keep on blinking at the moon (ella)

tw : relations sexuelles
Les sens d’Ella sont multipliés. Son regard est subjugué par sa beauté. Sa tête est enivrée par son odeur. Sa bouche ressent tous les détails de ses lèvres, chaque recoin. Et son corps est divisé par chaque caresse, redécouvrant chaque partie, chaque surface de sa peau, dont elle avait presque oublié l’existence mais que Reyansh réanime. Les secondes ne s’enchaînent plus, elles semblent même se soustraire. Ella se sent en dehors du temps, en dehors de la réalité. Enfin, sa réalité est devenue lui. Et leurs corps leur font comprendre, car sans dire spécialement un mot, ils s’additionnent parfaitement, comme si c’était logique qu’ils soient, là, tous les deux, dans ce lit. Peut-être qu’Ella n’est pas douée en mathématiques, mais la réponse à toutes ses équations semblent être justement trouvées. Une vague de bonheur, de plaisir vient s’empare du corps, de l’âme, du cœur de la jeune femme. Ce sentiment de bien-être, quand il est en elle, est indescriptible, les mots manquent. Ella prend son temps à scruter, à embrasser, à câliner le dos, la nuque, le torse, les tétons, les fesses, et bien plus encore de son partenaire. Elle apprend à aimer chaque partie, à découvrir leur spécialité, à découvrir ce qui le fait le plus vibrer ou pas. C’est comme si elle voulait que le plaisir ne s’arrêt plus, en tout cas, pas maintenant. Et puis, tout s’accélère, son corps se met à trembler, à recevoir un ouragan de bonheur, bien profond, bien fort et bien plus puissant que tout le reste. Son souffle s’arrête, son cœur oublie de battre, et tout se redétend à nouveau. Ella est apaisée, une sensation d’euphorie permanente traverse son corps. Elle peut enfin se reposer, près de lui. Puis, il se lève, va jeter le préservatif. En attendant, la jeune femme s’enroule dans ses draps, comme si elle ne voulait plus quitter son odeur. Lorsqu’il revient, elle lui laisse volontairement une place, proche d’elle. Elle se blottit dans ses bras, et continue à caresser légèrement son dos. L’heure ne compte plus. Il peut être une heure, minuit, midi, ou quatorze heures, ce n’est plus grave. Elle est avec lui, heureuse, apaisée, et amoureuse. Les mots ne sont plus utiles, ils se regardent sans parler, ils se comprennent ainsi. Puis, Reyansh décide de brisé ce silence. Ella sourit. « Je ne veux pas que tu partes. » répond-elle. « Je veux même continuer ce rêve éveillé, auprès de toi, là, ce soir » elle plonge son regard dans les yeux de son partenaire, décollé une main de son torse, redresse une mèche de ses cheveux puis ajoute « Et toi ? »

3h - Le souffle court, le corps plus vibrant et vivant que jamais malgré la fatigue, Reyansh laissa toute la tension redescendre. Son coeur reprenait, peu à peu, un rythme normal. Sa respiration, de moins en moins saccadée. Ses yeux, eux, ne quittaient pas Ella, à côté de qui il était maintenant allongé, rassasié. Il aurait pu rester là pendant des heures à la contempler. C’est un peu ce qui se passa, mais sur de longues minutes, à la regarder en silence. Leurs mains caressaient encore le corps de l’autre, par-ci, par-là, sur la joue, dans les cheveux, sur leurs courbes allongées. Il souriait, sans un bruit, parce qu’il était bien et qu’il ne voulait pas être ailleurs qu’ici. Il ne voulait plus bouger de ses bras, c’est ce qu’il lui dit. « C’est toi qui devrais partir. Tu es dans ma chambre. » Plaisanta-t-il, amusé. « Mais je te garde ici. » Comme lui, Ella désirait poursuivre ce rêve éveillé, pour toute la nuit. Il ne rêvait que de ça, lui aussi, de ne pas plonger dans le monde des rêves puisque dans la réalité, c’était tout comme. C’était mille fois mieux, même. La main de la brunette lâcha son torse pour aller replacer, pour la énième fois de la soirée sans doute, une mèche de ses cheveux bouclés. C’était la partie la plus rebelle de sa personne, sa chevelure indisciplinée. Il