passer l’occasion. Et son cœur ne fit que s’emballer un peu plus, quand elle entendit le souffle de l’Anglais lui donner une réponse. Cette façon qu’il avait de dire où tu veux. C’étaient des mots des gestes simples, mais qui résonnaient en elle comme tant de souvenirs passés, se faisant ramener à la surface. Effy ne bougea pas, laissant un instant l’occasion à leurs étoiles d’être témoin de leur choix. Inspirant encore l’odeur du sable frais et du sel marin, mêlée à la chaleur de la peau du garçon. Effleurant encore son torse d’une main délicate mais franche. Elle releva finalement la tête, pour croiser les iris envoûtants, et hocha la tête pour répondre à sa question. Si on y regardait de plus près, un sourire presque imperceptible étirait le coin de ses lèvres. Un sourire qui en disait long, qui disait tout. Pas celui du soulagement, de la satisfaction, de la gratitude. Juste cette lueur de douceur, ce moment hors de l’espace-temps, ces quelques heures à se retrouver, pleinement. Comme si rien d’autre n’existait. Effy ne voulait penser à rien d’autre. Juste ça. Juste eux. Levi se releva, et la jeune fille glissa sa main dans la sienne, naturellement, avec confiance, comme s’ils étaient de retour six ans en arrière. Son regard glissa un instant sur la bouteille d’alcool, abandonnée dans le sable. Elle ne la ramassa pas. Elle n’avait pas besoin de ça. Tout ce qu’elle pouvait ressentir comme pulsion désormais, c’était suivre cette âme à travers la nuit pour y lier la sienne une fois encore. Elle resserra l’étreinte de ses doigts, comme pour les rassurer tous les deux. Une sorte de tension nouvelle s’était installée, comme une attente fébrile, maintenant qu’ils avaient balayé toute hésitation, alors qu’ils traversaient la ville pour rejoindre l’appartement de Levi. Pour la première fois depuis des semaines, la brune se sentait bien. Ça ne durerait pas, elle le savait. Ils allaient déclencher un énième tremblement de terre, éboulement d’âmes, collision d’émotions. Mais c’était pas grave.

Combien de temps tiendraient-ils encore, suspendus au-dessus de ce qui s’apparentait au vide le plus total ? Ni l’un ni l’autre ne semblait prêt à mettre fin à ce jeu qui finirait tôt ou tard par avoir raison d’eux, comme s’ils avaient pleinement conscience qu’ils finiraient par se brûler à force d’embraser les flammes de cet incendie qui n’avait jamais cessé de se répandre. Les mots d’Effy avaient continué d’alimenter ce brasier, tout comme la réponse qu’il lui avait donnée, sans hésitation, sans tremblement audible. Ils décidaient de prendre un chemin des plus périlleux ensemble, qu’importent les conséquences qui pleuvraient sur eux après ça. Sa main ne tarda pas à rejoindre celle de la brune lorsqu’ils se relevèrent de leur cocon à tour de rôle, prêts à quitter les étoiles qui les avaient vu céder aux tentations les plus folles. Sans un mot, leurs doigts entrelacés, il ne suffit que d’un regard appuyé, signant cet accord tacite entre eux, pour qu’ils ne prennent la route les menant à l’appartement de Levi, comme s’il n’y avait rien de plus normal. Ils avançaient pourtant à grandes enjambées vers le centre de l’incendie, au sein même de son foyer, sans même daigner s’en protéger. L’anglais ralentit finalement le pas lorsqu’ils arrivèrent devant son immeuble, faisant comprendre à Effy qu’ils étaient arrivés à destination, sa main ne quittant la sienne que pour déverrouiller l’entrée du bâtiment, avant de s’en ressaisir pour la mener jusqu’à chez lui. « Entre. » Brisa-t-il le silence, lorsque sa clé débloqua la serrure, le brun s’écartant pour la laisser pénétrer les lieux où il vivait, cette pointe d’angoisse secouant ses entrailles alors qu’Effy découvrait pour la première fois son nouveau quotidien. « C’est plus petit qu’avant. » Ses yeux suivirent le mouvement des siens, qui semblaient capter l’environnement, lui qui n’était pas franchement en mesure de cacher que ses moyens semblaient bien plus maigres qu’à l’époque où ils s’étaient connus. « T’as besoin de quelque chose ? » Proposa-t-il, cherchant à ramener l’attention d’Effy sur lui, sur l’instant présent, alors que son corps entier continuait de vibrer à sa simple présence entre les murs de son quotidien.

