On croit que c'était pire mais parfois une personne arrange les choses (pv Noah Rutkowski) TERMINE

J'écoutais avec attention la jeune femme me répondre qu'elle était en effet chamane, mais qu'elle composait en elle même une sorte de conflit, ses parents étant d'origines, de culture, et de religion différentes. J'acquiesçai doucement, tandis qu'elle me donnait son avis sur les deux religions qu'elle connaissait. Personnellement, mon père était agnostique, tandis que ma mère était catholique. J'avais ainsi reçu une éducation catholique lorsque j'étais jeune, bien qu'en grandissant, je percevais la question davantage comme mon paternel. J'appréciais le côté reconnu du catholicisme, le fait que les anecdotes racontées dans la Bible sont plus ou moins connues de tous, et renferment une morale. Mais de là à croire que tout ceci s'est véritablement déroulé, c'était un pas que je n'avais jamais franchi. Je voyais plus cet ouvrage comme une oeuvre de fiction, presque comme les fables de Lafontaine, bien que je me gardais de répandre mon opinion sur la question, sachant pertinemment que ce n'était jamais bien reçu. « C'est vrai que c'est logique, comme façon de voir les choses. » concluais-je quand Haley me donna son point de vue sur la création du monde.

Puis, je lui parlais de la bouquinade qui aurait lieu au mois de novembre. Dans la mesure du possible, je ne ratais jamais cette occasion. Pour moi, c'était un moment phare dans ma passion de lecteur. Et il y avait tellement de choix, que je faisais toujours des trouvailles fabuleuses, et le tout à petit prix. Manifestement, l'idée de s'y rendre enchantait aussi Haley, qui proposait qu'on y aille à deux. Je ris doucement lorsque la jeune femme m'avoua toujours se perdre dans la ville de Bowen et ne pas nécessairement être aventurière, ce qui préserverait sa beauté. « Ça marche, je te dirais quand elle aura lieu et on ira ensemble. » acceptais-je avec un sourire. « C'est pratique en plus, je n'ai même pas besoin de ton numéro de téléphone, j'ai juste à frapper en face. » Je souris et l'écoutais enchaîner à nouveau sur le chamanisme, me questionnant sur une éventuelle pratique. Je fronçais doucement les sourcils. Je n'avais jamais pensé que cette occasion se présenterait à moi pour être sincère. « C'est vrai que ça m'intéresse, mais je n'y ai jamais vraiment pensé. Pour moi, ce n'était pas vraiment quelque chose qui se proposerait à moi un jour. » En effet, je n'avais jamais connu de chaman, ni même vraiment entendu parler à Bowen de chamanisme. Je baissais les yeux ensuite sur Rosie, qui semblait réellement à son aise. « Elle t'a adoptée. » annonçais-je avec un sourire. « Je pense que c'est la première fois que je la vois aussi décontractée sur les genoux de quelqu'un autre que moi. » Je conservais mon regard sur le chaton, continuant, sans réellement me poser de question. « A la base c'est mon ex qui l'a adopté, mais Rosie ne pouvait pas la voir. Elle se cachait toujours quand elle était dans les parages. J'ai pris plusieurs jours à l'amadouer pour qu'elle s'approche enfin de moi et à ce moment-là, elle me quittait plus. Et bien sûr, quand on s'est séparé, il était hors de question que je la laisse derrière moi avec quelqu'un qui la traitait pas assez bien à mes yeux. » Je haussais le regard vers Haley. « Ce qui est comique, c'est qu'avant ça, je n'aimais pas les chats. Maintenant, je m'en séparerai pour rien au monde. » Je ris doucement, avant de penser tout haut : « Tu dois me prendre pour la version masculine de la cat lady. »

