Non mais... que vois-je!? ft. Isaiah

Quelques bières déjà dans le système, Isaiah discutait avec des amis et des parfaits inconnus depuis vingt-deux heures, environ. Il n’arrivait que très rarement plus tôt que cela à une soirée, préférant régler tout ce qu’il avait à régler durant la journée avant. Comme ça, il pouvait profiter de quelques verres et de quelques joints la tête complètement vide. Demain était un autre jour. Bref, le jeune homme avait fait de nouvelles rencontres comme à pas mal tous les soirs, ce qui faisait augmenter son nombre d’amis Facebook à une vitesse hallucinante. Bon, il s’en fichait un peu, cette popularité qu’il avait n’était pas intentionnelle ou prisée. Il se liait juste naturellement et rapidement d’amitié avec les gens. C’était dans sa personnalité.

À un certain moment, la température dans la boîte de nuit était vraiment insupportable. Trop de gens, trop d’alcool, et Isaiah avait eu besoin de prendre l’air. Il sortit donc de l’établissement et resta sur le trottoir, s’allumant finalement un joint pour passer le temps et se remettre un peu dans l’ambiance. Alors qu’il terminait son joint et jetait les restants dans l’endroit approprié – bon, pour les cigarettes, mais ça revenait au même -, un jeune homme s’approcha de lui. Jeune homme c’était même généreux. Il avait l’air d’un gamin, enfin adolescent, pas du tout près d’être majeur. Isaiah le salua en retour puisque le gosse l’avait fait en premier. Il lui demanda ensuite s’il n’avait pas quelque chose de bon à lui vendre. Isaiah était habituellement prudent avec les inconnus, ne voulant pas se faire chopper par la police, mais ce gosse avait tellement l’air inoffensif. Et puis, Isaiah avait un si bon sens de l’observation qu’il était devenu assez doué pour reconnaître les vrais acheteurs des faux. Il acquiesça donc à la demande du garçon et lui vendit un peu d’herbe, pas trop, juste un peu, question de faire sa soirée et de ne pas vider son portefeuille. Isaiah avait un minimum de bon sens, même si selon plusieurs cela faisait de lui un irresponsable à la base.

Une voix féminine très agacée et forte s’éleva dans les airs, faisant en sorte que le gamin détala comme une gazelle. Isaiah se tourna vers son interlocutrice, et reconnut bien vite Kamille, avec qui il travaillait les vendredis au zoo. Un grand sourire s’afficha sur son visage. « Hé, Kamille ! » Il lui fit la bise, mais la jeune femme demeura hors d’elle. Isaiah, un peu trop calme, autant à cause de son naturel je-m’en-foutisme mais aussi à cause du joint qu’il venait de fumer, ne réagissait pas aussi fortement que Kamille à la situation. « Et pourquoi tu me frappes, Kamille ? C’est pas très gentil. » Lâcha-t-il devant une violence si gratuite.

Il ne fallait quand même pas juger trop vite. Au moins, Isaiah avait le mérite de fumer et de vendre de l’herbe de qualité. Il savait pertinemment que tous les produits chimiques mis dans l’herbe des villes étaient nocifs pour la santé et comme il détestait tout ce qu’il y avait de chimique, il était très prudent de ce côté-là. D’ailleurs, le cultivateur avec qui il faisait affaire était un bon ami, aussi naturel et anti-chimique que lui. Il faisait pousser son herbe dans son propre champ puisqu’il était agriculteur également. Isaiah lui faisait pleinement confiance et puis le naturel de l’herbe qu’il lui vendait se faisait sentir dans l’effet désiré. Il ne faisait donc que partager la bonne nouvelle en vendant ce produit autour de lui !

Bon, visiblement, tout le monde ne pensait pas comme lui. Kamille se détacha vite de sa bise en reniflant son odeur. Elle s’emporta en disant à Isaiah qu’il était complètement défoncé. Il hocha la tête. « Et un point de plus pour Sherlock ! » Il rigola. Il ne disait pas cela méchamment, pas du tout, c’était très humoristique comme commentaire. Isaiah prenait tellement la vie à la légère, il disait ce qu’il voulait, ne manquait jamais une occasion de faire rire. Sauf que là, pour le coup, Kamille ne rigolait pas. D’ailleurs, elle profita de l’occasion pour réprimander le brun quant à sa conduite. Il fronça les sourcils. « Te faire la bise était une erreur, Kamille ? Je ne crois pas. » Renchérit-il. Mais, voyant que la jeune brunette n’était pas du tout prête à lâcher prise, il prit un peu plus son sérieux. « Bon, d’accord, je vais pas faire semblant de ne pas savoir de quoi tu parles. Mais faut que tu relaxes, Kamille. Ce n’est pas grave du tout, on s’amuse tous, y’a pas de mal !! » Il tentait de la rassurer, de la calmer, parce qu’il n’avait pas du tout envie de se la mettre à dos pour un truc aussi futile et sans importance.