Une autre dimension semblait s'ouvrir brièvement à eux, prête à les engloutir. Et aucun d'eux ne semblait plus mesurer l'imprudence du chemin qu'ils empruntaient. Ils s'engouffraient sans réserve dans cet espace-temps qui n'existait que pour eux, ce soir, et éclaterait sans doute comme une bulle le lendemain. Mais le moment n'était pas aux réflexions sur le futur. Ils gardaient le silence, du bas de l'immeuble jusqu'au moment où Levi la fit entrer, son cœur tressautant en le frôlant lorsqu'il s'écarta pour la laisser passer. Elle avait l'impression d'entrer dans un lieu interdit, dans le terreau de leur damnation. Et elle n'avait aucune envie de faire machine arrière. Elle voulait renouer ces morceaux d'elle-même, dispersés dans tout le chaos de ses émotions et de sa vie, avec ceux de Levi, qu'il semblait lui aussi perdre sur son chemin. Effy voulait les ramasser délicatement, un par un, pour essayer d'en reconstituer quelque chose de beau, comme lui. Peut-être qu'ils étaient les seuls à voir ça l'un en l'autre. Peut-être que c'était pour ça que cette attache subsistait, envers et contre tout, malgré tout ce qu'ils risquaient. La brune laissa un instant son regard s'imprégner des lieux, dans un sentiment ambivalent de souvenirs et de nouveauté. Ce n'était pas le même endroit qu'à l'époque, et pourtant elle avait la sensation de pénétrer dans un espace qu'elle connaissait, parce que c'était le sien. Même s'ils ne se connaissaient plus comme avant. Il y avait des choses qui ne changeaient pas. Un moment, Effy faillit se perdre dans des questionnements intérieurs sur à quoi ressemblait vraiment la vie de cet homme aujourd'hui. Ces bribes d'existence qu'aucun d'eux ne mentionnait. C'était comme revenir dans sa chambre d'enfant. Rien n'avait bougé, et à la fois tout avait changé, un monde d'inconnu s'était implanté durant des années d'absence. L'Anglais la ramena cependant à l'instant présent, et elle ferma la porte sur ces réflexions non-pertinentes. Ce n'était pas pour creuser encore plus le fossé qu'ils étaient là. Pas pour se poser d'autres questions potentiellement nocives. Ils étaient là pour se retrouver, et brûler ensemble. « Oui. » répondit l'âme égarée, retrouvant son ancrage dans les yeux d'azur du garçon. Sa voix s'était voulue affirmée, mais intérieurement elle tremblait. Elle se sentait avalanche meurtrière, falaise qui s'écroule, étoile qui explose. « De nous. » apposa-t-elle d'un ton sans réplique, et à la fois d'une douceur indescriptible. Face à lui, son corps ne pouvant s'éloigner du sien de plus de quelques centimètres, Effy se perdait dans ce regard qui chamboulait sa tête. Toutes ces émotions, contenues ou exprimées jusqu'ici à mi-mots, se réunissaient maintenant en feu d'artifice. Elle était sobre, l'anesthésie des substances qu'elle prenait dissipée, laissant le chaos de ses sentiments partir en roue libre. Son corps frêle peinait à les contenir, bouleversé, presque malmené par tant de sensations. Elle aurait presque pu croire qu'elle allait mourir, devant tant d'intensité libérée. Au lieu de ça, ses mains se détachèrent de celle de son ancien amant, glissant sur son ventre, son torse, remontant dans sa nuque pour venir trouver ses lèvres, comme on cherche une bouffée d'oxygène. Son cerveau était saturé, incapable de se tourner vers autre chose qu'eux, leurs corps, leurs esprits liés, leurs souvenirs ravivés, alors que sa peau criait après la sienne.