Je ne pus m'empêcher de rire lorsque Haley me demanda si je n'étais pas le coéquipier de catwoman. En y réfléchissant, ça me procurerait pas mal d'aptitudes intéressantes. « Qui sait. » répondis-je, énigmatique, avant d'ajouter, songeur : « Mine de rien, ça ferait une bonne idée de déguisement pour Halloween. » Et plutôt original, je ne pensais pas voir rencontré des catmen un 31 octobre. Puis, j'entendis Haley me répondre sur le fait que beaucoup de personnes n'appréciaient pas les chats, et que cela remontait à plusieurs époques. En effet, je savais plusieurs des choses qu'elle me contait, et son savoir m'impressionnait également. Une chose était sûre : quelqu'un pouvait difficilement s'ennuyer dans une conversation avec la jeune femme, elle possédait toujours quelque chose de culturel à instruire. « Oui, et puis le fait qu'ils voient la nuit les a vite rétrogradé au stade de créatures des enfers qui sont sensées avoir la même caractéristique. » Je buvais une gorgée de ma bière, avant d'ajouter : « Bien que pendant la Grande Peste, ils ont quand même évité la propagation en dévorant les rats vecteurs de la maladie. » Je souris doucement. « Enfin, il y a tellement de choses à savoir et à dire, qu'on pourrait y passer la nuit je pense. » Je conservais mon sourire lorsqu'elle me dit que j'avais peut-être le totem du chat. « Ça me flatterait pour le totem du chat, mais je pense être loin d'avoir les caractéristiques pour. » Je posais mon regard vers mon animal de compagnie, tandis que Haley formulait exactement ce que j'avais pensé plus tôt, sur la faculté de Rosie notamment à déceler si une personne était bonne ou mauvaise. « C'est comique, je me suis dit exactement ça il n'y a pas très longtemps. Que je pourrais me fier à son jugement pour savoir si quelqu'un est bon ou pas. » Un léger rire fila entre mes lèvres lorsque l'étudiante ajouta qu'il était bien heureux qu'on ne mimique pas le comportement qu'adoptait présentement le chaton, c'est-à-dire s'endormir sur des inconnus. « Tu vas rire, mais j'étais quasiment pareil quand j'étais petit. Je m'endormais dans les bras de n'importe qui. La cible parfaite pour un kidnapping. Tu as des animaux ? »

Je ris de bon cœur lorsque Haley me dit qu'il s'agissait d'une chance que j'avais perdu la caractéristique de m'endormir sur n'importe qui. C'est vrai qu'à l'âge adulte, ça faisait moyen. Je me gardais toutefois de lui expliquer pourquoi lorsque j'étais plus jeune je pouvais m'assoupir très facilement. Bien que je me sentais en confiance avec la jeune femme, je ne voulais pas non plus lui dévoiler des parties de ma vie qu'elle pourrait juger ennuyantes. Puis, j'entendais l'étudiante me parler de son animal de compagnie, si l'on pouvait le qualifier ainsi. Il s'agissait davantage d'un compagnon qu'elle possédait dans sa ville d'origine et qui la suivait depuis maintenant de nombreuses années. A écouter l'existence et le train de vie de Haley, j'avais presque le sentiment de me retrouver dans un de mes livres, c'était vraiment enrichissant. « Est-ce qu'il a un nom ? » interrogeais-je. Peut-être que ma question pouvait paraître stupide, mais je savais qu'il n'était pas rare que des appellations soient données à ces animaux. « Tu dois avoir hâte aux vacances, pour retrouver tout ça. » insinuais-je, un fin sourire étirant mes lèvres. Puis, j'entendis la machine à laver sonner de la salle de bain, annonçant que le cycle qu'avait choisi mon interlocutrice était terminé. « Ha, l'heure de vérité a sonné ! » plaisantai-je, faisant référence à la tache qui couvrait le chemisier avant que Haley l'ait mis dans la laveuse avec la solution antitache de ma mère.

Mes yeux passèrent de la silhouette de Haley qui s'en allait vers la buanderie afin de récupérer son chemisier, et Rosie qui s'étirait de tout son long sur le canapé. Bien vite, le chaton en sauta pour se diriger vers la pièce où se trouvaient toutes ses affaires, y compris sa gamelle. Je bus quelques gorgées de ma bière, la finissant ainsi, et aperçus l'étudiante revenir, un sourire agréablement surpris étirant ses lèvres. Je ris doucement, avant de répondre : « Haha, je t'avais dit qu'il faisait des miracles ! » Je laissais Haley étendre son chemisier afin qu'il sèche plus rapidement au soleil, et lui répliquais alors qu'elle s'excusait d'éventuellement abuser : « T'inquiètes pas pour ça. Je t'aurais bien proposé ma sécheuse, mais je pense que ça risque de rapetisser ton vêtement. » Et puis, j'utilisais parfois la même stratégie que Haley pour sécher quelques morceaux de linge encore humides. Je hochais la tête en signe de dénégation lorsqu'elle me dit espérer ne pas me retenir d'autres occupations que j'aurais pu prévoir.  « Non non, et puis, généralement, c'est plus de l'improvisation. C'est rare qu'il y a des soirées de prévues avec mes amis, on se retrouve plutôt sur des coups de tête. » Je souris doucement, avant de l'interroger : « Et comment tu trouves Bowen depuis que tu es ici ? Tu n'as pas trop eu de mal à trouver ton appart' ? » Je savais que les logements pouvaient être de plus en plus ardus à dénicher dans la petite ville. Puis je jetais un coup d'oeil à la pile de livres que j'avais amenée dans le salon, avant de lui proposer : « En fait, si tu veux m'en emprunter pour les lire, n'hésite pas. »