Toujours en contrôle ou presque, Isaiah avait appris à reconnaître ses limites et à ne jamais les franchir, sauf s’il désirait atteindre cet état. Il ne fumait jamais trop, il ne buvait jamais jusqu’au point de ne plus se souvenir de rien et de ne plus pouvoir répondre de ses actes. Malgré les apparences, Isaiah était tout de même un homme responsable. Tout ce qu’il voulait, c’était d’avoir du plaisir, et il savait qu’il n’aurait aucun plaisir s’il était complètement torché. Disons qu’un peu d’alcool ou un peu d’herbe ne faisait que lui donner un petit coup de pied dans le cul pour être encore plus heureux qu’il ne le serait sans. Il n’avait pas besoin de ces substances pour s’amuser, mais c’était un bonus. Kamille n’avait donc pas à s’en faire pour lui : tout était sous contrôle. « Je sais tout ça, Kamille. Je sais. Mais tu vois, je ne fume pas à toutes les heures de la journée en quantités monstrueuses. Je fume un peu, pour me relaxer. Tu devrais essayer, Kamille, tu aimerais. » Lui proposa-t-il. Il n’allait cependant jamais forcer qui que ce soit à consommer s’il ne le voulait pas. Isaiah se doutait certes fortement que la brunette allait refuser son invitation, mais le partage étant tellement ancré en lui, il n’avait pu se retenir de proposer quand même. Et puis, elle avait visiblement besoin de se décontracter.

Kamille posa finalement sa main sur le bras d’Isaiah, doucement, avec un regard tout aussi doux accompagnant ses paroles digne d’une grande sœur. Le jeune homme ne put s’empêcher de sourire devant une telle action de la part de son amie. « Aw, Kamille. Tu es bien trop gentille pour ce monde. » Déclara-t-il. Dans la société actuelle, il y avait tellement de nombrilistes qui ne daignaient jamais s’en faire pour les autres. Isaiah était si ravi de compter parmi ses amis une femme comme Kamille, qui s’inquiétait de son sort même s’ils ne se connaissaient même pas tant que ça. « Ne t’en fais pas, d’accord, Kamille ? Je n’aurai pas d’ennuis. Et si ça peut te rassurer, je ne vends qu’à des personnes complètement lucides et informées. Si ce n’était pas à moi qu’elles achetaient, c’était à quelqu’un d’autre, et je préfère largement que ce soit mes produits cleans et naturels plutôt qu’une autre merde. » Isaiah frotta doucement et amicalement le bras de Kamille, pour ponctuer sa tentative de la rassurer. « Tu venais danser un peu, c’est ça ? » Demanda finalement Isaiah, imitant quelques mouvements de danse peu réussis pour appuyer ses propos. Après tout, si la brunette était ici devant la boîte de nuit, ce n’était pas que pour le réprimander.

Ne perdant pas de temps pour refuser l’offre d’Isaiah, Kamille secoua vivement la tête en signe de négation. Elle semblait presque choquée mais d’une façon plutôt mignonne, ce qui fit sourire Isaiah. Il n’insista pas. Kamille était une chic fille et il ne voulait certainement pas qu’elle le fuit en pensant qu’il était une espèce de dévergondé sans bon sens. Le respect était pour lui une valeur très importante alors il n’allait jamais aller à l’encontre de la volonté de quelqu’un d’autre. C’est pourquoi il cessa de parler d’herbe sur-le-champ, afin d’éviter que la jeune femme ne le laisse en plan et ne veuille plus lui adresser la parole. « C’est une belle qualité à avoir, Kamille. Je suis chanceux d’avoir une femme comme toi qui tienne à moi. » Dit-il en toute sincérité. Si Isaiah savait valoriser quelque chose dans la vie, c’était bien l’amitié – enfin, il y avait un tas d’autres trucs comme l’environnement, l’égalité entre tous, etc., mais l’amitié était un gros morceau. Il savait reconnaître des amis en or, et Kamille en était une, et ils ne se connaissaient même pas encore beaucoup. C’était donc beaucoup à ses yeux.

Isaiah demanda alors à Kamille si elle venait danser, autant pour changer de sujet que pour le réel intérêt qu’il portait à sa présence ici. La jeune femme, ayant presque la même réaction que lorsqu’il lui avait proposé de fumer, lui dit d’oublier ça. Isaiah prit un air faussement offusqué quand la brunette lui dit qu’elle allait dormir. « Oh, ça non, ma belle Kamille ! C’est samedi soir, la nuit est jeune ! N’allons pas danser si tu n’en as pas envie, mais tiens-moi au moins compagnie pour quelques heures encore ! » Lança-t-il à Kamille, avec un enthousiasme démesuré.

Le regard d’Isaiah se tourna vers les deux jeunes demoiselles qui roucoulaient et rigolaient de l’autre côté du trottoir, près de la porte d’entrée de la boîte de nuit. Il sourit en les regardant, et leur envoya la main, ce qui eut pour effet de les faire rigoler encore plus entre elles. Une d’entre elle vira au rouge, d’ailleurs. Le jeune homme reporta son attention sur Kamille. « Je préfère que tu les fasses fuir plutôt que ce soit elles qui te fassent fuir. J’ai bien envie de m’éclater avec toi, Kamille. » Isaiah accentua son toi, pour bien faire comprendre à la brunette qu’il se fichait bien des filles qui pourraient le reluquer. Ça pouvait arriver, oui. Quand il sortait, ce n’était pas si rare qu’il se fasse aborder. Il ne prenait pas la grosse tête pour ça et n’allait certainement pas délaisser Kamille pour cela.