Ne rien prévoir. Voilà ce qu’ils cherchaient à faire l’un comme l’autre, désarçonnés par l’ampleur que prenaient les évènements sans même qu’ils ne forcent quoique ce soit. C’était comme si le destin venait de leur envoyer une balle perdue, qu’ils s’étaient évertués jusqu’ici à éviter, pour ne pas causer davantage de dégâts physiques et moraux. Ce soir, il n’y avait plus rien à espérer de ces boucliers qui tombaient en ruines devant leurs yeux désarmés. Ils devaient accepter l’inévitable et ne pas en mesurer les conséquences. Pas tout de suite en tout cas. C’était presque dans un naturel déconcertant qu’ils se mirent à suivre le chemin qui les mènerait au chaud, là où les étoiles ne pourraient plus être témoins de leurs déboires et excès en tout genre. Il n’y aurait qu’eux, leurs corps, leurs âmes. Levi, il ne se rendait pas encore compte de la signification de leurs faits et gestes, même s’il ne pouvait ignorer cette appréhension qui avait grandi au creux de son ventre au moment où il avait réalisé qu’elle était là, en chair et en os, chez lui, au milieu de ce salon où il n’aurait jamais imaginé sa présence. Et pourtant, même à distance, il pouvait percevoir la chaleur qui émanait de son corps, les effluves de ce parfum qui l’aurait rendu dingue tant il en avait été envoûté pendant des années. Il tenta maladroitement de justifier le décor et la vétusté des lieux qui n’étaient rien d’autre qu’un toit pour qu’il puisse s’abriter lorsqu’il ne travaillait pas. Effy avait dû le comprendre, à la manière dont étaient disposées ses affaires, jusqu’aux nombreux croquis qui recouvraient la table basse sans une once de sens. Sa voix tenta de la rattraper, de ne pas la laisser s’évader dans ses songes, pour la ramener à ce présent qu’ils avaient décidé de vivre tous les deux, même si ça n’était qu’éphémère. Et semble-t-il qu’il n’avait pas évalué la force de la tempête qu’Effy pouvait abattre sur lui en quelques mots à peine, l’engloutissant lui tout entier dans un univers où il la laisserait faire ce qu’elle voulait de lui. Il cilla lorsqu’elle se rapprocha, vibra quand ses mains s’apposèrent sur ce corps qu’elle semblait redécouvrir mais qu’elle connaissait pourtant par cœur. Jusqu’à ce que leurs lèvres ne se scellent à nouveau, dans une douceur où la passion était venue s’entremêler, à l’instar de leurs souffles qui se perdaient pour mieux se retrouver. Levi, il aurait voulu s’abandonner à elle, tout entier, qu’elle puisse effleurer chaque cellule qui le constituait, juste pour se rappeler encore une fois de l’effet qu’elle lui faisait. Et il était persuadé qu’elle s’en rendrait compte dans peu de temps, de cet effet, ses mains prenant de l’assurance pour glisser dans son dos et la rapprocher de lui, de ce corps qui semblait littéralement en feu. « J’vais pas te survivre… » Murmura-t-il après avoir rompu abruptement leur échange, questionnant son regard pour espérer y lire le même chamboulement, celui qui les amènerait vers le même précipice. Lentement, une de ses paumes remonta jusqu’à sa chevelure, l’incitant à basculer doucement la tête et laisser libre court à ses lèvres d’atteindre la peau délicate de son cou qu’il parsema de baisers, entrecoupés de son souffle au rythme saccadé.