sourit. « Je pourrais te regarder pendant des heures. Je ne me lasserai jamais. » Il continua de la caresser doucement, de son épaule à sa hanche. Ils restèrent ainsi, longtemps, ni l’un ni l’autre n’avait conscience du temps qui s’écoulait. Ils s’embrassaient de temps en temps, puis l’un ou l’autre enfouissait son visage au creux de l’épaule de l’autre, se regardaient à nouveau. Il n’y avait pas besoin de mot. Leurs corps disaient tout. Au bout d’un moment, Reyansh sourit en constatant qu’Ella avait les yeux fermés. « Tu t’endors. » Souffla-t-il. « J’ai le meilleur moyen pour te réveiller un peu … » C’était peut-être cruel mais en même temps, c’était enfantin aussi, c’était doux dans sa manière de faire. Il se leva et la prit dans ses bras, se dirigeant vers la sortie de sa chambre. Ils étaient nus sur la terrasse du toit mais qu’est-ce qu’on s’en fout, il devait être trois ou quatre heures du matin. Ella toujours dans ses bras, il sauta dans la piscine avant qu’elle n’ait le temps de se dégager. Il éclata de rire alors qu’ils s’enfonçaient dans l’eau ensemble.

Ella reprend petit à petit ses esprits, heureuse et comblée. Son corps se détend mais n’oublie pas la vague de bonheur qu’elle vient de recevoir. Elle est désormais dans lit, avec lui, à le regarder, à l’admirer. La température de son corps diminue progressivement, alors que son cœur se réchauffe de plus en plus. Leurs mains continuent à parcourir leur corps, silencieusement, doucement, délicatement afin de ralentir tranquillement la cadence de leur rythme cardiaque. Et puis les paroles de Reyansh vient interrompre cette chorégraphie. Ella rit par la suite. C’est vrai, elle est dans sa chambre, c’est à elle de quitter les lieux. Pourtant, elle ne le veut pas, elle veut rester ici, toute la nuit, toute la journée aussi s’il le faut. « Je ne comptais pas partir de toute façon. »  Il leur est impossible de se quitter des yeux, de quitter leur main du corps de l’autre. Et dans cet élan de tendresse, de calme, de sérénité, Ella ferme les yeux. Et son esprit divague. Elle l’imagine avec elle, à voyager, à peindre, à sculpter, à détruire, à reconstruire. Elle ne saurait dire combien de temps cela a duré mais sûrement de nombreuses secondes pour que le souffle chaud de Reyansh vienne éveiller sa peau. Elle écoute à peine ce qu’il lui raconte, juste heureuse d’entendre une nouvelle fois sa voix, comme une berceuse. Or… Ella s’est bien trompée. Voilà qu’elle se retrouve dans ses bras, sans bien comprendre la situation, étant toute déboussolée. Elle essaye d’en sortir, mais impossible, il la serre fort, elle est condamnée à y rester. Puis, elle comprend. Elle saisit son plan cruel. L’adrénaline monte dans son corps. « Hey ! Rey ! » hausse-t-elle le ton. Ella tente de se débattre tant bien que mal. Rien y fait. Elle doit subir son triste sort. Elle n’a pu que fermer la bouche et éviter de boire la tasse. Ils ressortent tous les deux la tête hors de l’eau, la jeune femme remet, cette fois-ci, ses propres cheveux en place. Ni une ni deux, elle s’empresse d’arroser avec ses mains. « Œil pour œil, dent pour dent » lâche-t-elle. Et ils partent ensemble dans une bataille d’eau sans pitié, éclaboussant les rebords, les chaises, et tout ce qui les entoure. Dans cette piscine, ils sont à nouveau des gamins. Ils se moquent à nouveau de tout, de ce qui les entoure. Ils recréent leur bulle, leur propre bulle. Dans cette piscine, on ne peut entendre désormais que leurs rires résonner. Puis Ella stoppe le jeu, se rapprochant doucement de Reyansh, s’agrippant à lui pour l’embrasser, pour signer un contrat de paix… Et surout.. pour essayer de le couler. « Et oui, j’ai deux frères, j’ai appris à me défendre.»  dit-elle, justifiant son attaque, amusée. Définitivement, ce bain surprise a bien réveillé la jeune femme et même plus. Son côté enfantin, son enfant intérieur est à nouveau de la partie.