J'écoutais attentivement la réponse de Haley, qui me peignait un bilan plutôt positif de son séjour à Bowen, mis à part les quelques désagréments que beaucoup rencontrent dès qu'ils arrivent dans une ville pour la première fois. Je fronçais doucement les sourcils lorsqu'elle me fit part du fait que louper son transport en commun ici était plutôt aisé, ce à quoi je ne pouvais pas la contredire, malheureusement. Toutefois, je connaissais une solution à ce problème. Je ris doucement lorsqu'elle me qualifiait de super voisin qui l'avait sauvé du pétrin selon elle, pouvant presque tirer sur le super héros, avant de déposer un baiser sur ma joue, ce qui me surpris. Je ne m'attendais pas à cela, mais après, dans ma famille, être affectueux s'avérait un trait commun, donc ça ne me choquait pas énormément non plus. Bien qu'être embrassé par une fille que je connaissais depuis peut-être une heure figurait un temps record. « C'est de bon cœur. Et puis, comme ça, je peux me vanter d'avoir amélioré un peu ta journée ? En plus, tu m'as beaucoup apporté aussi. » Un doux sourire étira mes lèvres, tandis que je plongeais mon regard dans le sien. Il fallait avouer, Haley avait énormément pour elle : elle était dotée d'une beauté rare et d'une intelligence et culture exceptionnelle. Je me raclais doucement la gorge, avant de déclarer, moi-même un peu embarrassé sur le coup d'avoir ce genre de pensées. « Tu as un smartphone ? » Je tirais le mien de la poche de mon pantalon, lui montrant l'écran. « Il y a cette application qui te permet de savoir où se trouve ton transport en commun. C'est beaucoup plus sûr que de se fier aux horaires de leur site ou des abris. Personnellement, c'est ce que j'utilise, et comme ça si je rate mon bus, je n'ai que moi à blâmer. » Je souris doucement, puis précisais : « Et elle est gratuite, donc c'est cool. » Je levais mon regard vers le sien, m'interrogeant un peu plus sur sa vie personnelle, le genre d'amis qu'elle avait, l'âge qu'elle pouvait avoir. Mais je n'étais pas sûr que ce soit très pertinent.

Mon sourire s'élargit lorsque je vis que l'application viendrait en aide à Haley et que celle-ci semblait contente d'en entendre parler. Je me levais lorsqu'elle me dit qu'elle l'installerait lorsqu'elle pourrait à nouveau charger son téléphone portable, et allais chercher une page d'un petit bloc-notes que je conservais près de mon entrée. J'en arrachais une page et revenais avec un stylo, avec lequel j'inscrivis le nom de l'application, afin qu'elle l'ait sur elle au cas où. Je l'entendis par la suite m'inviter à manger, puis s'en excuser, incertaine qu'elle le faisait de la bonne manière. Je ne pus m'empêcher de rire doucement, dans le but d'alléger l’atmosphère et éradiquer son embarras. Haley me confia qu'elle trouvait la vie beaucoup plus facile avec les livres, ce que j'approuvais sincèrement. Puis, son discours s'accéléra, démontrant son embarras face à l'invitation qu'elle venait de me faire. Je ris doucement lorsqu'elle posa une main contre ses lèvres, comme pour s'empêcher de prononcer le moindre autre mot. Je posais une main sur son épaule quelques secondes, comme pour la rassurer : « Ne t'en fais pas, je sais ce que c'est aussi. Comme tu dis, l'avantage avec les livres, c'est qu'on ne peut pas vraiment perdre ses moyens, ou qu'on ait même à réfléchir à comment réagir, car ils se découvrent machinalement devant nos yeux. » Je lui tendais le bout de papier avec le nom de l'application. « C'est très gentil de m'inviter, et écoute, je ne vois pas pourquoi je dirais non. Et tu l'as très bien fait. Je n'ai pas besoin de carton d'invitation ou autres, c'est bien plus écologique comme ça, ma conscience reste verte. » plaisantai-je gentiment. « C'est le nom de l'application, comme ça tu l'as sur toi. » Parfois, avec mes petites attentions, je devais paraître pour un vrai maître d'école. En réalité, c'est surtout parce que j'étais l'aîné de plusieurs sœurs et j'avais toujours veillé à ce qu'elles ne manquent de rien, les couvant un peu trop, attitude que j'avais mimée chez mes parents lorsque j'étais beaucoup plus jeune. Puis ces derniers avaient décroché des postes plus importants et leur horaires étaient devenus délicates, ce qui m'avait incité à vite prendre un rôle de responsable envers mes cadettes. « Pas que je te prenne pour un bébé avec toutes mes petites attentions. C'est juste que c'est une seconde nature chez moi, étant un grand frère de têtes de linottes. » Je ris doucement, j'avais pris les choses en main lors de l'arrivée d'Haley à l'appartement en lui offrant plusieurs services pour parer à sa situation de sans domicile du moment, et maintenant, je reprenais un peu ce rôle avec l'application. J'étais trop dévoué pour les gens, sans doute, et cela m'avait coûté cher lors de ma dernière relation amoureuse.