Impossible de réfréner ces gestes guidés de sentiments bouillonnants maintenant qu’ils en étaient arrivés là. Et la jolie brune n’avait aucune, mais alors vraiment aucune envie d’arrêter quoi que ce soit. Cette cohérence dans la réunion de leurs êtres, tout d’un coup, prenait toute la place, une ampleur démesurée, à la hauteur des émotions sauvages qui les secouaient. Effy ressentait aussi cette appréhension, en même temps que cette impatience, ce besoin, qui semblait couler de sources. Elle pouvait lire dans le regard du brun qu’il en était de même pour lui. On aurait dit deux ados un peu trop emportés par l’incandescence de leurs sentiments, et à la fois, ils savaient exactement ce qu’ils faisaient, comme une danse répétée à maintes reprises, pour une cohésion parfaite, une synchronisation sans faute. Chaque centimètre de son dos que Levi effleurait, semblait s’embraser, la brûler avec délice, alors qu’elle pouvait sentir un long frisson prendre possession de sa peau. C’était trop et pas assez en même temps, leurs corps se collant rapidement l’un contre l’autre, incapables de faire autrement, alors que leurs pouls s’emballaient de concert. Elle put sentir son cœur louper un battement aux mots de l’amour d’une vie passée, plantant son regard dans le sien pour s’y laisser tomber en chute libre. Ce n’était même plus qu’une impression, ses mains tremblaient alors qu’elles redécouvraient encore et encore la texture de sa chair, tout son être était bouleversé, incapable de gérer ce flot continu de sensations, d’envies, de soulagements, d’incendies. S’ils n’y survivaient pas, ça lui allait très bien aussi. En cet instant, elle ne pouvait s’inquiéter moins de ce qui arriverait ensuite. Y avait même pas la place pour penser à quoi que ce soit d’autre, que ce qu’ils étaient en train de vivre, seconde après seconde. Eff’ en avait le souffle coupé, si bien qu’elle ne se sentait même pas capable de formuler une réponse en mots à Levi. Sa respiration saccadée devait être suffisante pour expliquer l’état dans lequel elle se trouvait. Et ce n’était même pas dû à l’intimité physique du moment, ou du moins, juste en partie. C’était ce cataclysme poignant qui ébranlait toutes ses barrières mentales, balayait tout sur son passage sans pitié, qui la mettait dans un tel état. Elle avait envie de lui dire tant de choses, dans ce moment volé, pourtant elle n’était pas capable de prononcer un mot. Elle ne pouvait que se satisfaire de leurs peaux embrasées, de ses lèvres et ses doigts qui voulaient redécouvrir chaque parcelle du corps de l’autre. Elle en oubliait de respirer, mais peu importe. Comme l’avait dit Levi, ils n’allaient peut-être pas se survivre, et tout de suite, ça n’avait plus la moindre importance. L’Anglaise se mordit la lèvre alors que son cou vivait le meilleur des supplices sous les baisers du garçon, ses mains agrippant sa nuque, ses épaules. Son corps n’y tenant plus, elle entreprit de lui retirer son haut, alors qu’il en faisait de même avec le sien, dans leurs mouvements pressés, nerveux, enflammés. Rien que sentir la chaleur de son bas-ventre contre le sien avait un goût de délivrance.