Profitant de ce moment durant lequel Ella était perdue dans ses pensées, les yeux fermés, Reyansh se releva avec agilité du lit, la prenant dans ses bras avant qu’elle n’ait le temps de comprendre à quoi il jouait. Ce n’est que lorsqu’il franchit le pas de la porte de sa chambre qu’elle sembla faire le lien entre sa direction et l’emplacement de la piscine qui se trouvait sur la terrasse du toit. Là, elle commença à se débattre un peu, haussant le ton, mais Reyansh ne démordait pas de son idée folle. Il la serra un peu plus contre lui, ce n’était rien de méchant, ce n’était que pour rire. Et ils s’étaient assez souvent baigné, toute la Bowery ensemble, pour que le jeune homme sache qu’Ella n’avait pas peur de l’eau. Elle savait très bien nager. Il sauta donc à pieds joints dans la piscine, se donnant un bon élan pour que tous les deux atterrissent sécuritairement presque au centre du grand rectangle. Lorsqu’ils remontèrent à la surface, Reyansh ayant libéré Ella durant leur chute, cette dernière lui envoya une grosse vague d’eau de ses mains. Il se protégea un peu trop tard et se prit toute l’eau en plein visage, mais il éclata de rire. Il passa une main dans ses cheveux pour les lisser vers l’arrière, ce qui était une tâche plus aisée maintenant qu’ils étaient complètement mouillés. Ils resteraient, peut-être, un peu plus longuement en place. « Je n’ai pas dit mon dernier mot, moi non plus ! » Et c’est ainsi qu’ils commencèrent à jouer aux enfants, insouciants, libres, comme s’il n’y avait pas de lendemain alors que les premiers rayons du soleil ne tarderaient sûrement pas à se pointer à l’horizon. Pour le moment cette nouvelle journée qui s’amorçait n’avait aucune importance. Tout ce qui importait c’était eux deux, ici, maintenant, dans cette bulle d’euphorie, de rires. Ella stoppa le jeu et se rapprocha doucement de Reyansh, comme si elle sortait son drapeau blanc sous forme de tendre baiser. Il allait lui rendre un second baiser quand il sentit les mains d’Ella sur ses épaules et tout son poids qu’elle mit pour le faire couler. Il se retrouva bien vite la tête en-dessous de l’eau, manquant de s’étouffer parce qu’il riait en même temps, tout ça était tellement léger et bon. Il remonta à la surface, toussant deux coups avant de continuer à rire. « Ils ne seraient pas bien fiers, tes frères, que tu utilises ton charme d’abord pour me déconcentrer. » Il esquissa un sourire, amusé. Malgré cette attaque Reyansh avait tout de même apprécié l’avant-goût, le baiser, le rapprochement. Il retourna donc vers Ella et cette fois l’intention n’était pas de se venger. Il avait juste envie de la retrouver. Elle enroula ses jambes autour de sa taille et passa ses bras autour de ses épaules. Lui, il la tenait sous les fesses, et alla à la section de la piscine où il pouvait toucher au fond. Il marchait, lentement dans l’eau, Ella dans les bras. Il l’embrassait, de temps en temps. Puis ils se regardaient, longuement. Il prenait de l’eau au creux de sa main et la faisait couler le long du dos de la brunette. Il l’embrassait encore. Ils répétèrent ce manège, encore et encore, jusqu’à ce que leurs corps commencent à frissonner. La brise était fraîche contre leurs épaules dénudées. Il faisait un peu moins noir, ici dehors, signe que le soleil n’était pas bien loin sous l’horizon. « On sort ? Il serait presque temps d’un café en regardant le soleil se lever, je pense … » Pour ça il leur faudrait se rhabiller et descendre, vite avant qu’une de leurs colocataires ne se lève avant eux - eux qui n’auraient, finalement, jamais à se lever puisqu’ils ne se seraient jamais vraiment couchés, cette nuit.

