Cherry wine. - Alfie

Le message de Nice lui avait fait plaisir. Il n'a pas trop dû lui laisser une mauvaise impression si elle veut déjà le revoir, quelques jours après leur rencontre. Faut dire que, ces derniers temps, toutes les merdes qui s'étaient accumulées en même temps sont petit à petit en train de se dissiper. L'histoire avec Nevaeh et CJ, puis Jordan qui lui a rendu visite l'autre jour, en plein milieu de la nuit. Il lui en faut peu pour le mettre de bonne humeur, le gamin. Alfie ne met pas longtemps avant d'apercevoir Bérénice assise au bar, vêtue d'une tenue bien différente de celle portées par les filles autour d'elles. Il la rejoint sans faire de bruit, les bruits de ses pas camouflés par le sable. « Hey, » lâche-t-il en s'accoudant sur le bar, un petit sourire au coin des lèvres. Alfie prend place à coté d'elle et attrape une carte posée un peu plus loin. « Je t'ai offert à manger la dernière fois, tu me paies un verre maintenant ? » Son regard passe de la carte au visage de Bérénice.

Alfie a directement apprécié Nice, et ça malgré le fait que celle-ci ai été plutôt distante lors des premières minutes de leur première rencontre. Il semblerait cependant qu'il ai fini par gagner sa confiance par il ne sait quelle magie, ou tout simplement qu'il a été, en réalité, la première personne à qui elle a pensé pour se changer les idées vu ce qu'elle lui dit. Avant de s'intéresser à cette dernière phrase, qu'elle prononce, il pose son regard sur la carte. « Je prendrais bien un Gin Fizz pour une fois, » dit-il en effleurant la carte à l'endroit où est écrit le nom de la boisson du bout de l'index. Alfie relève ensuite les yeux vers Bérénice et s'appuie à l'aide de ses avant-bras sur le bar. « Mais non en effet, je n'imagine pas à quel point. » Il plisse légèrement les yeux d'un air intrigué. Alfie a toujours été d'un naturel curieux, mais il n'est cependant pas du genre à se mêler de ce qui ne le regarde pas. Il ne compte pas la questionner sur tous les détails de sa vie, surtout qu'ils ne sont pas assez proches pour faire ça même si c'était dans sa nature d'être intrusif. « Mauvaise journée ? » se contente-t-il de demander.

Il sourit, amusé par sa question. Elle a raison, sauf qu'il ne pourrait pas se permettre de payer à tout vas ce que commandent les filles avec qui il passe ses soirées. Il n'a pas vraiment l'argent pour, mais ce n'est pas le genre de chose qui se dit à une fille qu'on a rencontrée il y a une semaine à tout casser. Alfie se contente de hausser les épaules. « Je suis pour l'égalité homme-femme, » répond-t-il avec un sourire angélique accroché aux lèvres. La bonne excuse lâchée par les hommes radins, même si ce n'est pas vraiment par ce terme que pourrait être caractérisé Alfie. Justement, il a parfois trop tendance à dépenser. Sa petite fortune est malheureusement déjà partie dans tous ses voyages. Face à la petite mine blasée de Nice, il pousse un léger soupire. « Les gens peuvent parfois être cons, » dit-il sans savoir qu'elle parle de son meilleur pote. Quoi que, même si il le savait, il aurait sûrement dit la même chose. Il adore Angus, mais il est vrai que parfois, il peut se montrer un peu connard quand ça parle de filles. Alfie prend le verre apporté par le barman et le porte à ses lèvres. « Buvons à nous, personnes extraordinaires entourées d'individus sans intérêt, » clame-t-il avant de boire une gorgée de sa boisson.

Clairement, Alfie n'est pas venu pour draguer Bérénice. Il l'apprécie, il la trouve mignonne et aime bien passer du temps avec elle. Sauf qu'elle est de ce genre de fille avec il évite de jouer, celles dont le coeur pourrait être brisé par sa faute. Et ça, c'est pas vraiment le genre de chose qui le fait triper. Même si il n'est pas entièrement stable comme type, il est loin d'être quelqu'un sans cœur. Il a déjà eu assez avec Lily. Nice et Alfie trinquent, boivent à leur santé comme si ils méritaient d'être félicités de ne pas faire partie des crétins de cette Terre. Il repose son verre sur le bar au moment où elle lui demande des nouvelles à lui raconter. Alfie réfléchit un instant avant de lui répondre. « Oh tu sais, la routine. Je bosse, je mange, je dors, je deviens vieux. Parfois je sors, même si je suis trop souvent limité à cause de mon meilleur pote qui squatte sans arrêt chez moi. » C'est en parlant de lui qu'il réalise. La dernière fois qu'ils se sont vus, Angus lui a parlé de Bérénice. Il lui a même demandé si ils avaient couché ensemble, une question qui l'a d'ailleurs bien fait marrer. Cette mauvaise rencontre dont elle lui parle, il y a bien des chances pour que ce soit Angus. Alfie a envie de rire, mais il se retient pour ne pas la rendre encore plus mal. « Et toi ? Je parie que t'as une vie beaucoup plus trépidante que la mienne. »