Il avait comme l’impression que ce soir, ils s’autorisaient l’interdit. Se laissant effleurer l’un et l’autre, l’un avec l’autre, permettant à leurs envies d’exploser au grand jour, dans un lâcher prise qui n’avait rien d’anodin. Levi, tout ce dont il avait besoin, c’était cette acceptation qu’il discernait dans les prunelles de celle qui avait trop de fois chamboulé son cœur, au point d’en provoquer des arythmies. Et il en était ce soir encore, la première victime, alors qu’il s’affairait à garder le contrôle sur son corps qui hurlait pour retrouver celui d’Effy, pour de vrai, sans faux semblants, sans hésitations. Il la désirait elle, entièrement, comme si sa vie en dépendait, comme si son cœur ne survivrait pas à une autre fugue qui l’éloignerait de lui. Levi, il était incapable de dissimuler chaque frisson qu’elle lui procurait, chaque onde qui émanait de son muscle cardiaque pour finalement trouver le sien, dans un écho qui résonnait jusque dans leurs tempes. Ses lèvres n’avaient pas fini d’effleurer les siennes, de les emprisonner dans le désir de ne plus jamais les quitter, ne leur laissant un temps de répit que pour respirer, même s’il restait convaincu que les lèvres d’Effy contenaient à elles seules tout l’oxygène dont il avait besoin pour survivre. Il se demandait encore comment il parvenait à rester debout alors que ses jambes menaçaient de flancher à chaque contact rapproché avec l’anglaise, ses mains s’accrochant à son corps qu’il désirait dans l’étau de ses bras, là où il avait eu sa place autrefois. Et sans pouvoir s’en empêcher, Levi ne pouvait qu’assister à ces flashs de leur passé, de leurs instants intimes et de tout ce qui avait compté quand leurs vies s’étaient liées. Il se rendait compte ce soir, à quel point le temps et les kilomètres n’étaient qu’un obstacle infime face à l’avalanche qui se perpétuait entre eux à chaque fois que leurs chemins se croisaient. C’était ainsi et il semblait que cette nuit, il finissait enfin par l’accepter. Sa bouche se baladait avec avidité dans le creux de son cou, y écrasant son souffle, parfois quelques soupirs à peine dissimulés, jusqu’à ce qu’ils ne décident de se dévêtir, dans une urgence aucunement contrôlée. Le corps en flammes, l’anglais se réappropria les lèvres de sa muse, y insufflant bien plus d’ardeur alors qu’il la guida à l’aveugle jusqu’à la pièce qui se trouvait derrière elle, et où leurs corps butèrent finalement contre l’armature de son lit. Incapable de ralentir le rythme d’une quelconque manière, Levi fit basculer Effy contre le matelas, laissant désormais la possibilité à son corps d’épouser les délicieuses courbes du sien, à ses lèvres de reprendre leur parcours dans le creux de son cou, venant jusqu’à effleurer sa clavicule pour enfin dévier vers son décolleté. Il releva finalement son visage à hauteur du sien, captant sans plus attendre le regard de son amour du passé, vibrant face à la confrontation de leurs univers qui semblaient toujours se retrouver, alors que d’une main habile, sa main glissa le long de son corps, de son cou jusqu’à l’ouverture de son pantalon qu’il détacha avec une lenteur mesurée.

À chaque espace supplémentaire qui se réduisait à néant entre eux, Effy avait l’impression de perdre un peu plus son souffle, mais d’avoir plus d’air à disposition. On aurait pu croire qu’ils avaient nié cette attraction invincible entre eux tellement longtemps qu’ils ne pouvaient maintenant plus que la laisser les consumer, sans pouvoir l’arrêter. Deux archers qui auraient tiré trop longtemps sur la corde de leur arc, leurs flèches se percutant de plein fouet dans une magnifique catastrophe. Deux flèches létales. C’était presque dans un état de transe que les deux âmes à bout entreprirent d’ôter toute enveloppe de tissu les empêchant de goûter pleinement à la peau de l’autre. La brune sentait son myocarde s’emballer, incendier sa poitrine, créant un brasier déchaîné et incontrôlable. Ce n’était pas seulement l’appel de la chair, c’était le chant de son âme qui bouleversait Effy à ce point. Partagée entre un désir charnel ravageur et un lien émotionnel qui pulvérisait tout sur son passage, elle se collait, embrassait, caressait, agrippait, ondulait, respirait. Tout était électrisant, répondant à une soif qui ne voulait pas se calmer. Ils titubaient jusqu’à la chambre, en tout cas la belle supposa que c’était une chambre, même si elle n’avait à peu près plus aucune conscience de ce qui les entourait, et que s’ils s’étaient retrouvés à même le sol du salon, ça ne l’aurait pas plus dérangée. Prise dans leurs baisers effrénés, elle se