Déconcertée par la surprise de Reyansh, troublée par le charme qu’il dégage même sous l’eau, Ella ne se laisse pas à nouveau perdre dans ses pensée. Elle est bien décidée à se venger, et surtout de ne pas s’avouer vaincue alors qu’elle divaguait tranquillement dans un autre monde, où il était là aussi, où tout était possible, où ils pouvaient réaliser mille et une choses. Or, ce moment de rêverie est bien terminée, l’adrénaline a réveillé tout son corps, et elle est bien déterminée à lui faire payer. Elle s’amuse donc à lui jeter de l’eau sur la figure. Un petit peu, puis de plus en plus fort. Et Reyansh lui répond. Ils partent donc dans une bataille infernale, à presque vider entièrement la piscine à force d’essayer de se défendre et d’attaquer. Et puis, les rires s’invitent aux jeux, comme deux enfants, deux gamins. Pourtant, la jeune O’Brian décide d’y mettre fin, de s’approcher de lui, de toucher son corps, puis ses lèvres. Est-ce la fin ? Est-ce un signe de paix ? Cela serait trop beau, et surtout, elle souhaite cette petite victoire, comme une fierté, une fierté pour son enfant intérieur. Elle dépose donc les mains sur ses épaules, et s’appuie sur lui, de tout son poids, de toute ses forces afin qu’il puisse être immergé entièrement dans l’eau avant de plonger avec lui, puis de remonter. Ces frères auraient été très fiers des leçons qu’ils lui ont données, c’est certain. « Je pense plutôt qu’ils m’applaudiraient. » répond-elle en riant, amusée de la situation, de leurs enfantillages. Pourtant, leur petite guerre se termine bien et Ella n’attend pas pour retrouver le goût de ses lèvres, la sensation de toucher son corps. Automatiquement, elle enroule ses jambes autour de lui, et les bloque. Elle ne veut plus les bouger, plus le quitter. Elle sent les mains de Reyansh glisser le long de son dos, et arriver au niveau de ses fesses, pour les tenir, pour la garder aussi près de lui. Elle pourrait rester des heures dans cette position, là, nue dans la piscine, contre lui. Ella se laisser bercer par les pas de Reyansh jusqu’à trouver le bord idéal de la piscine, celui qui leur permettrait d’être à la fois immergés dans l’eau, mais aussi assis afin de profiter de ce moment le plus longtemps possible. Ils s’amusent maintenant à s’embrasser, se regarder, sourire, se caresser. Et le temps s’arrête à nouveau. Ella ne saurait plus dire quelle heure est-il. Les heures sont des secondes, les minutes des heures, tout est inversé, tout a perdu son sens, car plus rien n’est important depuis qu’elle ait monté les escaliers pour le rejoindre. Pourtant, le ciel s’éclaircit, petit à petit. Il est encore sombre, certes, mais l’aube s’approche, doucement accompagnée d’une légère brise. Les poils s’hérissent, des petits points apparaissent sur sa peau, et un frisson traverse son corps. « Serre-moi encore une fois, fort, d’abord. » répond-elle avant de se jeter dans ses bras, de les serrer et de rester ainsi quelques secondes. Elle s’y détache, se lève, commence à marcher hors de l’eau, se tourne vers lui et lui tend sa main. Puis elle lève les yeux vers le ciel, pour observer les quelques éclaircies. « Je pense qu’on peut voir le lever du soleil tout en haut de la coloc, sur le toit. » propose-t-elle comme idée avant de retourner dans sa chambre, et remettre sa chemise. Elle aurait aimé rester nue avec lui, cela ne la dérangeait absolument pas. Mais lever de soleil signifie aussi réveil des autres, malheureusement. « Je passe par ma chambre récupérer un pull. Tu veux que je te prépare quelque chose au passage ? » Elle espère vraiment qu’assister au lever de soleil ne mettra pas totalement fin à cette nuit, à eux. Elle espère que ça continuera, encore et encore, pendant longtemps.

