Quand le destin se fait joueur | Sixtian

Le fait de déambuler dans la rue commerçante en faisant du lèche vitrine ne fait pas vraiment partie de mes occupations habituelles mais l'anniversaire de mon frère approche et même si je ne l'ai pas vu depuis mes 9 ans et que je n'ai aucun moyen de le joindre chaque année j'achète quelque chose que je garde dans un carton au fond de mon placard au cas où je le retrouve par miracle un jour. Oui je sais là vous vous dîtes "ah névrosée" et vous avez raison je suis le genre de personne assez névrosée pour penser que mon frère fait peut-être la même chose que moi à des kilomètres d'ici et cette perspective me rend heureuse. Enfin je regarde sans vraiment regarder mon esprit est ailleurs, je pense à tout et à rien en même temps je pense au boulot notamment mes articles qui n'en sont pas me prennent la tête je n'arrive pas à me sortir ces articles à la noix de la tête. Je divague un peu et m'abandonne à regarder les gens qui déambulent comme moi sûrement pour des raisons plus joyeuse que la mienne.

Mon regard se perd et je baisse la tête pour regarder mes pieds tout en marchant quand soudain je percute un homme. Bien plus grand que moi et si baraqué que je manque de tomber à la renverse. Mon premier réflexe et de m'abaisser pour ramasser le sac plastique qu'il vient de lâcher à cause de moi. Tout en ramassant je bredouille quelques excuses tant bien que mal tout en me redressant : « Je suis vraiment désolée monsieur j'aurai du regarder où j'allais je suis désolée est ce que je peux faire quelque chose pour ... » Ma phrase s'arrête en plein milieu et mon cœur loupe un battement tandis que je découvre qui est le mystérieux inconnu que je viens de bousculer. Ce n'est pas possible ça ne peut pas être Christian. Mon esprit se fait un plaisir de bugger si bien que plus aucun mot ne sort de ma bouche si bien qu'il doit se dire que j'ai perdu le don de la parole soudainement. Je baisse la tête persuadée que le rouge m'est déjà monté aux joues. Ça ne m'arrive pas souvent mais ce type m'impressionne surtout pour tout ce que je sais dessus. Je ne l'ai vu qu'une seule fois mais il m'a tellement parlé de lui que j'ai l'impression de le connaître depuis toujours et en quelques sortes d'avoir violé son intimité. Parce que quand il m'a dit toutes ces choses sur sa vie et les épreuves qu'il a traversé il était ivre complètement ivre et je suis presque sûre qu'il ne se rappelle absolument plus de tout ce qu'il m'a dit. Je n'ose pas lui dire que je sais pour sa femme ses enfants sa maîtresse sa fuite enfin absolument tout ce qui l'a marqué. Ce soir là quand j'ai vu qu'il était complétement cuit j'ai voulu le ramener chez lui bien évidemment mais impossible d'obtenir un seul renseignement de sa part du coup il a squatté mon canapé mais évidemment monsieur ne voulait pas dormir et m'a raconté ses histoires jusqu'à pas d'heure. Une fois qu'il s'était endormi j'étais allée me coucher à mon tour et le matin à mon réveil il s'était volatilisé. Je ne l'avais pas revu depuis. Remarque peu de chance pour qu'il se rappelle de moi alors peut-être que si je me reprend maintenant il ne s'apercevra de rien et je pourrais m'en aller comme si de rien n'était.

Je reprend donc ma phrase comme si de rien n'était : « Qu'est ce que je pourrais faire pour me faire pardonner ? » en le regardant droit dans les yeux.
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Je l'entend lancer un petit rire quand je baisse la tête et que mon visage tourne au rouge écarlate. Il doit sûrement se demander ce qui me fait rougir ainsi mais cela n'empêche que je suis fière de moi j'ai réussi à me reprendre en main sans frôler la crise d'angoisse ce qui est quand même un grand pas dans ma vie sociale. Je le fixe dans les yeux, en attendant ma réponse. Bien que ses lunettes de soleil m'empêche de voir ses yeux je n'ai pas oublié son regard : perçant vous savez le genre de regard qui vous transperce un peu pour moi personnellement ça me fou les jetons ce genre de regard ça me rend mal à l'aise. Enfin comme après toutes les choses de la vie je suis quelqu'un de mal à l'aise c'est comme ça je suppose.

Mon cœur loupe encore une fois un battement quand il me propose d'aller prendre un café. Bien sûr que l'idée me passe par la tête de prétendre un rendez vous important mais il a bien précisé que ce n'était pas une proposition et puis après tout qui flâne dans la rue commerçante en ayant un rendez vous important ? Personne oui c'est bien ce que je me disais. Je ne détourne toujours pas les yeux, bien trop heureuse de pouvoir soutenir ce regard, tout en disant « Eh bien si ce n'est pas une proposition dans ce cas. » Il me demande si ça me dérange de passer à sa voiture avant mais je sens que ce n'est pas vraiment une question et qu'il n'attend pas vraiment de réponse de ma part étant donné qu'il fait quelques mètres pour atteindre ce qui est visiblement sa voiture sans même attendre que j'ajoute quoi que ce soit. Sûrement une façon polie de me demander mon avis sans le faire pourquoi pas.