laissa guider dans des mouvements impatients, son bras cognant une porte au passage, avant qu’elle ne heurte le bord du lit pour finalement se retrouver sur le matelas, dans un mouvement presque brutal. Tout ça lui avait paru des plus fluides sans même qu’elle ne remarque réellement le trajet, trop absorbée par la fièvre de leurs corps qui ne pouvaient se lâcher. Sentir son poids sur elle, la douceur impatiente de ses lèvres courant le long de son cou jusqu’à sa poitrine. Elle en aurait presque suffoqué. Tout comme son pouls aux mesures erratiques, quand les iris couleur iceberg entraient en collision. La main de Levi descendit, doucement, presque cruellement, alors que l’Anglaise ne savait plus ce qui animait cette fièvre enragée : retrouver sans compromis celui qui avait bouleversé son être, ou la caresse de son corps contre le sien, promesse de plaisir imminent. Sans doute les deux, et c’était beaucoup trop à gérer, à discipliner. Alors ils ne disciplinaient rien, et Effy se redressait déjà pour capter encore les lèvres du garçon. Incapable de tenir en place, de ralentir, malgré le geste calculé de son partenaire, elle l’aida à enlever ce qui lui restait de vêtements, se tortillant pour faire glisser son jean et l’envoyer dans le néant d’un coin de la chambre. Elle le voulait, lui, vite, désespérément. Dans son esprit, il n’y avait plus de place pour autre chose que ça. La tempête qui sévirait ensuite les rattraperait bien assez vite, que pour qu’elle prenne le temps d’y penser maintenant. La douleur ne partirait pas, rien ne guérirait, rien ne serait plus facile, et même bien du contraire. Mais pour les quelques heures à venir, dans son esprit, il n’existait plus aucun être humain dans le monde à part eux deux.

Levi, il aurait pu vendre son âme au diable pour ne jamais voir cet instant s’arrêter, pour profiter encore un peu d’elle, de sa peau, des frissons qui parcouraient son échine à chacune de ses caresses. Il avait l’impression d’avoir été un volcan endormi que la brune venait de réveiller en un battement d’ailes, comme si elle avait toujours été la seule détentrice de ce pouvoir qu’elle avait toujours su exercer sur lui. C’était comme s’il pouvait effleurer le paradis du bout des doigts, atteindre l’inatteignable, flirter avec les étoiles qui avaient longtemps assisté à ce jeu d’ombres et de lumières qui s’était bâti entre eux. Désormais, il ne voulait plus la toucher qu’avec ses lèvres, qu’avec ses mains qui retrouvaient le dessin de ses courbes qu’il avait autrefois possédées, se délectant de son souffle à la chaleur enivrante. Le corps à moitié dénudé, Levi l’avait entraîné jusqu’au creux des draps, la laissant s’allonger au milieu du lit qui porterait bientôt les stigmates de leur passion. Et il le savait d’avance Levi, qu’il resterait hanté par les effluves de son parfum, par le souvenir fantomatique de sa chaleur contre la sienne, le corps et l’âme ravagés par tout ce qu’ils avaient partagé cette nuit. Impatient et exalté, ses doigts finirent par glisser en suivant un chemin invisible le long de son corps, trouvant refuge contre l’attache de son bas alors que ses yeux s’étaient ancrés dans les siens, désirant capter la moindre de ses réactions. Le souffle encore court, ses lèvres se lièrent de nouveau à celle de l’anglaise, éternisant leur échange alors qu’il la laissait se débarrasser de son jean, ses mains continuant leur longue descente sur ses cuisses mises à nue. D’un geste empreint de fougue, Levi détacha à son tour son jean, crevant d’envie d’éliminer la moindre couche de tissu qui entravait la rencontre de leurs chairs. Il voulait qu’elle sache qu’il la désirait, qu’il n’y avait qu’elle qui comptait à cet instant précis, qu’il n’avait d’intérêt que pour l’univers qui accueillait leur deux seules âmes toujours aussi perdues. Le cœur au bord des lèvres, Levi laissa son corps trouver sa place entre les jambes d’Effy, là où leurs désirs n’étaient plus à prouver, ses lèvres dérapant vers sa mâchoire, revenant finalement vers ses lèvres avec une envie de la posséder toute entière. Il était conscient qu’il n’y avait pas besoin d’un accord à voix haute pour qu’ils ne se comprennent, et pourtant, Levi avait eu ce réflexe de le chercher dans les iris turquoise de la brune, dans l’espoir d’y lire le même besoin qui animait son âme, celui qu’il s’était évertué à repousser depuis leurs retrouvailles. Il n’y avait plus rien à prouver désormais, et ils le savaient l’un comme l’autre, eux qui n’avaient aucunement cherché à faire machine arrière, se laissant totalement consumer par le désir de se retrouver.