Après les jeux d’enfants, après les rires et les éclaboussements, Ella et Reyansh retrouvèrent le calme et la tendresse. Ils pouvaient passer d’un état à l’autre sans se concerter, ils se suivaient sans même avoir à parler. L’artiste ignorait si c’était seulement l’effet de la nuit sur leurs esprits ou s’il s’agissait réellement de s’être si bien trouvés. Il voulait croire en la deuxième. Après tout, depuis leur premier baiser sur le trottoir, n’occupaient-ils pas toutes les pensées de l’autre ? N’étaient-ils pas, tout le temps, en train de se rejoindre dans l’imaginaire sans savoir que l’autre s’y trouvait aussi ? Seul le temps le dirait mais Reyansh était optimiste face à eux. Quelque chose d’aussi beau et doux ne pouvait être éphémère, une question d’heures. L’aube pointait le bout de son nez et leurs corps commençaient à frissonner. Vivement les premiers rayons du soleil pour les réchauffer. Reyansh proposa de sortir de l’eau et d’aller regarder le lever du jour ensemble, sur la terrasse. Avant, Ella réclamait ses bras, et l’artiste ne se fit pas prier. Il resserra son étreinte, les paumes bien pressées contre son dos, l’attirant contre lui. Il posa son menton dans le cou d’Ella, puis son nez, enfouissant son visage dans cette douceur. Il déposa un bref baiser sur sa peau et ils se détachèrent l’un de l’autre. Ella sortit de la piscine la première. Qu’est-ce qu’elle était belle, nue, éclairée par cette lumière naturelle. Il était planté là à la regarder à l’admirer, jusqu’à ce qu’elle lui tende la main. Il l’attrapa et s’extirpa à son tour de la piscine. « Faisons ça. Je n’y suis jamais allé c’est une nuit de premières fois, après tout. » Il sourit. Il la suivit jusqu’à sa chambre et enfila un nouveau tee-shirt et un nouveau caleçon. « Si tu arrives à préparer un café sans réveiller tout le monde, je veux bien … En t’attendant je vais préparer des couvertures et des coussins pour qu’on s’installe bien confortablement sur le toit. » Et tant pis s’il salissait tout, Reyansh n’était pas assez attaché aux choses matérielles pour s’inquiéter de cela. Au pire, ça se lavait. Il regarda Ella redescendre vers l’étage du bas et alla récupérer le nécessaire pour leur confort. Au passage, il ramassa son portrait de la jeune femme, laissé au sol à côté de son lit. Il la contempla à travers ses coups de fusain, un sourire aux lèvres, avant d’aller déposer le carnet sur sa table de travail. Il en profita pour consulter l’heure sur son téléphone posé là depuis hier, depuis le texto envoyé à Ella. Il était presque 5h30 du matin. Six heures et demie avec elle et c’était loin d’être assez. Reyansh monta sur le toit avec toutes les couvertures et les coussins et leur prépara un petit nid d’amour, tourné vers l’est. Il entendit la porte se rouvrir, en bas. « Je suis déjà en haut. T’as besoin d’aide pour monter ? » Demanda-t-il, pas trop fort, mais assez pour qu’elle l’entende.