Nous marchons pendant quelques instants avant de nous installer dans un café très cosy comme j'aime mais dans lequel je ne suis jamais allé preuve de mon activité sociale quasi inexistante. Christian me regarde toujours et le fait d'avoir ses yeux posés sur moi me rend de moins en moins mal à l'aise étant donné qu'il semble que ce soit une manie chez lui de fixer les gens. Un petit rire m'échappe tandis qu'il me vouvoie et m'appelle mademoiselle tout en me demandant ce qui me ferait plaisir. Je le regarde tout en disant « Excusez moi mais appelez moi Sixtine mademoiselle ça fait un petit peu... Formel. » Je me retiens encore une fois de rire et il va vraiment finir par croire que je me moque de lui mais la situation est juste vraiment cocasse. Dire que cet homme m'a étalé sa vie pendant des heures tandis qu'il était ivre et que j'ai même du le déshabiller car il avait vomi sur ses affaires et maintenant voilà qu'il m'appelle mademoiselle s'il vous plait je vous ai vu en caleçon je pense qu'on peut passer les formules de politesses. Enfin bien sûr je me retiens de dire tout ça à voix haute étant donné qu'il préfère sûrement oublier cet épisode si ce n'est pas déjà fait. J'ai l'impression d'avoir à faire à deux personnes tellement différentes et similaires à la fois. Mon sourire toujours plaqué sur le visage j'ajoute « Je vais prendre un jus de fruit ça m'ira très bien »    © soulmates

Mon visage commence à virer au rouge une nouvelle fois tandis que Christian mentionne le fait que je porte un joli prénom. Moi qui le trouve si inapproprié dans certaines circonstances et puis Sixtine ça renvoi forcément à la chapelle qui renvoi elle-même à Michel Ange enfin vous voyez le niveau quoi il est parfois un peu difficile d'être à la hauteur. Le serveur pointe enfin le bout de son nez et Christian commande une bière tout en veillant à ne pas oublier mon jus de fruit. Il relève ses lunettes tout en continuant de me fixer et se mordille la lèvre. Je ne me laisserai pas prendre au piège non il ne le faut pas mais en même temps si il continue de me regarder comme ça je vais vraiment finir par me cacher sous la table tellement j'ai l'impression que ses yeux me transpercent.

C'est le pompon quand il m'annonce qu'il tient à me présenter ses excuses pour l'autre fois que ça ne se reproduira pas et que ce n'est pas dans ses habitudes. La première chose qui me vient à l'esprit est qu'il s'en rappelle à vrai dire je pensais qu'il aurait tout oublié étant donné le taux d'alcool qui circulait dans ses veines à ce moment là. Et la deuxième chose c'est qu'il est très poli mais en même temps ça je le savais déjà étant donné tout ce qu'il m'a raconté à propos de lui. Il se racle la gorge signe qu'il est sûrement aussi mal à l'aise que moi. Je hoche la tête avec un sourire tout en remettant une mèche de cheveux derrière mon oreille. « Si ça peut te rassurer ce n'est pas vraiment dans mes habitudes non plus de ramener un inconnu bourré chez moi. » Je m'empresse d'ajouter « Et puis à vrai dire je ne pensais pas que tu te rappellerai de cet épisode ». Tout en ponctuant par un rire qui est un vrai rire pas ce genre de rire nerveux qui sort parfois sans qu'on le veuille vraiment plutôt un rire de soulagement parce qu'être la seule à se souvenir de quelque chose ça peut parfois être pesant. Le serveur revient et Christian s'empresse de payer nos consommations. Galant en plus de ça.

On sent qu'il a envie de changer de conversation. Dès que le serveur disparait Christian me demande d'où je viens parce que je n'ai pas d'accent australien. Un sourire s'imprime sur mon visage sans que je le veuille vraiment : c'est toujours l'effet que ça me fait de repenser à l'Amérique et à Seattle je dois avouer que parfois cette vie me manque un peu. C'est donc le sourire aux lèvres que je répond : « Je suis Américaine je viens de Seattle ça fait dix ans que je suis ici. Je te demanderai bien d'où tu viens également si je ne le savais pas déjà... » Je rajoute rapidement histoire d'expliquer un peu ce que je viens de dire : « Il y a pleins de choses qui nous échappent sans qu'on le veuille vraiment quand on est ivre et triste ». Je garde mon sourire histoire de lui montrer que je ne me sens pas mal à l'aise et que je ne garde pas un mauvais souvenir de cette soirée.      © soulmates