Musique

Il était bien le seul à pouvoir la détourner du néant dans lequel elle s’enfonçait jour après jour. Il en avait toujours été ainsi d’ailleurs, avec lui. S’ils avaient eu droit à leur lot d’étincelles chaotiques à leurs débuts, Effy gardait en tête le souvenir d’une relation saine avec Levi. Ils pouvaient se tirer vers le bas comme vers le haut, et contre toute attente, ils avaient plutôt réussi dans cette deuxième partie, à l’époque. Aujourd’hui, ça devait probablement être l’inverse, même si leur lien n’avait plus le titre de relation à proprement parler. À moins que. La jeune fille savait que ce qu’ils faisaient, ce à quoi ils s’abandonnaient ici, et même à chaque fois qu’elle poussait la porte du Wojna’s, rien que pour le voir lui, n’avait rien de constructif, et s’accompagnait de risques pour leurs âmes déjà trop mises à mal. Mais en cet instant précis, elle n’arrivait aucunement à concevoir que ce qu’ils faisaient était nocif. Parce que ça lui faisait du bien. Pas comme une ligne de survie jetée à la mer, une main tendue pour la sauver. Non, ça faisait du bien comme un message de l’univers. Comme une bulle de chaleur au creux de son ventre. C’était juste ça : incomparablement bien. Et ils se laissaient porter par cette sensation, celle de sauter dans le vide sans parachute, mais qu’est-ce que c’était exaltant. Juste. Effy ne pouvait plus détacher ses mains du corps de son partenaire. Elle en connaissait chaque trait et chaque courbe, mais elle le redécouvrait comme la première fois. Cette envie insatiable d’y goûter, de l’effleurer, de s’y coller. Ce fut avec un sentiment de délivrance que l’Anglaise put sentir pleinement chaque centimètre carré de peau contre la sienne, alors qu’ils se retrouvaient débarrassés de toute barrière textile, de tout artifice. Et son cœur n’en faisait toujours qu’à sa tête, pendant ce temps, secouant sa cage thoracique, chamboulant sa sensibilité comme un tremblement de terre. Leurs corps alignés, leurs cœurs en symphonie harmonique, le choc du ciel azur contre l’océan d’icebergs, ce fut sans doute à cet instant qu’Effy comprit qu’elle aimait Levi, encore, toujours. Et ça ne changeait absolument rien à la situation de leurs âmes damnées, mais c’était un fait inavouable qui la percutait de plein fouet. Son myocarde ne savait plus où donner de la tête, et il se retrouvait sûrement encore malmené en tous sens pendant un long moment. Et probablement que Levi pouvait déceler tout ça en un échange de regard. Elle le lui criait silencieusement. Le brasier se déchaînait, calcinant l’épiderme de leur désir. Le besoin inévitable de se lier l’un à l’autre, dans un élan annihilateur. Impossible de marquer une pause. Les mains de la brune glissaient le long du dos de son amant, vers ses côtes, puis ses hanches épousant l’ouverture de ses cuisses, puis son bas-ventre. Son intimité humide n’avait qu’un impératif, l’accueillir au fond d’elle pour se retrouver dans une étreinte scintillante au firmament. Dans cette osmose enfin accomplie, Effy laissa échapper un gémissement libérateur, presque à la lisière d'un pleurs de soulagement, alors que tout son corps tremblait, collé à la chair désirée. Les deux âmes perdues réunies, finalement, dans leurs élans incendiaires.