De temps en temps, Alfie repense à ce que lui a dit Lily la dernière fois qu'ils se sont vus. Pour la première fois, quelqu'un sur cette Terre lui a dit qu'il était quelqu'un de bien. Ça lui a fait bizarre, ça change des habituels tête de con, crétin dépourvu de cœur. Parfois, il se dit que si il n'avait pas passé plus de quinze ans à s'occuper de sa petite soeur, il aurait été une toute autre personne. À ne s'en faire pour personne, à ne pas avoir le sang qui chauffe quand on s'en prend à quelqu'un. Il se foutrait simplement du monde, et sûrement que là, il ne serait pas quelqu'un de bien. Le problème avec ça, c'est qu'il finit par s'attacher. Toujours pas point de vue sentiment, mais c'est presque s'il ne commence pas à ressentir le besoin d'être là, d'être quelqu'un de bien pour eux. « C'est vrai qu'il est assez collant, mais bon. Ce n'est pas de sa faute si il n'arrive pas à se débrouiller seul comme un adulte. » Il sourit en pensant à son ami. Angus rigolerait bien de l'entendre le traiter d'enfant, ou peut-être le taperait-il avant de répliquer quelque chose d'insensé qui finirait par les faire éclater de rire. Ces deux-là ont toujours été incorrigibles, surtout lorsqu'ils se trouvent dans la même pièce. Alfie écoute Nice parler de sa fameuse mauvaise rencontre, ce qui suffit à immédiatement attiser sa curiosité. « À quel point ? Peut-être que je le connais, dis-moi son nom et je te dirais si c'est un type bien ou pas. » Comme si il avait le flair pour repérer les mecs qui en valent de la peine de ceux qui ne méritent que d'être jetés.

Et pourtant, même vêtue ainsi, Alfie la trouve jolie. Elle est simple, naturelle, tellement différente de toutes ces pimbêches qui déambulent sur la plage avec la jupe à ras des fesses. Bérénice, elle, semble tellement plus pure que ces pauvres filles. Alfie ne s'intéresse pas à elles, il les a toujours trouvées beaucoup trop superficielles et imbues d'elles-mêmes. La question de Nice le fait rire. « Pratiquement oui ! » s'exclame-t-il en riant de bon coeur, un grand sourire étirant ses lèvres. Il l'écoute ensuite parler, confirmer ses doutes. C'est bien Angus, il n'y en a pas deux pour avoir un prénom pareil. Alfie se retient de rire. Il a envie d'aller à son appart car il sait que son meilleur pote s'y trouvera, et de lui foutre une claque à l'arrière de la tête. « Quel crétin, » lâche-t-il en secouant négativement la tête avec un léger sourire impossible à contrôler. « Nice, ne t'accroche pas à lui. C'est pas mon genre de jouer les meilleurs amis gays, mais t'es une fille bien et lui... » Il réfléchit à ce qu'il pourrait dire. Même si il aime l'embêter, le traiter de tous les noms, il reste le type qu'il apprécie le plus sur cette Terre. « Il reste Angus. »

Pendant un instant, ses pensées vont vers Angus. Alfie ne sait pas si il est le seul à connaître peut-être un peu trop bien ce type, à savoir qu'il n'est pas un abruti sans raison. L'un comme l'autre, ils ont eu leur moment de faiblesse où, après avoir trop bu, ils ont déversé devant l'autre tout ce qu'ils avaient sur le cœur. Et même si Alfie a toujours vu son passé comme ayant été difficile à vivre, il doit avouer que celui d'Angus semble avoir été bien pire. Cependant, même si il en sait beaucoup, il secoue négativement la tête. « Personne ne sait vraiment pourquoi il est comme ça. Je suppose que la seule explication est : parce que. Tu sais, c'est un type vraiment cool, si t'enlèves le coté sentimental. » Car même si Alfie n'est pas la personne la plus honnête sur cette Terre, il reste loyal. Si Angus n'a pas envie de parler de son vécu, ce n'est clairement pas lui qui va le faire à sa place. Il regarde leurs verres vides et en commande deux autres qu'il met sur son compte avant de plonger son regard dans celui de Nice. « C'est ça ton truc alors, t'attacher aux mauvais garçons. T'es pourtant pas le genre de fille à qui on devrait briser le cœur, » ajoute-t-il en lui adressant un sourire en coin.