Les minutes ont arrêté de tourner normalement. Ella a perdu totalement toute la notion du temps, tout ne défile plus comme avant. Avant, c’était bien chronométré, bien régulier, suivant un tempo précis donné par on-ne-sait-qui. Aujourd’hui, tout ça a disparu. Tout a éclaté. Tout ça n’avait plus de sens. Lorsqu’elle est avec lui, les heures ne défilent plus. Les grains du sablier ne tombent plus.  Mais dès qu’elle s’éloigne, ne serait-ce que de deux pas comme là, pour aller récupérer un pull, la réalité revient comme une claque. Chaque seconde semble une heure, chaque heure une journée. C’est comme si le temps rattrapait son retard.. Mais après quel retard court-t-il ? C’est bien ce que se demande la jeune femme, car pour elle, le seul retard valable dont il faudrait se soucier est celui où elle ne passe pas de temps avec lui. C’est donc dans cet élan qu’elle dégringole les escaliers ne manquant pas à tomber une ou deux fois. Elle rentre dans sa chambre, réveille son chat qui n’hésite pas à miauler tout son mécontentement contre elle -et il a toutes ses raisons valables-, et saisit le premier pull qu’elle aperçoit. La couleur du pull ? Son motif ? Elle s’en moque actuellement, ce n’est qu’un détail. Tout ce qui l’importe désormais est de rejoindre Reyansh, au plus vite. Elle se dirige par la suite vers la cuisine, met à bouillir de l’eau, et regarde dubitativement la cafetière. Et mince, comme elle n’aime pas le café, elle en a rarement fait. Comment cette étrange machine peut-elle fonctionner ? Elle observe les boutons, les différents bacs, mais rien ne lui vient en tête. Elle rejoint vite sa chambre, saisit son téléphone, et voit l'heure. Un sourire se dessine sur ses lèvres. C'est un magicien du temps, Reyansh, elle en est certaine maintenant. Puis, elle tapote la question à son ami Google, revient dans la cuisine, et essaye tant bien que mal à la faire fonctionner. Et dans le silence. Mais cette dernière n’est point coopérative et produit un grondement, comme si elle est en colère contre Ella qui ne sait pas s’en servir. Ella espère que, malgré tout, aucun des autres colocataires n’aient entendu le boudinement incessant de la machine. Décidemment, les deux ne seront jamais amies. Un petit sachet dans son thé, la tasse de café remplie, et Ella repart en direction d’une personne où elle se sent plus en sécurité, beaucoup plus qu’avec l’appareil et ses menaces. « Ne t’inquiète pas, je devrai m’en sortir, merci ! »  répond-elle hâtive de le retrouver, sur ce toit, à regarder le lever du soleil. Et puis là, elle découvre la scène. Des coussins, des couvertures, un nid douillet, et lui. Elle n’aurait pu mieux rêver. Elle dépose les tasses par terre, se faufile sous la couette, et se love contre lui. « Merci pour l’installation… »  chuchote-t-elle en regardant l’aube pointer le bout de son nez. « Je voudrai te dire que c’est parfait, mais je connais ton avis sur ce mot alors… juste merci. »  dit-elle en riant, la tête tournée vers lui finalement, et les yeux qui pétillent. Elle prend la tasse dans ses mains, inspire les saveurs fruitées de son thé et boit une gorgée. « Peut-être que cette nuit je me suis battue contre une machine pour ce café... »  Elle rit. « Mais je voulais te dire que… »  elle s’arrête un temps, observe à nouveau le paysage, puis lui. Ses cheveux, redevenus léger, volent au rythme du vent. Ses yeux sont légèrement plissés, sûrement par la fatigue. Mais ce tout, tout cet ensemble qui forme cet être fait battre le cœur de la jeune femme, qui s’accélère, un petit peu, encore une fois, une dernière fois. « Je ne la changerai pas, et j’espère en avoir d’autres identiques. » C’est peut-être la première fois qu’Ella parle à cœur ouvert devant lui. Et elle le sent, ses mains sont moites, son cœur est dans un train à très, trop, grande vitesse. Et pourtant, elle n’a pas précisé qu’elle en voulait d’autres avec lui et pas avec une autre personne. Mais c’est beaucoup trop pour elle de le dire. Elle a déjà dépassé son courage pour ces mots, qui semblent comme une évidence. C’est sûrement ça la magie de cette nuit, la magie de Reyansh, pouvoir tout battre, même le temps, même les cafetières. En attendant, elle se love contre lui, et espère qu’elle entendra une réponse rapidement. Avant le lever du soleil. Avant la fin de leur moment.