Je souris doucement en écoutant les remerciements de Haley, qui prenait progressivement l'allure de compliments. Ça me rendait un peu mal à l'aise, de l'entendre parler ainsi de ma personne. Je ne pouvais pas la contredire, elle avait raison lorsqu'elle disait que je faisais tout cela de manière altruiste. Je n'attendais absolument rien de la part de Haley en lui rendant service de la sorte. Au contraire, j'appréciais énormément sa compagnie, et j'avais agis dès le départ naturellement avec la conviction que c'était la bonne chose à accomplir. Je n'aurais pas pu continuer mon chemin en la laissant attendre assise sur le sol d'un des couloirs de l'immeuble résidentiel. Néanmoins, je n'étais pas forcément habitué à ce qu'on remarque mes points forts de cette manière. La majorité des gens que je fréquentais s'attendait à ce que j'agisse ainsi, pour eux, c'était acquis. « En tout cas, je suis bien content de t'avoir rencontrée. » répondis-je un peu maladroitement, mes mots semblant toutefois trop faibles pour pallier véridiquement mon opinion. « Bien que les circonstances auraient pu être meilleures, surtout pour toi. » ajoutais-je en souriant de manière compatissante, faisant référence à la très mauvaise journée que mon interlocutrice avait passée.

Puis, je l'entendis me demander quel âge j'avais. Je m'étais posé la question il y avait peu de temps, alors d'une certaine manière, j'étais heureux qu'elle me le demande, car cela me permettrait de lui retourner l'interrogation discrètement. « Vingt-six ans. Et toi ? » Je lui souris, avant d'interroger : « Tu es fille unique ? » Je me souvenais qu'elle m'avait dit que c'était son cousin qui s'occupait de son faucon lorsqu'elle était à Bowen, et non un frère ou une sœur. « Et du coup, pour l'instant, tu prévois rester ici jusqu'à l'obtention de ta licence ? » Ça me paraissait un peu logique, vu qu'elle avait vanté le pôle histoire de l'université de Bowen. Toutefois, je n'excluais pas le fait qu'elle veuille se rapprocher de sa famille au bout d'une année ou deux.

J'écoutais attentivement les réponses de Haley, les mémorisant chacune à leur tour. Je pouvais comprendre qu'elle puisse considérer un cousin comme un frère, j'avais toujours vu Woody comme le grand frère que je n'avais jamais réellement eu biologiquement parlant. On avait trois ans de différence, et bien qu'on avait passé le plus clair de notre enfance à jouer aux mêmes jeux et que jamais je n'avais eu grand mal à le suivre dans ses aventures, je lui avais toujours adressé une part d'admiration, tandis que lui était prêt à me défendre contre les mauvais coups. Puis, la jeune femme m'éclaira un peu plus sur son parcours universitaire et ses projets d'avenir. A la quantité d'opportunités qui pouvaient se présenter à elle, elle me faisait un peu rêver, bien que moi aussi, il n'y avait pas si longtemps, j'avais été à la même place. Sans doute que cela me rendait un peu nostalgique. Néanmoins, aujourd'hui, j'étais heureux du poste que j'occupais et je ne pouvais pas dire que celui-ci ne me comblait pas. Il m'apportait tout ce que je désirais, et de rares moments de stress, ce qui était bénéfique. Elle me contait une anecdote de son passé, ce que je ne pus m'empêcher de trouver intéressant. Et puis, Haley avait assez de charisme pour me transporter dans chacun de ses récits. Je hochais la tête en signe de dénégation lorsqu'elle s'excusa, disant que ses propos pouvaient m'ennuyer. « Non non, au contraire. Tu me fais rêver, avec tes histoires. J'y étais déjà. » Je souris doucement, interrogeant : « Et tu es en quelle année, maintenant ? » Je m'installais un peu plus confortablement dans le canapé, avant d'ajouter : « C'est vrai que tu as plein de portes qui s'ouvrent à toi. Après, j'imagine qu'au fil de tes études, tu définiras ce qui te plaît vraiment. » Je posais mon téléphone sur la table basse. « Ce que j'aime bien avec notre âge, c'est qu'on a encore plein de choses à expérimenter pour la première fois. » avouais-je, songeur. « Il y a quelque chose à Bowen que tu n'as jamais fait mais que tu aimerais faire ? » questionnais-je, bien que je me rendais aussi compte que la petite ville possédait des limites. Toutefois, Haley étant nouvelle ici, peut-être que cela rendait la tâche plus aisée. « Est-ce que tu veux boire quelque chose d'autre ? »