Pour le plus grand bonheur d’Isaiah, la demoiselle décida de capituler et d’accepter d’aller danser un moment. À force de sentir la chaleur et d’entendre la musique à chaque fois que la porte s’ouvrait, la demoiselle s’était laissée tenter ! Isaiah frotta ses deux mains l’une contre l’autre en signe de satisfaction. « Excellent ! Ok, comme on s’entendra peut-être pas tant que ça sur la piste de danse, on va se faire un signal codé pour quand tu voudras quitter. » Isaiah fit mine de réfléchir, et, finalement, tira ses deux lobes d’oreille avec ses index et son pouce. « Tu peux accompagner le tout d’une grimace, ce serait encore plus cool. » Le jeune homme, dans sa légèreté habituelle, attrapa la main de Kamille et l’entraîna finalement à l’intérieur de la boîte de nuit. Alors qu’ils se trouvaient dans le couloir menant à la salle principale, Isaiah se tourna la tête derrière lui pour regarder la jeune femme. « Tu veux boire un verre ou simplement danser ? » Il voulait s’assurer que tous les bons éléments pour une bonne soirée étaient réunis pour elle.

Le jeune homme hocha la tête à la réponse de Kamille et, tout juste avant d’entrer dans la salle principale dans laquelle ils ne s’entendraient plus autant parler, il lui dit : « On s’en reparle quand t’auras dansé deux-trois minutes. Tu seras assoiffée. » Parce qu’il ferait chaud, ils auraient chauds, et ils allaient se déshydrater assez vite. Certes, l’alcool était loin d’être la solution pour une bonne réhydratation, mais il n’allait pas se résoudre à commander une eau Perrier pour son amie. Enfin, si c’était vraiment ce qu’elle souhaitait, il n’allait pas en faire d’histoire. Comme mentionné plus tôt, Isaiah respectait le choix des autres. Mais il avait bien envie que Kamille lâche son fou. De ce qu’il savait d’elle, elle en avait bien besoin, et méritait aussi d’avoir une soirée d’amusement, enfin.

Ils entrèrent finalement dans cette fournaise dansante et, sans lâcher la main de Kamille, le brun se fraya un chemin jusqu’à un endroit où les gens dansaient pour de vrai. Aux extrémités, c’était surtout des groupes de personnes qui parlaient ensemble du mieux qu’ils le pouvaient. Isaiah préférait être dans le feu de l’action. Le DJ, au bout de la salle, envoyait du sacré beat et Isaiah était déjà dans l’ambiance. Une fois arrivé à un endroit qu’il jugea bon, le jeune homme se retourna vers Kamille et commença à danser avec elle, juste comme ça, sans autre préliminaire. Ils n’avaient pas besoin d’avoir ce petit moment gênant durant lequel les deux ne savent pas quoi faire. Isaiah était déjà à fond dans l’ambiance et, avec lui, Kamille ne tarderait pas à l’être aussi tellement il se donnait dans ses mouvements.

Un sourire de satisfaction se dessina sur les lèvres d’Isaiah alors que Kamille attrapait ses deux mains pour mieux danser en harmonie avec lui. Leurs deux êtres synchronisés se laissaient aller sur le rythme qu’envoyait le DJ, et franchement, Isaiah avait vraiment du plaisir. C’était chouette de la voir dans un cadre autre que le parc animalier. Ça faisait changement d’enlever les crottes de singe ou de nourrir les manchots ensemble, quoi. Il se laissait donc complètement aller, se permettant même de rapprocher la jeune femme de lui à quelques reprises pour qu’ils dansent un peu plus collés, sans que ça devienne vulgaire comme d’autres danseurs se le permettaient. Sauf que voilà, des gens un peu moins timides venaient se coller à Kamille, et Isaiah remarqua bien vite que ça ne faisait pas son bonheur. Lui s’en fichait pas mal, c’était que des corps, et même il trouvait qu’il y avait quelque chose de beau là-dedans, mais il pouvait aussi comprendre que Kamille n’était pas à l’aise. Il la laissa donc s’agripper à son cou non pas sans réprimer un léger sourire amusé. Elle était toute innocente, toute mignonne, et il la trouvait vraiment à craquer alors qu’elle cherchait sa protection, comme ça. Puis elle se leva sur la pointe des pieds pour atteindre l’oreille d’Isaiah et lui demanda, en hurlant, si c’était toujours comme ça. Isaiah hocha la tête et se pencha à l’oreille de sa compagne. « Pas mal, oui ! Les gens se laissent aller ! » Il sourit en la regardant, puis revint à son oreille. « Si tu veux, on va s’installer au bar ! Tu seras moins … envahie ! » Proposa-t-il.