Ella lui était revenue, enfin. Même ces quelques minutes les ayant séparés, elles étaient de trop. Cette nuit intime cette nuit à deux, cet infini, avait créé en Reyansh un besoin incommensurable d’Ella. Un besoin d’elle, de ses lèvres, de sa peau, de ses rires, de son regard dans le sien. Il aimait chaque seconde passée auprès d’elle et il savait que désormais il saurait difficilement s’en passer. L’artiste l’attendit sur le toit, l’air frais chatouillant les poils de ses cuisses dénudées, recouvertes par un caleçon noir assez court. Lorsqu’il la vit apparaître, ses deux tasses fumantes dans les mains, il sourit. Ils n’eurent même pas besoin d’échanger des mots pour se comprendre, pour ressentir ce que l’autre ressentait : la hâte, de se retrouver, de s’enlacer, de profiter des derniers étirements de cette nuit. Il se faufila sous la couette dès qu’elle posa les tasses au sol, prêt à l’accueillir contre elle. Les coussins légèrement relevés leur permettait d’admirer le lever du soleil sans se fatiguer les muscles du haut du corps. Reyansh lâcha un léger rire quand Ella mentionna son désir de qualifier ce nid douillet, et ce moment, de parfaits. « Ça me trouble de l’admettre, mais, je dois t’accorder que c’est vrai que ça s’en rapproche … énormément … » Elle, ce paysage, ce confort, la fatigue au fond de leurs regards. C’était doux c’était beau, et il voulait s’y accrocher encore un peu comme il s’accrochait à elle, un bras autour de ses épaules, l’autre autour de son corps. Pendant qu’Ella regardait le paysage, les mots en suspens, Reyansh la regardait, elle et ses cheveux au vent, elle et ses taches de rousseur qui réapparaîtraient un peu plus au soleil, elle et sa douceur dans son regard. Elle était belle. Elle arrivait à agiter son cœur comme jamais auparavant. Il avait peut-être déjà aimé une femme au point de la suivre en Australie mais il avait l’impression qu’il pourrait aimer Ella jusqu’à la suivre jusqu’au bout du monde et plus loin encore. La destination n’importerait pas tant qu’il serait avec elle. « Je ne dormirais plus jamais si ça voulait dire que je passais toutes mes nuits comme celle qu’on vient de vivre. Ensemble. Juste toi et moi. » Il la regarda avec un sourire, l’embrassa doucement, posant sa main sur sa joue. Il se recula et étira le bras pour prendre sa tasse à son tour, goûtant le café durement coulé. Il grimaça. « Ah, c’est probablement le pire café que j’ai bu de toute ma vie. » Il rit, moqueur. « Je savais bien qu’il fallait au moins une imperfection à ce moment. » Il continua de rire, regardant Ella, l’embrassant pour se faire pardonner. Puis, une fois les rires évanouis dans le silence, ils se blottirent l’un contre l’autre et regardèrent le soleil se lever, sans dire un mot. Le spectacle de lumière leur coupait le souffle, autant que l’amour qui grandissait entre eux. Il n’y avait rien besoin d’autre que ça. Qu’eux, le silence, et la beauté du temps qui file.

TERMINÉ.